par | Août 2, 2013 | ARTICLES, Vision et sens |
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Bénir, c’est participer à l’œuvre de Dieu en répandant la paix : au sens de « shalom », une paix entendue, dans un sens très large : plénitude, harmonie, santé.
En nous parlant ainsi de la bénédiction, Jean-Claude Schwab nous ouvre un horizon de vie.
Récemment, on pouvait lire sur la lettre d’une entreprise de télécommunication (1), un message éclairant : « Allô provient de l’ancien mot anglais : hallow (sois béni), le salut des marins quand leurs bateaux se croisaient. Au fil du temps, le mot se transforme en hello. Ce sont les standardistes qui démocratisèrent l’usage du hello au téléphone qui devint phonétiquement notre allô français ». Aujourd’hui, à une époque où l’interconnexion est désormais une caractéristique majeure de notre existence, il est bon de se rappeler que le bon exercice de la communication dépend de la reconnaissance d’une dimension qui fonde une confiance réciproque. Tel était le cas de ces marins d’autrefois lorsqu’ils se saluaient en terme de bénédiction.
Et, de même aujourd’hui, nous savons combien notre existence dépend de la qualité des relations qui donnent forme à notre environnement. Nous comprenons l’importance de notre manière de penser. Actuellement, de nombreuses recherches montrent les effets bénéfiques d’une pensée positive tant à l’égard des autres qu’à l’égard de nous-même (2). Nous voyons là une disposition de la création qui trouve signification et vigueur dans la bénédiction.. Et d’ailleurs, dès le milieu du XXè siècles, des thérapeutes chrétiens comme Agnes Sanford et Norman Peale (3) ont témoigné d’une expérience des effets d’une pensée de bénédiction à l’intention de tel ou tel.
Lorsque nous croyons que Dieu est présent et agissant au cœur même de notre monde, nous voyons en lui la source de vie, la puissance d’inspiration qui porte tout ce qui va dans le sens de la vie.Il nous appelle à participer à son œuvre (4). Nous sommes tous appelés à entrer dans la bénédiction.
Dans le passé, Jean-Claude Schwab, pasteur de l’Eglise Réformée en Suisse romande, a animé des sessions à Témoins dans le cadre de l’AFRAI, une association chrétienne se donnant pour but de manifester l’action de Dieu pour le développement et la restauration de la personne dans toutes ses dimensions (5) . Il anime également des sessions durant les vacances d’été (6). L’une d’entre elles a été consacrée au thème de la bénédiction. Dans un numéro du magazine Témoins, nous avions recueilli à ce sujet les propos de Jean-Claude Schwab qui nous fait entrer dans le mouvement de la bénédiction : affirmer la bénédiction ; reconnaître la bénédiction ; répandre la bénédiction, comme une manière bienfaisante de penser et de vivre.
Récemment, les numéros du magazine Témoins ont été numérisés et mis en ligne (7) sur le site de Témoins, le site de « la culture chrétienne interconfessionnelle ». On pourra donc y consulter cet article dans le cadre même du numéro dans lequel il a été publié (novembre-décembre 2000) (8).
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J.H.
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Entrer dans la bénédiction
Bénir, c’est proclamer la paix, agir en faveur de la paix, établir un espace de paix. Ici, on doit entendre le mot « paix » d’une façon très large, en retournant au terme hébraîque originel : Shalom. Shalom signifie la plénitude, l’harmonie, la santé, tout ce qui concourt à l’accomplissement de l’homme. Mais ce terme exprime aussi la restauration de l’être, le salut. En proclamant la paix, la bénédiction exprime l’action de Dieu dans la création et dans la rédemption.
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Affirmer la bénédiction
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Lorsque Jésus chasse les vendeurs du Temple, sa colère ouvre un espace pour la bénédiction (Mat 21. 12-16). Ce lieu n’était plus un espace de liberté et d’adoration, mais l’objet d’un envahissement. Cette situation évoque tout ce qui surgit en nous et fait opposition au moment où l’on veut faire place au silence, à l’intimité, à la rencontre. Les préoccupations, les sollicitations font barrage. A l’instar de la colère de Jésus, sans doute sommes-nous appelés parfois à poser des actes clairs, à laisser notre énergie s’exprimer pour rétablir les choses. Dans l’épisode rapporté de l’évangile, il ne faut pas moins que la colère de Jésus pour rétablir l’ordre originel, un espace sabbatique. Alors la rencontre peut avoir lieu. Les enfants expriment leur louange d’une façon toute simple et naturelle. Les malades peuvent s’approcher pour être guéri. Le projet de Dieu se réalise.
