Se rencontrer à travers un jogging

Nous ne sommes pas seuls.

Après deux décès dans ma famille proche, j’ai senti s’en aller une partie de moi. Partie que je savais ne pas pouvoir remplacer mais j’ai senti le besoin d’ouvrir mon coeur à plus de personnes, pour être plus entouré et pouvoir parler de ce qui m’arrivait.

J’ai profité d’un site permettant d’organiser des sorties paris.onvasortir.com. Adepte de course à pied, qui m’a toujours aidé pour penser à autre chose, me ressourcer, j’ai organisé un jogging. Le site propose donc la sortie à ceux qui veulent s’y joindre. Quelques personnes sont venues s’y ajouter et je reprogrammais la sortie chaque semaine.

De semaine en semaine, quelle ne fut pas ma joie de voir des personnes de toutes origines qui se rassemblaient pour le plaisir de courir ensemble… mais aussi pour le plaisir d’échanger avec d’autres.

Ce groupe qui s’est constitué est vraiment un groupe vivant : les personnes viennent… ou pas et crée plus de relation… ou pas avec d’autres personnes.

Voilà un tout cas un moyen très simple d’accéder aux autres :  partager une sortie ensemble et se découvrir une affinité, une passion commune ou simplement partager un moment de convivialité.

 

Alain

Lorsqu’un fils prend soin de son père

Dans des registres variés, il y a des relations qui apportent la vie à des personnes en difficulté. Et parfois cette intervention fait la différence entre la vie et … la survie. C’est pourquoi certaines expériences sont belles et réconfortantes.

Claude est aujourd’hui  cadre dans une société de services.  Marié, il a deux grandes filles. Il se rappelle son enfance comme fils unique : « J’étais seul et dès lors tous les espoirs de mes parents pesaient sur moi ». Leurs personnalités très différentes étaient souvent source de divergences.  Claude a connu une bonne relation avec son père, traducteur-lexicographe, reconnu par la presse spécialisée et passionné par son travail.Comme il exerce  en libéral, Claude est témoin de son activité. « Il a su me communiquer en partie sa passion pour l’anglais grâce à son sens pédagogique et son don de l’observation des détails ». Il participe à ses centres d’intérêt : les voyages, la musique classique. « On aimait bien écouter des œuvres ensemble ou en découvrir de nouvelles  ».

La mère de Claude, malade pendant dix ans, décède en 2005. « Mon père s’est occupé d’elle jusqu’au bout, refusant toute aide, estimant que cela relevait de  sa responsabilité. Il s’est épuisé à la prendre en charge. Peu de temps après, il est lui-même tombé malade ». Affecté par une dépression et des pertes cognitives, le père de Claude, hospitalisé pendant quelques mois, entre ensuite dans une maison de retraite médicalisée. L’environnement de cette maison est plutôt positif, mais son père, précédemment très autonome sur tous les plans, a du mal à s’y habituer. « Je suis content que tu viennes me voir, je n’ai  personne d’autre ».

Claude le rencontre deux à trois fois par semaine. Dans sa conversation, il s’appuie sur les centres d’intérêt de son père. Connaissant ses goûts, il écoute avec lui de la musique classique. Il a même ravivé chez lui le jeu de l’harmonica. Bien plus, certains week-ends, il l’emmène rencontrer d’anciens amis au pays Basque, en Angleterre,dans la Sarthe ou simplement l’invite à un concert local. Et il l’entraîne parfois dans un week-end touristique. Cela devient un sujet de conversation : « On  parle de notre prochain voyage, ce que l’on envisage de faire, qui nous allons voir, au le retour nous regardons les photos  faisons le point sur ce qui lui a plu ou pas ».

