par jean | Déc 2, 2019 | ARTICLES, Vision et sens |

Une vision d’espérance mise à la disposition de tous.
Au fil des années, nous avons pu constater combien la théologie de Jürgen Moltmann répondait aux aspirations et aux questionnements d’un vaste public. Ce recueil : Méditer avec Moltmann (1) s’inscrit dans cette approche. Par son accessibilité, il met la théologie de Moltmann à la portée de tous. Et pour quoi donc? L’avertissement en quatrième de couverture nous le dit :
« Dans l’histoire dont nous faisons l’expérience, il nous est plus facile de désigner le négatif dont nous voulons nous libérer que d’exprimer le positif en vue duquel nous espérons devenir libre. Mais c’est l’expérience d’un avenir plus grand qui nous mène vers des expériences toujours nouvelles ».
Le secret de la force mobilisatrice de la pensée de Moltmann se trouve dans la profondeur des réflexions existentielles qu’il nous propose. Mais, pour que cette force nous rejoigne et nous transforme à notre tour, elle doit être méditée, digérée, expérimentée, confrontée aux joie et aux peines de notre existence. L’incarnation de l’espérance s’inscrira alors dans notre parcours de vie ».
Les textes rassemblés ici (2) proviennent du blog : « L’Esprit qui donne la vie », créé en 2011, pour communiquer la pensée de Moltmann à tous ceux qui sont à la recherche d’un Dieu, communion d’amour et puissance de vie. Il n’est pas anodin que l’éditeur ait, de lui-même choisi comme titre : « Le sourire de Dieu ».
Ce livre nous ouvre à une nouveauté de vie. Dans son adresse aux étudiants de Prétoria, qui introduit le recueil, Jürgen Moltmann déclare : « Celui qui croit au « Dieu vivant », voit le monde non seulement selon la réalité… mais aussi selon les possibilités. « Tout est possible à celui qui croit », parce que « tout est possible avec Dieu » . Toute la réalité est une possibilité réalisée. La possibilité vient en premier, la réalité vient après » (p 13). Ce livre regarde à la promesse de Dieu et nous ouvre un avenir. Dans le témoignage sur lequel s’achève ce recueil, homme de foi et d’action engagé dans de grandes causes humanitaire, Guy Aurenche nous confie une notation personnelle : « En refermant provisoirement ce livre de méditation, me vient l’appétit d’un commencement caché » ( p 156).
Au fil des années, nous avons pu constater combien la théologie de Jürgen Moltmann était libératrice, féconde et éveillait des échos chez des amis de formations et de cultures très différentes. La théologie de Moltmann est un continent. Chacun vient y chercher une réponse à ses questionnements. C’est un dialogue à partager.
J H
- Jean Hassenforder. Méditer avec Moltmann. Le sourire de Dieu. Préface : Discours de Jürgen Moltmann aux étudiants de Pretoria, traduit par David Gonzalez. Postface par Guy Aurenche. Empreinte Temps présent. 2019 (Collection : l’art de méditer dirigé par David Gonzalez).
- Issus du blog : « L’Esprit qui donne la vie », les textes sont entrés ensuite dans un processus d’édition, dans lequel, à notre regret, le référencement initial n’a pas été retranscrit. A ce sujet, on se reportera donc au blog originel : https://lire-moltmann.com
par jean | Mar 17, 2015 | ARTICLES, Vision et sens |
Accueillir l’œuvre de Christ en nous
En relisant le cahier dans lequel Odile Hassenforder écrivait ses réflexions et ses méditations, on trouve un ensemble de trois textes au sujet de la ressemblance à Jésus, à Christ, écrits en début novembre 2006. Le premier d’entre eux a été publié dans un chapitre du livre : « Sa présence dans ma vie » (1) sous le titre : « Accueillir l’œuvre de Christ en nous » (p 121) : « Jésus n’est pas extérieur à nous comme un modèle à suivre, mais il demeure en nous. C’est l’œuvre de Dieu dans un mouvement de vie ». Nous poursuivons ici cette réflexion à travers des extraits des deux textes suivants, inédits.
1 Il s’agit de se laisser transformer.
Accueil de la bonté de Dieu : Parce que je la reçois, je me sens habitée. Alors, je peux et désire en vivre davantage.
