« Prayer of the mothers » : un chant mobilisateur de Yael Deckelbaum pour la marche des femmes juives et arabes unies pour la paix.

 

Dans le contexte de la violence qui sĂ©vit entre israĂ©liens et palestiniens, exacerbĂ©e par l’appareil rĂ©pressif d’IsraĂ«l, un mouvement s’est levĂ© pour proclamer un esprit de paix. Ce mouvement : « Women wage peace » (Les femmes font campagne pour la paix) est apparu en 2014 Ă  l’occasion du conflit armĂ© Ă  Gaza. Il a pris son essor et a rĂ©alisĂ© en 2016 une marche pacifique qui s’est imposĂ©e par sa dynamique et sa visibilitĂ©.

Le 4 octobre 2016, ce mouvement pour la paix a commencĂ© une marche de l’espĂ©rance qui a durĂ© deux semaines. Pendant ces deux semaines, des milliers de femmes juives et arabes israĂ©liennes ont marchĂ© du nord d’IsraĂ«l vers JĂ©rusalem, en rĂ©clamant un accord de paix IsraĂ«l-Palestine qui serait respectueux, non violent et acceptĂ© par les deux parties. La marche a culminĂ© le 19 octobre avec plus de 4 000 femmes rĂ©alisant une priĂšre conjointe juive et musulmane pour la paix au Qasr el Yahud Ă  l’extrĂ©mitĂ© nord de la Mer morte. Ce mĂȘme soir, 15 000 personnes se sont rassemblĂ©es pour protester et appeler Ă  l’action devant la rĂ©sidence du Premier ministre israĂ©lien (1).

 

Un chant de marche : « The prayer of the mothers »

Cette grande manifestation a trouvĂ© son chant de marche dans un hymne : « The prayer of the mothers » (la priĂšre des mĂšres). Ce chant a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© par une jeune et talentueuse musicienne israĂ©lienne, Yael Deckelbaum, interprĂšte et compositrice qui s’est engagĂ©e dans le mouvement et l’a accompagnĂ© dans son action (2). Reconnue dans son pays et Ă  l’étranger comme une artiste d’excellence, fondatrice et membre du lĂ©gendaire trio : Habanot Nechama, Yael a Ă©crit le chant : « Prayer of the mothers » et l’a enregistrĂ© avec des responsables de « Women wage peace ». Yael a travaillĂ© Ă©galement avec Lehmah Gbowee, une femme libĂ©riane qui a reçu le prix Nobel de la paix pour sa mobilisation des femmes en faveur de la paix ayant dĂ©bouchĂ© sur la fin de la seconde guerre civile au LibĂ©ria en 2003.

 

 

« Prayer of the mothers » est chanté dans des contextes divers et sous des formes différentes (3).

Ses paroles nous entrainent sur le chemin de la fraternité et de la paix comme en témoignent ces quelques extraits.

 

« Chuchotement du vent de l’ocĂ©an

Qui souffle trĂšs loin

Le linge qui flotte

Contre l’ombre d’un mur

 

Entre le ciel et la terre

Il y a des gens qui veulent vivre en paix

Ne baisse pas les bras

Continue Ă  rĂȘver

De paix et de prospérité

 

Quand est-ce que les murs de la peur fondront ?

Quand retournerais-je de l’exil

Et nos portes s’ouvriront

A ce qui est vraiment bon ?

 

Les murs de la peur fondront un jour

Et je rentrerai de l’exil

Les portes s’ouvriront

A ce qui est vraiment bon

 

Du Nord au Sud

De l’Ouest à l’Est

Ecoute la priĂšre des mĂšres

Apporte leur la paix

 

 

Ce chant a accompagnĂ© la marche de la paix. Il porte de bout en bout le clip rĂ©alisĂ© par « Women wage Peace » (4) pour communiquer le message et l’esprit de cet Ă©vĂ©nement. Ce clip transmet une symbolique forte Ă  travers ses diffĂ©rentes sĂ©quences :

° Des jeunes femmes, de blanc vĂȘtues, se rassemblant dans le dĂ©sert, et exprimant une convivialitĂ© fraternelle dans un chant partagĂ©, expression de paix.

° Dans le mĂȘme Ă©lan et dans le mĂȘme esprit, des femmes de toutes origines manifestant leur solidaritĂ© et leur fraternitĂ© en des gestes significatifs de tendresse et de reconnaissance.

° L’intervention de Lehmah Gbowee, prix Nobel de la paix, pour encourager ce mouvement : « Je voulais vous faire savoir que la paix est possible dans le monde oĂč nous vivons quand des femmes intĂšgres et de foi se manifestent pour le futur de leurs enfants ».

° De bout en bout, la dynamique de cette marche commune revĂȘt une dimension Ă©pique et nous entraine dans un dĂ©passement de nous-mĂȘme.

 

Dans cette dĂ©marche,  convergent des femmes dans une pleine humanitĂ© d’amour, d’empathie, de respect. Pour nous, nous percevons dans cet Ă©vĂ©nement un souffle, le souffle de l’Esprit. L’Esprit abolit les barriĂšres et unifie comme nous l’apprend l’expĂ©rience de la PentecĂŽte (6). Comme en d’autres Ă©vĂšnements historiques, l’espĂ©rance ouvre les portes de la libĂ©ration. Nous accueillons ce chant dans un mouvement d’émotion, de sympathie et d’émerveillement.

 

J H

(1)            Sur le site du journal israĂ©lien, Haaretz, un article qui fait le point sur cet Ă©pisode : « Prayer of the mothers » honors thousandsof jewish and arab women marching for peace » : http://www.haaretz.com/israel-news/1.754127 On trouvera par ailleurs d’autres articles sur cet Ă©vĂšnement important intervenu en octobre 2016 : Sur +Positivr : « des milliers de femmes en marche pour la paix » : http://positivr.fr/women-wage-peace-paix-israel-palestine-femmes/ Sur le site du Monde : « En IsraĂ«l, le combat des femmes pour la paix » : http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2016/10/20/en-israel-le-combat-des-femmes-pour-la-paix_5017432_3218.html Le mouvement « Women wage peace » s’est inspirĂ© de mouvements analogues pour la paix en Irlande du Nord et au LibĂ©ria. Il milite pour des nĂ©gociations de paix entre IsraĂ«l et l’autoritĂ© palestinienne. Il accueille des personnes trĂšs diverses, y compris des hommes. Il comprend aujourd’hui plus de 20 000 membres. Une information complĂšte sur Wikipedia : https://en.wikipedia.org/wiki/Women_Wage_Peace

(2)            Yael Deckelbaum. Biography : http://www.yaeldeckelbaum.com/en/biography

(3)            Yael Deckelbaum and The Prayer of the Mothers Ensemble- The Land : https://www.youtube.com/watch?v=bU8Fqi1iFxc

(4)            Clip de la marche de l’espoir conduite par « Women wage Peace » et animĂ©e, de bout en bout, par le chant : « The prayer of the mothers » : « Yael Deckelbaum/ Prayer of the mothers- Official video : https://www.youtube.com/watch?v=YyFM-pWdqrY&list=PLKZY04ztdn4vRnQqcu2z0UzBWtTV9FL9s

(5)            PentecÎte : Actes 2.1-21

 

 

Sur ce blog, voir aussi :

« Aujourd’hui, nous sommes tous frĂšres Ă  Bamako » : https://vivreetesperer.com/?p=1101

« La vision mobilisatrice de Martin Luther King » : « I have a dream »

https://vivreetesperer.com/?p=1493

Dynamisme de vie dans un monde qui se construit

Jack-Ma - ALIBABAJack Ma, fondateur d’Alibaba

Toutes les informations affluent pour nous dire que nous vivons dans un monde de plus en plus interconnectĂ©, une mondialisation qui se poursuit Ă  vive allure. Et la Chine fait dĂ©sormais partie de cet univers. Cependant, pour certains, elle peut paraĂźtre encore lointaine, un peu Ă©trange selon la reprĂ©sentation de notre histoire. Et mĂȘme parfois, cette Ă©vocation peut engendrer une certaine crainte. La mĂȘme crainte apparaĂźt vis Ă  vis de la mondialisation. Et si la crainte l’emporte sur la conscience que nous participons Ă  une aventure qui peut se rĂ©vĂ©ler positive pour nous tous, alors on entre dans la dĂ©fense et le repli. Nous y sommes. C’est le moment oĂč les populismes s’accompagnent de rĂ©flexes nationalistes. Alors, en regard, il nous faut poursuivre et amplifier le grand rĂ©cit de ce qui unit, de ce qui est en train de se construire partout dans le monde, un monde qui doit faire face Ă  des dĂ©fis communs, de la misĂšre au saccage de la nature.

