De prescriptions à suivre à l’ouverture du cœur dans la relation.
Philippe nous parle de son évolution personnelle. Lorsqu’il considère son parcours depuis ses années de jeunesse, il se rend compte qu’il a beaucoup changé intérieurement. « Le changement, c’est une progression, c’est un chemin ». Mais comment changer ? A partir d’une éducation dans un environnement chrétien évangélique, Philippe observe que pour changer, bien souvent, les gens essaient de se soumettre à des prescriptions extérieures, celles qui sont formulées dans des « recommandations » de différents ordres. Mais pour Philippe, un changement profond s’est réalisé lorsqu’il est venu d’une transformation qui partait de l’intérieur.
« Dans ma jeunesse, j’avais tendance à prendre la Bible comme un livre qui me dictait ma ligne de conduite. Aujourd’hui, avec du recul, je réalise que finalement, à chaque étape où j’ai pu changer profondément, cela ne s’est pas produit en appliquant une prescription ou une recommandation, mais en vivant une relation profonde avec une personne. Le début de mon cheminement en profondeur a commencé dans une rencontre avec un ami chrétien où j’ai senti un climat de liberté, un climat de confiance et de respect. Je me suis senti reconnu comme un être unique. Ce climat de confiance m’a permis d’ouvrir mon cœur. A ce moment-là, le Saint Esprit a pu se manifester en profondeur. Cette rencontre m’a permis de comprendre que le changement se produisait à travers une relation simple et authentique .
Cela me rappelle un évènement qu’a vécu le prophète Elie lorsqu’il était poursuivi et menacé de mort par un empire puissant de l’époque (I Rois 19).
Elie s’est réfugié dans une grotte . Là, il rumine sur ses épreuves, sur ses frustrations. La grotte symbolise pour moi une coquille dans laquelle l’être intérieur est enfermé. Elie se considère avant tout comme prophète. C’est son identité. Et sa grande frustration, c’est qu’il ne peut plus exercer son rôle de prophète. Cet état d’esprit l’empêche de communiquer en profondeur avec son Créateur. En se réfugiant dans cette grotte, il pourvoit à se sécurité et se coupe de son Créateur et même de son prochain. Et là, Dieu lui parle. Il lui pose une question : « Qu’est ce qui t’arrive ? » . Elie exprime ses états d’âme en restant replié sur lui-même. Il y a ensuite un fort tremblement de terre qui ébranle la grotte et il est amené à sortir de la grotte.
Cet évènement évoque pour moi une situation personnelle. A l’époque de la rencontre qui a été pour moi le point de départ d’un changement intérieur, mon couple était menacé. Mon épouse souffrait de mon repli sur moi-même, de ma non communication. J’ai ressenti cet échec comme un véritable tremblement de terre. Cela m’a aidé à sortir de ma coquille.
Après le tremblement de terre, Elie perçoit d’une façon nouvelle la présence de Dieu. Il est précisé dans la Bible que Dieu ne s’exprime pas dans la puissance des évènements naturels, mais dans une voix douce qui est perçue par Elie. Dieu lui repose la question : « Qu’est ce qui t’arrive ? Elie lui redit ses soucis, mais cette fois non plus en tant que prophète, mais en tant que fils aimé de son Créateur. Et là un changement profond s’opère en lui. Une nouvelle forme de relation et de communication apparaît. C’est le début d’un changement profond dans la vie d’Elie. A partir de là, ses interventions vont produire beaucoup plus de fruit.
J’ai vécu dans ma vie d’autres étapes dans lesquelles, à travers des rencontres, j’ai pu ouvrir mon cœur et vivre d’autres changements profonds. Ainsi, avec mon épouse,en cherchant la communication, en m’ouvrant, j’ai appris à me connaître et à connaître ma femme. J’ai acquis ainsi beaucoup plus de liberté dans ma relation avec les autres.
J’apprécie beaucoup la manière dont Jésus s’exprime dans les Béatitudes et dans de nombreuses paraboles, des modes d’expression qui font résonner l’être intérieur et qui nous détournent de vouloir imiter les personnes religieuses qui se concentrent sur une application de préceptes. Dans mon enfance et mon adolescence, je suis tombé dans le piège de vouloir réaliser une image religieuse. Je vivais dans un milieu où dominaient des prescriptions issues des épîtres du Nouveau Testament : « Je veux que.. Il faut que ». Il y avait un accent très fort sur la morale : « C’est bien. C’est mal ». Et c’est à partir de là qu’on interprétait les Evangiles. Plus je me suis détaché de ce regard sur moi-même : bien ou mal, plus le changement intérieur a pu s’opérer. Jésus a dit qu’il est venu accomplir la loi. Pour moi, je ne me réfère plus à une loi du bien et du mal, mais à une loi régénérée basée sur l’amour où l’être trouve sa place. Quand nous ouvrons notre cœur à notre Créateur, nous ne nous évaluons plus en terme de bien ou de mal, mais nous vivons comme un être aimé, unique et respecté. Si nous heurtons notre Dieu par notre comportement, ce n’est pas plus la loi du bien ou du mal qui nous reprend, mais l’amour qui nous ouvre les yeux.
Contribution de Philippe