Romains 12. 2 A cause de la bonté que Dieu vous a témoigné,
« Ne suivez pas les coutumes du monde où vous vivez
Mais,
laissez Dieu vous transformer
en vous donnant une intelligence nouvelle
Ainsi, vous pourrez savoir :
ce qu’il veut
ce qui est bon
ce qui lui plait
ce qui est parfait »
Offrir sa vie : consacrer son être tout entier : que notre corps, nos forces, nos facultés soient à sa disposition pour le renouvellement de notre mentalité.
Adopter une attitude intérieure différente. Donner à nos pensées une nouvelle orientation
Inspiration de nos pensées renouvelée. Coeur transformé. Attitude mentale et spirituelle changée.
Ephésiens 4.23 :
« Comprenez les choses
d’une façon nouvelle
selon l’Esprit de Dieu
Devenez une personne nouvelle
créée comme Dieu veut.
La vérité la rend juste et sainte ».
C’est à dire :
Ne mentez plus : dire la vérité à son prochain
Ne commettez plus de péché : votre colère cesse avant la nuit
Ne plus voler : travailler honnêtement
Pas de paroles mauvaises : paroles utiles qui aident les autres, qui font du bien
Ne pas garder de rancunes
Ne pas s’énerver ; pas de cris, d’insultes…
Cherchez les mots qui aident et encouragent
Que chaque parole contribue au progrès spirituel.
Dite à propos, cette parole sera le moyen par lequel
Dieu bénira celui qui vient, entend.
Faites disparaître toute mauvaise humeur : aigreurs, rancune, esprit de revendication, explosion de colère, raillerie, paroles blessantes.
Soyez aimables
Compréhensifs les uns pour les autres
Aidez vous les uns les autres
Toujours prêts à pardonner
Marcher dans l’amour de Christ.
2 Recevoir une force de vie
Jésus n’a pas apporté un enseignement extérieur.
Ses paroles sont force de vie.
pénètrent, transforment le cœur
Provoquent de l’enthousiasme parce qu’elles éveillent un désir profond
Alors, il s’agit de s’ouvrir à la force de vie, de résurrection-renouveau en Christ.
Touché au fond du cœur, c’est dans la joie et l’enthousiasme
que nous désirons changer
devenir++
en sachant que c’est possible
que l’Esprit agit en nous
Il ne s’agit plus d’observer une loi
mais de s’ouvrir à l’Esprit de Jésus
de se laisser conduire par Lui
en s’engageant dans la voie de l’amour.
Cela dépasse nos forces morales
Alors devenons lumière : bonté, justice, vérité.
Une telle expérience suscite en nous la louange (Ephésiens 5.18-20)
Odile Hassenforder
(1) Odile Hassenforder. Sa présence dans ma vie. Empreinte temps présent. 2011. Sur ce blog, des textes issus de ce livre ou inédits : https://vivreetesperer.com/?tag=odile-hassenforder
par | Mar 2, 2012 | ARTICLES, Hstoires et projets de vie, Vision et sens |
Témoignage et réflexion de Philippe Molla en dialogue avec le texte précédent : « Dedans…dehors ! Face à l’exclusion, vivre une commune humanité ».
Merci à Jean pour ce travail personnel si précieux pour moi !
Encore un texte qui respire la liberté !
Ces mots résonnent tellement en moi que j’éprouve le besoin d’écrire
quelques pensées personnelles :
C’est pour moi un appel à sortir de mes conceptions humaines de qui je
crois être, ce regard souvent faussé qui m’empêche d’aller vers
l’autre. Mon prochain que je catalogue si facilement par ce qui
« frappe l’oeil « . Ne suis-je pas le prochain de mon prochain ?
J’ai tellement à apprendre de l’autre, d’une rencontre. Souvent l’homme se
plaint de ne pas trouver Dieu, peut-être par ce qu’il ne sort pas de
son enclos. Qui est notre maître, la crainte ou l’Amour ?
Qu’apprenons-nous dans notre milieu où nous nous construisons ?
Les différences de l’autre sont-elles une menace pour nous ? Ce » qui
sommes nous ? » que nous avons construit, si fragile, faut-il par tous
les moyens le protéger ? Pourquoi ?
À l’âge de 18 ans, je me sentais fort, bien construit. J’avais mes
réponses sur beaucoup de sujets. Cela me donnait beaucoup d’assurance
et une paix intérieur. Mes petites réponses toutes faites sur la vie,
la religion, sur Dieu, me faisaient croire que je détenais la vérité !
