Le miracle de l’existence

 Un éclairage de Bertrand Vergely

Se peut-il que nous soyons entrainĂ© par la routine des affaires courantes, l’emprise exercĂ©e par le flot des Ă©vĂšnements au point d’oublier ce qui nous fonde : notre propre expĂ©rience ? Se peut-il que dans le tourbillon du quotidien nous n’y prĂȘtions pas attention, nous ne percevions pas le flux de la vie qui nous est donnĂ©e sans compter, et, dans le mĂȘme mouvement, notre participation au monde des vivants ?

Lorsque cette conscience d’exister survient, elle peut ĂȘtre dĂ©crite comme une expĂ©rience fondatrice. C’est donc un dĂ©voilement de sens, c’est une joie libĂ©ratrice. Ce peut ĂȘtre une expĂ©rience bouleversante.

Dans son livre : « Sa prĂ©sence dans ma vie », Odile Hassenforder nous raconte comment, face Ă  l’adversitĂ©, elle a vĂ©cu cette expĂ©rience.

« Au fond de mon lit, en pleine aplasie due Ă  une chimio trop forte, j’ai reçu la joie de l’existence. Un cadeau gratuit donnĂ© Ă  tout humain par Dieu  ». « EpuisĂ©e, au fond de mon lit, incapable de toute activité  lĂ , inutile, je soupire : « qui suis-je ? ». LĂ , d’une seconde Ă  l’autre, je rĂ©alise cette chose extraordinaire : « j’existe ». C’est gratuit. Cela m’est donnĂ© gratuitement. Je suis partie intĂ©grante de la crĂ©ation : une Ă©toile dans le firmament, une pĂąquerette dans la prairie, peu importe. Etoile ou pĂąquerette, j’existe ». «  Une joie immense m’envahit au plus profond de moi-mĂȘme comme une louange Ă  notre Dieu. Il est grand, il est beau. Il est bon  » (1).

 

 

Le miracle d’exister

 Ainsi, cette expĂ©rience traduit un Ă©merveillement. Bertrand Vergely, philosophe et thĂ©ologien orthodoxe (2), a Ă©crit un livre ; « Retour Ă  l’émerveillement » (3). Et, dans ce livre, il magnifie la conscience de l’existence. Tout se tient. La conscience de notre existence est associĂ©e Ă  la conscience de celle des ĂȘtres et des choses.

« Les ĂȘtres, les choses ne sont pas des abstractions. Ils existent en chair et en os. Ils sont palpables, tangibles, et ils sont lĂ  parce qu’ils sont porteurs du fait inouĂŻ de l’existence. Ils auraient pu ne pas ĂȘtre, mais ils sont et leur existence s’exprime par leur rĂ©alitĂ© concrĂšte, tangible, charnelle. L’existence parle de transcendance et la transcendance parle du miracle d’exister. Tout existe parce que tout est miraculeux. Ayant conscience du miracle de l’existence, on a conscience de l’existence. On existe. On fait exister les autres et le monde autour de soi » ( p 44-45).

 

Nous Ă©merveiller de l’existence des autres. Un appel au respect et Ă  la considĂ©ration

Cette conscience du miracle de l’existence n’induit pas seulement une transformation et une libĂ©ration personnelle. Elle fonde une harmonie sociale. « Il aurait pu ne rien y avoir. Il y a quelque chose et non rien. Miracle. Les autres qui existent, les animaux, les plantes, l’univers nous parlent de ce miracle. Ils nous parlent de notre miracle. Nous sommes aussi miraculeux qu’eux. Prenons en conscience. Nous rentrons dans la considĂ©ration des autres et de l’univers. Nous devenons attentifs, respectueux. Parfois, nous avons envie d’aimer l’humanité «  ( p 43).

Ce respect, cette attention fonde la vie morale. « On est moral lorsqu’on est saisi dans le trĂ©fonds de soi-mĂȘme par un sentiment d’infini respect pour l’existence, pour les hommes, pour la vie
 La morale nous met directement en relation avec le principe transcendant et miraculeux de l’existence, ce principe s’exprimant dans tout ce qu’elle peut avoir de charnel. C’est ce que dit fort bien Simone Weil : « Il est donnĂ© Ă  peu d’ĂȘtres de dĂ©couvrir que les ĂȘtres et les choses existent ». Elle parle de la conscience morale et explique que celle-ci passe par une expĂ©rience charnelle » (p 44).

 

L’existence fonde la pensĂ©e.

 Bertrand Vergely met Ă©galement en Ă©vidence un lien entre la conscience d’exister et la pensĂ©e.

