Une culture de l’amour, de l’accueil de l’autre, d’acceptation de la différence.
Jean Vanier (1), le fondateur de « l’Arche » (2), un ensemble de communautés qui accueillent des personnes handicapées mentales dans des lieux de vie partagée, a reçu le prix de la fondationTempleton (3), une organisation qui œuvre pour le développement spirituel dans la reconnaissance conjuguée de l’apport des sciences et des religions. A cette occasion, dans une interview en vidéo (4) ; « Jean Vanier parle sur les grandesquestions » et il nous communique sa vision d’une société plus humaine où chacun est reconnu, respecté, aimé, et où l’on peut trouver dans une petite voix intérieure l’inspiration pour œuvrer en ce sens. « La vision de Dieu, c’est que nous nous aimions les uns les autres, que nous nous respections les uns et les autre, qu’on voit chez l’autre, différent, le trésor de son être ». Cette interview ouvre notre cœur et notre regard. Ces quelques notations recueillies lors de son audition pourront contribuer à baliser notre réflexion et notre méditation.
Devenir pleinement humain
Etre pleinement humain, c’est reconnaître notre condition humaine dans ses limitations : « Nous sommes des êtres qui n’existaient pas, il y a quelques années et nous n’existerons pas, de la même façon, dans quelques années. Devenir pleinement humain, c’est accepter la réalité : je suis né un tout petit enfant. Je vais mourir, pauvre. Nous sommes tous des êtresvulnérables »
Mais l’être humain est aussi porteur d’un grand potentiel, car il est doté à la fois d’une tête et d’un cœur. « La tête, qui a besoin de savoir, de connaître, de rechercher, de chercher. C’est une intelligence extraordinaire pour faire des choses et prendre notre place. Et aussi lecœur, une capacité d’apprécier l’autre, différent ». Face à un monde marqué par les rivalités, « la question est de découvrir ce qui est le plus intime dans l’être humain, c’est à dire le cœur, la capacité d’aimer, la capacité de voir dans l’autre, différent, ce qui est bon : « Tu es beau. Tu as des choses à donner ».
« Il y a besoin d’une unité entre la tête et le cœur « pour que j’utilise mon intelligence non pas pour avoir plus de pouvoir, mais pour faire de belles choses, pour aller vers un monde où il y a plus de paix, plus d’accueil des gens, plus d’amour »
Dans le cœur de l’homme, il y a le désir constant de l’infini ». On cherche à avoir plus d’argent, plus de pouvoir, mais aussi « à découvrir que dans l’approche de l’infini, il y a une recherche de Dieu ».
Quel est le rêve de Dieu pour l’humanité ?
« Le rêve de Dieu pour l’humanité, c’est l’unité »
Mais d’où venons-nous ? Il fut un temps où il y a eu l’esclavage, l’horreur de l’esclavage »…il fut un temps où on parlait des gens d’Afrique où des premières nations du Canada comme des sauvages. Heureusement aujourd’hui, on les reconnaît comme des êtres humains et on considère leurs traditions comme des traditions importantes, profondément humaines…De la même façon, les personnes avec un handicap étaient longtemps considérées comme une honte pour les familles et même comme une punition de Dieu pour des péchés ou des méfaits des ancêtres… On est en train de découvrir que chaque personne (quelque soit son statut) est vraiment une personne »
Nous avons vécu une prise de conscience : « Avec la fin de la guerre 39-45, on a découvert Auschwitz. On a découvert aussi l’horreur de la bombe atomique. On peut connaître le suicide. Il faut qu’il y ait un changement »
Jean Vanier nous parle de la vision de Dieu : « La vision de Dieu, c’est une évolution progressive de l’humanité. C’est que nous nous aimions les uns les autres, que nous nous respections les uns les autres, qu’on voit chez l’autre différent le trésor de son être. Chaque personne est importante… Alors, c’est là la vision de Dieu. C’est que, petit à petit, dans la terrible lutte entre l’injustice et la justice, que progressivement de plus en plus de personnes prennent conscience que notre Dieu est le Dieu de la paix, le Dieu de la communion et le Dieu de l’unité. La vision de Dieu est que je change, que nous changions, pour que nous devenions plus juste et plus humain ».