Mais, en même temps, les textes synoptiques nous disent qu’à la suite de cet incident, les ennemis de Jésus s’entendent pour le faire mourir. Ainsi, Jésus signe de sa mort cette œuvre de libération. C’est dire combien, à ses yeux, cet espace pour la bénédiction,au cœur de nos vies, est vital. Il a fallu l’action virulente de Jésus pour que les gens puissent s’approcher de Lui au temple. Jusque là, ils ne le pouvaient pas. Bien sûr, ils ont reçu de lui de grands bienfaits, mais ceux-ci sont un effet de sa présence. Cette simple présence, sa proximité, est bénédiction. C’est à travers la présence de Dieu que s’établit le Shalom, plénitude et harmonie, puissance de restauration personnelle et relationnelle.
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Reconnaître la bénédiction
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La présence et l’action bénissantes de Dieu sont à l’origine de l’univers, mais elles sont aussi à l’origine de ma vie. « C’est Toi qui m’a tissé dans le sein de ma mère. Je te loue de ce que je suis une créature si merveilleuse » (Psaume 139. 13-14) « Tu m’as fait sortir du sein maternel. Tu m’as mis en sûreté sur les mamelles de ma mère » (Psaume 22.10).
Ainsi, mon Dieu, Tu as pris soin de moi dès l’origine. Tu m’as donné des signes d’amour qui m’ont permis de vivre. Sans ces signes, je n’existerais pas. J’ai reçu ainsi la confiance originelle qui est le fondement du développement humain. Il y a eu des dérapages ensuite dans ma vie. Mais j’ai reçu ce fondement, cette grâce d’exister. Si je n’en suis pas conscient, je suis appelé à réaliser que la bénédiction est à l’œuvre pour moi, depuis mon origine. Cette prise de conscience est une bénédiction en soi, une nouvelle bénédiction.
« Mon âme, bénis l’Eternel, n’oublie aucun de ses bienfaits ». Cette exhortation à soi-même (Psaume 103) m’appelle à bénir Dieu pour ma vie et, pour cela, à faire mémoire de ma vie. C’est une démarche importante à faire périodiquement. Il y a là un travail en quête de sens, en quête des traces de Dieu. Quel est le fil conducteur pour ma vie ? Je rends grâce pour le bien et, dans les côtés négatifs, je cherche à reconnaître la main de Dieu qui utilise tout. Quand il y a du sens, il y a quelqu’un qui est derrière. Je découvre ce quelqu’un qui est avec moi. Il y a là une attitude à acquérir : savoir reconnaître la présence de Dieu à l’œuvre dans ma vie.
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Répandre la bénédiction
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« Que l‘Eternel te bénisse et te garde. Que l’Eternel fasse luire sa face et qu’il t’accorde sa grâce. Que l’Eternel tourne sa face vers toi et qu’il te donne la paix » (Nombres 6, 24-26) . La bénédiction d’Aaron, traditionnelle dans le judaïsme, nous introduit dans une attitude de bénédiction .
« Bénissez, ne maudissez pas » nous rappelle Paul (Romains 12.14), en écho à la parole de Jésus (Matthieu 5.44). Ce précepte nous invite à une attitude intérieure. Bénir les gens autour de nous, c’est avoir un regard positif sur eux, leur souhaiter le meilleur, les mettre intérieurement en relation avec Dieu, invoquer sur eux sa protection.
Pour exprimer à l’autre la bénédiction de Dieu, il faut apprendre à se rendre présent à lui, entrer dans le concret d’une relation. Je me réfère à l’attitude de Jésus lorsqu’il guérit un sourd-muet dans l’évangile de Marc (ch 7. 23-25). En quelque sorte, Jésus apprivoise cet homme. Il le prend à part, il entre en proximité avec lui en le touchant. Jésus soupire intérieurement, lève les yeux au Ciel et dit à l’homme : « Ouvre-toi ». Présent à lui-même dans son soupir, Jésus est présent au Père et exerce une présence de libération vis-à-vis de cet homme.
Pour moi, la parole et la présence sont deux réalités qui doivent aller de pair. Ainsi, bénir l’autre explicitement, c’est se rendre présent à lui et dans l’humilité, se faire simplement le serviteur d’une Parole. Entrons ensemble dans la bénédiction de Dieu.