(et oui ! J’avais l’esprit bien étroit ! Comme si je pouvais détenir
Dieu, la vérité !)
Mais cette construction m’a inconsciemment isolé. Si l’autre avait
une conception de la vie très différente de la mienne, j’avais
tendance à le cataloguer et le classer par catégorie. J’avais appris
dans ma religion que l’autre était dehors et moi dedans. J’avais
appris à inviter mon prochain dans mon enclos, mon système de pensée
humain, ce que j’appelle « La pensée unique ».
Dans cette démarche aucune connexion profonde avec l’autre n’était
possible. Pourtant, cette connexion est si précieuse, elle n’exige
rien de l’autre, elle n’attend rien de l’autre. Cette connexion où
Dieu peut enfin se révéler parce qu’il est synonyme d’AMOUR!
Alors comment ai-je trouvé le chemin de la liberté, de l’amour, de la
guérison intérieur ?
A travers de vraies rencontres !
Ma rencontre avec ma femme Martine a progressivement révélé mon état
d’homme préfabriqué par la société, par la religion. Notre amour et
sa patience m’ont beaucoup aidé.
A travers, d’autres rencontres aussi. En particulier, une rencontre
profonde avec un homme, qui m’a fait entrevoir ce qu’est un partage où
il n’y a pas de place pour le jugement, les préjugés… Et ensuite, il
n’y en eu beaucoup d’autres.
Dieu a permis que je passe par des tempêtes intérieurs, des problèmes
professionnels, la maladie… Ces épreuves m’ont fragilisé. Mais c’est
dans cet état de fragilité que de véritables rencontres ont surgies.
Où l’amour de Jésus-Christ s’est manifesté, apportant guérison,
changement de mentalité et reconstruction de l’être.
J’ai découvert que Dieu se cache dans notre prochain ! Nous Le
trouvons quand nous acceptons notre fragilité, notre vulnérabilité.
Jésus-Christ n’est pas venu en super héros, mais Il a choisi de
s’exposer. Il a accepté de se rendre vulnérable, fragile, dans le seul
but d’atteindre le coeur de celui qui se sent en manque de tout,
rejeté, exclu, pauvre, pêcheur, malade, seul dans sa souffrance,
esclave de ses vices, prisonnier de sa religion, prisonnier de son
clan familial, prisonnier de sa société…
Quand j’ai lu le titre « Dedans…Dehors », j’ai tout de suite pensé à la
parabole du Bon Berger.
Cette invitation à la liberté.
Et aussi au mot église.
Ce mot église est très peu utilisé dans les évangiles. Donc, j’imagine
que Jésus l’a très peux prononcé. Peut être pour éviter qu’il soit
mal utilisé, mal interprété en créant des divisions entre tous les
hommes, des clans. Tous ces hommes à qui Jésus-Christ a donné sa vie
sur la croix, cette croix si douloureuse. Cette croix, où, bras
ouverts, il dit: «Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils
font.» L’Amour personnifié, ne laissant aucune place pour le jugement !
Cette Amour qui unit tous les hommes !
Ce mot église, « ekklesia » en grec, composé de ek et dérivé de kaleo.
Ek: hors de
Kaleo: donner un nom, appeler.
On pourrait traduire église par » les appelés par leur nom (dans le
sens unique, relation personnelle et intime avec le créateur) à sortir
hors de »
Pour comprendre la parabole du Bon Berger, il faut connaître comment
procédait un berger à l’époque de Jésus. Le berger avait un associé
qui gardait les moutons dans la bergerie, le gardien. Quand le berger
se rapprochait de la bergerie, il commençait à appeler ses brebis par
leur nom. (Cette notion de donner un nom unique à chaque brebis,
montre que le berger connaissait bien ses brebis, il passait beaucoup
de temps avec elles) Alors le gardien ouvrait la porte et les brebis
couraient avec excitation rejoindre leur berger. Le berger faisait
demi-tour et marchait en direction des verts pâturages.
Les brebis reconnaissent très bien la voix et les sons . Je connais
bien ce sujet. J’ai passé beaucoup de temps dans ma jeunesse avec une
brebis et son agneau:
Une brebis a soif de liberté, elle recherche à atteindre toujours
l’herbe fraîche qui se trouve de l’autre coté de la clôture.
il faut beaucoup de patience pour approcher une brebis.