Une expérience personnelle et collective : la rencontre avec les personnes ayant un handicap mental
Jean Vanier nous parle de l’expérience personnelle qu’il a vécu et qui a été le point de départ du développement des communautés de l’Arche.
« Je vais vous parler un petit peu de mon expérience. J’étais officier dans la marine. J’ai quitté la marine pour suivre Jésus. J’ai fait des études. Et, en 1964, j’ai découvert les personnes ayant une déficience intellectuelle. Je peux dire que je ne pouvais pas imaginer ce que j’ai vu, combien ces hommes et ces femmes sont humiliés, mis dans de grandes institutions, enfermés, mis de côté. Les parents ont honte d’avoir un enfant comme cela. Ils sont perçus comme débiles, idiots et, à l’école, on se moque d’eux ».
Un jour, Jean Vanier a été confronté personnellement à cette situation. « J’ai découvert des hommes dans une institution très violente et très fermée. Je sentais que je ne pouvais pas faire quelque chose dans cette institution, mais comme je voulais être disciple de Jésus, j’avais envie de faire quelque chose. Et la seule chose que j’ai fait, c’est de commencer à vivre ensemble avec Raphaël qui avait eu une méningite, qui était fragile, avec Philippe qui avait eu une encéphalite, qui parlait beaucoup. Ils n’avaient pas de famille. Et je ne pouvais pas imaginer qu’ils restent en institution toute leur vie. C’était donc pour moi évident : on allait vivre ensemble.
Et c’était extraordinaire parce qu’on s’amusait. Les personnes qui ont un handicap mental ne sont pas des gens qui vont parler d’économie, de philosophie, de politique. Ce qu’ils ont envie, c’est de rigoler, d’avoir de la joie, de vivre. Donc, il y a un langage : le langage de l’affectivité, le langage de la joie, le langage de la célébration. Et, parce qu’évidemment, ces hommes ont changé, ils ont découvert qui ils étaient.
A partir de là, un processus a commencé et s’est poursuivi dans la communauté de l’Arche. L’Arche a grandi et aujourd’hui on compte 147 communautés à travers le monde dans des pays aussi différents que le Bangladesh, le Japon, Haïti. Il y a là un même esprit. « L’amour, ce n’est pas faire des choses pour des gens, c’est révéler à chacun : « Tu as une valeur, tu as les dons que tu as, tu as les difficultés que tu as, et derrière tout cela, il y a toi ».
Jean Vanier nous rapporte comment une transformation des mentalités s’est opérée à l’Arche, non seulement chez les aidés, mais chez les aidants. « Au commencement de l’Arche, dans les années 60, les jeunes voulaient un changement dans les universités. Il y avait de la turbulence. Les jeunes ne voulaient pas être coincés par l’autorité, ils voulaient vivre. Alors beaucoup de jeunes sont venus. Mais ils venaient avec la culture (dominante), une culture du succès, du pouvoir. Ils venaient pour faire le bien aux personnes avec un handicap. Mais, ce qui est étonnant, ce sont les personnes avec un handicap qui ont touché le cœur de ces jeunes assistants et assistantes, elles dont le cœur du cœur est leur capacité, leur beauté dans la relation et dans l’amour… Au lieu de vouloir être dans une culture du succès, une culture du pouvoir, ils ont découvert qu’il y avait une autre culture qui est la culture de l’amour, de l’accueil de l’autre, différent. Accepter la différence, accepter que l’autre, avec ses fragilités, avec ses capacités aussi, est une personne. Ce sont les personnes avec un handicap qui changeaient ces jeunes assistants et les rendaient plus humains. Donc, il y a quelque chose de très beau que nous avons découvert : ces jeunes gens, merveilleux en générosité, pouvaient devenir des hommes et des femmes exceptionnels capables d’aimer et de mettre leur intelligence au service de l’autre ».