Pour le père de Claude, c’est vraiment un lien vital. Affecté par des pertes de mémoire, des troubles neurologiques et d’orientation qui entravent sa mobilité et l’empêchent d’avoir une activité intellectuelle normale, ce père trouve dans son fils une présence active qui éveille en lui une motivation ciblée et entretient, remet en route parfois des processus cognitifs. Claude nous dit comment il a conçu ces activités. « Pour moi, le plus important c’est de valoriser mon père par rapport à ce qu’il était et ce qu’il peut encore faire, positiver en quelque sorte et réanimer le lien social qu’il avait avant dans ses relations ». « Ce que j’essaye de faire est simple : réanimer des choses qui étaient en sommeil, réveiller des motivations, apporter des stimulations. Ainsi a-t-il pu communiquer avec une amie aux USA grâce au système Skype et la voir sur l’écran d’ordinateur, ce qui était absolument inédit pour lui ».« Mon père aimait l’humour et les jeux de mots, les histoires dérisoires qui font rire … dans les prétoires, alors, de temps en temps à travers une histoire ou une allusion de ma part, il arrive encore à rire ou sourire ». Lorsqu’il raconte ses déplacements avec son père, à travers son récit, on perçoit chez Claude beaucoup de sollicitude : intégrer les limites de son père qui se déplace principalement en chaise roulante, tenir compte des intempéries et … des contretemps périlleux… Il l’encourage à prendre des initiatives et doit aussi être parfois directif avec lui, en particulier dans les transports pour des aspects de  sécurité.

L’expérience de Claude s’adresse à tous ceux qui sont confrontés à des situations analogues : « Lorsqu’en 2009, mon père a constaté lui-même, en fonction de son état, qu’il n’y avait guère d’autre choix que de rechercher une maison de retraite médicalisée, j’ai été  perturbé.J’ai découvert ensuite que ce n’est pas nécessairement la fin mais le commencement d’une autre nature de relation qui s’appuie sur son vécu, sa culture, sa personnalité et tient compte des limites du présent ». Le récit de cette expérience pourra aider d’autres personnes et leur redonner espoir.

« Voir son père se dégrader est évidemment une souffrance; «  Je dis souvent qu’il descend l’escalier par étapes, à chaque marche il faut se réadapter mutuellement ! » En l’aidant, je « bénéficie » aussi d’un retour, une sorte de feed-back, cela me fait du bien de participer à cet accompagnement et de voir mon père content. « Subsidiairement je ne veux pas risquer de cultiver demain le regret posthume d’avoir omis de mettre en œuvre à son égard ce qui était raisonnablement envisageable… ». Claude évoque un verset de la Bible, le cinquième commandement : « Honore ton père et ta mère afin que tes jours se prolongent et que tu sois heureux » (Deutéronome 5.16). Il participe concrètement à cette inspiration. Comme d’autres personnes qui prennent soin de leurs proches ou de leurs relations, il est source de vie pour des personnes fragiles et isolées. C’est un message d’espoir.

Contribution de Claude à partir d’un entretien retranscrit sous la forme d’un récit (JH).

La grâce d’exister

Dans son livre : « Sa présence dans ma vie » (1), Odile Hassenforder nous raconte comment, face à l’adversité, elle a vécu une expérience de plénitude.

« Au fond de mon lit, en pleine aplasie due à une chimio trop forte, j’ai reçu la joie de l’existence. Un cadeau gratuit donné à tout humain par Dieu… ».

« Epuisée, au fond de mon lit, incapable de toute activité…là, inutile, je soupire : « qui suis-je ? »

Là, d’une seconde à l’autre, du fond du gouffre, je réalise cette chose extraordinaire : « j’existe ! ». C’est gratuit. Cela m’est donné gratuitement. Je suis partie intégrante de la création : une étoile dans le firmament, une pâquerette dans la prairie, peu importe : étoile ou pâquerette, j’existe ».

Une joie immense m’envahit au plus profond de moi-même : comme une louange à notre Dieu : Il est grand. Il est beau. Il est bon… »

JH

(1)         Hassenforder  (Odile). Sa présence dans ma vie. Empreinte, 2011. « La grâce d’exister » p.171-172. www.editions-empreinte.com « Le livre alterne témoignages d’un riche vécu de foi et méditations de textes bibliques… L’auteure nous convie à une dimension extra-ordinaire, qui donne une nouvelle saveur à nos existences ». Présentation du livre sur le site de Témoins accompagnée de commentaires et de témoignages: Sa présence dans ma vie