De belles histoires nous sont dĂ©jĂ  familiĂšres. Cependant, en frĂ©quentant internet, on dĂ©couvre des personnalitĂ©s jusque lĂ  ignorĂ©es. Ainsi, Ă  travers des vidĂ©os, nous avons fait connaissance de Jack Ma, le fondateur d’Alibaba, la grande entreprise de distribution chinoise Ă  l’égale d’Amazon. A priori, qu’est ce qui pouvait nous intĂ©resser dans cette manifestation d’un capitalisme Ă©tranger ? Or nous nous nous sommes sentis concernĂ©s et encouragĂ©s par l’histoire de Jack Ma. En effet, c’est l’histoire d’un homme qui, ayant grandi en terre chinoise, s’est ouvert Ă  la culture internationale, en dĂ©passant les enfermements et en crĂ©ant dans son pays une dynamique Ă©conomique.

Sa biographie est aujourd’hui bien accessible (1).
Jack Ma a appris l’anglais en frĂ©quentant et en accompagnant des touristes . Il est devenu professeur d’anglais. Cette familiarisation avec la culture anglophone lui a permis d’effectuer un sĂ©jour aux Etats-Unis oĂč il a dĂ©couvert le potentiel d’internet. DĂšs lors, dans les annĂ©es 1990, il s’engage dans la crĂ©ation d’entreprises fondĂ©es sur l’utilisation d’internet. Ce parcours dĂ©bouche finalement sur la crĂ©ation d’Alibaba qui connaĂźt un immense succĂšs en transformant les conditions de la distribution commerciale en Chine.
Cependant, lorsqu’on entend Jack Ma nous raconter son parcours, on voit combien la rĂ©ussite n’était pas acquise d’avance. Au contraire, Jack Ma nous rapporte la longue sĂ©rie des refus qui ont Ă©tĂ© opposĂ©s Ă  ses candidatures Ă  diffĂ©rents emplois, les nombreux Ă©checs qu’il a rencontrĂ©s. C’est dire l’obstination et la persĂ©vĂ©rance dont il a fait preuve. Toujours attentif aux situations, aux besoins , il a su saisir les opportunitĂ©s. Ce chemin, il l’a parcouru avec d’autres, dans un esprit de collaboration et une capacitĂ© de leadership. Il a Ă©tĂ© portĂ© par une inspiration toujours positive : ne pas se plaindre, tirer parti des Ă©checs, partir Ă  nouveau. Cet homme sympathique est appelĂ© aujourd’hui Ă  s’exprimer dans des vidĂ©os en vue de former et d’encourager des entrepreneurs (2)

Mais si cette histoire nous interpelle, ce n’est pas d’abord en raison des qualitĂ©s entrepreneuriales de Jack Ma, c’est parce que sa conduite et son discours tĂ©moignent Ă©galement d’un humanisme qu’il est bon de pouvoir reconnaĂźtre et apprĂ©cier dans un univers qui ne nous est pas familier. Jack Ma a conscience de la finalitĂ© de service de son entreprise. Il met en Ă©vidence les qualitĂ©s des femmes dans ce travail et le rĂŽle majeur qu’elles jouent dans ce domaine. C’est un engagement ferme en faveur de la promotion fĂ©minine. Jack Ma travaille avec de nombreuses petites entreprises et il soutient et encourage les petits entrepreneurs. Jack n’oublie pas les premiĂšres annĂ©es oĂč il a Ă©tĂ© un professeur d’anglais trĂšs apprĂ©ciĂ© par les Ă©tudiants. Il encourage les jeunes. C’est une autre illustration de son sens de la relation. Ainsi accorde-il une grande importance Ă  l’éducation. Et son approche est humaniste. Ainsi, reconnaissant le rĂŽle de plus en plus grand qui va ĂȘtre jouĂ© par les machines, il nous dit qu’il appartient Ă  l’éducation de contribuer au dĂ©veloppement de ce qui est proprement humain : « les valeurs, le croire, la pensĂ©e indĂ©pendante, le travail en Ă©quipe, le soin portĂ© aux autres ». Et, en cc sens, quelles disciplines privilĂ©gier ? « Les sports, la musique, la peinture, les arts
 » (3).

https://www.youtube.com/watch?v=rHt-5-RyrJk

Face Ă  l’agitation qui nous entraine, Ă  un appĂ©tit effrĂ©nĂ© de consommation, il nous appelle Ă  la sagesse (4). « Chaque dĂ©sastre environnemental est un reflet de l’ñme humaine Parce qu’on a besoin de trop de choses, on dĂ©truit beaucoup de choses. Tout ce que l’on veut, c’est avoir plus. On en veut toujours plus : aller sur la lune, aller sur Mars.. etc. On regarde toujours vers l’extĂ©rieur. Nous les ĂȘtres humains, on ne regarde jamais vers l’intĂ©rieur. Si vous ne faites pas d’introspection, vous ne serez jamais sage. Si vous n’ĂȘtes pas sage, vous ne savez pas ce que vous avez envie. Aujourd’hui, les ĂȘtres humains disposent de bien plus de ce qu’ils peuvent s’attendre Ă  recevoir. Alors la pollution, tout ce qui arrive, c’est parce que les ĂȘtres humains deviennent cupides et arrogants. C’est pour cela que la technologie des big data essaie maintenant de percevoir Ă  l’intĂ©rieur de l’ĂȘtre humain. Croyez-moi ! la machine vous connaitra mieux que vous ne vous connaissez vous-mĂȘme.. Donc, selon moi, dans une pĂ©riode de datas, dans les cent prochaines annĂ©es, les ĂȘtres humains doivent essayer de faire preuve d’introspection. On verra beaucoup de choses horribles en nous. Quand la connaissance est tournĂ©e vers l’extĂ©rieur, on voit de mauvaises choses chez les autres alors qu’on peut voir les belles choses si on regarde Ă  l’intĂ©rieur. C’est la philosophie chinoise ».

https://www.youtube.com/watch?v=bM0vNSE8yeI

Dans un monde inquiet et tourmentĂ© oĂč les menaces abondent, il est important de nous rassembler dans une inspiration constructive. Nous avons besoin d’entendre qu’il y aujourd’hui un grand nombre d’initiatives positives. Certaines, comme les organisations humanitaires, sont bien connues. Partout, dans le monde, des hommes de bonne volontĂ© sont Ă  l’Ɠuvre (5). Nous pouvons Ă©galement percevoir des Ă©volutions dans les mentalitĂ©s, des Ă©mergences qui adviennent ou se prĂ©parent. Ce rĂ©cit de vie du fondateur d’une grande entreprise chinoise apparait dans ce contexte. Pour certains, il n’est pas attendu dans ce que nous percevons de ces innovations positives, mais, de fait, il nous apporte un Ă©clairage complĂ©mentaire et convergent. Nous avons bien ce qui peut ĂȘtre redoutĂ© et redoutable dans le contexte chinois. Nous savons aussi qu’à partir d’une immense pauvretĂ©, la Chine a pu engendrer une classe moyenne qui compte plusieurs centaines de millions de personnes.
Si le rĂ©cit de Jack Ma nous parait si important, c’est justement parce qu’il intervient dans un univers que, pour beaucoup d’entre nous, nous connaissons mal. Il nous dit qu’à travers le commerce, des relations nouvelles s’ouvrent Ă  l’échelle du monde. Il nous dit que des rĂ©alitĂ©s nouvelles peuvent apparaĂźtre dans de contextes inattendus. Dans le contexte d’une grande et dynamique entreprise, le rĂ©cit de Jack Ma tĂ©moigne d’un humanisme qui se dit aussi en d’autres points de la planĂšte .

J H

(1) Une biographie de Jack Ma est accessible sur Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jack_Ma Au World Economic Forum, Jack Ma, interviewĂ© par Abi Ramanan, au regard de son parcours et son expĂ©rience de la dynamique d’Alibaba, expose sa vision de la transformation du monde et sa conception de la vie(Sous-titrĂ©) : https://www.youtube.com/watch?v=V9ENp2BQ8lE Sur Alibaba : Duncan Clark. Alibaba The house that Jack Ma built. Harpercollins. Un article rĂ©cent sur Alibaba paru en France : https://www.capital.fr/entreprises-marches/jack-ma-son-alibaba-detronera-t-il-amazon-1322604
(2) « De la motivation à la réussite » ArgEntrepreneur. Présenté par Sonny Court. Interview traduit en français : https://www.youtube.com/watch?v=Bp6EUCr3du8
(3) Jack Ma on the future of education : https://www.youtube.com/watch?v=rHt-5-RyrJk
(4) La philosophie de la vie selon Jack Ma : https://www.youtube.com/watch?v=bM0vNSE8yeI
(5) Partager les solutions. Propager les innovations. C’est changer le monde. http://www.vivreetesperer.com/partager-les-solutions-propager-les-innovations-cest-changer-le-monde/

Et si nous Ă©duquions nos enfants Ă  la joie ? Pour un printemps de l’éducation !