La petite voix intérieure
« Si la grande question humaine est celle de la liberté, cela nous amène à parler de la petite voix intérieure. Il y a un document de l’Eglise catholique, au Concile Vatican II, qui définit la conscience personnelle. La conscience personnelle, c’est ce qui est le plus important. C’est ce qui donne sa dignité à l’être humain. La conscience personnelle est le sanctuaire sacré où chaque être humain entend la voix de Dieu qui l’oriente vers ce qui est juste, vrai et bon et qui le détourne de la haine et de l’injustice.
Le Mahatma Gandhi a beaucoup parlé de cette petite voix intérieure. Comme beaucoup d’autres hommes, il s’est opposé à la tyrannie de la normalité parce qu’ils voulaient faire ce qui est juste, ce qui est vrai, ce qui est aimant. La petite voix intérieure est comme une attraction vers la justice, comme une fleur qui est attirée vers la lumière, vers le soleil. La petite voix intérieure, qui est le cœur du cœur de l’être humain, c’est la capacité de lutter pour la justice, pour la vérité, pas seulement de lutter, mais de constamment chercher ce qui est vrai, ce qui est juste, pour que nous soyons des hommes et des femmes de paix. Gandhi, Martin Luther King et Mandela, et de grands hommes comme ceux-là, sont tous des hommes qui ont cru qu’ils étaient des êtres uniques et qu’ils étaient libres, libres de ne pas faire comme tout le monde, de ne pas chercher à être acclamés, mais libres comme un être humain ».
« Cette petite voix intérieure, qui est le plus profond de l’être humain, doit être cultivée ». Cette petite voix me permet « d’être libre pour suivre ma conscience, pour œuvrer pour la justice, l’amour et la vérité dans un monde où il y a tellement d’injustice et tellementde peur ».
(3) Par ses prix annuels, la fondation Templeton a mis en valeur des personnalités oeuvrant pour le développement spirituel : http://www.templetonprize.org
Lorsqu’on a vécu enfant dans un environnement contraint, il peut nous arriver d’intérioriser ultérieurement ces contraintes. La norme reçue se poursuit dans un idéal volontariste. Les conflits engendrés par des impositions excessives, s’ils sont eux-mêmes brimés, peuvent aussi se retourner en auto-agressivité. Et celle-ci engendre une recherche de modèle pour éviter les tensions intérieures et échapper à la culpabilisation. Ainsi, pour certains d’entre nous, nous avons, plus ou moins, des difficultés à nous reconnaître et à nous accepter tel que nous sommes. Si le contexte religieux suscite une culpabilisation, il en résulte un véritable enfermement. Cependant, la psychologie peut nous aider à percevoir l’étendue de nos blocages. Et, par exemple, la non acceptation de soi, peut se traduire dans la méconnaissance du corps. Elle peut aussi engendrer une peur de nos vulnérabilités comme de tout ce qui échappe à notre contrôle puisqu’il y quelque chose en nous qui nous inquiète.
Cette attitude ne facilite pas non plus une relation ouverte et détendue avec les autres. On manque de liberté. Mais, c’est aussi par la relation que la délivrance peut venir. Bien souvent, on voit des êtres se transformer parce qu’ils se sentent aimés. Ils découvrent le bonheur. Ils abandonnent leurs protections et leurs défenses. Quelle image avons-nous de Dieu ? L’enseignement de Jésus manifeste l’amour que Dieu a pour nous. Et cet amour est opérant. C’est ce que Luc-Olivier Bosset nous fait admirablement découvrir dans cettevidéo : « Une vulnérabilité enveloppée d’amour » (1). En lavant les pieds de ses disciples, quelques heures avant son arrestation et sa passion, Jésus manifeste un amour pour ces hommes tels qu’ils sont, et pour nous aussi… Cette méditation touche le cœur et peut se réécouter à plusieurs reprises. En accompagnement, nous proposons ces quelques notes issues de l’exposé. « Le dernier mot sur la vulnérabilité est donné par l’amour de Jésus qui lave tout, qui soigne tout, qui guérit tout ».
J H
Le lavement des pieds : un geste d’une profonde douceur.