Elle est vite dominée par la crainte, ce qui la pousse à mettre sa vie
en danger, ainsi que la vie de son agneau…
Je finirai par ces passages:
Jean 10:4
Quand IL les a tous fait sortir, il marche devant eux. Et ses moutons
le suivent, parce qu’ils connaissent sa voix.Ils ne suivront jamais
quelqu’un d’autre. Au contraire, ils fuiront loin de lui, parce qu’ils
ne connaissent pas la voix des autres personnes.»
Il n’y a pas de crainte dans l’amour, mais l’amour accompli chasse la
crainte; car la crainte suppose le châtiment, et celui qui craint
n’est pas accompli dans l’amour. (1 Jean. 4.18)
Alors sortons découvrir ce que Dieu a caché comme trésors merveilleux !
Ces trésors préparés spécialement pour nous, être unique, aimé de
son créateur !!
Psaumes 65:
Quand TU passes, les richesses débordent. Les terres sèches sont
couvertes de récoltes, les collines sont entourées de joie. Les
pâturages portent les moutons et les chèvres, les vallées sont
couvertes de blé. Toute la campagne chante et danse de joie.
Alors qu’est ce qui nous empêche de faire de véritables rencontres où
la VIE circule
Philippe Molla
Voir sur ce blog (7 octobre 2011) un autre texte de Philippe :
« Un chantier peut-il être convivial ? »
par jean | Août 20, 2018 | ARTICLES, Expérience de vie et relation, Société et culture en mouvement |

Marshall Rosenberg et la communication non violente
Une nouvelle approche de la relation se développe et se répand aujourd’hui dans un mouvement intitulé : Communication non violente (CNV). Cette approche est apparue aux Etats-Unis à partir des années 1960 sous l’impulsion de Marshall Rosenberg . Marshall Rosenberg a grandi dans une famille juive très unie en contraste avec le climat de violence raciste qui sévissait à l’époque et dont il a beaucoup souffert. Dans son parcours d’étude et de recherche en psychologie, il trouve inspiration chez Carl Rogers, un psychologue américain innovant qui met l’accent sur une approche centrée sur la personne. Dans sa découverte de la non violence, il s’inspire de l’exemple de Gandhi. Aujourd’hui, en France, la communication non violente commence à pénétrer dans de nombreux secteurs d’activité où la relation a un rôle majeur. La pensée de Marshall Rosenberg est relayée par des personnalités comme Thomas d’Ansembourg (1), bien apprécié sur ce blog. De nombreux témoignages apparaissent sur le Web. L’approche de Marshall Rosenberg est accessible à travers de livres et de nombreuses vidéos auxquelles on se reportera (2). Marshall Rosenberg veut promouvoir une relation fondée sur un « don naturel », la capacité de donner et de recevoir dans une joie désintéressée . Cependant, cette aptitude positive est aujourd’hui contrecarrée par une culture qui traduit une vision pessimiste de l’homme entrainant une pratique en terme de punition et de récompense, et qui se manifeste dans la volonté d’avoir raison. Communiquer avec l’autre, c’est savoir reconnaître dans ses réactions, les besoins et les sentiments qui en sont les ressorts. La communication pourra alors s’établir en profondeur sur ce registre. On cherche également à observer les comportements plutôt que de formuler des impressions subjectives sur leurs auteurs. Bref, il y a là un savoir-être et un savoir-faire qui se révèlent très efficaces pour dépasser et dénouer les conflits aux différents niveaux où ils peuvent advenir, y compris dans des situations sociales et politiques dangereuses. La communication non violente apparaît ainsi comme une sagesse en action.
Vois la beauté en moi : « See me beautiful »
La vidéo de Marshall Rosenberg, que nous présentons ici, témoigne de la dimension humaine de cette approche d’une façon émouvante. En effet, Marshall commence son propos par un chant qu’il émet et accompagne sur sa guitare (3). Ce chant exprime une aspiration humaine à une pleine reconnaissance alors que celle-ci est en réalité bien souvent refoulée :
« Vois la beauté en moi
Cherche le meilleur en moi
C’est ce que je suis vraiment
C’est tout ce que je veux être
Peut-être que cela prendra du temps
Peut-être que cela sera difficile à trouver
Vois la beauté en moi
Est-ce que tu peux saisir l’occasion
Est-ce que tu peux trouver une manière
De me voir briller avec toutes les choses que je fais
Vois la beauté en moi »
Dans cette vidéo, Marshall Rosenberg donne ensuite quelques exemples qui permettent de comprendre la mise en œuvre de la communication non violente. Ainsi, nous raconte-t-il une rencontre mouvementée dans un camp de réfugiés au Moyen-Orient.
