Culture générale, expression, communication
Témoignage d’une enseignante auprès d’étudiants de sections électronique, informatique.
Hélène Delahaye est professeur de culture générale dans un IUT électronique, informatique. Elle a pour mission, d’une part de développer la culture générale des étudiants, et, d’autre part, de les préparer aux grandes demandes de communication de la vie professionnelle, par exemple préparer une synthèse de documents, rédiger une lettre de motivation pour une embauche, préparer une soutenance de stage…etc
Hélène a une formation de professeur de lettres, et, après de nombreuses années dans l’enseignement secondaire, en lycée, elle a accédé à ce poste dans l’enseignement supérieur. Au départ, Hélène a effectué des études de lettres, car elle aime beaucoup la littérature. Elle apprécie tout particulièrement la littérature du XIXè etXXè siècles, notamment le roman qui témoigne de l’évolution sociale depuis deux siècles. « C’est, par exemple, Balzac qui rapporte le passage de l’Empire à la Restauration, la révolution industrielle, l’installation des banques, la construction du monde de l’argent. Au XXè siècle, une femme écrivain, Annie Ernaux, nous parle de la condition des femmes, et, dans un livre récent : « Les années », elle retrace, à travers une sorte d’autobiographie, l’extraordinaire changement de ces trente dernières années ».
Dans l ‘enseignement secondaire, Hélène a beaucoup enseigné dans des sections technologiques. Et donc elle connaissait bien le public de garçons qu’on retrouve dans les IUT. Elle était déjà introduite dans l’université en donnant une formation pour permettre aux non bacheliers d’accéder à l’enseignement supérieur.
Les étudiants en électronique, informatique. Quelle culture ?
Hélène nous décrit le public étudiant dans les sections IUT où elle enseigne. « C’est un public composé majoritairement de garçons issus à la fois du Bac S et du Bac STI (Sciences et techniques industrielles). C’est un public qui est évidemment d’abord motivé par la technologie, et peu concerné par les disciplines littéraires. La culture de ce public est orientée avant tout vers les nouvelles technologies. Il est passionné par tout ce qui est informatique, le progrès technique en général et le sport. On peut y ajouter la musique contemporaine.Certains lisent la presse, mais surtout la presse spécialisée, technique ou sportive.
Ils sont très peu nombreux à lire des livres. Cependant, on trouve dans ce milieu de grands amateurs de science fiction, mais aussi de grands lecteurs de littérature fantastique (« Heroic Fantasy »), par exemple : J K Rowlings (Harry Potter), Tolkien… Ces lecteurs sont en même temps passionnés par l’informatique. Je me rappelle un étudiant assez original venant de STI, excellent en informatique, amateur de « Fantasy », toujours en train de lire entre deux cours et, en même temps, toujours premier dans les concours d’écriture poétique. Souvent ces lecteurs aiment également la philosophie et expriment une réflexion sur le monde et des interrogations sur l’existence. Cette minorité n’est pas négligeable, puisqu’ils représentent du cinquième au quart d’un groupe. J’essaie de m’appuyer sur leurs motivations pour entraîner le groupe, et, de toute façon, ils sont en général tous volontaires pour les exercices de communication et d’expression.
Par ailleurs, l’ensemble des étudiants est très ouvert à la langue anglaise et à la culture anglo-saxonne.. Par exemple, ils regardent beaucoup de films américains en vo et ils connaissent beaucoup de choses sur le cinéma. Et d’autre part, ils écoutent beaucoup de musique anglophone. Plus généralement, ils s’intéressent aussi à la vie politique et économique des Etats-Unis et des pays anglophones. Par exemple, l’année dernière, j’ai étudié avec eux un article sur Steve Jobs et je me suis aperçu qu’ils connaissaient très bien le fonctionnement de la société Apple.
D’autre part, en région parisienne et dans les grandes villes, la moitié des effectifs de ces sections est issue de l’immigration et quelques uns viennent directement de l’étranger (chinois, africains, marocains). Souvent, ils sont très motivés par le sport, notamment le football.
Propositions d’enseignement
Hélène nous dit comment elle oriente actuellement son enseignement.
« Il y a d’abord une réflexion sur le monde actuel et notamment sur leur domaine de spécialité .
Par ailleurs, je cherche à développer toutes les qualités d’expression écrite et orale pour leur donner une meilleure chance professionnelle. Bien sûr, il faut revoir tout ce qui est syntaxe, grammaire, orthographe parce que c’est souvent leurs points faibles .
Par ailleurs, ils sont très doués pour tout ce qui est exercice de créativité. Par exemple, si on fait des exercices de créativité théâtrale, ils sont toujours volontaires et productifs. De même, à l’écrit, quand il s’agit d’écrire de très courts écrits poétiques, ils sont très créatifs. Pourquoi cette créativité ? Peut-être parce que cela a un rapport avec leur interactivité dans la culture internet.
Je les aide également à rédiger des rapports. Un exercice important est la synthèse de documents.
Dans les salles de travaux pratiques, ce public étudiant est habitué à travailler en équipe par deux ou quatre. Et cette capacité de travailler en équipe peut également s’investir dans l’enseignement de l’expression et de la communication. Ils aiment bien travailler en groupes autonomes et rendre ensuite leurs travaux ».
Comment cet enseignement est-il perçu par les étudiants ? « Pour certains, c’est superflu. Pour certains autres, c’est une détente. Mais la majorité des étudiants a conscience que les entreprises demandent, au delà des compétences techniques, de bonnes capacités d’expression écrite et orale. Par ailleurs, les étudiants savent aussi qu’une bonne culture générale et un recul par rapport à la technique est valorisée en entreprise ».
Hélène apprécie son rôle d’enseignante. « Si ce public est parfois assez « remuant », il est aussi très attachant. Il est agréable de communiquer dans ce cadre. C’est un public qui a beaucoup d’humour, qui est souvent jovial, amical. Dans les réunions d’anciens élèves, il est agréable de les revoir et d’évoquer de bons souvenirs.
Contribution d’Hélène Delahaye.