« Il fut un temps où lorsqu’on découvrait qu’un enfant était gaucher, au lieu de lui permettre d’être ce qu’il était, on le forçait à entrer dans un moule, même si cela n’était pas dans sa nature. Il fallait que cet enfant apprenne à écrire avec la main droite, car c’était la normalité.
Dans l’Evangile, à un moment donné (Jean 13), on nous raconte que Jésus lave les pieds de ses disciples. Quand il accomplit ce geste, Jésus sait pertinemment que ses disciples ne sont pas des superhéros. Dans les heures qui vont suivre, quand la tension avec les autorités politiques et religieuses va être à son comble, Jésus sait très bien que ses disciples vont se sentir vulnérables, qu’ils vont l’abandonner. C’est pourquoi, sentant toute cette fragilité, le Christ aurait pu profiter des dernières heures qu’il passait avec eux pour les faire entrer, ces gens un peu gauches, pour les faire entrer dans le moule du superdisciple parfait, invulnérable, solide et vaillant.
Or, au lieu de cela, il accomplit un geste d’une profonde douceur. Il leur lave les pieds. Il prend le temps de les toucher à un endroit de leur corps qui est exposé, qui est vulnérable, le pied qui est souvent sali, blessé, meurtri par les cailloux de la route. Ce faisant, c’est comme si Jésus leur disait : Et bien, cette vulnérabilité qui te traverse, ne passe pas ton temps à vouloir la nier, la bannir, l’arracher comme si c’était une mauvaise herbe, mais apprend plutôt à l’aimer, à l’envelopper d’amour. Ne te rêve pas comme une personnalité sans talon d’Achille, comme un super héros, mais avance plutôt dans l’existence en vivant tout ce que tu es, même ces parties vulnérables. Ces parties vulnérables peut-être te font souffrir, car elles sont exposées, mais, en même temps, ce sont des points de contact qui te mettent en relation avec le monde qui t’entoure. Regarde, au travers de tes failles, parfois la vie peut te rejoindre, te nourrir et te porter.
Alors, accepte ta vulnérabilité, en sachant que parfois, au travers d’elle, jaillit mon amour. Car le dernier mot sur ta vulnérabilité ce ne sera pas la condamnation, la moquerie ou l’humiliation des autres, mais ce dernier mot sur ta vulnérabilité sera donné par mon amour qui lave tout, qui soigne tout, qui guérit tout. Vois, si je me suis mis à genoux devant toi, dit Jésus, c’est pour que tu puisses te relever et que tu puisses, chaque jour, choisir la vie.
J’ai découvert la technique Alexander (du nom de son auteur) par hasard en visitant un forum santé dans un cadre professionnel. Il y avait là différents ateliers dont celui de la technique Alexander que j’ai observé de loin sans y prêter vraiment d’attention. Je suis finalement passée près de la table où étaient déposées les plaquettes ; et là, mon regard a été attiré par les propositions suivantes :
– Se mouvoir avec aisance,
– Etre dynamique sans tensions superflues
– Retrouver un dos en bonne santé.
Comme je souffrais de lombalgies récurrentes depuis quelques temps et désireuse de m’en défaire, j’ai pris la plaquette.
J’ai attendu quelques mois avant de me lancer dans cette aventure et de prendre contact avec le professeur. Parce qu’il ne s’agit pas d’une thérapie, même si les effets physiques et psychologiques sont là, mais d’un enseignement… J’ai donc repris le chemin de l’apprentissage ou plutôt celui du « désapprentissage », mais cela je ne le savais pas en commençant !
J’ai été « bluffée » dès la première leçon : des exercices apparemment simples (se lever, s’asseoir, marcher…) qui m’ont fait prendre conscience de certaines de mes tensions génératrices de blocages et de douleurs. J’ai découvert que je ne savais pas me poser sur un support (chaise ou lit …).
Cette prise de conscience en a déclenché d’autres et m’ont conduites dans une nouvelle dimension : celle d’une certaine réconciliation entre mon corps et mon être intérieur. Je suis entrée dans une relation plus attentive et plus respectueuse avec mon corps, en découvrant par l’expérience, qu’au lieu d’être un obstacle ou un objet à maîtriser, il était un allié, un ami, et finalement que mon corps c’est moi aussi, pour cette vie ici et maintenant.
