Invitation à la spiritualité

Invitation à la spiritualité

Une vision nouvelle. Un chemin

Au cours des dernières décennies, dans le contexte du déclin de la « religion organisée » et du reflux de la mentalité matérialiste et scientiste, la spiritualité s’ est imposée comme une vision nouvelle. Une recherche  historique, sociologique et psychologique particulièrement développée en milieu anglophone nous instruit sur ce phénomène. Comment la spiritualité s’inscrit-elle dans une pratique de vie ?

Certes, la réponse à cette question varie selon chacun. Mais, à partir de leur expérience et de leur culture, certains peuvent nous apporter un éclairage fructueux.  C’est le cas d’Alexandra Puppinck Bortoli dans son livre : » Invitation à la spiritualité » (1). « Elle nous propose ‘éclairer le sens de la spiritualité en explorant cette part intime de nous- même à partir des expériences sensibles que nous offrent la poésie, la musique, la beauté, l’art, le sacré, le souffle, la lumière. Elle nous entraine ainsi dans une déambulation à la rencontre de notre sensibilité. Elle nous appelle à prendre conscience de cette dimension déjà présente en nous, à mesurer la portée spirituelle des choses qui nous entourent. A ouvrir les yeux. Notre existence prend alors une autre signification, une autre saveur. Plus réceptif à sa beauté, nous découvrons alors qu’elle est bien plus vaste que nous le pensions » ( page de couverture).

 

 La montée d’une nouvelle vision de la vie

Au cours des dernières décennies,  de pair avec le déclin de la religion organisée, la spiritualité  est devenue une réalité visible et reconnue. C’est ce que montre une récente enquête effectuée aux Etats-Unis, en 2023. (2). 70% des américains adultes se considèrent comme spirituels ou disent que la spiritualité est très importante dans leur vie.  Dans ce contexte, 48% se déclarent également religieux, 22% spirituels, mais pas religieux. Interrogés à partir d’une liste d’items, la plupart des américains spirituels déclarent que « être connectés avec quelqu’un plus grand que soi » est essentiel pour se dire étant spirituels. Effectivement, « être connecté avec quelqu’un de plus grand que moi » remporte 74% des suffrages : être connecté avec Dieu : 70% ; être connecté avec mon vrai moi : 64% ; être ouvert d’esprit : 53% ; être connecté avec la nature : 43%….

La spiritualité prospère aujourd’hui dans l’âge écologique en devenir. C’est ainsi qu’un « Manuel de transition intérieure » publié sous le titre significatif de « Reliance » (3) consacre un chapitre à la spiritualité. Les auteurs mettent en évidence « un regain de spiritualité en lien en particulier avec des engagements écologiques et sociétaux ». « Ce n’est pas qu’un effet de mode. Il constitue une tendance de fond dans le monde occidental ». Mais qu’est-ce la spiritualité ?

« En fait, le mot renvoie à des expériences plurielles qui ressortent notamment dans une large enquête menée en 2013 auprès de personnes fréquentant le forum 104, carrefour parisien entre spiritualité et transition. A la question : qu’est-ce que la spiritualité ?, on peut lire des réponses très diverses : la rencontre de l’être humain avec son âme ; la quête de ce que nous sommes au-delà des apparences ; ce qui donne sens à ma vie ; être relié au divin qui est en chacun de nous…. Une réalité invisible mais qui existe, porteuse d’idéaux et de valeurs pour l’humanité ; un chemin de connaissance de soi et un éveil à l’au-delà ». Les auteurs avancent cette proposition : « La spiritualité désigne la relation à un autre plan du réel de la vie et de la conscience : « le plus grand que soi ». Comme l’étymologie renvoie à « l’esprit », dans notre perspective, ce n’est pas seulement la vie de l’esprit (avec une minuscule), mais la vie de ou dans l’Esprit (avec une majuscule), comme expression justement du « plus grand que soi ».

Sociologue de la religion en Pologne, Dominika Motak nous décrit la montée de la spiritualité dans une culture postmoderne caractérisée par l’individualisme (4). A la fin du XXè siècle et au début du XXI è, on observe par exemple les progrès du nouvel Age en Grande Bretagne (Heelas and Woodhead 2005). Plus généralement, Charles Taylor diagnostique « un tournant massif de la culture moderne vers la subjectivité ». Un nouvel univers religieux se dessine.  La vision nouvelle comprend une croyance en une unité entre l’homme et la nature, une conception holistique du rapport entre l’esprit et le corps, et une conscience des limitations entre le corps et la rationalité ( Hunt 2002). Dominika Motta met l’accent sur l’individualisation. C’est le primat de l’expérience.

Cependant, un livre « Something there. The biology of the human spirit “(2006) (5) nous parait essentiel pour caractériser la prise de conscience de la dimension spirituelle.  On peut entendre ce titre comme « Quelque chose est là » ou « il y a bien quelque chose ». Effectivement, à partir de nombreuses recherches et d’une culture encyclopédique, l’auteur, David Hay, montre l’existence d’une réalité spirituelle qui n’apparait pas immédiatement au premier abord. Il s’appuie sur la recherche engagée par Alister Hardy dans « une unité de recherche sur l’expérience religieuse » où il a constitué une banque de données rassemblant plusieurs milliers de récits d’expériences correspondant à la question : « Vous est-il arrivé d’avoir conscience d’une présence ou d’une puissance (ou d’être influencé par elle), que vous l’appeliez Dieu ou non, et qui est différentes de votre perception habituelle ? ». Or, ces expériences sont particulièrement impressionnantes.  Elles suscitent notamment le sentiment d’une présence porteuse d’amour et de paix. Elles peuvent induire également admiration et émerveillement, une « awe » pour reprendre le terme anglais, phénomène qui a été étudié récemment par un chercheur américain, Dacher Keltner (6). David Hay a mené également une enquête sur la vie spirituelle des gens ordinaires. D’autre part, en collaboration avec Rebecca Nye, David Hay a conduit une recherche qui a mis en évidence la présence d’une vie spirituelle vive et fraiche chez les enfants. A partir des résultats de cette recherche montrant comment les enfants se sentaient reliés à la nature, aux autres personnes, à eux-mêmes et à Dieu, David Hay en est venu à se représenter la spiritualité enterme de « conscience relationnelle ». Dans une proximité avec Alister Hardy, David Hay rappelle la position de celui-ci, c’est-à-dire un ancrage biologique de la spiritualité. Selon Alister Hardy,  « tous les hommes, membres de l’espèce Homo Sapiens, ont un potentiel de conscience spirituelle ». Hardy perçoit cette conscience comme un véritable sens. « Ce sens a naturellement été sélectionné dans le processus de l’évolution parce qu’il nous aide à survivre ».

Chercheuse américaine en psychologie et en neurosciences, Lisa Miller a publié récemment un livre intitulé : « The awakened brain. The new science of spirituality and our quest for an inspired life » (le cerveau éveillé. La nouvelle science de la spiritualité et notre quête pour une vie inspirée). Comme psychologue, Lisa Miller a perçu les insuffisances de la psychothérapie classique. Elle s’est donc engagée dans une pratique prenant en compte le besoin de sens et la dimension spirituelle. Finalement, elle a réussi à obtenir les moyens pour réaliser une recherche concernant le rapport entre la dépression et l’expérience spirituelle. Un collègue a entrepris une recherche dans le même sens. Au total, il s’est avéré qu’un bas niveau de symptômes dépressifs était associé à un haut niveau de spiritualité.

« Cette recherche révolutionnaire a suggéré que la spiritualité n’est pas juste une croyance, mais quelque chose avec lequel chacun de nous est né avec la capacité d’en faire l’expérience ». Lisa Miller a poursuivi sa recherche et, en 2012, un projet de recherche, mettent en œuvre l’imagerie à résonance magnétique, a abouti en apportant des conclusions spectaculaires. Il y avait une différence éclatante entre le cerveau associé à une faible spiritualité et le cerveau associé à une spiritualité élevée.

C’est une avancée révolutionnaire. « Le livre de Lisa Miller révèle que les humains sont universellement équipés d’une capacité pour la spiritualité et qu’en résultat, nos cerveaux deviennent plus robustes et plus résilients. Le « Awakened brain » combine une science en pointe (de l’imagerie par résonance magnétique à l’épidémiologie) à une application sur le terrain pour des gens de tous les âges et de tous les genres de vie, en éclairant la science surprenante de la spiritualité et comment mettre celle-ci en œuvre dans nos propres vies ».

Comme le montre ce panorama en quelques dizaines d’années, notre perception de la spiritualité a complètement changé. La spiritualité s’est imposée. D’une part, la pratique spirituelle est maintenant répandue, mais elle est aussi reconnue à travers les recherches des historiens, des sociologues et des psychologues. La capacité pour la spiritualité apparait comme ancrée dans la nature humaine.

La montée de la spiritualité au cours des dernières décennies entraine un changement profond dans les mentalités qui n’a pas échappé à Fritz Lienhard, théologien à Heidelberg, auteur d’un livre sur « l’avenir des Eglises protestantes » (8).

« La crise des églises a des causes précises et ne relève pas de la fatalité. Certains indices montrent plutôt que la spiritualité prend des formes plus individuelles liées à l’expérience intérieure. Cette situation représente un défi pour la théologie et les Eglises. Dans la tradition chrétienne, c’est le Saint Esprit qui suscite l’expérience religieuse, tout en renvoyant à la parole instituée par le Christ ». Fritz Lienhard évoque le développement des nouvelles religiosités. « Les nouvelles religiosités refusent de distinguer ce qui relève de la religion et ce qui n’en relève pas. La spiritualité qui lui est liée se retrouve dans tous les domaines de l’existence, s’adressant à l’être humain en entier ». Un des chapitres de ce livre est intitulé : « Humanisme et énergie cosmique ».

« Au centre des nouvelles religiosités, il y a la transformation de l’individu grâce à la conscience qui confère de nouvelles forces, ouvre à de nouvelles dimensions de l’esprit et de la nature ».  Cette conception du monde contribue à une modification de la perception de Dieu : « Dieu, le monde et l’être humain constitue un ensemble. Une énergie circule entre l’être humain, la nature et le cosmos. La notion d’expérience spirituelle devient première… ». Dès lors, Fritz Lienhard met en évidence l’importance et la fréquence des expériences religieuses et spirituelles, lesquelles ont été ici déjà évoquées dans notre présentation des recherches d’Alister Hardy et de David Hay. « Les sociologues observent l’accroissement d’une expérience qu’ils qualifient de religieuses  En 2013, 24% des personnes interrogées en Europe disent qu’elles expérimentent souvent ou très souvent une intervention de Dieu ou du divin. 17% parlent d’expérience de communion avec le divin… ».