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 Le tĂ©moignage d’Antonella Verdiani

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En ce temps de crise, un monde se dĂ©fait et un autre commence Ă  naĂźtre. Nous percevons et nous ressentons les menaces et les pertes, mais nous avons besoin de voir ce qui est en train de germer, la promesse du renouveau. Car c’est ainsi que nous pourrons quitter l’ordre ancien et reconnaĂźtre l’avenir auquel nous sommes appelĂ©s.

A cet Ă©gard, l’éducation est un champ privilĂ©giĂ©.

Pour notre part, au long des annĂ©es, ayant participĂ© Ă  un courant de pensĂ©e et d’action militant pour des formes nouvelles d’éducation permettant aux enfants et aux jeunes de grandir dans le respect de leur personnalitĂ© et le dĂ©veloppement de leur crĂ©ativitĂ© (1), nous pouvons constater les pesanteurs qui font obstacles Ă  la transformation des pratiques Ă©ducatives (2). Et pourtant, aujourd’hui, celles-ci sont appelĂ©es Ă  changer en fonction de la poussĂ©e d’internet (3) et de nouvelles conceptions pĂ©dagogiques (4). Une pression accrue s’exerce en faveur du changement en se manifestant dans des aspirations nouvelles.

A cet Ă©gard, l’appel d’Antonella Verdiani (5) en faveur d’un « printemps de l’éducation » et le mouvement qui se dĂ©veloppe en ce sens, nous paraĂźt un signe prometteur. Mais cet appel prend aussi la forme d’un tĂ©moignage Ă©mouvant. Antonella Verdiani nous raconte une expĂ©rience vĂ©cue dans son enfance oĂč elle s’est sentie rejetĂ©e par la contrainte des normes culturelles et elle nous rapporte sa recherche sur le sens de l’éducation. « Et si nous Ă©duquions nos enfants Ă  la joie ! ». Voici une interpellation qui nous touche et nous mobilise. Cette interview (6) a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e dans le cadre d’une confĂ©rence locale de « Ted » (7).

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Antonella Verdiani nous prĂ©sente un Ă©pisode qui a marquĂ© sa vie d’enfant. « J’ai dix ans. C’est le jour de l’examen pour entrer Ă  l’école de la Scala de Milan ». Elle nous dĂ©crit les lieux : un grand escalier, puis une Ă©norme salle oĂč deux dames, « au sourire assez figé », accueillent une vingtaine de fillettes. Le piano dĂ©marre une musique de Chopin. « Vous pouvez danser Ă  votre façon », leur dit-on. Antonella s’élance dans la danse. Elle se sent portĂ©e par la musique.  Elle s’exprime avec la passion qui lui est coutumiĂšre et dont son professeur de danse l’avait fĂ©licitĂ©. « Toi, tu as la passion ! ». Et puis, il faut passer une inspection devant les deux dames. L’une d’entre elle regarde ses pieds avec insistance. Elle appelle sa collĂšgue. « Mes pieds sont vraiment bizarres
 Je dois ĂȘtre vraiment quelqu’un de bizarre » se dit la petite fille. On passe ensuite dans une salle de classe. Les enfants sont appelĂ©es un Ă  un Ă  s’asseoir Ă  gauche ou Ă  droite. Et puis vient la dĂ©cision. « A droite, les Ă©lĂšves que nous avons sĂ©lectionnĂ©es. A gauche, celles que nous n’avons pas retenues ». « J’étais Ă  gauche », raconte Antonella qui Ă©clate en sanglots. « Maman, on m’a refusé ! », dit-elle Ă  sa mĂšre. « Le monde magnifique d’une petite fille vouĂ©e Ă  la danse s’écroule ». Pendant des annĂ©es aprĂšs cet Ă©pisode, elle a vĂ©cu comme si elle avait perdu le droit d’ĂȘtre heureuse.

Et pourtant, sa joie de vivre n’a pu ĂȘtre brisĂ©e. « Un jour, je me suis senti libre du sortilĂšge de l’échec ». « Il n’est pas question d’étaler ma vie », nous dit Antonella. Un incident comme celui lĂ , cela arrive. « C’est normal. C’est banal ». C’est arrivĂ© Ă  moi. Cela peut arriver Ă  vous ou peut-ĂȘtre Ă  vos enfants. Et bien, non, ce n’est pas normal ! « Cet Ă©pisode est la manifestation d’une cruautĂ© ordinaire que notre monde, notre systĂšme Ă©ducatif continue d’infliger aux enfants en tuant leur capacitĂ© de rĂȘver. Et moi, je ne veux pas ĂȘtre complice de cela ».

Antonella  a repris des cours de danse, puis elle est entrĂ©e Ă  l’universitĂ© oĂč elle a soutenu une thĂšse en sciences de l’éducation : « Eduquer Ă  la joie ». Et, dans cette interview, elle nous rapporte sa dĂ©couverte. En Ă©tymologie, le mot joie dĂ©rive d’un mot sanscrit : yuj qui signifie : lien, connexion, reliance. Les enfants, quand ils sont en train d’apprendre librement et passionnĂ©ment, sont dans cet Ă©tat d’ñme. Ils apprennent sans fatigue. Etre reliĂ©e, Antonella en a l’expĂ©rience. « Pour moi, cette reliance me ramĂšne Ă  ce que j’ai vĂ©cu lorsque j’ai dansĂ© sans fatigue. C’était ĂȘtre en contact avec le monde, avec le ciel et la terre, avec les animaux, avec les fleurs, avec les gens, avec vous  ». Et si on commençait Ă  Ă©duquer Ă  partir des dons de chacun ! En « permaculture, une pratique Ă©cologique, on cultive Ă  partir de ce que est dĂ©jĂ  fertile. « Si on pouvait apprendre Ă  partir de notre richesse, de notre trĂ©sor, ce serait rĂ©volutionner l’éducation, changer la face du monde ».

Antonella Verdiani nous parle des pionniers qui ont luttĂ© pour changer l’éducation : Maria Montessori, Steiner, Freinet
 Leur influence s’est heurtĂ©e Ă  bien des obstacles. « La bonne nouvelle, c’est qu’aujourd’hui de plus en plus d’enseignants, d’éducateurs et de parents inventent de nouvelles pratiques Ă©ducatives fondĂ©es sur la libertĂ©, le respect des rythmes de l’enfant, la capacitĂ© de rĂȘver ». « Ma joie, c’est de connecter
 Aussi, avec un groupe de personnes qui savent encore rĂȘver, j’ai fondĂ© une alliance pour le renouveau Ă©ducatif. Parce que tout est dĂ©jĂ  là
 Il faut simplement relier. C’est Ă©duquer Ă  la joie ». C’est le « printemps de l’éducation ». Ce mouvement prend de l’essor Ă  travers un site internet et connecte de nombreuses initiatives (8). Cet appel s’achĂšve sur une ouverture : une parole de Maria Montessori : « La joie d’apprendre est autant indispensable Ă  l’intelligence que la respiration au coureur  » « et au danseur ! », ajoute Antonella.

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Ce tĂ©moignage Ă©mouvant nous invite Ă  espĂ©rer et Ă  agir. Une nouvelle vague de renouveau Ă©ducatif apparaĂźt aujourd’hui. Et elle s’inscrit dans une dynamique de connexion. Lien, connexion, reliance, ce sont lĂ  des termes que nous avons dĂ©jĂ  rencontrĂ©s dans la recherche de Rebecca Nye sur la spiritualitĂ© des enfants : « Dans l’enfance, la spiritualitĂ© porte particuliĂšrement sur le fait d’ĂȘtre en relation, de rĂ©pondre Ă  un appel, de se relier Ă  plus que moi seul, c’est Ă  dire aux autres, Ă  Dieu, Ă  la crĂ©ation ou Ă  un profond sens de l’ĂȘtre intĂ©rieur (inner sense of self) » (9). Dans ce contexte, ce mouvement pour une Ă©ducation nouvelle nous apparaĂźt comme un signe d’une Ă©volution profonde dans les esprits en cours actuellement. Et oui, nous pouvons recevoir l’appel : « Et si nous Ă©duquions nos enfants Ă  la joie ? » comme une ouverture vers l’avenir et comme une promesse.

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J H

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(1)            Une revue en perspective. Education et dĂ©veloppement ? Textes prĂ©sentĂ©s par Louis Raillon et Jean Hassenforder. L’Harmattan, 1998. Inspiration de l’éducation nouvelle et nouvelles approches  pĂ©dagogiques.