Ainsi, Ă©voque-t-il Pascal, le philosophe. « Il a compris ce qu’est la pensĂ©e. Celle-ci est une affaire de conscience et non de raisonnement. On pense quand on a conscience du miracle de l’univers. Nous ne sommes rien dans l’univers ou quasiment rien. Nous devrions ne pas exister, un rien suffit pour nous anĂ©antir. Or nous existons. Il y a lĂ  un miracle. Quelque chose qui vient d’ailleurs, d’au delĂ  de nous, nous permet d’exister          . On s’en rend compte en faisant justement l’expĂ©rience d’exister (p 46).

Nous ne sommes pas englouti par le vide abyssal. « Face au vide, il y a le fait d’exister malgrĂ© un tel vide, fait quelque part plus immense encore que l’immense
 Plus vaste que l’infini spatial, il y a l’infini d’existence. Il faut qu’il y ait de l’existence pour qu’il y ait de l’espace
 En ayant conscience d’exister, nous comprenons tout, mĂȘme l’espace. Nous prenons alors la bonne mesure des choses
 Le rĂ©el n’est pas une chose et encore moins un vide, c’est une existence et, mieux encore, un infini d’existence auquel seule la conscience a accĂšs.. On pense quand on parvient Ă  un tel niveau
 On dĂ©voile la profondeur du rĂ©el ainsi que des ĂȘtres humains. On se met Ă  avoir une relation juste Ă  ceux-ci » ( p 47).

 

La pensĂ©e juste est celle de l’homme vivant

 La pensĂ©e peut-elle s’exercer positivement en dehors des contingences de l’existence ? Y a-t-il une raison pure ? Le philosophe Kant rĂ©pond Ă  cette question dans « la critique de la raison pure ». Il comprend qu’il faut replacer la pensĂ©e dans le cadre de l’homme vivant. En finir avec ces pensĂ©es qui prĂ©tendent tout penser une fois pour toutes. Cesser donc de faire, par exemple, de Dieu une pensĂ©e qui prĂ©tend tout penser afin de faire de lui une pensĂ©e vivante  qui fait progresser. Remplacer le Dieu de l’idĂ©ologie par le Dieu qui fait avancer et vivre » (p 53).

Bertrand Vergely met en scĂšne les dĂ©rives du dogmatisme et du scepticisme qui se rĂ©pondent et s’engendrent mutuellement dans le champ de la religion et de la philosophie. A l’opposĂ© de ces discours systĂ©matiques, il y a une pensĂ©e en phase avec l’existence.

« Quand la pensĂ©e vit, quand elle est la pensĂ©e d’un homme existentiel, elle est au cƓur d’un croisement entre le ciel et la terre, elle est la rencontre entre l’esprit et la rĂ©alitĂ© concrĂšte, incarnĂ©e. Ici, pas besoin de dogmatisme pour affirmer l’esprit, ni de scepticisme pour corriger le dogmatisme afin de revenir dans la rĂ©alité  L’esprit rend tĂ©moignage de la rĂ©alitĂ© concrĂšte comme la rĂ©alitĂ© concrĂšte rend tĂ©moignage de l’esprit. Rien ne s’oppose, tout se croise » (p 52).

Une pensĂ©e fĂ©conde et Ă©quilibrĂ©e s’enracine dans l’existence. « Kant a vu, comme Pascal, que la pensĂ©e est en proie Ă  un conflit entre dogmatisme et scepticisme. Ce conflit vient de ce que la pensĂ©e est vĂ©cue de façon passionnelle. Cette approche passionnelle vient de ce que l’on ne la vit pas. On n’a pas de relation avec celle-ci. On ne la vit pas
Qui est vivant noue des relations au monde en confrontant sans cesse ce qu’il pense et ce qu’il vit, ce qu’il vit et ce qu’il pense. Quand tel est le cas, fini les illusions de la raison pure. Fini donc le scepticisme pour corriger une telle façon de penser » (p 52).

Il y a des expĂ©riences oĂč la prise de conscience d’exister transforme notre regard sur la vie. Nous avons rapporté  l’expĂ©rience d’Odile. Comme l’écrit Bertrand Vergely, prendre conscience de son existence, c’est aussi prendre conscience de celle des autres et, au delĂ , d’un rapport avec la nature et avec Dieu. C’est ce que David Hay, dans son livre majeur : « Something there » met Ă©galement en Ă©vidence en dĂ©finissant la spiritualitĂ© comme « une conscience relationnelle » (4). Et la recherche montre que les expĂ©riences spirituelles tĂ©moignent d’une activation du sens relationnel, d’une manifestation de la transcendance et d’un profond et immense Ă©merveillement (4).