 

Un chemin à la découverte de la vie spirituelle

A travers la recherche, nous avons découvert qu’à notre époque, la spiritualité est un phénomène essentiel.

Dans ce contexte, chacun suit son chemin. Dans son livre : « Invitation à la spiritualité », Alexandra Puppinck Bortoli, en personne sensible et cultivée, nous fait part de ses expériences et ainsi elle nous suggère un chemin. « Cet essai poétique et philosophique nous propose d’explorer cette part intime et mystérieuse de nous-même à partir d’expériences sensibles que nous offrent la poésie, la beauté, l’art, le sacré, la religion, le souffle, la vie… autant de chemins foisonnants qui laissent entrevoir un horizon spirituel ». L’auteur reprend le constat sur l’ancrage de la spiritualité dans la nature humaine. « Tout semble déjà là ! La conscience spirituelle est enracinée dans la nature humaine. Il nous suffit de nous tourner vers elle et de nous mettre à l’écoute de la vie. Plus réceptif à sa beauté, nous découvrirons alors que la vie est bien plus vaste et plus belle que nous le pensions ; nous pressentirons la présence d’une vie derrière la vie qui ne demande qu’à être dévoilée et vécue. Ce rapport spirituel à la vie pleinement vivante est une source inépuisable d’émerveillement et de joie » ( p 11-12). Ce livre nous parait particulièrement dense parce qu’il entremêle expérience, réflexion et d’abondantes références à de grands penseurs et à de grandes œuvres, aussi envisagerons-nous ici deux chapitre seulement en vue de faire entrevoir la démarche de l’auteure : l’art et l’arrière-monde.

 

Une ouverture spirituelle à travers l’art

Le chapitre sur l’art est introduit par une citation de Paul Valery : « Ce que nous appelons une œuvre d’art est le résultat dont le but fini est de provoquer chez quelqu’un des développements infinis ». L’auteure voit dans la transformation de la matière à travers l’art une signification spirituelle. « Obstinément, les artistes – dont les sculpteurs bien sûr –  se confrontent à la matière pour en faire jaillir une forme ou une âme, la vie visible et invisible qui l’anime – travail de spiritualisation de la matière. Démarche qui tâtonne, qui cherche et qui se sait toujours inachevée. Démarche amoureuse et féconde, jamais épuisée » ( p 63). L’expérience artistique nous transforme. « La contemplation d’une œuvre nous entraîne dans un double mouvement : un mouvement d’intériorisation tissé d’émotion, de  méditation et de questionnement, et un mouvement d’élévation au-delà de soi-même et de ses représentations. En ouvrant de nouveaux espaces, ce cheminement spirituel nous transforme ».

L’auteure aborde une forme d’art originale : l’art asiatique. « L’art asiatique  nous fait pénétrer dans des espaces éminemment spirituels. Des peintes comme Zao Wou-KU ou Fabienne Verdier captent l’impalpable du monde : le souffle primordial, la vitalité et le dynamisme des éléments » ( p  64). Le commentaire se poursuit : « A n’en pas douter, leurs oeuvres sont le fruit d’une éducation des sens, d’une écoute, d’une ouverture, d’un abandon dans une longue contemplation de l’essence des éléments. Ces artistes se laissent habiter par les forces fondamentales du cosmos ; ils absorbent ls puissances énergétiques de la nature pour nourrir leurs corps et leurs esprits et nous en offrir une quintessence. Leurs oeuvres colorées rendent visibles l’énergie invisible du vivant sur la toile…. Le spectateur vient se nourrir en contemplant ces œuvres, il ressent l’énergie vitale –  sorte d’éveil – qui lui rappelle qu’il est d’une même essence et d’une même famille du vivant –  appartenant au grand tout, nous dit Fabienne Verdier » ( p 65).

L’auteure nous fait entrer également dans l’apport de l’art abstrait. « La démarche très dépouillée des Asiatiques s’apparente sur certains points à celle de l’art abstrait et de l’un de ses initiateurs Vassily Kandinsky, peinte de la couleur et des formes. Cet artiste, à la charnière du XiXè et du XXè siècle, est contemporain du philosophe Edmund Husserl, le fondateur de la phénoménologie. Ce courant de pensée a pour ambition de décrire les phénomènes, c’est-à-dire ce qui se présente à la conscience » ( p 67). « Retourner à l’expérience pure et intacte d’aller à la chose même ! ». Tel est le mot d’ordre de la phénoménologie portée par Husserl. Cette approche prône une manière d’être en relation avec le monde tout autre que l’attitude scientifique t matérialiste qui s’impose à cette époque, attitude qui observe le monde de manière extérieure et matérielle et qui dicte s propre lecture du réel en négligeant l’expérience intérieure d la conscience » ( p 68). C’est dans ce contexte que l’auteure envisage l’apport de l’art abstrait et, tout particulièrement l’œuvre de Kandinsky. « L’art abstrait entre en connivence avec la phénoménologie. Il illustre artistiquement ce mouvement phénoménologique qui observent les  choses telles qu’elles se donnent à voir à notre conscience, dans leur pureté et leur essence, dans leur être même. Kandinsky, peintre russe orthodoxe, pratique l’abstraction…. L’artiste est en quête de l’âme cachée des choses. Chacun « me montrait son visage, son être intérieur, l’âme secrète qui se tait plus souvent qu’elle ne parle » dit-il. Kandinsky reconnait cette même aptitude chez Cézanne, pourtant figuratif » ( p 69).

L’auteure évoque la manière dont Kandinsky envisage son œuvre. « Une œuvre est bonne lorsqu’elle est apte à provoquer des vibrations dans l’âme, car l’art est le langage de l’âme » ( p 70).  Alexandra Puppinck Bortoli décrit la fonction spirituelle de l’art : « Côtoyer l’art est essentiel pour l’homme. Chaque couleur, chaque note de musique provoquent une vibration qui enrichit notre vie spirituelle. Et plus l’âme flirte avec l’art, plus elle l’aime et le désire. « l’art existe là où il y a une soif insatiable pour le spirituel, l’idéal. Une soif qui rassemble tous les êtres humains, affirme ainsi le cinéaste Andréï Tarkovski » ( p 71).

Alexandra Puppinck Bortoli nous explique ensuite comment la musique correspond à son aspiration spirituelle.  « Lorsque les mots nous manquent, « la musique élève la voix et dit des choses qu’on ne peut pas exprimer ». Elle tente d’exprimer l’ineffable et l’impalpable, ce je-ne-sais-quoi, « invisible présence spirituelle » qui nous enveloppe et se laisse découvrir comme fondement de la beauté de l’existence. Telle est la tâche de la musique nous dit Jankélévitch, poète de l’ineffable ». L’auteure précise en quoi la musique a une dimension spirituelle. « Les qualités spirituelles des chefs-d’oeuvre en musique tiennent à  l’expérience de l’harmonie, de la pureté, et de la beauté ; elles sont liées à la perception de profondeur, de verticalité, d’immensité, d’intensité et parfois même au sentiment d’éternité qu’elles provoquent en nous – vibration ressentie comme originelle et universelle –  sentiment d’élévation qui ouvre à bien plus grand que celui qui a composé ou interprété l’œuvre » ( p 74). On retrouve dans les effets un potentiel d’expérience spirituelle tel que nous l’avons précédemment rapporté dans notre présentation de la recherche sur la « awe » (6). « Chacun de nous peut en faire l’expérience à condition de se mettre, de tout son être, à l’écoute. Se vit alors « une expérience mystique », une « augmentation des sens », un « accroissement d’être » pour reprendre les termes du compositeur Liszt. Sensation qui nous fait passer d’une expérience purement émotionnelle à une expérience spirituelle. Dilatation du cœur et élévation de l’âme. « La musique est la médiatrice entre les mondes sensoriel et spirituel », écrivait Gaston Bachelard ».

 

Une réalité autre : l’arrière monde

De la poésie au religieux, Alexandra Puppinck Bortoli poursuit son parcours en un chapitre récapitulatif :  L’arrière-monde. Au départ, elle s’y exprime à travers un chant d’allégresse dans la découverte des merveilles qui nourrissent une vie spirituelle : « passer de la vie à la vie spirituelle, c’est se mettre à l’écoute du « chant du monde » (expression empruntée au titre d’un livre de Jean Giono) et se laisser séduire par son charme irrésistible. Sa mélodie est une épiphanie, une manifestation de la beauté et de la vérité, de la vie derrière toute chose. Sentir l’esprit de vie – qui est une réalité vivante, une valeur absolue et un infini présent dans la vie – nous fait aimer la nature, les êtres humains et le divin » ( p 132).  Comme nous l’avons déjà évoqué à travers les recherches sur la spiritualité (5), l’émerveillement peut déboucher sur une expérience spirituelle. Prendre le temps de contempler la nature est la porte ouverte à l’émerveillement. Il se peut parfois que nous vivions un accord parfait avec elle, une unité, des « noces » nous disait Albert Camus, qui peuvent mener à un basculement des sens, une immersion sensible, une fusion et une dissolution dans les éléments » ( p 133) L’auteure évoque l’extase cosmique appelée aussi « sentiment océanique ». Aujourd’hui,  une recherche recueille et décrit ces expériences spirituelles qui participent à la conscience écologique (9).  « Cette expérience de révélation, de transcendance et d’incarnation intime dans l’immanence du monde est celle de l’infini qui se manifeste dans le fini. Ce sentiment de pleine existence peut tous nous saisir – selon différentes intensités –  à la faveur d’une promenade en forêt, d’un coucher de soleil ou encore lors d’une nuit d’orage… Cette rencontre avec la vie derrière la vie ou, dit autrement, avec l’esprit de la vie qui nous saute aux yeux et nous saisit, nous dit combien notre existence mérite d’être vécue » ( p 135). Oui, on peut être « ébloui par l’émerveillement » (10). L’auteure poursuit en tournant son regard vers l’humain. « L’esprit de la vie se révèle également dans les relations amicales et amoureuses…. Selon le philosophe Emmanuel Levinas, le visage de l’autre est une altérité qui ouvre au-delà… Nous sommes chacun un infini et une éternité qui s’ouvre à l’autre… » ( p 136-137) ;