Propos recueillis auprès de Jean-Claude Schwab
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(1) La lettre. Ligne fixe. orange, mai-juin 2013
(2) « La dynamique de la conscience et de l’esprit humain. Un nouvel horizon scientifique. D’après le livre de Mario Beauregard : « Brain wars ». http://www.temoins.com/etudes/la-dynamique-de-la-conscience-et-de-l-esprit-humain.-un-nouvel-horizon-scientifique.-d-apres-le-livre-de-mario-beauregard-brain-wars.html
(3) Agnes Sanford inscrit la prière de guérison dans une compréhension des interrelations entre la pensée et le corps : Sanford (Agnes). La lumière qui guérit . Delachaux et Niestlé, 1955. Norman Vincent Peale a découvert l’apport de la psychologie dans le développement spiritueL Il donne à un de ses livres intitulé au départ : « Puissance de la foi », le titre : « Puissance de la pensée positive » pour que celui-ci puisse s’adresser à tous et pas seulement aux croyants pratiquants. Peale (Norman Vincent). La puissance de la pensée positive. Marabout, 1990
(4) Sur ce blog, la contribution d’Odile Hassenforder : « Dieu, puissance de vie. Les projets de Dieu pour moi, pour l’humanité, pour l’univers sont des projets de bonheur et non de malheur ». https://vivreetesperer.com/?p=1405
(5) Les interventions de Jean-Claude Schwab à Témoins ont été suivies par la publication de deux textes : « Voici une bonne nouvelle : habiter mon corps » : http://www.temoins.com/developpement-personnel/voici-une-bonne-nouvelle-habiter-mon-corps/toutes-les-pages.html et : « Au cœur du cyclone » : http://www.temoins.com/parole-ouverte/au-coeur-du-cyclone.html On se reportera également à une récente contribution de Jean-Claude Schwab sur ce blog : « Accéder au fondement de son existence » https://vivreetesperer.com/?p=1295
(6) Jean-Claude Schwab participe activement à l’association : Expérience et Théologie : http://www.experience-theologie.ch/accueil/
(7) La mémoire de Témoins : http://www.temoins.com/index.php?option=com_content&view=article&id=959&catid=30
(8) Témoins. Novembre/Décembre 2000 http://temoins.com/index.php?option=com_content&view=article&id=993&catid=29
par jean | Sep 18, 2012 | ARTICLES, Société et culture en mouvement |
Pour réformer la finance, il faut changer les finalités et créer des institutions nouvelles incarnant le bien commun.
D’après le livre de James Featherby: « Of markets and men ».
Comment faire face aux dérives et aux ravages du système financier dominant ? Comment refonder la finance ?
Une voix britannique vient nous répondre. James Featherby, membre de l’équipe du « London Institute for Contemporary Christianity (LICC) » (Institut de Londres pour le Christianisme Contemporain), juriste pendant trente ans dans une grande firme de la « City » de Londres, vient d’écrire un livre passionnant à ce sujet : « Of markets and men. Reshaping finance for a new season » (1). (Des marchés et des hommes. Réorganiser la finance pour une nouvelle époque »). Et il nous fait part de son approche dans un article qui vient de paraître sur le site du LICC (2).
En passant en revue les travaux de plusieurs chercheurs, James Featherby met l’accent sur l’importance des institutions. Dans la série de conférences de Reith (Ecosse), en 2012, Niall Ferguson affirme que le plus grand danger pour l’Occident réside dans son autosatisfaction (« complacency ») vis à vis des institutions (3). Dans « The origins of political order » (Les origines de l’ordre politique) (4), Francis Fukuyama déclare que la soumission de l’état aux règles de droit est fondamentale. Dans un livre intitulé : « Why nations fall » (Pourquoi des nations échouent » (5), Daron Acemoglu et James Robinson nous disent que l’existence d’institutions destinées à servir l’intérêt public plutôt que l’exploitation privée, explique pourquoi certains pays réussissent et d’autres s’effondrent. Dans un ouvrage : « To change the world » (Changer le monde) (6), James Davison Hunter appelle les chrétiens à une « présence loyale » (« faithful presence ») dans les institutions civiques, en se consacrant en premier à l’accompagnement du changement culturel.
Face aux dérives actuelles, « la « bonté » (« goodness » a besoin de s’incarner dans des institutions si nous voulons que des cultures et conduites positives se maintiennent et grandissent. De bonnes institutions, me semble-t-il, peuvent à la fois conduire (« channel ») nos énergies positives et limiter nos excès. L’alternative est claire ».
James Featherby propose quatre démarches radicales pour institutionnaliser le bien (« goodness » dans l’économie et la finance :
° Changer le contrat social entre les grandes entreprises (« large business ») et la société en leur assignant un but civique autant qu’un but privé.
° Défaire le mécanisme par lequel une dette excessive a été créée dans la vie collective et personnelle.