Et plus surprenant, cette nouvelle acceptation (même débutante) m’amène à une plus grande ouverture à autrui et à la Présence divine, avec une confiance en développement.
Aujourd’hui encore, je poursuis les leçons, désireuse d’approfondir ces premières découvertes.
Nadine
Expérience positive
C’est par Nadine que j’ai entendu parler de la méthode Alexander. Grâce au passage d’une formatrice, empreinte d’empathie et de sens relationnel, j’ai pu commencer à découvrir les bienfaits de cette méthode. A travers quelques exercices, je me suis rendu compte combien certaines parties de mon corps échappaient à ma conscience. Mon mental était tourné sur lui-même. J’ai appris à être davantage présent à moi-même vers une plus grande unité corps et esprit en lien avec l’environnement . C’est un appel à une transformation profonde de notre être. Lorsqu’on vient de loin en ce domaine, tout un chemin à parcourir !
En suivant notre fil facebook, nous avons rencontré une parole qui nous a rejoint profondément : « I believe that appreciation is a holy thing, that when we look what is best in a person we happen to be at the moment, we are doing what God does. So in appreciating our neighbor, we are participating in something truly sacred » : « Je crois qu’une appréciation positive appartient au registre de la sainteté, et que quand nous reconnaissons ce qui est le mieux dans une personne avec laquelle il nous arrive d’être à un certain moment, nous sommes en train de faire ce que Dieu fait. Ainsi, en appréciant notre prochain, nous participons à une réalité qui est vraiment sacrée ».
Fred Rogers, un homme qui, à la télévision, a su parler au cœur profond
Qui a exprimé aussi bien la grâce d’une appréciation positive de ce qui est bon et beau dans ceux que nous rencontrons ? C’est un homme mûr, pasteur américain qui, à un moment de sa vie, s’est engagé dans la participation à une émission de télévision à l’intention des enfants : « Mister Rogers Neiborhood » où il a apporté une présence authentique et chaleureuse. C’était un homme âgé qui aimait les enfants. Pour cette œuvre, Fred Rogers s’est vu décerné un prix en 1997. Après avoir été présenté « comme le meilleur des voisins que chacun de nous ait pu avoir », la parole fut donnée à cet homme humble et empathique qui en profita pour demander à l’assistance de prendre avec lui dix secondes pour « penser aux gens qui vous ont aidé à devenir ce que vous êtes, ceux qui ont pris soin de vous et ont voulu pour vous ce qui était le meilleur pour votre vie ». De fait, il en résulta un moment d’intense émotion.
L’article rappelle l’œuvre de Fred Rogers (1) et nous rapporte également dix paroles prononcées par lui. Ces paroles sont bien souvent émouvantes parce que nous ressentons personnellement leur profonde vérité. A partir de l’expression d’une vie en relation, elles font écho en nous. Nous en présentons ici quelques unes.
Des paroles qui touchent et éclairent
« Nous vivons dans un monde dont nous avons besoin de partager la responsabilité. Il est facile de dire : « Ce n’est pas mon enfant, ma communauté, mon univers. Ce n’est pas mon problème ». Et puis, il y a ceux qui voient le besoin et qui y répondent. Je considère ces gens comme mes héros ».
« Qu’est-ce qui pousse toujours plus des gens à vouloir davantage que ce qu’ils pourront utiliser ou avoir besoin ? Je pense tout bonnement que c’est l’insécurité. Comment faire connaître au monde que les signes extérieurs qui font fortune ne sont pas finalement ce qui est important pour être accepté ? »
« Comme être humain, notre rôle est d’aider les gens à réaliser combien chacun de nous est vraiment rare et précieux. A l’intérieur de nous, il y a quelque chose d’unique. C’est notre rôle de nous encourager les uns les autres à discerner cet apport original et à trouver les moyens d’en développer l’expression ».