Alexandra Puppinck Bortoli nous fait part enfin de sa vision du divin qui s’exprime et se révèle à tracer le chant du monde. « Lorsque l’esprit de la vie se fond à l’esprit divin, nous sommes invités à vivre une expérience spirituelle, métaphysique et mystique. On découvre alors qu’au-delà de soi-même, de l’autre et de la nature, il existe « autre chose » :  un ineffable qui nous dépasse et vient d’ailleurs. On pressent un mystère, un je-ne-sais-quoi,, une Présence au cœur de la vie, une mélodie de grande beauté qui chante l’Amour, l’Absolu et l’Infini.  Le divin par son Esprit anime, et le monde, et les êtres et la vie elle-même (11)…. Le divin, pour l(homme de foi, est cette Vie derrière la vie…La foi nait de l’intuition d’une  présence, elle se concrétise par l’expérience de la rencontre avec cette Présence à la fois intime et infinie :  «  C’est le cœur qui sent Dieu et non la raison. Voilà ce que c’est la foi. Dieu sensible au cœur et non à la raison (Blaise Pascal) » (p 139). Si « L’arrière monde » est envisagé par Friedrich Nietzche comme « un concept désignant les mondes supérieurs qui auraient pour vocation de dévaloriser l’ici-bas », l’auteure, dans la foulée de sa découverte expérientielle, l’envisage au contraire comme une résultante du coeur et de la conscience spirituelle ( p 140-145). L’auteure débouche sur une réflexion portant sur la « conscience spirituelle ». « Au-delà de l’intelligence, par une écoute et une présence intime au monde, la vie spirituelle naît de la découverte qu’il existe au cœur de la vie une cohérence interne qui nous échappe et nous dépasse : l’esprit de la vie, autrement dit la beauté et la vérité de la vie qui s’y révèlent… Avoir foi en l’ineffable de la transcendance – quelqu’en soit la nature – c’est s’abandonner à croire, et habiter l’ignorance avec confiance et émerveillement … Dans son rapport au monde visible et invisible, la spiritualité, au sens de la vie de l’esprit, pousse à développer un lien intime au réel, à la « chair du monde », nous dit MerleauPonty. Par une attention particulière aux êtres et aux choses, elle nous ouvre à l’invisible…. » ( p 147-148).

Nous assistons aujourd’hui à une profonde transformations des mentalités qui se manifeste notamment dans l’expansion de la spiritualité. Une historienne américaine, Diana Butler Bass, met en évidence une évolution profonde dans la manière de croire : « Ce qui apparait comme un déclin de la religion organisée indique en fait une transformation majeure dans la manière dont les gens comprennent Dieu, en font l’expérience. Le Dieu distant de la religion conventionnelle cède la place à un sens plus intime du sacré qui irrigue le monde. Ce glissement d’un Dieu vertical vers un Dieu qui se trouve à travers la nature et la communauté humaine est le cœur de la révolution spirituelle qui nous environne et interpelle non seulement les institutions religieuses, mais aussi les institutions politiques et sociales ». Face à l’écart qui se creuse entre la religion organisée et une un foi en phase avec l’expérience, le théologien Jürgen Moltmann apporte une réponse  théologique :  Si « une forme de christianisme a pu apparaitre comme un renoncement à une vie pleinement vécue dans le monde », Molmann nous présente au contraire « un Dieu vivant qui suscite la plénitude de vie ». Dieu n’est pas lointain. Il est présent et agissant… Moltmann nous présente une spiritualité dans laquelle « la vie terrestre est sanctifiée et qui se fonde sur la résurrection de Jésus-Christ » (12). Et Jürgen Moltmann nous présente une théologie de l’Esprit saint qui va de pair avec une théologie de l’expérience : « L’expérience de Dieu qui donne vie et qui  est faite dans la foi du cœur et dans la communion de l’amour, conduit d’elle-même au-delà des frontières de l’Eglise vers la redécouverte de ce même Esprit dans la nature, les plantes, les animaux et dans les écosystémes de la nature » (13)

Aujourd’hui, l’expansion de l’expérience spirituelle requiert effectivement l’éclairage d’une théologie de l’Esprit. C’est également la conclusion de Fritz Lienhard dans son livre sur l’avenir des Eglises protestantes (8).

Dans son « invitation à la spiritualité », Alexandra Puppinck Bortoli a également abordé le thème de l’expérience dans le cadre de la religion et du sacré, elle rapporte une expérience spirituelle dans sa présence lors d’une liturgie orientale à  l’église Saint-Julien-le-Pauvre ( p 77-81) et, dans son interview sur le site Zeteo (1), elle exprime sa foi chrétienne. Manifestement dans son livre, elle sait reconnaitre l’expérience spirituelle dans une vaste gamme de contextes de la poésie à l’art jusqu’à l’émerveillement en pleine nature. A travers son expérience et une culture francophone, elle balise un chemin pour éclairer notre démarche spirituelle.

J H

 

  1. Alexandra Poppinck Bortoli.  Invitation à la spiritualité. Un pas de plus. Cerf, 2024.  L’auteure est interviewée au sujet de son livre sur le site Zeteo : https://www.youtube.com/watch?v=eFTQUfetDT8
  2. La spiritualité parmi les américains : https://www.temoins.com/la-spiritualite-parmi-les-americains/
  3. Reliance : une vision spirituelle pour un nouvel âge : https://vivreetesperer.com/reliance-une-vision-spirituelle-pour-un-nouvel-age/
  4. Spiritualité post-moderne et culture de l’individualisme. Une transformation des mentalités : https://www.temoins.com/spiritualite-postmoderne-culture-de-lindividualisme-transformation-mentalites/
  5. La vie spirituelle comme une « conscience relationnelle ». Une recherche de David Hay sur la spiritualité d’aujourd’hui » : https://www.temoins.com/la-vie-spirituelle-comme-une-l-conscience-relationnelle-r/
  6. Comment la reconnaissance et la manifestation de l’admiration et l’émerveillement exprimées par le terme « awe » peut transformer nos vies ? : https://vivreetesperer.com/comment-la-reconnaissance-et-la-manifestation-de-ladmiration-et-de-lemerveillement-exprimees-par-le-terme-awe-peut-transformer-nos-vies/
  7. Comment une pratique spirituelle fait barrage à la dépression, apparait positivement dans l’activité du cerveau et engendre une vie pleine : https://vivreetesperer.com/the-awakened-brain/
  8. Dans le contexte d’une nouvelle culture, quel avenir pour les églises protestantes ? : https://www.temoins.com/dans-le-contexte-dune-nouvelle-culture-quel-avenir-pour-les-eglises-protestantes/
  9. La participation des expériences spirituelles à la conscience écologique : https://vivreetesperer.com/la-participation-des-experiences-spirituelles-a-la-conscience-ecologique/
  10. Ebloui par l’émerveillement : https://vivreetesperer.com/ebloui-par-lemerveillement/
  11. Contempler la création : https://vivreetesperer.com/contempler-la-creation/
  12. Dieu vivant, Dieu présent, Dieu avec nous dans un monde où tout se tient : https://vivreetesperer.com/dieu-vivant-dieu-present-dieu-avec-nous-dans-un-univers-interrelationnel-holistique-anime/
  13. Un Esprit sans frontières : https://vivreetesperer.com/un-esprit-sans-frontieres/

 

Un regard enchanté sur la Californie

Christina’s world

 Au fil des années, dans l’attrait pour les photos, j’en ai pu découvrir de très belles à travers la fréquentation du réseau des sites Flickr. Donc, à plusieurs reprises, j’ai choisi de présenter sur ce blog des sites dont j’admirais les photos (1), et parfois même au delà, des sites pour lesquels je ressentais des affinités avec l’expression de la personne auteure. Pour ce dernier cas de figure, j’ai mis en évidence les sites de Julie Falk (Etats- Unis. Michigan) (2), Paula W (Angleterre) (3), Gloria Castro (Espagne. Valencia) (4).  Ce parcours, à la découverte de photos du monde entier,  est source d’émerveillement. La beauté nous apparaît dans des pays géographiquement très différents. Aujourd’hui, nous présentons le site : « Christina’s world » (le monde de Christina) en Californie (5).

L’auteure se présente comme une photographe de longue date. Elle nous apprend la diversité de ses intérêts : art,  écriture créative, poésie, lecture, vie au quotidien, spiritualité et développement personnel… Et, en effet, la culture de Christina se manifeste avec bonheur dans la manière dont elle exprime un sens à propos de ses photos. Autre qualité : Christina nous raconte souvent le contexte dans lequel elle a pris ses photos en nous partageant ses efforts, ses joies, ses ressentis autant que l’état du climat qui prévaut à ce moment.

Christina prend en photo des sujets variés. Elle partage avec nous de superbes portraits, mais elle nous enchante également et surtout par de magnifiques photos de nature, et tout particulièrement par la merveilleuse vision des plages californiennes. Ces photos de mer, de terre et de ciel se distinguent par la beauté et l’harmonie des coloris, l’agencement des lignes d’horizon, et la présence de quelques êtres vivant, quelques oiseaux en vol et des humains bien sûr en différentes compagnies et en différentes situations. On ne se lasse de se gorger de la beauté de ces photos et d’y voir les merveilles de  la création.
Voici quelques unes de ces photos qui vont nous amener à regarder sans nous lasser ce merveilleux site.

 

Les couleurs sont les sourires de la nature

« Suivez vos rêves
Ils connaissent le chemin » (anonyme)

 

Inspire, calme, guérit

« L’océan inspire, le coucher du soleil calme et l’air salé  guérit ».

Christina nous parle des pélicans : « Les pélicans ne sont pas comme les aigles qui volent seuls . Ce sont des oiseaux sociaux et ils volent en groupe…. C’est beau de les voir ensemble voler au dessus de l’océan sur une longue distance … »

 

Offrande d’amour

« C’est ce cœur d’or
Et cette âme poussière d’étoile
Qui fait ta beauté »
r.m. broderick

Comme Tu es grand

«O Seigneur, mon Dieu
Quand avec émerveillement, je considère les mondes que tes mains ont faits
Quand je vois les étoiles, quand j’entends le tonnerre
Ta puissance à travers l’univers s’est déployée »
Cantique chrétien basé sur une mélodie suédoise traditionnelle et un poème écrit par Carl Gustav Boberg (1859-1940)

 

Quel monde merveilleux !