(2)            Comment le systÚme scolaire français engendre un manque de confiance : Une analyse dans le livre : Algan (Yann), Cahuc (René), Zylbergerg (André). La fabrique de la défiance. Grasset, 2012. Sur ce blog : « Promouvoir la confiance dans une société de défiance. Transformer les mentalités et les institutions. Réformer le systÚme scolaire. Les pistes ouvertes par Yann Algan » : https://vivreetesperer.com/?p=1306

(3)            Sur ce blog : « Une nouvelle maniĂšre d’ĂȘtre et de connaĂźtre. « Petite poucette » » de Michel Serres » : https://vivreetesperer.com/?p=820

« Une rĂ©volution en Ă©ducation. L’impact d’internet pour un nouveau paradigme en Ă©ducation » : https://vivreetesperer.com/?p=1565

(4)            « Laissez-les lire ! Une dynamique relationnelle et Ă©ducative » (PrĂ©sentation du livre de GeneviĂšve Patte : « Laissez-les lire ») : https://vivreetesperer.com/?p=523 « Une nouvelle maniĂšre d’enseigner : Participer ensemble Ă  une recherche de sens : L’approche pĂ©dagogique de Britt Mari Barth » : https://vivreetesperer.com/?p=1169

On doit Ă©galement mettre l’accent sur une dĂ©couverte rĂ©cente : En proposant un ordinateur Ă  des enfants de bidonville, le chercheur indien, Sugata Mitra, a montrĂ© comment ces enfants Ă©taient capables d’apprendre des savoirs trĂšs complexes en s’entraidant sans assistance extĂ©rieure. C’est dire le potentiel d’apprentissage qui rĂ©side en chaque enfant. C’est un paradigme rĂ©volutionnaire en matiĂšre d’éducation. Voir sur Wikipedia : http://en.wikipedia.org/wiki/Sugata_Mitra et http://fr.wikipedia.org/wiki/Sugata_Mitra ExpĂ©rimentations et recherches rĂ©centes sont prĂ©sentĂ©es sur Ted par Sugata Mitra : « Construire une Ă©cole dans le Cloud » : https://www.ted.com/talks/sugata_mitra_build_a_school_in_the_cloud?language=fr

(5)            Docteur en Sciences de l’Education, Antonella Verdiani a travaillĂ© plus de 18 ans Ă  l’Unesco oĂč elle Ă©tait responsable de questions d’éducation. En 2014, elle a publiĂ© un livre : « Ces Ă©coles qui rendent les enfants heureux. ExpĂ©riences et mĂ©thodes pour Ă©duquer Ă  la joie » (Actes Sud). Actuellement consultante et formatrice, elle est la fondatrice du collectif : « Le printemps de l’éducation », constituĂ© de reprĂ©sentants de la sociĂ©tĂ© civile en France et Ă  l’étranger et qui a pour objectif l’organisation de rencontres entre les acteurs du changement en matiĂšre d’éducation. Un article d’Antonella Verdiani sur le site du Huffingtonpost : « Si on Ă©duquait Ă  la joie ? » : http://www.huffingtonpost.fr/antonella-verdiani/eduquer-enfants-joie_b_3643196.html Parcours et vision d’Antonella Verdiani dans une interview sur Moodstep : https://www.youtube.com/watch?v=dAvYhjQSkPI

(6)            TĂ©moignage d’Antonella Verdiani : « Et si nous Ă©duquions nos enfants Ă  la joie ? »

Sur le site : Printemps de l’éducation : http://www.printemps-   education.org/slide/et-si-nous-eduquions-nos-enfants-a-la-joie/

(7)            TED x Vaugirard Road : organisation et contenu des rencontres locales patronnĂ©es par TED VidĂ©os de tĂ©moignages  et d’exposĂ©s souvent Ă©clairants http://www.tedxvaugirardroad.com/

(8)            Le printemps de l’éducation. Un mouvement pour le renouveau de l’éducation : vision, participants, gouvernance et activitĂ©s
 http://www.printemps-education.org/

Pendant longtemps, en regard des adultes, le statut de l’enfant a Ă©tĂ© nĂ©gligeable. Les paroles de JĂ©sus dans les Ă©vangiles sur la valeur primordiale des enfants ont Ă©tĂ© largement mĂ©connues. Au XXĂš siĂšcle, Maria Montessori joue un rĂŽle de pionniĂšre en mettant en Ă©vidence le potentiel du petit enfant. Elle parle de celui-ci en terme d’« embryon spirituel ». Aujourd’hui oĂč le concept de spiritualitĂ© est dĂ©sormais reconnu, la recherche rĂ©alisĂ©e par RĂ©becca Nye et David Hay auprĂšs d’enfants britanniques de 6 Ă  10 ans met en Ă©vidence leurs aptitudes spirituelles en terme de « conscience relationnelle » : Voir : Rebecca Nye. Children’s spirituality. What it is and why it matters. Church House Publishing, 2009. Voir sur ce blog : « L’enfant, un ĂȘtre spirituel » : https://vivreetesperer.com/?p=340 Nous percevons un lien entre renouveau de l’éducation et approche spirituelle si bien que nous pouvons en parler en terme de : « signe des temps ».

La bonté humaine

La bonté humaine. Est-ce possible ?

La recherche et l’engagement de Jacques Lecomte.

 

Quel est notre regard sur l’homme, sur l’humanité ? Comment nous reprĂ©sentons-nous les ĂȘtres humains ? PlutĂŽt nĂ©gativement ou plutĂŽt positivement, plutĂŽt avec mĂ©fiance ou plutĂŽt avec confiance ? L’orientation de nos reprĂ©sentations va influer sur nos comportements.

Pour certains, l’homme est plutĂŽt mauvais. Le jugement est sĂ©vĂšre. L’attention se porte principalement sur le mal qu’il engendre ou a engendrĂ©. Cette condamnation se manifeste dans des thĂ©ories philosophiques ou religieuses, et jusque dans des approches qui se veulent scientifiques. Dans la vie quotidienne elle-mĂȘme, une critique gĂ©nĂ©ralisĂ©e prĂ©vaut. Elle dĂ©bouche sur le cynisme. La dĂ©fiance l’emporte. Ce pessimisme engendre dĂ©mobilisation et absence d’espoir.

 

Pourquoi ce livre,

 

Bien sĂ»r, dans la rĂ©alitĂ© humaine, les opinions ne sont pas aussi tranchĂ©es, mais il y a bien des orientations dominantes. Le choix que nous faisons en la matiĂšre ne relĂšve pas seulement de notre rĂ©flexion. Il a des implications majeures pour nous-mĂȘme et pour les autres. Ainsi, le livre de Jacques Lecomte intitulé : « La bontĂ© humaine » (1) nous concerne tous. Pour certains, un tel Ă©noncĂ© est presque une provocation. Ils n’y voient qu’idĂ©alisme, voire une idĂ©ologie opposĂ©e. Pour d’autres, attentifs Ă  voir la bontĂ© autour d’eux, ce titre rĂ©pond Ă  une attente. De fait, l’auteur nous apporte un Ă©clairage, car il s’appuie sur une approche scientifique pour mettre en lumiĂšre : « altruisme, empathie, gĂ©nĂ©rosité » dans les comportements humains.

Il nous explique comment il a Ă©tĂ© amenĂ© Ă  Ă©crire ce livre : « Lorsque j’ai parlĂ© autour de moi de ce livre que j’étais en train d’écrire, cela n’a laissĂ© personne indiffĂ©rent. J’ai globalement suscitĂ© deux sortes de rĂ©actions. Certaines personnes Ă©taient trĂšs enthousiastes
 D’autres Ă©taient nettement plus critiques ; « Ah oui, je vois
 Vous ĂȘtes du genre rousseauiste. Vous ne croyez tout de mĂȘme pas au mythe du bon sauvage  » (p 10). « Au dĂ©part, mon objectif, en Ă©crivant cet ouvrage, Ă©tait simplement de rĂ©Ă©quilibrer la perspective nĂ©gative souvent exprimĂ©e sur l’ĂȘtre humain, en montrant l’autre facette, plus positive. Plus j’avançais dans mes lectures, plus je constatais que le fond de bontĂ© est davantage constitutif de notre ĂȘtre que la tendance Ă  la violence et Ă  l’égoĂŻsme » (p 298).

Jacques Lecomte est docteur en psychologie, chercheur et universitaire, prĂ©sident de l’association francophone de psychologie positive. Son ouvrage repose sur des centaines d’études scientifiques et de trĂšs nombreux tĂ©moignages. En repoussant Ă  la fois une conception exagĂ©rĂ©ment pessimiste, et une conception exagĂ©rĂ©ment optimiste, l’auteur plaide pour une conception « optirĂ©aliste » : « L’individu ayant une propension fondamentale Ă  la bontĂ©, mais pouvant Ă©galement se tourner vers la violence, par manque existentiel, il convient de faciliter les situations susceptibles de faire Ă©merger le meilleur de chacun tout en Ă©tant lucide sur le fait qu’aucune sociĂ©tĂ© ne peut transformer radicalement les individus. Chacun a sa part de responsabilité : les individus comme les institutions » (p 299).

 

Quel cheminement ?

 

Le livre se développe en deux temps.