« Lorsque mon interprète m’a présenté, il a mentionné que j’avais la nationalité américaine. Alors, un des participants a bondi et il a crié : « assassin ». Ce que j’ai entendu lorsqu’il s’est exprimé, c’est « Vois la beauté en moi ». Pour faire cela, on voit la vérité. Cette personne se sent comment ? Quel est le besoin chez lui qui a engendré ce sentiment ? Ainsi, lorsqu’il a crié : « assassin », j’ai dit : « Monsieur, est ce que vous êtes furieux parce que mon gouvernement n’a pas répondu à votre besoin de soutien ? Il a été un peu surpris par cette réponse. Il n’avait pas l’habitude que quelqu’un cherche à savoir son besoin lorsqu’il essaye de communiquer. « Oui, tu as fichtrement raison. On n’a pas de maison. On n’a pas d’argent. Pourquoi est-ce que vous envoyez vos armes ? » Alors, je suis resté en lien avec ses besoins. « Si je comprend bien, c’est difficile pour vous lorsque vos besoins ne sont pas satisfaits, de voir arriver des armes ». Tant que je reste en lien avec ce qui est vivant dans cette personne, je n’entend aucune critique, je n’entend aucun reproche. Je vois la personne qui chante : « Vois la beauté en moi ». Et quand la personne s’aperçoit de mon regard quand je chante cette chanson, la personne sent que ce qui est vivant en elle m’importe. Et quand les gens ont confiance que ce qui est vivant en eux nous importe, nous sommes bien sur le chemin pour résoudre les besoins de tout le monde. Alors cela, c’est l’autre moitié de la communication non violente. On a la possibilité d’utiliser la communication non violente sans devoir tenir compte de la façon dont l’autre personne s’exprime, parce que nous avons ces oreilles là. Nous nous mettons en lien avec les sentiments et les besoins de l’autre quelque soit sa façon de communiquer ».
Et voici un exemple familier. Lorsque nous demandons à nos enfants de fermer la télé, nous recevons parfois une réponse violente : « Non ». On n’entend pas « non ». Nous entendons : « Vois la beauté en moi » ». Nous entendons ce que la personne sent et ce qui l’habite. Cela ne veut pas dire que nous renoncions à nos besoins. Mais cela montre à l’autre personne que ses besoins sont importants pour nous, que ses besoins sont sur un pied d’égalité avec les nôtres. Et quand les gens ont confiance, on est sur le chemin de l’apprentissage réciproque ».
Dépasser les obstacles
« Vois la beauté qui est en moi »… C’est affirmer, c’est reconnaitre que, quelque soit le marasme dans lequel il est embourbé, il y a , en tout homme, un potentiel de vie. c’est reconnaître le positif pour lui permettre de se développer. Cela ne va pas de soi. Ce chant est un appel qui trace un chemin, qui autorise les humains en déshérence à être reconnu dans leur potentiel, à exprimer leur dignité intrinsèque. Et ne sommes pas nous-même interpellés ? N’y a-t-il pas parfois en nous un déni de nous-même ? N’y a-t-il pas dans notre culture des éléments qui peuvent s’opposer à l’expression d’une pleine appréciation de notre être comme si il y avait une inconvenance ?
Un souvenir remonte à notre mémoire. Dans un colloque qui a eu lieu aux Etats-Unis sur la réception de la théologie de l’espérance de Jürgen Moltmann, son épouse, Elisabeth Moltmann-Wendel, une pionnière de la théologie féministe était intervenue pour exprimer le malaise de beaucoup de femmes chrétiennes de l’époque face à un état d’esprit répressif (4). Et, pour exprimer la valeur de la femme, elle avait conclu sa prise de parole par une affirmation percutante : « I am good. I am full. I am beautiful ». « Je suis bonne. Je vis pleinement. Je suis belle ». Elle rapporte ses sources : la plénitude mise en valeur par la théologie féministe et le théologie afro-américaine : « Black is beautiful ». Aujourd’hui, notre contexte de vie est différent, mais sommes-nous tous à l’aise avec une affirmation personnelle dans les termes de Marshall Rosenberg et d’Elisabeth Wendell Moltmann ?