« Je vois les arbres en vert, et aussi les roses rouges
je les vois fleurir pour vous et pour moi
Et je me dis : Quel monde merveilleux !
Un chant de Louis Armstrong

 

Un moment précieux dans le temps

« Si vous manquez le moment présent
Si vous manquez votre rendez-vous avec la vie
C’est très sérieux ».
Thich Nhat Hanh

 

Gentillesse

« Au delà d’une saine discipline
Sois gentil avec toi
Tu es un enfant de l’univers
Pas moins que les arbres et les étoiles
Tu as le droit d’être là ».
Max Erhmann

 

La mer, le ciel et le goéland

« Ma paix, je vous la laisse. Ma paix, je vous la laisse
Je ne vous la donne pas comme le monde la donne
Que vos cœurs ne se troublent pas et ne soient pas effrayés »
Jésus. Bible. Jean 14-27

 

Au commencement

« Rencontre moi là où le ciel touche la mer
Attend moi là où le monde commence ».
Jennifer Donnelly

 

L’art de la nature

« L’art prend du temps
Monet a fait pousser ses jardins
Avant de les peindre »
Atticus

Au fur et à mesure que nous avons parcouru les albums, notre émerveillement est allé en grandissant. Car les photos témoignent d’une vie au rythme des saisons, abreuvée par la beauté des paysages et de la végétation de la Californie du sud, et plus particulièrement, par l’harmonie des couleurs et des formes qui apparait en parcourant les plages de l’océan Pacifique. En photographe expérimentée, ,Christina traduit  la variation de la lumière et la délicatesse des coloris dans des photos qui rejoignent parfois les chefs d’œuvre de la peinture.

Christina ne sait pas seulement gouter et exprimer les merveilles de la nature ou saisir, dans des portraits, une existence humaine, elle sait aussi en parler à travers des commentaires d’une vaste littérature de Gandhi à Einstein. La réflexion philosophique se conjugue avec de superbes poèmes et des jaillissements bibliques. Nous y trouvons sagesse de vie et émerveillement en terme d’admiration, de reconnaissance et de louange. En Christina’s world, nous avons découvert un trésor.

J H

 

  1. A la découverte des grands espaces américains : https://vivreetesperer.com/a-la-decouverte-des-grands-espaces-americains/ Comme les oiseaux du ciel : https://vivreetesperer.com/comme-les-oiseaux-du-ciel/                   Couleurs et formes : merveilles en macrophotographie : https://vivreetesperer.com/couleurs-et-formes-merveilles-en-macrophotographie/  Les roses de la paix : https://vivreetesperer.com/les-roses-de-la-paix/                      Et aussi les sites de July Falk, Paula W et Gloria Castro
  2. Lumière du matin : https://vivreetesperer.com/la-lumiere-du-matin/ Effets de lumière dans une campagne bocagère : https://vivreetesperer.com/effets-de-lumiere-dans-une-campagne-bocagere/
  3. Le jardin de Paula : https://vivreetesperer.com/le-jardin-de-paula/
  4. Un regard lumineux dans un pays lumineux : https://vivreetesperer.com/un-regard-lumineux-dans-un-pays-lumineux/
  5. Christina’s world : https://www.flickr.com/photos/chrissie_bee/

 

 

« Animal » de Cyril Dion

Quand des voix innovantes et compétentes nous ouvrent de nouveaux chemins pour un monde écologique

Réalisateur du film : « Demain » (1), qui, en son temps, ouvrit les esprits à une dynamique de société participative et écologique, Cyril Dion réalise aujourd’hui un second long métrage : « Animal », qui nous éveille à la vision d’un monde fondé sur la biodiversité.

Le film réalise le projet décrit dans la page de couverture du livre correspondant : « Imaginez que vous puissiez voyager sur quatre continents pour rencontrer certains des plus éminents et des plus passionnants biologistes, climatologues, paléontologues, anthropologues, philosophes, économistes, naturalistes et activistes qui cherchent à comprendre pourquoi les espèces disparaissent, pourquoi le climat se dérègle et surtout comment inverser la tendance ». Le livre : « Animal » (2) rapporte l’ensemble de témoignages, des informations et des idées recueillies « dans une série de rencontres effectuées lors du tournage du film ».

« Pendant 56 jours, Cyril Dion est parti avec une équipe de tournage et deux adolescents très engagés, Bella Lack et Vipulan Puvaneswaran (p 17), l’une anglaise et l’autre français de parents nés au Sri Lanka. Avec Cyril Dion, ces deux jeunes ont posé leurs questions. « Faire ce voyage avec eux fut une expérience merveilleuse et bouleversante. Pour autant, dans la retranscription des entretiens, j’ai choisi de mêler nos trois voix en une pour interroger nos interlocuteurs ». « Leur présence active a permis de mieux comprendre comment leur génération aborde un double défi écologique » (p 21). Le sous-titre du livre témoigne de cette intention : « Chaque génération a son combat. Voici le notre ».

« Si le climat est devenu un sujet incontournable, une autre crise écologique sans doute aussi grave est encore largement absente des conversations et de nombreuses politiques publiques : « la destruction accélérée du vivant » (p 14). Les chiffres sont accablants. De nombreuses espèces sont menacées ou en danger d’extinction. « Notre planète se dépeuple de ses habitants non humains sauvages » (p 15). Aussi, ce livre est un manifeste en faveur de la biodiversité, en faveur de la présence des animaux. Et il s’efforce de répondre aux questions correspondantes : « Pourquoi des espèces disparaissent-elles ? Que pouvons-nous faire pour l’éviter ? Et pourquoi y sommes-nous pour quelque chose ? (et la réponse est oui). Avons- nous le droit de faire ça ? A quoi servent toutes ces espèces ? Doivent-elles servir à quelque chose pour que nous décidions de les protéger ou d’arrêter des les éradiquer ? Comment renouer une relation féconde avec le vivant ? Quelle est notre place parmi les autres espèces ? Et, à quoi servons-nous dans l’univers du vivant ? » (p 17).

« Nous avons besoin de regarder en face ce que notre planète traverse… Nous avons besoin de lucidité, de courage, de solidarité, d’élan, de sens et de désir. De la lucidité peut naitre le choc et c’est ce choc qu’il nous appartient désormais de faire » (p 23). A travers l’expérience et l’expertise des personnalités interviewées, ce livre est si dense et si riche qu’il n’est pas possible d’en rendre compte. Nous essaierons seulement ici de rapporter quelques moments privilégiés où, parmi d’autres, un horizon se découvre, une perspective apparaît. Ce sont quelques brèves notations qui ouvrent notre esprit à une dimension nouvelle.

 

Pourquoi les espèces disparaissent ?
Rencontre avec Anthony Barnosky (p 27-36)

Anthony Barnosky, géologue, paléontologue et biologiste qui a enseigné, toute sa carrière, à l’Université de Berkeley, répond à nos questions (p 27-36). Il distingue cinq causes majeures de l’extinction des espèces : la destruction des habitats, la surexploitation des espèces, la pollution, les espèces invasives, et les changements climatiques » (p 29). La menace aujourd’hui réside non seulement dans des changements progressifs, mais dans l’apparition de « points de bascule » (p 32). A la suite de cet entretien, laissant de côté le dérèglement climatique, « un phénomène si considérable qu’il nécessiterait, à lui seul, un film ou un livre, la recherche de l’équipe s’est centrée sur la pollution, la surexploitation des espèces et la disparition des habitats ».

 

Se passer des pesticides
Rencontre avec Paul François (p 38-58)

Paul François est un agriculteur qui, suite à un grave accident avec un herbicide, a converti ses 240 hectares en agriculture biologique. A cette échelle, un tel changement est un exploit. Paul François nous raconte son changement de mentalité et de pratique. Il lui a fallu accepter la présence de l’herbe plutôt que de la supprimer systématiquement. Plutôt que d’acheter des produits chimiques, Paul François investit dans la mécanisation et dans la main d’œuvre. Et il a vu réapparaitre les hirondelles qui, en se nourrissant des insectes, remplacent les pesticides. Les abeilles reviennent également. En même temps, Paul François nous dit comment « il gagne mieux sa vie en bio qu’en conventionnel ». Suite à sa maladie professionnelle, Paul François a remporté une bataille juridique contre Monsanto. C’est dire son courage et sa persévérance. La transformation de son exploitation est un exploit remarquable.

 

Arrêter de parler et agir
Rencontre avec Afroz Shah (p 65-75)

Afros Shah est un jeune avocat indien qui a engagé la lutte contre le plastique répandu sur une grande plage à Mumbaï. Une grande mobilisation pour le nettoyage s’en est suivie. C’est une action de terrain. Voilà une action qui évoque la responsabilité qui incombe à chacun de nous. « C’est le raisonnement que s’est tenu Afroz. Et il se trouve qu’il est à l’origine, par son seul engagement, d’un considérable mouvement de nettoyage du plastique à Mumbaï, qui a inspiré des milliers et peut-être même des millions de personnes en Inde et dans de nombreuses régions du monde » (p 71).

 

La maternité d’un élevage intensif
Rencontre avec Laurent Hélaine et Philippe Grégoire
(p 77-96)

Cette visite à un élevage intensif suscite en nous un effroi et un écœurement. A cette occasion, la question de la consommation de la viande dans l’alimentation est posée. Cyril Dion ouvre la réflexion : « Si nous voulons réduire considérablement notre consommation de viande, il serait sans doute plus efficace de le faire à travers une mesure structurelle emblématique qui, à mon sens, ferait honneur à l’humanité : bannir l’élevage en cage, mais également en bâtiment fermé sans accès à l’extérieur comme le propose le référendum pour les animaux… Interdire ce type d’élevage aurait la vertu de cesser d’infliger ces terribles conditions de vie à des animaux, mais également de diminuer mécaniquement la quantité de viande que nous pourrions consommer » (p 95-96).