Dans la premiĂšre partie, l’auteur dĂ©crit et explique des situations oĂč l’on s’attendait Ă  ce que la violence et le chacun pour soi dominent alors que c’est le contraire qui se produit : des personnes en sauvent d’autres au risque de leur vie ; des individus violents changent radicalement d’orientation aprĂšs avoir rencontrĂ© des personnes qui ont su reconnaĂźtre leur fond de gĂ©nĂ©rosité ; d’autres pardonnent des actes de grande violence  dont ils ont Ă©tĂ© victimes
 Nous trouvons une description de rĂ©alitĂ©s humaines que nous recevons avec admiration, comme la maniĂšre dont beaucoup de juifs ont Ă©tĂ© sauvĂ©s en France durant la seconde guerre mondiale ou encore un phĂ©nomĂšne moins connu, mais tout aussi remarquable, comme la fraternisation qui s’est manifestĂ©e Ă  certains moments entre les deux camps opposĂ©s dans les tranchĂ©es de la « grande guerre ». Nous avons lu avec Ă©motion les rĂ©cits et les tĂ©moignages qui abondent dans ces chapitres et qui permettent Ă  l’auteur de nous proposer des rĂ©flexions de grande portĂ©e. L’une d’entre elles, par exemple, nous invite Ă  considĂ©rer que non seulement le pardon est possible, mais que les criminels peuvent s’amender.

Dans la seconde partie, Jacques Lecomte aborde les fondements de ce qui constitue l’ĂȘtre humain Ă  partir d’un ensemble de disciplines : la psychologie du bĂ©bĂ© et du jeune enfant, mais aussi la primatologie (l’étude des singes primates) et l’anthropologie (tout particuliĂšrement, l’étude des peuples premiers). D’autres donnĂ©es sont issues de deux disciplines en plein essor : la neurobiologie et l’économie expĂ©rimentale. « Une partie importante de ces recherches a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e Ă  partir des annĂ©es 2000. Autrement dit, je n’aurais pas pu Ă©crire un ouvrage aussi documentĂ©, il y a seulement dix ans » (p 12).

 

Les nouvelles approches scientifiques.

 

Effectivement, plusieurs approches convergent dans la mise en Ă©vidence d’un potentiel humain.

La psychologie des bĂ©bĂ©s et des jeunes enfants est, Ă  cet Ă©gard, tout Ă  fait rĂ©vĂ©latrice. « Depuis les annĂ©es 1980, et plus encore depuis les annĂ©es 2000, une quantitĂ© impressionnante de recherches nous permettent de mieux connaĂźtre le fonctionnement relationnel du bĂ©bĂ©. Il est gĂ©nĂ©tiquement prĂ©disposĂ© Ă  communiquer trĂšs tĂŽt avec autrui et Ă  manifester de l’empathie » (p 224). Ainsi, quelques heures aprĂšs sa naissance, le bĂ©bĂ© commence Ă  entrer en connexion avec ceux qui l’entourent. « DĂšs sa toute petite enfance, le bĂ©bĂ© n’est pas seulement rĂ©ceptif Ă  l’univers humain qui l’entoure, mais Ă©galement capable d’amorcer la communication en « espĂ©rant » que les autres humains vont rĂ©agir Ă  son comportement » (p 227). On peut parler d’ « intersubjectivitĂ© innĂ©e » selon laquelle le nourrisson naĂźt avec une conscience rĂ©ceptive aux Ă©tats objectifs des autres personnes. D’autres observations montrent que les jeunes enfants sont naturellement altruistes. Ils aiment aider. Et de mĂȘme, ils manifestent naturellement de l’empathie. En avance sur son temps, une grande Ă©ducatrice, Maria Montessori (2), avait perçu trĂšs tĂŽt le potentiel de l’enfant. Aujourd’hui, la recherche appuie une vision positive de l’éducation. « On a longtemps cru que les pratiques Ă©ducatives destinĂ©es Ă  dĂ©velopper la gentillesse avaient pour but d’inhiber les tendances Ă©goĂŻste de l’enfant et les remplacer par des attitudes altruistes. Mais les choses ne se passent pas du tout de cette maniĂšre. En fait, l’éducation s’appuie sur une prĂ©disposition innĂ©e Ă  l’altruisme chez l’enfant, elle dĂ©veloppe l’altruisme (ou le rĂ©duit), elle ne le crĂ©e pas » (p 229).

 

Deux chapitres portent sur les origines de l’humanitĂ©. À chaque fois, l’auteur montre un changement majeur dans les reprĂ©sentations dominantes. Ainsi, dans le passĂ©, certains anthropologues ont pu considĂ©rer les ancĂȘtres de l’homme, les hominidĂ©s, comme des « bĂȘtes de proie ». C’est la thĂ©orie du « grand singe tueur ». Or les recherches actuelles sur les singes montrent que « les relations sociales des primates sont essentiellement pacifiques et coopĂ©ratives ». Dans ses recherches, le primatologue, Frans de Waal, a mis en Ă©vidence chez les primates un potentiel altruiste au point qu’il a pu Ă©crire rĂ©cemment Ă  leur sujet un  livre au titre Ă©minemment significatif : « L’ñge de l’empathie. Leçons de la nature pour une sociĂ©tĂ© solidaire » (3).

ParallĂšlement, il y a Ă©galement un changement d’orientation dans l’anthropologie. Jacques Lecomte consacre un chapitre Ă  cette Ă©volution : « De l’accent sur un « peuple fĂ©roce » imaginaire Ă  l’étude de peuples plutĂŽt pacifiques ».

 

Un nouvel horizon s’est ouvert rĂ©cemment Ă  travers les dĂ©couvertes de la neurobiologie : « Notre cerveau est prĂ©disposĂ© Ă  l’amour, la coopĂ©ration et l’empathie ». Ainsi, l’auteur rapporte le rĂŽle d’une hormone, « l’ « ocytocine », qui favorise l’empathie et la gĂ©nĂ©rositĂ©. Les centres de rĂ©compense mis en Ă©vidence dans le cerveau sont activĂ©s par le plaisir de souhaiter du bien aux autres au point que des Ă©quipes de chercheurs se sont « intĂ©ressĂ©es à une forme de mĂ©ditation, appelĂ©e « mĂ©ditation bonté » qui vise Ă  augmenter le sentiment d’affection et d’attention envers soi et envers autrui. Assise dans une position relaxĂ©e, la personne pense positivement Ă  quelqu’un qu’elle apprĂ©cie. Elle Ă©largit ensuite ces sentiments. On observe en  retour de multiples effets bĂ©nĂ©fiques
 Ses relations avec les autres s’amĂ©liorent ainsi que sa santĂ© physique et psychique  » (p 255).

Il y a Ă©galement la mise en  Ă©vidence d’un potentiel d’empathie chez l’homme. Les observations psychologiques peuvent maintenant se fonder sur une dĂ©couverte rĂ©cente de la neurobiologie, celle des « neurones miroirs ». « Ces cellules nerveuses s’activent non seulement quand un individu accomplit une action, mais quand il voit un autre individu la rĂ©aliser
 Elles nous permettent non seulement de reconnaĂźtre et de comprendre le sens des actions d’autrui (empathie cognitive), mais Ă©galement ce que ce dernier ressent (empathie Ă©motionnelle » (p 262).

 

Jacques Lecomte consacre enfin un chapitre Ă  l’économie expĂ©rimentale. Les recherches actuelles menĂ©es dans cette discipline toute rĂ©cente montrent qu’on ne peut fonder les sciences Ă©conomiques sur une conception Ă©troite de l’ĂȘtre humain appelĂ© « homo oecomenicus » qui serait essentiellement individualiste, rationnel et Ă©goĂŻste.  Pendant longtemps, la pensĂ©e Ă©conomique dominante a Ă©tĂ© peu ouverte Ă  l’expĂ©rimentation. « Mais, depuis une vingtaine d’annĂ©es, l’économie expĂ©rimentale est en plein essor. Ce courant de recherche a clairement montrĂ© que les individus fondent leurs dĂ©cisions sur la coopĂ©ration, la confiance, le sentiment de justice et d’empathie plutĂŽt que sur l’égoĂŻsme intĂ©ressĂ©. Ce qui est exactement Ă  l’opposĂ© des prĂ©dictions des thĂ©ories Ă©conomiques officielles » (p 277). Malheureusement, « les convictions des Ă©conomistes nĂ©oclasssiques fonctionnent souvent comme des « prophĂ©ties autorĂ©alisatrices ». Elles deviennent « vraies » par le simple fait de se diffuser dans la population » (p 290). En regard de cette idĂ©ologie, l’auteur se propose de montrer dans un prochain ouvrage « qu’une Ă©conomie fondĂ©e sur la confiance en autrui et sur la coopĂ©ration fonctionne plus efficacement qu’une Ă©conomie fondĂ©e sur la compĂ©tition et la cupidité ». En rĂ©habilitant « les valeurs fondamentales », il ouvre ainsi pour nous un horizon.

 

Un nouvel horizon.