Dans une de ses interventions (5), Thomas d’Ansembourg, sur un registre un peu différent, nous rapporte combien il a ressenti dans sa culture environnante, catholique traditionnelle, une méfiance vis à vis de la recherche et de l’expression du bonheur. Il y a effectivement un héritage culturel à dépasser.
Marshall Rosenberg nous montre combien une image négative de l’humain a régné pendant des siècles et comment elle a engendré le malheur « Lorsqu’on pense que, par nature, l’être humain est malfaisant, quel est le processus correctif : la pénitence. Il faut que les gens se détestent eux-mêmes ». Et, aujourd’hui encore , plutôt que de rester dans une attitude de partage, on entre dans une pratique de confrontation : « qui a raison ? », et, en conséquence, un engrenage de punitions et de récompenses ».
Dans ces oppositions à la non violence, il y a donc un héritage culturel à dépasser, et cet héritage renvoie à une culture religieuses fondée sur une théologie du péché originel. Dans son livre : « Oser la bienveillance » (6), Lytta Basset nous apporte un utile éclairage. « Nos contemporains ont un besoin brulant d’être valorisés pour qui ils sont. Mais si la voix qu’ils entendent n’est pas celle d’un Dieu inconditionnellement bienveillant, faut-il s’en étonner ? J’ai cherché du côté de ce qui, trop longtemps, a parasité la ligne. Je veux parler de ce dogme du péché originel qui, adopté au Vè siècle sous l’influence de saint Augustin, a « plombé » l’Occident de manière ininterrompue jusqu’au XXè siècle, avec sa vision catastrophique de la nature humaine » (p 11). Lytta Basset nous montre également en quoi une doctrine aussi « toxique » est contraire à l’enseignement et à la vie de Jésus, et à la théologie chrétienne des premiers siècles, relayés sur ce point par l’Orthodoxie et reformulés aujourd’hui par des théologiens contemporains (7). Notons par ailleurs que cette représentation pessimiste de l’homme se trouve également aujourd’hui chez certains psychanalystes athées comme Freud (8). Et, comme l’observe Lytta Basset : « Comment peut-on accompagner quelqu’un sur son chemin de guérison, de pacification, de libération lorsqu’on a une vision négative de l’être humain ? ». La bienveillance, telle que la décrit Lytta Basset, notamment dans l’exemple de la relation entre Jésus et Zachée, est un processus libérateur.
« Vois la beauté en moi ». Lytta Basset nous paraît rejoindre Marshall Rosenberg : « En toute lucidité, on peut opter pour la bienveillance : se focaliser sur l’être de la personne, ce qu’elle est essentiellement et éternellement quoiqu’elle fasse : une créature bénie « capable de Dieu ». A cette profondeur, on n’est jamais déçu ni trompé…. On ne dira jamais assez combien le simple geste bienveillant que nous posons, la moindre parole, peut nous remettre instantanément dans le courant puissant de la bienveillance. C’est à notre portée parce que c’est de l’ordre du respect : je salue en toi, malgré tout, un être humain semblable à moi. Puisque tu es en vie, je prend le risque de faire confiance à ton potentiel, que je ne prétend pas connaître » (p 23). Oui, le chant de Marshall Rosenberg ouvre le chemin de la confiance. « Quand la personne s’aperçoit de mon regard quand je chante cette chanson, la personne sait que ce qui est vivant en elle m’importe. Et quand les gens ont confiance que ce qui est vivant en eux nous importe, nous sommes bien sur le chemin pour résoudre les besoins de tout le monde ».