 

Des lois pour transformer la société
Rencontre avec Claire Nouvion et Matthieu Colléter
(p 98-125)

On parle ici des actions volontaires pouvant exercer une influence. On a besoin de lois pour changer la donne. Face aux lobbys, une conscience politique est nécessaire. Des associations s’emploient avec persévérance à obtenir des changements législatifs. C’est le cas de l’association Bloom où travaillent Claire et Matthieu, et qui intervient au niveau européen. Ainsi, elle est parvenue à gagner une bataille contre la pêche en eau profonde. C’est une victoire importante, mais il a fallu des années pour y parvenir alors que les nouvelles techniques de pêche ravageaient les fonds sous-marins. A ce propos, Cyril Dion nous décrit les coulisses des pouvoirs politiques. Il nous rapporte par exemple l’expérience innovante qui a été celle de la Convention citoyenne pour le climat (p 120-123). Et comme il y a activement participé, il nous en montre également les limites, tous les obstacles auxquels les propositions de la Convention se sont heurtées. « Les groupes d’intérêt privés ont une influence disproportionnée sur les décisions publiques ». Alors, une pression de l’opinion est particulièrement nécessaire. Mais pour l’emporter, « peut-être avons nous besoin d’un autre récit de ce que l’avenir pourrait être ».

 

Le récit de la croissance et les nouveaux indicateurs.
Rencontre avec Eloi Laurent
(p 127-145)

L’ancien récit « fondé sur la croissance économique et une certaine conception du progrès est en train de nous entrainer vers l’abime ». C’est ce que nous a longuement expliqué Eloi Laurent, économiste à l’OCDE et enseignant à Sciences Po Paris et à l’université de Stanford en Californie. Considérant la relation entre économie et écologie, Eloi Laurent a mis l’accent sur l’interaction entre la crise des inégalités et la question écologique en les considérant comme liées et jumelles » (p 127). Quel type de dynamique sociale conduit aux crises écologiques ? Quelle est la source du problème ? « Il est désormais absolument clair que la poursuite de la croissance économique telle qu’elle est conçue aujourd’hui, engendre la destruction des écosystèmes » (p 129). « Avec ‘Les limites de la croissance’, écrit au début des années 1970, l’équipe autour de Dennis et Donella Meadows avait une incroyable intuition de ce qui allait se passer » (p 130). Selon Eloi Laurent, les concepts de croissance et de décroissance ne sont plus pertinents. « Il faut se concentrer sur le bien-être humain. Ce qui compte pour les gens, c’est la santé et les liens sociaux ». Eloi Laurent propose la santé comme l’indicateur fondamental qui doit et qui va remplacer la croissance au XXIe siècle (p 153). « Malheureusement, que ce soit le lien social ou la santé, ces deux indicateurs sont mis à mal par l’organisation actuelle du monde ». Eloi Laurent répond également à des questions sur le capitalisme. Ce qui importe, à son avis, c’est que la puissance publique ne soit pas au service du marché » (p 137). Par ailleurs, des pays comme la Chine et l’URSS ont de très mauvais bilans écologiques indépendamment du capitalisme. Au contraire, Eloi Laurent cite « des petits pays gouvernés par des femmes, qui ont décidé de sortir de la croissance : la Nouvelle-Zélande, la Finlande, l’Islande et l’Ecosse… On peut tout à fait décider que la richesse, c’est la santé, l’éducation, la biosphère… C’est en partie ce qu’ont fait les pays nordiques » (p 138).

 

La nature n’existe pas
Rencontre avec Philippe Descola
(p 147-173)

Cyril Dion décrit ensuite son champ de recherche. « Pour élaborer les directions des projets économiques et politiques, il nous faut adhérer à une lecture (forcément subjective), commune du  monde… (p 143) Ce dont nous avons besoin n’est pas de prouver fièrement que nous sommes capables d’accomplir des exploits, mais de détourner le fleuve pour que tout le monde aille dans la même direction. Mais, pour cela, nous avons besoin d’un autre récit collectif que celui de la croissance. Qui donne suffisamment de sens et de perspective à l’humanité pour orienter différemment son destin » (p 145). A partir de cet instant, nous avons réorienté notre quête. « Plutôt que de continuer à chercher des réponses techniques aux cinq causes de l’extinction dans une logique quelque peu mécanique, nous nous sommes intéressés à ce qui pourrait devenir les fondements d’un autre récit. Pour cela, nous sommes allés rencontrer Philippe Descola, sans doute l’un des anthropologues vivants les plus respectés, disciple de Claude Lévy-Strauss et auteur du livre : « Par delà. Nature et culture » (p 146).

Philippe Descola critique le concept de nature. « La nature, c’est essentiellement, ce qui est en dehors de nous les humains ». Elle est ce qui nous permet de regarder de haut tout ce qui est non humain… » (p 151). « La nature est devenue un élément central du monde des Européens ». Ce terme n’existe pas dans d’autres langues. En Europe, nous avons voulu établir « une frontière entre les animaux humains et non humains fondée sur discontinuité morale et subjective » (p 152). Mais, affirme Philippe Descola, « les « signes symboliques du langage » ne sont pas les seuls moyens de communication. En Amérique, les gens pensent que les animaux non humains peuvent former des projets et réfléchir sur eux-mêmes, qu’ils ont une sorte de subjectivité que l’on pourrait appeler intériorité ». Et, pour communiquer avec les animaux, ils intègrent les signes que ceux-ci utilisent » (p 153). « Nous sommes connectés à tous les éléments du monde de façon inextricable » (p 154).

 

Nous faisons partie du monde vivant
Rencontre avec Dr Jane Goodhall (3), fondatrice de l’Institut Jane Goodhall et messagère de la paix auprès des Nations unies.
(p 174-192)

« A une époque où les femmes étaient découragées de poursuivre des études scientifiques… Jane a eu l’audace d’engager des recherches non conventionnelles – d’abord sans diplôme, puis en passant à l’Université de Cambridge – en menant la toute première étude sur les chimpanzés dans leur environnement naturel. Grâce à sa ténacité, elle a non seulement vécu une vie extraordinaire, mais elle a surtout changé notre façon de penser la relation entre les humains et les animaux » (p 171). Parce qu’elle était en phase avec la forêt, les arbres, les animaux, Jane a pu entrer en contact avec les chimpanzés et mettre en évidence leurs capacités, entre autres, l’utilisation d’outils, abolissant la frontière qui avait été établie entre cette espèce et les humains. Aujourd’hui, Jane nous appelle à une prise de conscience : « Tout au long de notre évolution, nous faisions simplement partie du monde animal. Mais maintenant que nous avons développé un intellect, et que nous savons que nous détruisons la planète, notre rôle devrait être celui de réparer les dommages ». Le message de la Genèse devrait être compris comme attribuant à l’homme un rôle d’intendant. « Un bon intendant prend soin de la terre. L’heure est maintenant venue d’utiliser notre fameux intellect pour changer les choses… » (p 188).

 

La bibliothèque du vivant
Rencontre avec Dino Martins
(p 196-221)

Le voyage de Cyril Dion s’est poursuivi dans l’exploration du vivant et la compréhension des écosystèmes. Cyril Dion et son équipe ont rendu visite à Dino Martins, biologiste et créateur du Mpala Research Center au beau milieu du Kenya. Dino Martins est aussi un entomologiste passionné par la biodiversité et « plus particulièrement par les plus petites créatures que sont les abeilles, les termites et les insectes en général dont il est un spécialiste mondial » (p 189). Dino les a accompagné dans son parc du Kenya à la découverte des éléphants, des girafes et des zèbres en liberté dans leur environnement naturel. Ce fut un émerveillement. En cette circonstance, Dino Martins a mis en évidence l’importance de la biodiversité. «  Si nous perdions trop d’espèces, la vie humaine deviendrait misérable et nous serions nous-mêmes confrontés à un risque d’extinction. Chaque espèce fait partie de cette toile de la vie où tout est interconnecté. La bibliothèque du vivant est ce qui nous maintient en bonne santé, nous nourrit, nous rend heureux » (p 198). Dino décrit la vie des écosystèmes. Comment les animaux communiquent entre eux ? Comment les différentes espèces participent à l’équilibre des écosystèmes ?
Grand observateur des fourmis, Dino nous montre leur activité incessante. Elles contribuent notamment à la dispersion des graines. « Sans elles, il n’y aurait pas de prairies. Er, sans prairies, pas d’animaux. Ces fourmis font partie de ces écosystèmes depuis des centaines de milliers d’années et elles en sont une des espèces clé » (p 214).
Dino manifeste son enthousiasme pour tout ce qui est vivant. La faune sauvage « nous rappelle la beauté, la vérité, l’amour. Voir des animaux se déplacer dans ce monde est l’une des choses les plus magiques qui soient et je ne me lasserai jamais de les observer » (p 209).

 

La cascade trophique et les superprédateurs
Rencontre avec Liz Hadley
(p 225-249)

L’exploration se poursuit dans une rencontre avec Liz Hadley, responsable de la réserve naturelle de Jasper Ridge en plein milieu de la Silicon Valley en Californie. Dans cette petite réserve, la diversité se manifeste à nouveau dans la variété des espèces qui s’équilibrent les unes les autres. Et, à cet égard, on nous montre le rôle que jouent les superprédateurs, comme par exemple les pumas « en régulant les populations de cervidés, permettent de contrer la maladie de Lyme issue des acariens qui s’attachent aux cerfs » (p 227).

 

Cohabiter avec les loups
Rencontre avec Baptiste Morizot et Jean-Marc Landry
(p 251-300)

Dans ce monde du vivant, comment les humains vont-ils se comporter, en terme de guerre ou de respect envers les espèces animales ? Aujourd’hui, en France, les loups reviennent et paraissent menaçants. Effectivement, les éleveurs sont inquiets lorsqu’ils voient les troupeaux attaqués. Cyril Dion est allé à la rencontre d’un éleveur et il a interrogé le philosophe Baptiste Morizot. Ce dernier s’est interrogé sur notre possible cohabitation avec les loups en expérimentant sur le terrain, pistant les loups et autres prédateurs, mais aussi en allant à la rencontre  des éleveurs » (p 249).
Ainsi Baptiste s’implique dans l’approche suivante. « C’est une situation dans laquelle les différents camps sont venus à cohabiter dans les mêmes territoires tout en ayant des intérêts contradictoires. Ils doivent apprendre des langages communs et trouver des moyens de se faire passer des messages, de traduire leurs comportements mutuels pour entretenir des relations moins toxiques » (p 270).
Baptiste Morizot a écrit un livre : « les diplomates ». Aujourd’hui, le monde vivant nous rappelle qu’il est bien vivant, qu’il n’a jamais été un décor et qu’il faut agir avec lui avec le même degré d’attention et de sérieux que nous le faisons avec les altérités humaines… Le grand enjeu aujourd’hui, c’est de leur rendre justice. Et donc de commencer à apprendre leur langage, à comprendre comment ils vivent pour inventer des modus vivendi. En ce sens, il s’agit de diplomatie » (p 295).