 

La maniĂšre de percevoir l’orientation de l’ĂȘtre humain vers le bon ou le mauvais est une reprĂ©sentation qui s’inscrit dans l’histoire des mentalitĂ©s et dans l’évolution des cultures. On constate autour de nous des perceptions trĂšs diffĂ©rentes Ă  ce sujet. « Pourquoi certains croient-ils si fort Ă  la mĂ©chancetĂ© humaine ? ». L’auteur examine successivement le rĂŽle des mĂ©dia, notre propre fonctionnement psychologique, la culture, l’imprĂ©gnation idĂ©ologique. Le lecteur trouvera dans ce chapitre des Ă©lĂ©ments de rĂ©ponse.

La perception de la positivitĂ© et de la nĂ©gativitĂ© de la personne humaine s’inscrit elle-mĂȘme dans un climat social et culturel. Ainsi d’aprĂšs les enquĂȘtes internationales, le pessimisme est plus fort en France que dans d’autres pays comparables. La dĂ©fiance est prĂ©sente. À la question : « En rĂšgle gĂ©nĂ©rale, pensez-vous qu’il est possible de faire confiance aux autres ou que l’on n’est jamais assez mĂ©fiants », 21 % des français estiment que l’on peut faire confiance, contre 66 % en NorvĂšge et en SuĂšde. Sur 26 pays Ă©tudiĂ©s, la France se trouve au 24Ăš rang » (p 325) (4).

Si la rĂ©ponse Ă  la question d’une prĂ©disposition de l’homme au bien ou au mal est influencĂ©e par la maniĂšre de percevoir la vie sociale, elle s’inscrit Ă©galement dans le temps. Ainsi, on peut Ă©mettre l’hypothĂšse d’une relation entre l’agressivitĂ©, la violence, la rĂ©pression correspondante d’autre part, les frustrations engendrĂ©es par la faim, la maladie, la misĂšre d’autre part. Si le bonheur apparaĂźt comme une idĂ©e neuve en Europe au XVIIIĂš siĂšcle, il y a bien un rapport avec une amĂ©lioration des conditions de vie.

Il y a une influence rĂ©ciproque entre les mentalitĂ©s et les visions du monde. Ainsi, en thĂ©ologie, « la conception du pĂ©chĂ© originel, qui signifie que chaque ĂȘtre humain naĂźt avec un penchant fondamental au mal », apparaĂźt dans le contexte d’une Eglise qui reprend et poursuit le rĂšgne impĂ©rial. Elle se rĂ©pand Ă  partir des Ă©crits d’Augustin d’Hippone (saint Augustin) et elle va conditionner les mentalitĂ©s tout au long de la chrĂ©tientĂ©. Or, selon Georges Minois, auteur d’un ouvrage de rĂ©fĂ©rence sur ce sujet, « l’idĂ©e d’une chute primordiale dont tous les hommes partageraient la culpabilitĂ© est absente de l’Ancien Testament et des Evangiles. C’est une crĂ©ation tardive de thĂ©ologiens qui voulaient renforcer l’édifice doctrinal » (p 327). Il y a donc des interrelations entre les idĂ©ologies et les reprĂ©sentations. Ainsi, au XXĂš siĂšcle, les sciences humaines ont elles-mĂȘmes Ă©tĂ© imprĂ©gnĂ©es par des idĂ©es selon lesquelles l’homme se caractĂ©rise par l’égoĂŻsme et une propension Ă  la violence. Dans ces chapitres sur l’anthropologie, la primatologie, la psychologie, Jacques Lecomte montre combien certains auteurs ont Ă©crit dans ce sens au point que leurs conclusions apparaissent aujourd’hui comme caricaturales. À cet Ă©gard, l’idĂ©ologie matĂ©rialiste de Freud a projetĂ© sur l’enfant des reprĂ©sentations extrĂȘmement nĂ©gatives. « L’enfant est absolument Ă©goĂŻste. Il ressent intensĂ©ment ses besoins et aspire sans aucun Ă©gard Ă  leur satisfaction, en particulier face Ă  ses rivaux, les autres enfants » (p 230). À cet Ă©gard, on se reportera Ă©galement Ă  l’analyse circonstanciĂ©e de JĂ©rĂ©mie Rifkin dans son livre « Vers une civilisation de l’empathie » , il montre comment pendant plusieurs dĂ©cennies, la pensĂ©e de Freud a handicapĂ© le dĂ©veloppement de la psychologie de l’enfant.

 

Vers un nouveau paradigme


Aujourd’hui, dans la crise que nous traversons, on perçoit, en arriĂšre plan,  une grande mutation. Mais si les menaces sont bien prĂ©sentes, il y a aussi des prises de conscience qui suscitent des actions. Et ces prises de conscience peuvent s’inscrire dans une transformation de la vision du monde comme c’est le cas dans le domaine de l’écologie. On peut aller plus loin dans l’interprĂ©tation ; au delĂ  de la rĂ©action Ă  la menace, n’y aurait-il pas une Ă©mergence, l’anticipation d’un autre avenir ?

La revue « Sciences humaines » a publiĂ© rĂ©cemment un dossier sur « le retour de la solidarité : empathie, altruisme, entraide ». La responsable de ce dossier, Martine Fournier, note un changement dans les prĂ©occupations et les orientations (5). Cette Ă©volution est internationale comme en tĂ©moigne l’ouvrage de JĂ©rĂ©mie Rifkin : « Une nouvelle conscience pour un monde en crise. Vers une civilisation de l’empathie » (6).

Le livre de Jacques Lecomte sur « la bontĂ© humaine » s’inscrit dans le mĂȘme mouvement. Ainsi peut-il Ă©voquer : « Un changement de paradigme porteur d’implications sociales et politiques » (p 295). « Ce nouveau millĂ©naire voit se rĂ©aliser sous nos yeux ce que Thomas Kuhn appelle une rĂ©volution scientifique, c’est-Ă -dire une pĂ©riode historique exceptionnelle au cours de laquelle se modifient les convictions des spĂ©cialistes. » Le changement s’accĂ©lĂšre. « Une partie importante des dĂ©couvertes citĂ©es dans ce livre ont Ă©tĂ© faites depuis les annĂ©es 2000. Conclusion : les thĂ©oriciens de l’homme Ă©goĂŻste et violent sont des gens du passĂ©, du siĂšcle et mĂȘme du millĂ©naire passé » (p 297). Une vision nouvelle est en train d’apparaĂźtre.

 

En commentaire : une esquisse de réflexion spirituelle.

 

On observe parallĂšlement des transformations profondes dans la vie spirituelle et religieuse.

Un chercheur britannique, David Hay, a pu dĂ©finir la spiritualitĂ© comme « une conscience relationnelle » avec Dieu, la nature, les ĂȘtres humains et soi-mĂȘme (7). Dans le mĂȘme mouvement, des recherches rĂ©centes ont mis en Ă©vidence la spiritualitĂ© des enfants (8). Tout ceci est en cohĂ©rence avec les Ă©tudes que nous venons de mentionner.

Par rapport aux sĂ©quelles d’un  hĂ©ritage, celui d’une thĂ©ologie rĂ©pressive centrĂ©e sur le pĂ©chĂ© originel, dont on mesure aujourd’hui les consĂ©quences nĂ©gatives, nous sommes appelĂ©s Ă  revenir tout simplement Ă  l’enseignement de JĂ©sus au cƓur duquel se trouve l’amour, le pardon, le non jugement. « Que votre lumiĂšre luise ainsi devant les hommes afin qu’ils voient vos bonnes Ɠuvres, et qu’ils glorifient votre PĂšre qui est dans les cieux » (Mat 5. 16). Cette parole de JĂ©sus ne signifie-elle pas  que non seulement ceux qui le suivent sont appelĂ©s Ă  ĂȘtre bons, mais qu’il y a chez les hommes une capacitĂ© de reconnaĂźtre ce qui est bon parce que, Ă  leur mesure, ils ont dĂ©jĂ  une expĂ©rience de ce que cela signifie, et que dans le mĂȘme mouvement, ils peuvent entrer dans ce courant de vie jusque dans la louange et la reconnaissance de la bontĂ© de Dieu. Ainsi, les disciples de JĂ©sus sont appelĂ©s Ă  permettre la reconnaissance de ce qui est bon : prĂ©disposition Ă  la bontĂ© ou manifestation de celle-ci.