° Réduire les opérations spéculatives dans les marchés financiers sans rapport avec l’économie réelle.
° Donner aux épargnants et aux retraités la capacité de mettre en oeuvre leur capital pour une fonction productive plutôt que d’avoir en vue seulement un rendement financier maximum.
« Si nous ne changeons pas les finalités des entreprises (« corporate objectives of the business ») qui contrôlent la manière dont nous vivons, incluant les structures bancaires, mais sans nous limiter à celles-ci, alors le volume de leurs budgets de publicité et la puissance de leurs plans continueront à accabler (« overwhelm ») à la fois ceux qui travaillent pour elles et le reste d’entre nous ».
Il est bon d’entendre cette voix qui, à partir d’une expérience professionnelle au sein même du système financier actuel, s’élève pour proclamer la nécessité d’un changement majeur dans les finalités et le fonctionnement du système financier et économique.
« Notre finance reflète notre philosophie. Nous avons besoin de penser et d’agir d’une manière qui soit plus relationnelle, holistique, en proximité, audacieuse, humble, inspirée par des finalités et des principes, tout cela en harmonie avec une vision biblique de la vie. Et puis, nous avons besoin de réorganiser nos institutions pour qu’elles reflètent notre nouvelle philosophie. Nous l’avons fait dans le passé. Nous pouvons le faire encore ».
Cette voix converge avec d’autres, entre autres, celles qui nous parlent aujourd’hui d’économie positive (7) ou d’économie solidaire (8) . Le chantier de la réforme est en train de se mettre en route.
J H
(1) Featherby (James). Of markets and men. Reshaping finance for a new season. Tomorrow company, 2012. http://www.licc.org.uk/shop/product/of-markets-and-men-reshaping-finance-for-a-new-season
(2) James Featherby. Reshaping finance for a new season. http://www.licc.org.uk/engaging-with-culture/connecting-with-culture/business/reshaping-finance-for-a-new-season-1389
(3) Niall Ferguson.The rule of law and its Enemies. Reith lectures, 2012 http://www.bbc.co.uk/podcasts/series/reith
(4) Francis Fukuyama. The origins of political order. From prehuman times to the French Revolution. Profile books, 2011. http://www.profilebooks.com/isbn/9781846682575/
(5) Daron Acemoglu, James A. Robinson. Why nations fail. The origins of power, prosperity and poverty. Profile books, 2012. http://www.profilebooks.com/isbn/9781846684296/
(6) James Davison Hunter. To change the world. The irony, tragedy and possibility of Christianity in the late modern world. Oxford University Press, 2010 http://ukcatalogue.oup.com/product/9780199730803.do#.UFTcza7j5Zp
(7) Voir sur ce blog : « Changement dans les esprits. Nouvelles finalités, nouvelles approches. L’économie positive ».
Voir sur le site de Témoins : « L’économie sociale et solidaire. Ses valeurs et ses enjeux » http://www.temoins.com/en-bref/leconomie-sociale-et-solidaire-ses-valeurs-et-ses-enjeux.html
par jean | Juil 2, 2012 | ARTICLES, Expérience de vie et relation, Hstoires et projets de vie, Société et culture en mouvement |
Un fil conducteur : l’épopée d’un cheval témoigne de la puissance de la bonté et de la vie face au déchaînement du mal.
Cheval de guerre : c’est un des nombreux romans de Michael Morpurgo traduits en français dans la collection folio junior (1). Lorsqu’un auteur qui a du cœur et du talent écrit pour la jeunesse, son œuvre atteint également les adultes. C’est le cas pour Michael Morpurgo et cela apparaît dans la reprise de cet ouvrage en terme d’un film destiné à un grand public.
Dans les livres de Michael Morpurgo, la communion en la vie se manifeste fréquemment à travers la présence d’un animal et ses relations avec les hommes. Dans des situations très diverses, et en particulier la confrontation à des épreuves collectives comme la guerre, on y voit la force de l’amitié et une noblesse d’humanité. Face au mal, quelque part une lumière brille. Et lorsque la bonté se révèle ainsi dans les épreuves, elle appelle une émotion qui peut se manifester jusqu’aux larmes. On se réjouit que le grand cinéaste qu’est Steven Spielberg ait décidé de réaliser un film à partir d’un roman de Michael Morpurgo (2). Il a su reconnaître la beauté et la grandeur de cette œuvre.