 

Coopérer avec le vivant
L’exemple du Bec Hellouin (4)
Rencontre avec Perrine et Charles Hervé-Gruyer
(p 201-215)

« Cohabiter avec le vivant, c’est non seulement le comprendre et le protéger, mais c’est aussi le moyen de collaborer avec lui ». Existe-t-il une façon d’habiter cette planète avec une logique de gagnant-gagnant avec le vivant ? Il y a bien une nouvelle logique qui émerge, notamment autour des dynamiques permaculturelles » (p 299).

« A la ferme du Bec Hellouin, on peut découvrir une des applications, de la permaculture à l’agriculture, les plus abouties du monde… La visite même du lieu est transformatrice… L’harmonie des formes, des couleurs, la diversité des cultures dans un espace si réduit, le soin apporté à la construction de chaque butte, de chaque mare, de chaque bâtiment a quelque chose de bouleversant… De cette organisation profondément intelligente peut jaillir la beauté conjuguée à l’efficacité créée par une forme de symbiose entre les différents systèmes qui coexistent » (p 300).

Charles nous raconte l’histoire de la ferme. « La création de la ferme a été une véritable aventure. Au départ, notre rêve était de vivre en harmonie avec la nature… Dans cette quête de beauté, nous avons composé l’ensemble un peu comme un tableau avec beaucoup de petits espaces… Sans le savoir, nous avons reconstitué un paysage complexe qui favorise les connexions. Puis quelque chose de magnifique s’est produit. On cherchait la beauté et la nature nous a offert un cadeau formidable : la productivité » (p 303). « Cette ferme fait 20 hectares », nous  dit Perrine, « mais nous nous contentons d’en cultiver 5, car nous faisons tout à la main ou avec un cheval de trait… Une culture sans engrais, sans pesticide, sans produit chimique ou de synthèse » (p 302). Charles nous décrit une trajectoire de découverte : « Au fil des ans, nous avons découvert qu’en faisant tout à la main, nous pouvions faire pousser plus de légumes en moins d’espace. Ce faisant, on libère les 9/10 du territoire pour installer des milliers d’arbres, des haies, des mares, des plantes aromatiques et médicinales. Autant de milieux différents, de niches écologiques qui permettent d’accueillir la faune et la flore sauvage. Nous avons progressivement observé la réapparition des insectes, des papillons, des vers de terre et des abeilles, mais aussi d’oiseaux en voie de disparition et de plantes indigènes… » (p 302). C’est vraiment une coopération avec la nature. « Au départ, on voulait produire notre nourriture en faisant le moins de mal possible à la planète. Mais un jour, on s’est dit que cette histoire ne tenait pas debout, que ce que nous voulions en réalité, c’est produire en faisant du bien à la planète. Depuis, nous faisons tous le jours le constat qu’on peut résoudre cette équation difficile qui consiste à cultiver une nourriture de qualité en réparant les blessures qu’on a infligé aux écosystèmes » (p 304).

 

Coopérer avec le vivant

Cyril Dion poursuit cette conversation sur la manière de coopérer avec le vivant en interrogeant François Léger, enseignant chercheur en agro-écologie, longtemps conseiller scientifique de la ferme du Bec Hellouin. A la demande des deux adolescents accompagnant Cyril Dion, la conversation a porté notamment sur la place des animaux dans le système agricole. Ce fut ensuite une rencontre avec Nicolas Vereecken, professeur d’agro-écologie et spécialiste des insectes. Notre intérêt pour les ruches et les abeilles domestiques ne doit pas nous faire oublier la vie et le rôle des abeilles sauvages qui jouent un rôle important dans la pollinisation. Là encore, il faut envisager la biodiversité. « Si vous n’aviez pas d’oiseaux, de frelons, d’araignées, la vie serait beaucoup plus difficile pour nous tous, surtout en été parce que vous auriez des surpopulations d’insectes que tous ces organismes aident à contrôler… La clé de l’écologie, c’est l’interdépendance et l’équilibre » (p 333).

 

Partout des initiatives

Les entretiens se poursuivent avec des personnalités exceptionnelles en des lieux qui parsèment la planète.
C’est la rencontre avec Lotus Vermeer qui est parvenue à rétablir la biodiversité et à ramener des espèces dans les Channel Islands sur la côte de Californie. C’est une rencontre avec Valérie Cabanes, juriste international qui travaille au contact des peuples indigènes et lutte pour les droits humains et pour le droit de la nature. C’est une rencontre avec le président du Costa Rica qui, par une politique volontariste, est parvenu à rétablir la couverture forestière dans son pays, de 20% dans les années 1980, à 70% aujourd’hui. C’est une rencontre avec Paulino et Paolo Rivera, membres d’une tribu autochtone au Costa Rica, ayant dû abandonner leur lieu d’origine et ayant réussi à planter une forêt dans leur nouvel habitat.

 

En mobilisation

En fin de parcours, Cyril Dion nous rappelle l’inimaginable défi écologique auquel nous sommes confrontés.
« Le péril est là et demande, toutes affaires cessantes, à nous mobiliser comme en temps de guerre »… « Le changement auquel nous devons parvenir, est culturel et structurel « (p 415).

Ce livre nous aide puissamment à penser le monde différemment et nous éclaire sur les pistes d’action. Tout informé que nous ayons pu être sur les questions écologiques, nous sortons différents de cette lecture. A travers les entretiens, nous avons découvert une multitude de situations et des réponses aux questionnements ainsi éveillés. Avec Cyril Dion et les deux adolescents qui l’ont accompagné, Bella et Vipulan, nous avons participé à une véritable exploration, à une grande épopée. A travers des flashs significatifs, nous avons rapporté cette lecture enthousiasmante qui vient accompagner un film impressionnant et mobilisateur (5). De quoi envisager ensemble un nouveau récit et un projet commun.

J H

  1. Le film « Demain » : https://vivreetesperer.com/le-film-demain/
  2. Cyril Dion Avec la collaboration de Nelly Pons. Animal. Chaque génération a son combat. Voici le nôtre. Actes sud. Colibris (Domaines du possible).
  3. A paraitre sur ce blog : Jane Goodhall : Une recherche pionnière sur les chimpanzés, une ouverture spirituelle, un engagement écologique.
  4. Cultiver la terre en harmonie avec la nature (la ferme du Bec Hellouin) : https://vivreetesperer.com/cultiver-la-terre-en-harmonie-avec-la-nature/
  5. Le film : Animal : https://www.youtube.com/watch?v=b0HouR6CYK4

 

 

Contempler la création

Louez l’Eternel du bas de la terre, Monstres marins et vous tous abimes :
Feu et grêle, neiges et brouillards ;
Vents impétueux qui exécutez ses ordres ;
Montagnes et toutes les collines ;
Arbres fruitiers et tous les cèdres ;
Animaux et tout le bétail ;
Reptiles et oiseaux ailés ;

Qu’ils louent le nom de l’Eternel
Car son nom seul est élevé ;
Sa majesté est au dessus de la terre et des cieux

Psaume 148 7-10,13

Dans cette séquence (1), frère Richard Rohr partage sur la manière de « voir » et de percevoir Dieu dans les formes de la nature sur la base d’une spiritualité incarnée.

10 octobre 2021
Contempler la création

 La spiritualité de la création a ses origines dans les Écrits hébraïques tels que les psaumes 104 et 148. C’est une spiritualité qui est enracinée, en premier, dans la nature, dans l’expérience, et dans le monde tel qu’il est. La riche spiritualité hébraïque a formé l’esprit et le cœur de Jésus ».

Richard Rohr fait remarquer alors combien nous sommes habitués à penser la religion en terme d’idées, de concepts et de formules trouvés dans des livres. « Ce n’est pas là où la religion commence. Ce n’est pas la spiritualité biblique. Celle-ci commence en observant ce qui est ».

Paul écrit : « Déjà depuis la création du monde, l’essence invisible de Dieu et sa puissance éternelle ont été vues clairement par la compréhension de l’esprit des choses créées » (Rom 1.20). Nous connaissons Dieu à travers les choses que Dieu a faites. La première fondation de toute vraie vision religieuse est tout à fait simplement d’apprendre à voir et à comprendre ce qui est ».

Or, selon Richard Rohr, « la contemplation, c’est rencontrer la réalité dans sa forme la plus simple et la plus directe, sans jugement, sans explication et sans contrôle ».

Richard Rohr nous appelle à voir dans le monde les « vestigia Dei », ce qui signifie les empreintes de Dieu. Apprendre à aimer pour voir. « Nous devons commencer avec une pierre. Puis nous passons de la pierre au monde végétal et nous apprenons à apprécier les choses qui grandissent et à voir Dieu en elles. Peut-être, une fois que nous pourrons voir Dieu dans les plantes et les animaux, nous pourrons voir Dieu dans nos prochains. Et puis, nous pourrons apprendre à aimer le monde. Et puis quand tout cet amour aura pris place, quand ce regard sera advenu, quand de telles personnes viendront à moi et me diront qu’elles aiment Jésus, j’y croirais. Elles sont capables d’aimer Jésus. Leur esprit est préparé. Leur esprit est libéré et il a appris à voir et à recevoir, comment rentrer en soi et en sortir. De telles personnes pourraient bien comprendre comment aimer Dieu ».

 

La dance de la vie

Richard Rohr voit en François d’Assise comme un premier exemple de quelqu’un qui a découvert en lui-même la connexion universelle de la création. Il nous fait part d’un apport de Sherri Mitchell sur la sagesse de s’accorder dans l’harmonie de la réalité.