Des thĂ©ologiens comme JĂŒrgen Moltmann nous aident Ă  percevoir aujourd’hui l’Ɠuvre de l’Esprit de Dieu Ă  la fois dans la transcendance et dans l’immanence, ce qui germe et grandit dans la crĂ©ation. En Christ mort et ressuscitĂ©, une nouvelle crĂ©ation est en marche et Dieu nous appelle Ă  l’espĂ©rance. Par rapport Ă  la thĂ©orie classique de l’évolution qui procĂšde Ă  partir des seuls Ă©vĂšnements du passĂ©, Moltmann montre une dynamique oĂč nous anticipons un avenir qui se manifeste dĂ©jĂ . Il a exprimĂ© cette pensĂ©e dans plusieurs livres, mais il y revient, en termes trĂšs accessibles, dans un ouvrage tout rĂ©cent paru en 2012 : « Ethics of hope » (Une Ă©thique de l’espĂ©rance) (9). Ainsi Ă©crit-il : « Le concept de l’évolution nous permet de comprendre comment ce qui existe aujourd’hui s’est rĂ©alisĂ©, mais non comment cela aurait pu ĂȘtre et peut aujourd’hui devenir possible » (p 125). Et il met en Ă©vidence les thĂ©ories nouvelles de l’émergence. « Il y a dans l’histoire de la nature des processus dans lesquels de nouveaux ensembles, de nouvelles formes Ă©mergent
 Dans le jeu du hasard et de la nĂ©cessitĂ©, il y a une tendance vers des formes de plus en plus complexes… » (p 126). Cette tendance a Ă©tĂ© dĂ©signĂ©e comme une auto organisation de l’univers (self-organisation) ou « une auto organisation de la vie »  L’interprĂ©tation thĂ©ologique ne contredit pas cette perspective. Au contraire. Elle donne Ă  cette idĂ©e une profondeur nouvelle Ă  travers l’idĂ©e d’une « auto transcendance » (Karl Rahner) sur la base de l’immanence et de la transcendance de l’Esprit Divin » (p 126). Dans ce grand mouvement, « l’Esprit de Dieu libĂšre et unit en  anticipant la nouvelle crĂ©ation ». Puisque l’humanitĂ© participe Ă  cette dynamique, elle ne va pas s’aligner sur la sĂ©lection naturelle ou la lutte pour l’existence, mais au contraire mettre en avant le principe de la coopĂ©ration. Ainsi Moltmann met en Ă©vidence les recherches qui se dĂ©veloppent aujourd’hui, comme par exemple la dĂ©couverte des neurones miroirs. DĂ©jĂ , dans son livre : « Dieu dans la crĂ©ation (10), Moltmann avait Ă©crit : « L’essence de la crĂ©ation dans l’Esprit est par consĂ©quent la « collaboration » et les structures manifestent la prĂ©sence de l’Esprit dans la mesure oĂč elles font connaĂźtre « l’accord gĂ©nĂ©ral » (p 25). « Etre vivant signifie entrer en relation avec les autres. Vivre, c’est la communication dans la communion » (p 15).

 

On pourrait reprendre ici la pensĂ©e de Teilhard de Chardin : « Tout ce qui monte, converge ». Ici, une thĂ©ologie innovante entre en phase avec les transformations qui se manifestent dans un courant de pensĂ©e et qui inspirent Jacques Lecomte lorsqu’il Ă©voque un nouveau paradigme. Son ouvrage sur « la bontĂ© humaine » nous introduit dans une vision en plein devenir. Ce livre est passionnant, Ă©mouvant. Il ouvre des voies nouvelles qui vont au delĂ  des relations interpersonnelles puisqu’elles tracent Ă©galement un chemin pour des transformations sociales Ă  travers le projet de l’auteur d’écrire un livre pour une nouvelle maniĂšre d’envisager l’économie. Cette lecture Ă©veille espoir et dynamisme.

 

J H

 

(1)            Lecomte (Jacques). La bonté humaine. Altruisme, empathie, générosité. Odile Jacob, 2012.

(2)            Montessori (Maria). L’enfant. DesclĂ©e de Brouwer, 1936 (Ă©dition originale).

(3)            De Waal Frans). L’ñge de l’empathie. Leçons de nature pour une sociĂ©tĂ© plus solidaire. Les liens qui libĂšrent. 2010.

(4)            Un article à ce sujet : « Défiance ou confiance. Quel style de relations ? Quelle société ? » http://www.temoins.com/culture-et-societe/societe/345-jean-hassenforder-defiance-ou-confiance-.html

(5)            Le retour de la solidarité. Dossier animé par Martine Fournier, p 32-51, in : Sciences Humaines, N° 223, février 2011. Voir sur ce blog : « Quel regard sur la société et sur le monde ? » https://vivreetesperer.com/?p=191

(6)            Rifkin (JĂ©rĂ©mie). Une nouvelle conscience pour un monde en crise. Vers une civilisation de l’empathie. Les liens qui libĂšrent, 2011. Voir sur ce blog : « La force de l’empathie » http://www.vivreetes.com/?p=137 et, sur le site de TĂ©moins : « Vers une civilisation de l’empathie » http://www.temoins.com/recherche-et-innovation/etudes/816-vers-une-civilisation-de-lempathie-a-propos-du-livre-de-jeremie-rifkinapports-questionnements-et-enjeux.html

(7)            Hay (David). Something there. The biology of the human spirit. Darton, Longman, Todd, 2006. Voir sur ce blog : « Expériences de plénitude » https://vivreetesperer.com/?p=191. Sur le site de Témoins : « La vie spirituelle comme une conscience relationnelle » http://www.temoins.com/recherche-et-innovation/etudes/672-la-vie-spirituelle-comme-une-l-conscience-relationnelle-r.html?showall=1

(8)            Sur ce blog : « l’enfant, un ĂȘtre spirituel » https://vivreetesperer.com/?p=340  Sur le site de TĂ©moins : « DĂ©couvrir la spiritualitĂ© des enfants.  Un signe des temps » http://www.temoins.com/recherche-et-innovation/etudes.html

(9)            Moltmann (JĂŒrgen). Ethics of hope. Fortress Pres, 2012

(10)      Moltmann  (JĂŒrgen). Dieu dans la crĂ©ation. TraitĂ© Ă©cologique de la crĂ©ation. Cerf, 1988. Voir sur le blog : « L’Esprit qui donne la vie : « Dieu dans la crĂ©ation » http://www.lespritquidonnelavie.com/?p=766

Le film ‘Demain’

Un monde nouveau qui est en train d’apparaütre

Nous ne pouvons pas ignorer les messages de plus en plus prĂ©cis et de plus en plus pressants qui annoncent un bouleversement climatique et la ruine de la biodiversitĂ©. Mais que faire ? Refuser d’y penser ou au contraire affronter le dĂ©fi. Ces derniĂšres annĂ©es, la prise de conscience a grandi et elle a mĂȘme dĂ©bouchĂ© sur la rĂ©ussite d’une grande nĂ©gociation internationale, la COP 21. Mais des mesures techniques suffisent-elles ? Comme tout se tient, nous sommes Ă©galement appelĂ©s Ă  changer de genre de vie, et pour cela, nous devons modifier notre regard et adopter des comportements nouveaux. Nous avons besoin d’y voir plus clair, de dĂ©couvrir de nouveaux chemins. Un film vient de sortir et rĂ©pond Ă  cette question.

« Demain » est un film documentaire français rĂ©alisĂ© par Cyril Dion et MĂ©lanie Laurent. Devant un futur que les scientifiques annoncent prĂ©occupant, leur film a la particularitĂ© de ne pas donner dans la catastrophe » (Wikipedia). En rĂ©ponse Ă  leurs questions, qui sont aussi les nĂŽtres,  les deux jeunes rĂ©alisateurs, Cyril et MĂ©lanie, sont partis aux quatre coins de la planĂšte pour trouver les hommes et les femmes qui proposent des solutions Ă  ces problĂšmes ». Ils ont dĂ©couvert, et ils nous permettent d dĂ©couvrir avec aux, qu’un mouvement est dĂ©jĂ  en marche pour rĂ©pondre Ă  ce dĂ©fi. « Partout, des hommes et des femmes racontent un autre monde qui respecte la nature et les humains, d’autres façons de faire l’agriculture et l’économie, d’autres formes d’éducation et de dĂ©mocratie
 Ces personnes Ă©crivent une nouvelle histoire. Elles nous disent qu’il faut nous bouger maintenant » (1)

 

 

Nous voyons ainsi des innovations apparaĂźtre et apporter des transformations radicales dans les principaux secteurs de l’activitĂ© humaine : l’agriculture, l’énergie, l’économie, la dĂ©mocratie, l’éducation. Et l’on s’aperçoit qu’un nouvel Ă©tat d’esprit est en train d’émerger et, qu’en certains lieux, le changement est dĂ©jĂ  trĂšs avancĂ©.

 

Cultiver la terre autrement, c’est aussi traduire une attitude nouvelle vis à vis de la nature.

Ainsi, en ville, ressent-on sans doute davantage un manque qui tient Ă  son Ă©loignement. Et la recherche d’un nouveau mode d’accession Ă  la nourriture est  une expression de vie. Petite ville anglaise en dĂ©shĂ©rence dans une rĂ©gion ayant perdu son industrie, Todmorden est devenu le berceau d’une culture de lĂ©gumes et de fruits au sein mĂȘme d’une ville. Cette innovation s’est rĂ©pandue ensuite en Grande-Bretagne et dans le monde. C’est le mouvement des « Incroyables comestibles ». Oui,  incroyable, mais vrai !