« Cheval de guerre », c’est une histoire. A la veille de la première guerre mondiale, le jeune Albert mène une existence paisible dans une ferme anglaise avec son cheval Joey. Mais le père d’Albert décide de vendre Joey à la cavalerie britannique et le cheval aboutit bientôt sur le front français. L’officier britannique qui le monte est tué dans une charge de cavalerie et le cheval se retrouve employé dans l’armée allemande. Dans un épisode meurtrier, il s’échappe et échoue entre les deux lignes de front. Une trêve s’instaure brièvement et il est récupéré par un jeune soldat britannique et retrouve ensuite Albert, son ancien maître et ami qui s’est engagé avec l’arrière pensée de rencontrer à nouveau ce cheval tant aimé.
En comparant un film à l’œuvre écrite qui lui a donné naissance, on éprouve parfois un malaise. Personnellement, dans ce cas, je n’éprouve pas du tout cette impression, car l’image sobre et belle enrichit la trame, et les aménagements dans l’intrigue vont de pair avec une puissance d’évocation. Il y a bien sûr dans ce film un déroulement qui tient en haleine, mais à travers le héros qui est ici le cheval Joey, il y a de plus, quelque part, un souffle épique.
Cependant, pour nous, ce qui fait la profondeur de ce film tel qu’il nous émeut et se grave dans notre mémoire, c’est la relation entre l’animal et les êtres humains nombreux et divers avec lesquels il va se trouver en relation.
Bien sûr, une puissance de vie se manifeste dans ce cheval. C’est un cheval qui suscite l’admiration des connaisseurs et l’estime qu’on lui porte, s’accompagne d’une affection. Il y a un courant qui passe entre l’homme et l’animal.
Ce cheval met en évidence la diversité des comportements humains à son égard. Il est parfois soumis à des brimades, à des maltraitances ou tout simplement à l’indifférence humaine. Mais, en regard, combien il suscite chez beaucoup d’hommes, empathie, bonté, et on pourrait ajouter parfois un sentiment d’amitié. Son jeune maître et compagnon, Albert, a su l’apprivoiser à travers une communication intuitive. Et, par la suite, il va rencontrer des hommes de cœur dans les différents milieux où ils va évoluer depuis l’officier britannique qui le monte au départ jusqu’à des soldats anglais et allemands qui se détachent du lot en prenant soin de lui, jusqu’à un grand-père et sa petite-fille qui l’accueillent un moment dans une ferme française.
L’épisode dans lequel Joey se retrouve prisonnier des barbelés entre deux lignes de front est lui-même particulièrement émouvant. Car il montre, de part et d’autre chez les allemands et chez les britanniques, un sentiment d’humanité qui s’éveille à la vue de ce cheval perdu, une forme de tendresse qui apparaît dans la barbarie ambiante. La conscience humaine se manifeste à travers deux hommes qui se lèvent et vont à sa rencontre malgré tous les dangers. On sait aujourd’hui que cet épisode est plausible parce qu’il y a eut, dans cette guerre, des essais de fraternisation (3). Oui, cette grande guerre a été un massacre collectif, un enfer. Dans plusieurs de ses livres, Michael Morpurgo a dénoncé les horreurs de ce conflit. Dans le film, une scène symbolise la puissance du mal : l’énorme canon hissé sur une colline au prix de la souffrance de nombreux chevaux et qui envoie à l’horizon le feu de la mort. En regard, il y a tout ce que Joey révèle en éveillant des sentiments d’humanité dans cet enfer, et, en fin de parcours, la solidarité qui porte des soldats britanniques à venir à son aide.
Le film témoigne de ces vertus que sont l’empathie, la bonté, l’humanité, la solidarité en contraste avec le déchaînement des forces du mal. Quelque part, il révèle la puissance du bien. Nous avons besoin de ce message et la manière dont il nous est proposé suscite une émotion profonde. Merci à Michael Morpurgo et à Steven Spielberg !
JH
(1) Morpurgo Michael). Cheval de guerre. Gallimard Jeunesse (Folio junior). Edition originale : War horse (1982)
(2) Le film : « Cheval de guerre » est d’abord sorti en anglais : « War horse ». On peut aujourd’hui l’acheter en dvd
En évoquant la bonté que beaucoup ont manifesté vis à vis du cheval Joey, ce film peut éveiller le désir de lire le livre de Jacques Lecomte sur la bonté humaine. On y trouve une description de la fraternité dans les tranchées durant la guerre 1914-1918 (La fraternité dans les tranchées p 97-101. Lecomte (Jacques). La bonté humaine. Altruisme, empathie, générosité. Odile Jacob, mars 2012. Mise en perspective sur ce blog : « La bonté humaine. Est-ce possible ? » https://vivreetesperer.com/?p=674