« Chaque chose vivante a son propre chant de la création, son propre langage et sa propre histoire. En vue de vivre harmonieusement avec le reste de la création, nous devons vouloir écouter et respecter toutes les harmonies en mouvement autour de nous ». C’est faire appel à tous nos sens pour envisager le monde. « Quand nous vivons comme des êtres disposant de plusieurs sens, nous découvrons que nous sommes capables de comprendre le langage de chaque chose vivante. Nous entendons la voix des arbres et nous comprenons le bourdonnement des abeilles. Alors nous commençons à réaliser que c’est la substance inter-tissée de ces rythmes flottants qui nous tient dans un équilibre délicat avec toute vie. Alors notre vie et notre place dans la création commencent à faire sens d’une manière complètement nouvelle.

Sherri Mitchell nous raconte ensuite une expérience de cet ordre.

Dans une chaude journée d’été, dans un état méditatif, elle a remarqué le minuscule rampement d’une fourmi près d’un brin d’herbe.

« Comme j’observais la fourmi en train de bouger, son petit corps a commencé à s’illuminer. Puis le brin d’herbe sur lequel il marchait s’est lui aussi éclairé. Comme j’étais là et j’observais, tout l’endroit qui m’entourait a commencé à s’éclairer. J’étais assise, m’émerveillant tranquillement devant cette vue nouvelle, sans bouger de peur de la perdre. Pendant que j’étais assise là, respirant avec le monde autour de moi, les fermes lignes de mon être ont commencé à s’estomper. Je me suis sentie en expansion et en train de me fondre avec tout ce que j’observais. Soudain, il n’y avait plus de séparation entre moi, la fourmi, l’herbe, les arbres et les oiseaux. Nous respirions avec la même respiration. J’étais envahie par ce sens de parenté tellement beau et complet avec toute la création… ».

 

Sentir la nature

Richard Rohr nous convie à expérimenter une vie en pleine nature.

A l’exemple de François d’Assise, il a lui-même vécu quelques moments d’ermitage dans la nature. Il raconte comment il a découvert ce qui se passait chez les animaux et dans les arbres. Combien nous perdons lorsque nous sommes coupés de la nature… « Mes temps d’ermitage m’ont resitué dans l’univers de Dieu, dans la providence et dans le plan de Dieu. J’ai eu le sentiment d’être réaligné avec ce qui est. J’appartenais et donc j’étais sauvé… »

« Quand nous sommes en paix et que nous ne y opposons pas, quand nous ne sommes pas en train de fixer et de contrôler le monde, quand nous ne sommes pas remplis de colère, tout ce que nous pouvons faire est de commencer à aimer et pardonner. Rien d’autre ne fait sens lorsque nous sommes seuls avec Dieu. Il n’y a rien qui vaille de retenir parce qu’il n’y a rien d’autre dont nous ayons besoin. Je pense que c’est dans cet espace de liberté que le réalignement advient. François vivait un tel alignement… ».

 

Les cercles sacrés

Richard Rohr voit la Trinité comme un « cercle de danse » d’amour et de communion mutuelle. « Ceux d’entre nous qui ont grandi avec la notion trinitaire de Dieu communément répandue, voient la réalité consciemment ou inconsciemment, comme un univers en forme de pyramide, avec Dieu au sommet d’un triangle et tout le reste en dessous. Mais c’est exactement ce que la Trinité n’est pas. Les premiers Pères de l’Eglise disaient que la métaphore la plus proche pour envisager Dieu, c’était un cercle de danse de communion. Ce n’était pas une situation hiérarchique, monarchique ou une pyramide.

Richard Rohr cite alors Randy Woodley, un théologien d’origine Cherokee (tribu indienne). « Notre modèle de la relation à toute chose est un simple symbole utilisé par les autochtones américains : le cercle. L’harmonie dans le genre de vie est souvent entendue en terme symbolique de cercle ou de cerceau ». Rassemblons-nous… faisons un cercle… Le cercle n’a ni début, ni fin et on peut y entrer n’importe où et n’importe quand. « Quand nous nous rassemblons dans un cercle, la prière a déjà commencé… Nous nous rassemblons l’un avec l’autre et avec le Grand Mystère même sans qu’un mot ait été dit ».

Randy Woodley nous introduit dans le symbolisme pour les peuples autochtones et pour la terre elle-même.

« Dans presque toutes les tribus autochtones d’Amérique du Nord, le cercle ou le cerceau est considéré comme un symbole de la vie. Ce symbole est une puissante représentation de la terre, de la vie, des saisons, des cycles de maturité etc… ».

 

Une prière centrée sur la création

« La nature spirituelle de la Création a toujours été là depuis le Big Bang… L’Esprit et la matière ont été un depuis que Dieu a décidé de se manifester ».

« Le Christ est partout. La planète entière est ointe et messianique. Tout porte le mystère du ChristQuand nous apprenons cela, nous sommes en communion. ». Nous sommes en communion lorsque nous allons à l’église… Nous  sommes en communion dans la pause de la salle de bain. Nous sommes en communion quand  nous sommes dans la nature.

Richard Rohr convie une sœur franciscaine, José Hobday à s‘exprimer. Elle écrit comment elle a appris à « prier sans cesse » à partir de la spiritualité autochtone de sa mère qui honorait le sens d’être en communion, en harmonie constante, d’être avec Dieu en toutes choses. « Ma mère priait comme une américaine autochtone. Cela signifie qu’elle se voyait priant en vivant et vivant en priant. Elle essayait de prier sa vie. Elle exprimait, par exemple sa prière de gratitude dans la manière dont elle faisait les choses : Quand vous remuez les flacons d’avoine, faites le lentement de manière à ne pas oublier que les flacons d’avoine sont un don et qu’il ne faut pas les prendre pour acquis. Elle faisait les choses en priant. Elle priait même en marchant… Elle m’enseignait à marcher doucement sur la terre parce que la terre est notre mère. Quand nous marchons, disait-elle, nous devrions être prêts à entrer dans chaque mouvement de beauté que nous rencontrons ».

Qu’est-ce que Richard Rohr a appris de la spiritualité américaine autochtone ? « D’abord à faire que ma prière soit centrée sur la création. Les indiens prient comme étant en famille avec la création. Dans notre prière, nous pourrions penser aux créatures… et à leur relation avec la création. C’est ce que les américains autochtones ont fait. Cela ne les a pas seulement gardés en contact avec la création, mais aussi bien avec le Créateur.

 

Révérer la création et le Créateur

Pour Richard Rohr et la tradition franciscaine, l’incarnation est au cœur d’une spiritualité affirmant la création. Nous rencontrons Dieu dans la création parce que nous rencontrons Dieu partout. Au lieu d’être une barrière à la vie spirituelle, la création est une porte. Les gens qui vivent en relation profonde et harmonieuse avec la nature ont toujours su cela. Richard Rohr a trouvé, dans ses conversations avec des anciens autochtones, une perspective sur la nature de la réalité qui commence avec un éclairage sur la nature du Créateur. Et il cite à ce sujet, un verset de l’épitre aux romains (1. 19-20) : « Les perfections invisibles de Dieu, sa puissance éternelle et sa divinité, se voient comme à l’œil, depuis la création du monde, étant considérées dans ses ouvrages… ». « L’Ecriture est cohérente avec la vision du monde indigène que la nature du Créateur est visible dans la création. Qu’est- ce que la création nous dit de la nature de Dieu ? Les peuples indigènes ont été accusés d’animisme, c’est à dire d’adorer la création plutôt que le Créateur. Mais, en réalité, le fondement de la spiritualité indigène, c’est la révérence… La révérence, c’est un profond respect. Le Créateur est évident dans la création qui nous entoure. Je puis voir cela et en faire l’expérience avec mes sens… L’humilité, c’est reconnaître que je ne suis pas séparé de la création. Je fais partie du tissu de la vie. J’ai appris que cette dépendance mutuelle est un don. La vie est un don ».

J H

  1. Center for action and contemplation. Contemplating creation : https://cac.org/contemplating-creation-2021-10-10/

Voir aussi sur ce blog:
L’homme, la nature et Dieu : https://vivreetesperer.com/lhomme-la-nature-et-dieu/
Enlever le voile: https://vivreetesperer.com/enlever-le-voile/
La grande connexion : https://vivreetesperer.com/la-grande-connexion/

Et la présentation du livre de Richard Rohr: The divine dance:
https://vivreetesperer.com/la-danse-divine-the-divine-dance-par-richard-rohr/
https://vivreetesperer.com/reconnaitre-et-vivre-la-presence-dun-dieu-relationnel/

 

Playing for change

Une musique qui porte à travers le monde une aspiration à l’amour et à la beauté

Playing for change

Et si il y avait chez tous les humains une aspiration à l’amour et à la fraternité
Et si ils pouvaient se reconnaître semblables dans un besoin de solidarité et de fraternité
Et si un chant, une musique exprimant cette aspiration et ce besoin pouvait faire écho et se propager à travers le monde
Et si ce chant, cette musique tissait un lien entre tous ceux qui l’accueillent et qui y participent
Et si ce chant, cette musique suscitait un nouveau regard, une transformation des esprits…

Il y a bien une réponse à ces souhaits :

C’est le mouvement « Playing for Change » qui s’exprime à travers un site (1) et des vidéos sur You Tube. Ici, le chant, la musique se manifestent conjointement à travers de multiples expressions dans le monde, dans de nombreux pays, en Amérique, en Afrique, en Asie. Ces expressions proviennent de gens différents : en lien avec leurs compatriotes, des musiciens dans un style très divers, parfois même des groupes d’enfants. Ainsi, de relai en relai, la mélodie circule d’un bout du monde à l’autre.

Les origines et le développement de Playing for Change

D’ou vient cette belle innovation ? L’histoire en est bien couverte par Wikipedia (2). Nous reprendrons ici le récit qui en est fait sur la RTBF (radio télévision belge francophone) (3). « Playing for Change » est un mouvement qui souhaite inspirer et connecter le monde au travers de la musique… « Playing for Change » est né en 2002 sous l’impulsion de Mark Johnson et de Whitney Kroenke, deux artistes et voyageurs qui sillonnaient à l’époque les rues des États-Unis à bord d’un studio mobile en quête de rencontres musicales inspirantes. « En 2005, Mark Johnson, alors qu’il marche dans les rues de Santa Monica en Californie entend la voix de Roger Rigley chanter « Stand by me » et décide, touché par cette voix unique, de lui proposer d’être le premier à enregistrer sur une version : « Autour du monde » de cette chanson.