Et cette vidĂ©o nous prĂ©sente Ă©galement les fermes urbaines qui ont commencĂ© Ă  se dĂ©velopper dans la ville amĂ©ricaine de DĂ©troit ruinĂ©e par la perte de son industrie automobile. Mais l’apparition des fermes urbaines correspond Ă  un besoin plus gĂ©nĂ©ral puisque, comme il nous est rappelĂ©, aujourd’hui le phĂ©nomĂšne urbain devenant majoritaire, il est bon d’en rapprocher la production de nourriture. Et, en mĂȘme temps, on prend conscience des dĂ©gĂąts suscitĂ©s par une agriculture industrielle, grande consommatrice d’énergie et peu protectrice des sols. En fait, elle met Ă  mal les Ă©quilibres naturels. Un paradigme opposĂ© est en train de s ‘affirmer : la permaculture qui associe les espĂšces, rĂ©gĂ©nĂšre les sols et dĂ©ploie un travail respectueux de la nature. La vidĂ©o nous montre un exemple impressionnant et rĂ©jouissant de cette nouvelle forme de culture Ă  la ferme du Bec Hellouin en Normandie.

 

On sait aujourd’hui combien la consommation des carburants fossiles dĂ©rĂšgle le climat. Ce dĂ©rĂšglement climatique est une grande menace. Or, Ă  nouveau, ce reportage nous apporte une bonne nouvelle. Partout dans le monde, les Ă©nergies renouvelables se dĂ©veloppent rapidement. Les Ă©nergies issues de la biomasse, les dispositifs solaires et Ă©oliens sont aujourd’hui compĂ©titifs. A nouveau, les exemples prĂ©sentĂ©s par cette vidĂ©o de l’Ile de la RĂ©union Ă  l’Islande sont Ă©loquents. A Copenhague, c’est toute la vile qui se transforme. Car si l’énergie Ă©olienne est une ressource particuliĂšrement efficace au Danemark, dans la ville elle-mĂȘme, un processus est mis en Ɠuvre pour rĂ©duire la consommation  d’énergie. Le paysage urbain se modifie en favorisant le dĂ©veloppement du vĂ©lo et de la marche Ă  pied. La transformation de la vie urbaine apparaĂźt Ă©galement dans la maniĂšre dont la ville de San Francisco parvient Ă  recycler 80% de ses dĂ©chets.

A travers ces exemples, on perçoit Ă©galement l’apparition d’un nouveau genre de vie, plus Ă©conome et plus sobre. Et justement, Pierre Rabhi, paysan philosophe aujourd’hui bien connu, accompagnateur du mouvement Colibris, dĂ©nonce l’aberration que reprĂ©sente une croissance Ă©conomique indĂ©finie au profit d’une humanitĂ© insatiable. Le reportage s’oriente alors vers les prĂ©mices d’une nouvelle Ă©conomie. La vidĂ©o nous prĂ©sente une entreprise particuliĂšrement innovante Ă  tous Ă©gards, et notamment en matiĂšre de dĂ©veloppement durable : Pocheco. Les rĂ©alisateurs mettent Ă©galement l’accent sur des expĂ©riences de monnaie locale qui rĂ©duisent l’emprise des banques et encouragent une Ă©conomie de proximitĂ©. Les exemples sont empruntĂ©s Ă  la Suisse et Ă  la Grande-Bretagne (Totnes et Bristol).

 

Mais, les difficultĂ©s rencontrĂ©es pour dĂ©velopper une nouvelle Ă©conomie ne tiennent-elles pas, pour une part, Ă  la distance qui s’est installĂ©e entre les gouvernants et les gouvernĂ©s ? Cette question est abordĂ©e, peut-ĂȘtre un peu trop sommairement. Mais, lĂ  aussi, des exemples positifs nous sont apportĂ©s. C’est l’insurrection non violente des citoyens islandais face Ă  la gestion politique de la banqueroute des banques d’Islande. C’est la rĂ©publique des villages en Inde. Ce reportage nous prĂ©sente l’action concrĂšte d’un maire qui parvient Ă  transformer la vie de sa commune, ce qui implique Ă©galement un changement dans les mentalitĂ©s.

 

Et, bien sĂ»r, cette Ÿévolution requiert une nouvelle Ă©ducation. A cet Ă©gard, l’exemple de la Finlande est remarquable. L’enseignement finlandais montre qu’il est possible Ă  la fois d’obtenir d’excellents rĂ©sultats scolaires dans les classements internationaux et de dĂ©velopper un climat de confiance et de respect qui encourage la rĂ©ussite de tous les enfants dans la reconnaissance de la diversitĂ© de leurs rythmes, de leurs aptitudes et de leurs aspirations. La Finlande met en pratique, Ă  une vaste Ă©chelle, ce que les pionniers de l’éducation nouvelle ont expĂ©rimentĂ© et formulĂ©.

 

Le film : « Demain » est en salle depuis le 2 dĂ©cembre 2015. Et, en quelques mois, il a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© vu en France par plus d’un million de spectateurs. C’est dire combien il rĂ©pond Ă  Ă  un besoin de comprĂ©hension et d’action. Et, c’est vrai, face aux menaces, il nous encourage lorsqu’il se conclut sur cette parole : « Si on se rassemble, on a tous le pouvoir de changer le monde ».

Ce film rassemble les piĂšces d’un puzzle et nous voyons apparaĂźtre l’image d’un monde nouveau. Et, il est aussi un fil conducteur. Il nous montre un chemin. On perçoit, dans le dĂ©roulement de ce film, un souffle Ă©pique. De dĂ©couverte en dĂ©couverte, nous Ă©prouvons un sentiment d’émerveillement. Et nous ressentons du bon, du bien et du beau, car ce film ne nous parle pas seulement de dĂ©couvertes techniques, fondamentalement, il nous montre Ă©galement une qualitĂ© nouvelle de la relation humaine. C’est une Ă©mergence. C’est un monde nouveau qui est en train d’apparaĂźtre. Et, personnellement, nous voyons, dans cette Ă©mergence, l’Ɠuvre de l’Esprit (2).

De nombreux articles parus sur ce blog rejoignent la dĂ©marche de ce film (3). Celui-ci est dĂ©sormais accessible en DVD (4).  C’est un bel outil pour encourager la prise de conscience qui est aujourd’hui engagĂ©e.

 

J H

 

(1)            Co-produit par le mouvement Colibris, le film « Demain » a reçu le CĂ©sar du meilleur film documentaire. Voir aussi le livre de Cyril Dion sur le mĂȘme thĂšme : Demain. Un nouveau monde en marche. Actes Sud, Domaine du possible, 2015.  Site du film « Demain ». Bande-annonce : http://www.demain-lefilm.com

(2)            « L’ « essence » de la crĂ©ation dans l’Esprit est la « collaboration », et les structures manifestent la prĂ©sence de l’Esprit, dans la mesure oĂč elles font connaĂźtre l’ « accord gĂ©nĂ©ral ». « Au commencement Ă©tait la relation » (M Buber) JĂŒrgen Moltmann. Dieu dans la crĂ©ation p 25                       Un blog sur la pensĂ©e thĂ©ologique de Moltmann : « L’Esprit qui donne la vie » : http://www.lespritquidonnelavie.com

(3)            « Pour une conscience Ă©cologique. Une expĂ©rience de terrain » : https://vivreetesperer.com/?p=694                    Anne-Sophie Novel, militante Ă©cologiste et pionniĂšre de l’économie collaborative » : https://vivreetesperer.com/?p=1975                                 « Incroyable, mais vrai ! Comment les « Incroyables comestibles » se sont dĂ©veloppĂ©s en France » : https://vivreetesperer.com/?p=2177                                 « Cultiver la terre en harmonie avec la nature. La permaculture, une vision holistique du monde » : https://vivreetesperer.com/?p=2405                                « La force de l’empathie (JĂ©rĂ©mie Rifkin. Une nouvelle conscience pour un monde en crise. Vers une civilisation de l’empathie) : https://vivreetesperer.com/?p=137          « Une rĂ©volution de l’« ĂȘtre ensemble » (Vive la Co-rĂ©volution ! Pour une sociĂ©tĂ© collaborative ) : https://vivreetesperer.com/?p=1394                                        « SociĂ©tĂ© collaborative. La fin des hiĂ©rarchies » : https://vivreetesperer.com/?p=2205                              « Vers un nouveau climat de travail dans des entreprises humanistes et conviviales. Un parcours de recherche avec Jacques Lecomte » : https://vivreetesperer.com/?p=2318   « Et si nous Ă©duquions nos enfants Ă  la joie ? Pour un printemps de l’éducation ! » : https://vivreetesperer.com/?p=1872

(4)            Le DVD du film : Demain vient de sortir. Il est accessible sur le site : Colibris : http://www.colibris-lemouvement.org       On peut le commander aussi sur Amazon :        https://www.amazon.fr/Demain-Mélanie-Laurent/dp/B018ID4YIE/ref=sr_1_1?s=dvd&ie=UTF8&qid=1466349524&sr=1-1&keywords=demain