« Je pense que chacun aspire à être aimé. Et, en conséquence, la plus grande chose que nous puissions faire est d’aider les gens à savoir qu’ils sont aimés et capables d’aimer ».
« Je crois qu’une appréciation positive appartient au registre de la sainteté et que, quand nous reconnaissons ce qui est le mieux dans une personne avec laquelle il nous arrive d’être à un certain moment, nous sommes en train de faire ce que Dieu fait. Ainsi, en appréciant notre prochain, nous participons à une réalité qui est vraiment sacrée ».
Chacune de ces réflexions éclaire le potentiel de notre manière d’être en relation . A certains moments, nous avons été encouragés et fortifiés par l’attention et l’affection qui nous ont été portées. Nous savons combien nos paroles peuvent elles aussi être porteuses d’encouragement et favoriser un processus de guérison et de libération. Fred Rogers nous permet d’aller à l’essentiel : un amour reçu et donné, une reconnaissance mutuelle, une appréciation de ce qui est bon et beau. C’est une harmonie à travers laquelle la présence de Dieu se manifeste.
Comment la toxicomanie est liée à l’isolement social et peut trouver remède dans un environnement positif.
Des études sociologiques ont montré combien la dégradation du tissu social engendrait des maux de tous ordres dans les populations concernées. Et, à l’inverse, tout ce qui relie a des effets positifs. Ce regard est confirmé par une étude récente sur la manière d’affronter la toxicomanie. Auteur d’un livre tout récemment publié : « Chasing theScream. The first and last daysof the war of drugs » (1), JohannHari (2) nous expose la recherche qui lui a permis de démonter les conceptions dominantes orientant la lutte contre ce fléau social et de proposer un éclairage nouveau : une approche environnementale (3).
Qu’est-ce qui pousse des gens à se polariser sur la drogue et à développer une dépendance jusqu’à ce qu’ils ne puissent plus s’arrêter ? Comment pouvons aider ces gens à revenir avec nous ?
Aux Etats-Unis, dans les années 80, une explication de la toxicomanie s’est développée dans une perspective individualiste. Ainsi, s’appuyait-on sur une expérience en psychologie animale : « Mettez un rat seul dans une cage avec deux bouteilles d’eau. L’une est remplie seulement d’eau. L’autre contient de l’eau mélangée avec de l’héroïne ou de la cocaïne. Dans cette expérience, presque à chaque fois, le rat devient de plus en plus obsédé par l’eau mélangée avec de la drogue et en consomme de plus en plus jusqu’à ce qu’il en meure ».
Mais cette explication a complètement été remise en cause par une autre expérience mise en oeuvre par Bruce Alexander, professeur de psychologie à Vancouver. L’expérience précédente, a-t-il observé, se caractérise par la solitude du rat. Le rat est seul dans une cage et il n’a rien d’autre à faire qu’à s’adonner à la drogue. Qu’est ce qui arriverait si on procédait différemment ? Alors, le professeur Alexander a construit un parc pour des rats (« Rat park »). C’est une cage dans laquelle les rats ont à leur disposition des balles colorées, des tunnels, une bonne nourriture et plein d’amis. On y a placé les deux bouteilles : eau pure et eau droguée. Et bien, ces rats pouvant mener une bonne vie ne se sont pas précipité sur l’eau droguée. Pour la plupart, ils l’ont évitée. Aucun n’est mort comme ceux qui vivaient dans leur cage, seuls et malheureux.
« On peut en déduire que la dépendance est une adaptation. Ce n’est pas vous. C’est votre cage ». Le professeur Alexander avance que cette découverte « contredit à la fois la pensée de droite selon laquelle la toxicomanie est une faillite morale provoqué par un laxisme hédoniste et une pensée libérale selon laquelle cette dépendance à la drogue est une maladie se déroulant dans un cerveau chimiquement imprégné ». Et une autre expérience a confirmé sa thèse. Des rats drogués ayant séjourné seuls pendant des dizaines de jours dans la première cage, sont revenus progressivement à une vie normale dans le « parc des rats ».