Chaque vidéo fonctionne sur le même principe de rassembler des dizaines de musiciens et de chanteurs, issus de pays et de cultures différents, autour d’un même morceau. « Playing for Change » partage à travers leurs vidéos des messages d’amour, de partage et de respect, tout en mettant en avant des artistes et musiciens de très grande qualité… ». « Ce sont des artistes des rues dotés d’un grand talent. On y retrouve par exemple celui qu’on appelle Grandpa Elliott, un chanteur qui ne paie pas de mine avec sa salopette, son galurin, sa barbe blanche en bataille, son harmonica, sa gouaille et pourtant il vous séduira en quelques notes à peine ».

« Au vu du succès des différentes vidéos sur Youtube, les fondateurs de « Playing for Change » ont décidé de lancer une organisation à but non lucratif qui se consacre à la création d’écoles de musique et de programmes éducatifs aux quatre coins du monde… ».

 

Un message

« Playing for Change » puise ses chants dans le courant de l’expression musicale américaine et d’autres expressions connexes dans la seconde moitié du XXè siècle où s’y manifeste une extrême créativité. Cette musique s’exprime en différents genres musicaux qui s’enchainent, coexistent et peuvent se rejoindre. Elle est irriguée par différentes sources, mais tout particulièrement par la veine créatrice de la musique afro-américaine dans ses différentes composantes. « Playing for Change » peut ainsi reprendre des chansons très appréciées dans les années 1960 et 1970 et plus tard… A coté des chansons produites aux Etats-Unis, il met en valeur d’autre chants comme « Imagine » de John Lennon et « Redemption song » de Bob Marley. Et puis, au cours des années, le mouvement étant ancré internationalement, le répertoire a pu s’étendre culturellement. Toutes ces chansons viennent nous inspirer et nous encourager en prenant pour thème : l’amour, l’entraide, le respect, la fraternité, la paix, la libération…

A titre d’exemple, voici quelques chants mis en évidence par « Playing for change ».

« Lean on me » ( 4) est un chant emblématique de « Playing for change » puisque c’est l’écoute de ce chant qui a inspiré le fondateur de « Playing for change ». Créé 1972, ce chant nous invite à ne pas hésiter à demander un soutien, à pouvoir nous appuyer sur quelqu’un et à pouvoir compter sur lui. C’est un chant qui exalte l’amitié, l’entraide, l’espérance…
« Nous avons tous de la peine. Nous avons tous du chagrin. Si nous sommes sages, nous savons qu’il y a toujours un lendemain…
Appuies toi sur moi. Quand tu ne seras pas fort, je serai ton ami. Je t’aiderai à avancer.
Bientôt, j’aurais besoin de quelqu’un sur qui me reposer à mon tour. S’il te plait, ravale ta fierté si tu as besoin d’emprunter quelque chose. Car personne ne peut répondre à ton besoin si tu ne le montres pas.
Tu peux compter sur moi, mon frère quand tu as besoin d’aide
Nous avons tous besoin de quelqu’un sur qui nous reposer… ».
Ce sont des paroles qui portent. Ce sont des paroles qui réconfortent. Ce sont des paroles qui donnent espoir.
Lean on me : https://www.youtube.com/watch?v=LiouJsnYytI

« Everyday people » est sorti en 1969 (5). C’est un message qui proclame que les gens sont pareils quelque soit leur race et leur milieu social. C’est une protestation concrète contre les préjugés de tous genres. C’est un plaidoyer pour la paix et l’égalité : https://www.youtube.com/watch?v=-g4UWvcZn5U

« United » est un chant qui proclame l’unité de l’humanité. « Apprenons à vivre comme si nous étions un »… « Nous avons à rassembler le monde et apprendre à vivre comme si nous étions un ». C’est un chant diffusé en 2011 dans une collaboration avec les Nations Unies :
« United » : https://www.youtube.com/watch?v=6vT_7AX06UQ

« Love is all » (6) est un chant pop apparu en 1974.
Il proclame combien l’amour est une exigence :
« Chacun de nous est appelé à vivre avec d’autres et à les comprendre Aussi aime ton voisin comme tu aimes ton frère…
Tout ce dont vous avez besoin, c’est d’amour et de compréhension… Venez et montrez vos sentiments
L’amour est tout. L’amour est tout. »
La version de « Love is all » dans « playing for change » est admirable et émouvante parce qu’elle manifeste l’expression de nombreux enfants à travers le monde.
« Love is all » : https://playingforchange.com/videos/love-is-all/?fbclid=IwAR3VnVW5Lm3mXjRW6R9v-mM4FH9PnrtR_HtwWBK1FNCBOZncsMLxXqUcIis

En ces temps tourmentés, l’expression musicale de « Playing for change » vient nous rafraichir et nous encourager. Oui, à travers le monde, il y a des gens qui croient à l’amour et à la paix. Il y a dix ans, nous avions déjà présenté « Playing for Change » sur ce blog (7). C’est donc une nouvelle visite. Aujourd’hui, Playing for Change » poursuit son chemin, et, très présent sur internet, se manifeste dans une diversité internationale. Dans un contexte où on peut remonter au Gospel, « Playing for Change » évoque l’amour et la paix. Dans un regard éveillé à la présence de l’Esprit, on y voit ici son œuvre.

J H

  1. Playing for Change Re-imagine a world connected by music : https://playingforchange.com
  2. Playing for Change : wikipedia (francophone) : https://fr.wikipedia.org/wiki/Playing_for_Change Wikipedia (anglophone) : https://fr.wikipedia.org/wiki/Playing_for_Change
  3. RTBF Marin Jaumotte. Playing for Change, inspirer et connecter le monde à travers la musique : https://www.rtbf.be/culture/pop-up/detail_playing-for-change-des-chansons-pour-inspirer-et-connecter-le-monde-a-travers-la-musique-marion-jaumotte?id=10317571
  4. Lean on Me. (chanson de Bill Withers). Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Lean_on_Me_(chanson_de_Bill_Withers)
  5. Everyday people . Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Everyday_People
  6. Love is all (Roger Glover song) . Wikipedia : https://en.wikipedia.org/wiki/Love_Is_All_(Roger_Glover_song)
  7. Un hymne à l’unité. Playing for change. : https://vivreetesperer.com/un-hymne-a-l%E2%80%99unite-%C2%AB-playing-for-change-%C2%BB/

 

 

La grande connexion

Vivre au ciel maintenant, la grande connexionVivre au ciel maintenant
Selon Richard Rohr

Les représentations du Ciel qui nous sont traditionnellement proposées nous renvoient au lointain et au futur, et son accès au conditionnel. Cependant, ce paysage est en voie d’évolution.

Dans une séquence sur « la communion des saints », Richard Rohr nous ouvre une vision évangélique en se fondant sur les paroles de Jésus lors de son dernier repas avec ses disciples. Ici des interrelations s’affirment. Des barrières tombent : « Jésus leur dit toutes ces choses, et levant les yeux au ciel, il dit « Père, je ne demande pas pour ceux là seulement, mais aussi pour ceux qui croient en moi à travers leur parole : qu’ils puissent tous être un, de même que toi Père, tu es en moi et moi en toi, qu’ils puissent aussi être en nous de manière à ce que le monde puisse croire que tu m’as envoyé » (Jean 17. 1, 20-23).

« On peut voir dans cette prière le plus haut niveau de l’enseignement mystique du Nouveau Testament », écrit Richard Rohr. « Ici Jésus se connecte à tout. Il est dans le Père, le Père en vous, vous en Dieu, Dieu en lui, Dieu dans le monde et vous dans le monde. Tout cela est un ».

Pour Richard Rohr, c’est là le fond des choses. La relation est première. Nous ne vivons pas seuls, mais en relation. « Les saints voient les choses dans leur connexion et leur globalité ; ils ne voient pas les choses séparées. C’es tout un et cependant, comme la Trinité, c’est aussi différent. Ce que vous faites à l’autre, vous vous le faites à vous-même. Comme vous vous aimez vous-même, c’est aussi comme vous aimez votre prochain. Comme vous aimez Dieu, c’est comme vous vous aimez vous même. Comme vous vous aimez vous même, c’est comme vous aimez Dieu. Comme vous faites une chose, c’est comme vous faites toutes les choses ». Nous pouvons nous interroger dans cette perspective sur notre manière de vivre.

De même, cette approche nous appelle à discerner, à voir la réalité en profondeur. « La  foi, ce n’est pas simplement voir les choses en surface, mais à reconnaître leur signification profonde. Etre une personne de foi signifie que nous voyons les choses – les gens, les animaux, les plantes, la terre – comme intrinsèquement connectés à Dieu, connectés à nous-mêmes et donc absolument dignes d’amour et de dignité. C’est pour cela que Jésus a prié : Pour que nous voyons les choses dans leur unité, dans leur connexion ».

Où en sommes nous dans ce regard ? Notre maturité spirituelle est fonction de notre degré d’évolution dans la manière de percevoir notre connexion, nos interrelations. C’est ce que nous dit Richard Rohr : « Plus nous pouvons nous connecter, plus il y a de la sainteté en nous. Moins nous pouvons nous connecter, moins nous sommes transformés. Si nous ne pouvons pas nous connecter avec des gens d’autres religions, d’autres classes, d’autres races, avec nos « ennemis » ou avec ceux qui sont en souffrance, nous ne sommes pas très convertis. Les gens vraiment transformés sont capables d’une reconnaissance universelle… »

Notre manière de voir a des conséquences quant à notre manière de voir le « ciel ». « Nous n’allons pas au ciel, nous apprenons à vivre dans le ciel maintenant », écrit Richard Rohr. « Et personne ne vit seul au ciel. Ou nous apprenons à vivre en communion avec d’autres gens et avec tout ce que Dieu a créé, ou bien, très simplement, nous ne sommes pas prêts pour le ciel… »

Ainsi quel est le chemin ? « Nous avons été invités, même maintenant, même aujourd’hui, même en ce moment, à vivre consciemment dans la communion des saints, dans la Présence, dans le Corps, dans la Vie du Christ éternellement Ressuscité ».

J H

  1. Une méditation de Richard Rohr dans son site : Center for action and meditation : Living in Heaven now Vendredi 12 mars 2021 https://cac.org/living-in-heaven-now-2021-03-12/

Voir aussi ces autres méditations de Richard  Rohr

Enlever le voile : https://vivreetesperer.com/enlever-le-voile/

L’homme, la nature et Dieu : https://vivreetesperer.com/lhomme-la-nature-et-dieu/