J H
(1) Site de Thomas d’Ansembourg : http://www.thomasdansembourg.com Sur ce blog, plusieurs articles autour d’interviews ou de conférences de Thomas d’Ansembourg, et notamment, présentation de son dernier livre : « la paix, ça s’apprend » : https://vivreetesperer.com/?p=2596
(2) On trouvera un enseignement de base dans trois vidéos sous titrées en français : https://www.youtube.com/watch?v=f99Xvp3yFPg
(3) Le chant de Marshall Rosenberg : « See me beautiful » : https://www.youtube.com/watch?v=XJJ6PQhX8og
(4) Intervention d’Elisabeth Moltmann-Wendel dans le colloque sur la réception de la rhéologie de l’espérance. Sur ce blog : « Quelle vision de Dieu, de l’humanité et du monde en phase avec les aspirations et les questionnements de notre époque » : https://vivreetesperer.com/?p=2674
(5) Thomas d’Ansembourg. Comprendre l’humain dedans pour comprendre l’humain devant : https://www.youtube.com/watch?v=7THnCPe7qUo
(6) Lytta Basset. Oser la bienveillance. Albin Michel, 2017. Mise en perspective sur ce blog : « Bienveillance divine. Bienveillance humaine. Une harmonie qui se répand » : https://vivreetesperer.com/?p=1842
(7) On suivra sur ce point l’œuvre de théologiens très présents sur ce blog : Jürgen Moltmann et Richard Rohr. C’est une théologie qui met en évidence la communion divine en un Dieu Trinitaire, une communion à l’œuvre pour inspirer notre humanité. Voir la vie et l’oeuvre de Jürgen Moltmann : http://www.temoins.com/une-theologie-pour-notre-temps-lautobiographie-de-juergen-moltmann/ « The divine dance » par Richard Rohr : https://vivreetesperer.com/?p=2758
(8) Dans son livre : « Vers une civilisation de l’empathie », Jérémie Rifkin, traite entre autres, de la sombre vision de l’humanité soutenue par Freud et de ses conséquences : http://www.temoins.com/vers-une-civilisation-de-lempathie-a-propos-du-livre-de-jeremie-rifkinapports-questionnements-et-enjeux/
par jean | Déc 3, 2022 | ARTICLES, Vision et sens |
La continuité de la vie
Selon Barbara Holmes
Du 30 octobre au 5 novembre 2022, sur le site du Center for action and contemplation, Richard Rohr a publié une séquence de méditations intitulée : « Garder la foi dans nos ancêtres » (« Keeping faith in our ancestors ») (1). Dans l’esprit du thème annuel : « Nothing stands alone » : « Rien n’est isolé ; tout se tient », cette séquence envisage la « communion des saints » : « A travers l’histoire, les humains ont souvent manifesté fortement leur appréciation d’une connexion avec leurs ancêtres », écrit Richard Rohr en poursuivant : « Je pense que cette notion collective de l’unité est ce que les chrétiens ont essayé de verbaliser lorsqu’ils ont ajouté tardivement à l’ancienne déclaration de foi des apôtres : « Je crois à la communion des saints ». Ils nous offrait l’idée que les morts en unité avec les vivants, qu’ils soient nos ancêtres directs, les saints en gloire ou même, ainsi appelées, les âmes du purgatoire » (« Partie d’un corps », mardi 1er novembre 2025). Sur ce blog, nous avons évoqué à de nombreuses reprises, la communion des vivants et des morts en évoquant notamment la théologie de Jürgen Moltmann (2). Nous abordons ce thème ici en rapportant la contribution de Barbara Holmes dans cette séquence : « The continuum of life » (La continuité de la vie » (3).
Barbara Holmes intervient à deux reprises dans cette séquence, l’une d’elle rapportant une expérience spirituelle vécue personnellement sur le registre du thème évoqué. Elle s’inscrit par ailleurs dans le réseau communautaire du « Center for action and contemplation ». C’est une personnalité qui a acquis une compétence dans de nombreux domaines : art, sociologie, sciences de l’éducation et, bien sur, théologie. A partir de son expérience spirituelle, elle a écrit plusieurs livres, et notamment : « « Une joie inexprimable. Pratiques contemplatives dans une Eglise noire », « Cosmos et libération ». Elle déclare : « Ma vie est engagée dans la lutte pour la justice, la guérison de l’esprit humain et l’art dans un mouvement de créativité radicale en recherche de pertinence ». Elle est décrite comme « une enseignante en spiritualité, une activiste et une chercheuse centrée sur la spiritualité afro-américaine, la mystique, la cosmologie et la culture » (4). C’est une théologienne et une écrivaine.
Barbara Holmes s’exprime ainsi : « Un monde sans ancêtres est solitaire. Je suis pleine de gratitude envers les anciens de ma famille qui m’ont introduit dans le continuum de la vie. Il est important de savoir comment nous comprenons notre séjour dans cette réalité. Si nous considérons nos vies comme des segments séparés par un trait qui englobe les dates de la naissance et de la mort, nous serons inconsolables quand un traumatisme tronquera nos réalités et retardera nos destinations. Mais si nous nous considérons nous-même comme une partie du continuum de la vie qui ne se termine pas à la mort, mais transite jusqu’à la vie après la vie, nos perspectives peuvent changer ».