Mais qu’en est-il dans la vie humaine ? Johann Hari a mené l’enquête. Il a mis en évidence que durant la guerre du Vietnam, un pourcentage important de soldats américains se droguait à l’héroïne. On se demandait ce qui allait arriver lorsqu’ils seraient de retour dans la vie civile. De fait, pour la plupart, ils ont repris une vie normale.
Autre exemple : les malades recevant à l’hôpital des médicaments comprenant de l’héroïne ne tombent pas dans une dépendance lorsqu’ils se retrouvent chez eux. Johann Harli évoque également l’exemple du Portugal qui, il y a quinze ans, a adopté une politique nouvelle en matière de lutte contre la drogue. Les dépenses ont été transférées de la répression à une action pour créer un environnement favorable en terme de logement et d’emploi. Cette politique a été évaluée positivement.
Ainsi, il y a des alternatives aux politiques traditionnelles. La réponse à la dépendance, c’est un milieu relationnel bienfaisant.
« Nous avons besoin d’aimer et d’être en relation » (« We need to connect and love »). Malheureusement, nous avons créé un environnement et une culture qui nous coupent de la connexion humaine ou qui offrent seulement une parodie de relation sur internet… La montée de la toxicomanie est un symptôme d’une maladie plus profonde qui réside dans la manière dont nous vivons ».
Johann Hari rapporte les propos de Bruce Alexander : « Pendant trop longtemps, nous avons parlé exclusivement en terme d’une sortie individuelle de la toxicomanie. Nous avons besoin d’envisager le processus en terme de guérison collective ». Cependant, « cette vérité ne nous remet pas seulement en question sur le plan politique. Elle ne nous oblige pas seulement à changer notre manière de penser. Elle nous appelle aussi à changer nos cœurs ».
Cette étude nous invite à envisager la lutte contre la toxicomanie d’une façon nouvelle depuis une action de terrain jusqu’aux politiques publiques. Cependant, beaucoup plus généralement et d’une façon presque emblématique, elle met en évidence l’influence de l’environnement humain sur les comportements. Cet environnement dépend lui-même de la qualité des relations qui l’induisent. Manifestement, il y a là une réalité qu’on peut observer à différents niveaux et sur différents registres. C’est dire notre responsabilité. C’est dire aussi combien nous avons besoin d’inspiration pour nous engager en ce sens (4).
Jean Hassenforder
(1) Hari (Johann). Chasing the scream. The first and last days of the war on drugs. Bloomsberry Publishing, 2015 Ce livre est présenté et mis en perspective sur : Wikipedia. The free encyclopedia : http://en.wikipedia.org/wiki/Chasing_the_Scream
(2) Le parcours de Johann Hari a été aussi l’objet de critiques. On pourra consulter sa biographie dans : Wikipedia.The free encyclopedia : http://en.wikipedia.org/wiki/Johann_Hari
(4) Bien entendu, les inégalités et la domination socioéconomique entravent le développement d’un environnement positif. Cependant, on observe aujourd’hui une montée des aspirations en quête d’un environnement relationnel et en demande de convivialité. Voir : « Emergences d’espaces conviviaux et aspirations contemporaines » : http://www.temoins.com/evenements-et-actualites/recherche-et-innovation/etudes/emergence-despaces-conviviaux-et-aspirations-contemporaines-troisieme-lieu-l-third-place-r-et-nouveaux-modes-de-vie On rejoint par là le message d’amour de l’Evangile et une vision de l’œuvre de l’Esprit. C’est la recherche d’une communauté telle que l’exprime très bien le théologien Jürgen Moltmann : « L’expérience de la communauté est expérience de la vie, car toute vie consiste en échanges mutuels de moyens de subsistances et d’énergie et en des relations de réciprocité. Il n’y a pas de vie sans relations de communauté qui lui soient propres. Une vie isolée et sans relations, c’est à dire individuelle au sens littéral du terme… est une réalité contradictoire en elle-même. Elle n’est pas viable et elle meurt. Une absence totale de relations représente la mort totale. C’est pourquoi la « communion de l’Esprit Saint » n’est qu’une autre expression pour désigner « l’Esprit qui donne la vie ». La vie naît de la communauté, et là où naissent des communautés qui rendent la vie possible et la promeuvent, là l’Esprit de Dieu est à l’œuvre… Instaurer la communauté et la communion est manifestement le but de l’Esprit de Dieu qui donne la vie dans le monde de la nature et dans celui des hommes. Tous les êtres créés existent non par eux-mêmes, mais en d’autres, et ont besoin, pour cette raison, les uns des autres, et ils trouvent leur consistance les uns dans les autres » (Moltmann (Jürgen). L’Esprit qui donne la vie. Seuil, 1999 (p 297-298) Ouverture à la pensée de Moltmann dans le blog : « L’Esprit qui donne la vie » : http://www.lespritquidonnelavie.com/ Sur ce blog : « Vivre en harmonie » : https://vivreetesperer.com/?p=43
Dans son livre : « Sa présence dans ma vie » (1), OdileHassenforder nous guide dans une recherche de plénitude et partage avec nous une expérience qui a changé sa vie.
A certains moments, nous nous interrogeons : Qu’avons-nous fait de notre vie ? Qu’en faisons-nous aujourd’hui ? Notre vie s’inscrit-elle dans une relation qui lui donne du sens? Odile répond à ces questions dans la joie de la communion avec un Dieu relationnel et une relation confiante avec Jésus.
J’accueille au plus profond de moi la parole de Jésus dans Matthieu 25. 21 :
« C’est bien, bon et fidèle serviteur : tu as été fidèle en peu de choses, je te confierai beaucoup : entre dans la joie de ton maître »
Etre bon et fidèle serviteur ? (2)
J’ai conscience de ce don gratuit que tu me donnes d’approfondir la relation avec toi, Seigneur, Père, Fils et Saint Esprit.
Tu es l’Eternel qui dépasse temps et espace.
Mon désir est grand :
– d’être l’arbre planté près de l’eau (Psaume 1)
– le sarment de la vigne (Jean 15)
c’est à dire de porter beaucoup de fruits.
Je ne cherche plus à servir, selon moi, bonne action à vivre selon la sollicitation, la demande d’autrui.
C’est vrai que tu m’as donné ce talent
De sentir la blessure de l’autre
D’être en souci pour l’autre
De lui tendre la main.
Et actuellement, tu me donnes plus de discernement
Pour ne pas me mettre au service de l’autre
Mais à ton service pour l’autre
Sachant que c’est toi qui t’en occupe.
Tu me fais ressentir, en me donnant l’énergie d’agir, ce courant de Vie qui me traverse vers l’autre
Et cela, dans la joie de ta Vie
de ta Présence
de ton Amour.
LA JOIE ? Seuls peuvent la connaître ceux qui m’aiment et deviennent mes amis.
Evangile de Jean.15.15
Je ne vous appelle plus serviteurs, mais mes amis..
Parce que je vous ai fait connaître tout ce que j’ai appris de mon Père..
Vous ne m’avez pas choisi… Moi, je vous ai choisis..
Je vous ai chargés d’aller, de porter du fruit, du fruit durable..
Ainsi le Père vous donnera tout ce que vous lui demanderez en mon nom.
Ce que je vous demande : AIMEZ vous les uns les autres…
Odile Hassenforder
(1) Odile Hassenforder. Sa présence dans ma vie. Parcours spirituel Empreinte Temps présent, 2011. Voir : La joie, p 125-126 . C’est ici le texte initial écrit en janvier 2006
(2) Odile cite un chapitre du livre : Dieu appelle (La Baconnière) : « Vies de discrète fidélité p 289-290)
– Serviteurs : « disciples obscurs, ceux qui Me servent sans se faire valoir, humblement mais fidèlement », humbles, patients, fidèles…
– « Ceux qui portent bravement leur croix en souriant au monde ».
– Récompense : la Joie au sein même de la souffrance, l’épreuve, la pauvreté. « Non seulement celui qui me sert, mais celui qui souffre
AVEC MOI ».
– Avec moi, parce que toujours plus à moi , Dispensateur de la Joie.