Barbara Holmes porte ensuite son regard sur les relations entre le monde présent et l’au delà. « La communauté des ancêtres qui habite déjà la vie au delà de la vie se tient en contact constant avec nous. Ils envoient des messages et interviennent lorsque nécessaire. Ils prient avec nous et murmurent des avertissements. Que nous les appelions ancêtres ou anciens, seules ces femmes et ces hommes qui ont mené de bonnes vies dans leur vie physique, sont considérés comme étant des guides avisés dans le royaume spirituel. Dans certaines cultures africaines, ils sont appelés les ainés, les anciens. Chaque ancien représente l’entière autorité mystique et légale de la lignée. Pour moi, les ancêtres, les ainés vivants et morts, m’ont imposé le respect et ont toujours été présents, me soutenant et me guidant ».
Richard Rohr apporte ensuite un témoignage personnel. Après le décès de sa mère, il a fait l’expérience de la connexion ou d’un « pont » à la vie après la mort. « Je crois qu’un des évènements essentiels est l’expérience de la passion et de la mort, en relation avec quelqu’un que nous aimons, avec quelqu’un auquel nous sommes lié.
Quand ma mère est décédée, je n’ait pas douté qu’elle construisait un pont – je ne vois pas quel autre mot utiliser – qu’elle bâtissait un pont et prenait quelque chose de moi avec elle et qu’elle me renvoyait quelque chose d’elle. Je comprends maintenant à un niveau plus profond ce que Jésus voulait dire : « A moins que je m’en aille, l’Esprit ne viendra pas ». (Jean 16.7). Je pense que le cours normal de l’histoire est pour chaque génération de passer et de bâtir des ponts d’amour et de confiance pour la génération suivante… Tout ce que Jésus est venu nous enseigner et avait seulement besoin de nous enseigner, c’était comment avancer à travers le grand mystère, ne pas être confondu et d’avoir confiance que Dieu est de l’autre côté ».
Les formes de notre conscience des rapports entre les vivants et les morts sont certes en relation avec la culture dans laquelle nous vivons. Les accents peuvent varier, mais, avec Jürgen Moltmann, nous croyons en la communion entre les vivants et les morts.
« L’être humain est un être en relation ». Cette réalité se manifeste également dans la continuité des générations. « Les êtres humains participent à une continuité des générations même s’ils n’en ont pas toujours conscience ». Dans les sociétés modernes occidentales, l’individualisme fait obstacle à cette conscience collective. Cela réduit la conscience de la communion entre les vivants et les morts. A cet égard, les sociétés traditionnelles, en particulier celles d’Extrême Orient, ont quelque chose à nous rappeler, car elles vivent actuellement cette communion entre les vivants et les morts. Dans le monde occidental, nous avons besoin d’une culture nouvelle du souvenir, « de manière à ne pas vivre seulement comme individus pour nous-mêmes, mais en vue de regarder au delà de nous-mêmes ». C’est seulement si nous percevons notre durée de vie dans le cadre plus vaste de la succession des générations que nous pouvons entrer « dans la mémoire du passé et dans l’avenir en espérance de ce qui est à venir ». Pour réaliser cette communion entre les vivants et les morts, une transcendance de la vie et de la mort est requise… La foi chrétienne envisage la communion des vivants et des morts dans le Christ qui est mort dans une mort humaine et a été ressuscité dans une vie divine. En conséquence, la communauté chrétienne est une communauté non seulement des vivants, mais des morts. « Le Christ est ressuscité pour qu’il puisse être le Seigneur à la fois des morts et des vivants » ( Romains 14.9) (5).
J H
- Keeping faith in our ancestors : https://cac.org/themes/keeping-faith-with-our-ancestors/
- Sur la Terre comme au Ciel : https://vivreetesperer.com/sur-la-terre-comme-au-ciel/ Le Dieu vivant et la plénitude de vie : https://vivreetesperer.com/le-dieu-vivant-et-la-plenitude-de-vie-2/ Une révolution spirituelle. Une approche nouvelle de l’Au-delà : https://vivreetesperer.com/une-revolution-spirituelle-une-approche-nouvelle-de-lau-dela/
- The continuum of life : https://cac.org/daily-meditations/the-continuum-of-life-2022-10-30/
- Barbara Holmes : https://www.drbarbaraholmes.com/bio
- Le Dieu vivant et la plénitude de vie : https://vivreetesperer.com/le-dieu-vivant-et-la-plenitude-de-vie-2/