Dans son livre, Bertrand Vergely nous entraine dans l’émerveillement. Comme dans ces quelques pages concernant le miracle de l’existence, il nous apprend Ă  en voir toutes les dimensions. Il dĂ©voile le miraculeux  qu’on peut entrevoir dans le quotidien. C’est le mot d’Einstein : « Il y a deux façons de voir la vie. L’une, comme si rien n’était un miracle. L’autre comme si tout Ă©tait miraculeux » .

Si la conscience d’exister est source d’émerveillement et ouvre notre regard, l’existence de l’homme est, elle aussi, extraordinaire. « L’homme a des sources extraordinaires. Sophocle, dans Antigone, n’hĂ©site pas Ă  le dire : « Entre tant de merveilles au monde, la grande merveille, c’est l’homme ». L’homme n’est pas rien. Il vient de loin. Il est appelĂ© Ă  aller loin. Il est porteur de grandes choses » (p 51).

J H

 

 

 

 

 

Par delà la séparation

 

Un tĂ©moignage de JĂŒrgen Moltmann

 

Parce que nous croyons que le principe de la vie, c’est l’amour comme le cƓur de ce que nous vivons et de ce Ă  quoi nous sommes appelĂ©s, tel que JĂ©sus l’exprime en une parole magistrale (Mat 22.37-40), nous entrons pleinement dans une conception d’un univers prĂ©disposĂ© Ă  la relation, un univers oĂč tout se tient, oĂč tout se relie et interagit, un univers oĂč nous sommes appelĂ© Ă  rejeter tout ce qui sĂ©pare : les exclusions, les Ă©gocentrismes, la dissolution des liens. Oui, la spiritualitĂ© est bien « une conscience relationnelle » (1). Nous croyons que cette relation ne s’arrĂȘte pas au monde prĂ©sent, mais qu’en Dieu, communion d’amour,  les ĂȘtres humains ne « disparaissent » pas corps et bien. Comme l’écrit JĂŒrgen Moltmann, on peut Ă©voquer « une communion des vivants et des morts » (2) qui s’inscrit dans le mouvement oĂč Dieu prĂ©pare en Christ ressuscitĂ© une nouvelle crĂ©ation, un monde dans lequel Il sera « tout en tous » (1 Corinthiens 15.28) .

 

Dans une autobiographie qui relate les Ă©tapes de son oeuvre thĂ©ologique (3), JĂŒrgen Moltmann a Ă©crit une page Ă©mouvante qui dĂ©crit la nouvelle forme de la relation avec son pĂšre aprĂšs la mort de celui-ci. Cette expĂ©rience, vĂ©cue dans une profonde humanitĂ©, et Ă©clairĂ©e par la foi, est, pour nous, une lumiĂšre qui peut nous Ă©clairer dans des passages de deuil. C’est pourquoi, nous en partageons ici quelques extraits (4). En 1982, ĂągĂ© de 85 ans, le pĂšre de JĂŒrgen est mort brusquement d’une crise cardiaque. JĂŒrgen Moltmann nous rapporte ce qu’il a Ă©crit dans les semaines qui ont suivi ce dĂ©part :

« PĂšre, oĂč es-tu ? Jusqu’ici, cela allait de soi. Je savais que tu Ă©tais Ă  Hambourg assis Ă  ton bureau
 Je savais que tu devenais plus ĂągĂ©, plus faible. Mais tu Ă©tais toujours lĂ , fiable et toujours attentif : mon pĂšre.  Maintenant, je ne peux plus te trouver, mais tu ne t’es pas Ă©vanoui. Tu n’as pas disparu. Tu es plus prĂ©sent que jamais pour moi. Tu as Ă©chappĂ© aux limitations de l’espace et du temps. Quand je pense Ă  toi, je ne te vois pas seulement comme tu as Ă©tĂ© dans ta vieillesse, mais aussi comme tu Ă©tais au sommet de ta force, comme tu Ă©tais quand j’étais un petit enfant et que, juchĂ© sur tes Ă©paules, je cachais mes yeux avec mes mains, et aussi, quand tu Ă©tais jeune homme et qu’à l’ñge de 17 ans, tu es parti Ă  la guerre en 1914
 Je t’entends, je te vois, je sens ta proximitĂ©. Es-tu parti ainsi pour que tu puisses venir Ă  moi de cette maniĂšre. Tu est mort corporellement pour ĂȘtre prĂ©sent Ă  nous dans l’esprit » . « C’est le miracle de la transformation des morts que j’ai expĂ©rimentĂ© aprĂšs la mort de mon pĂšre avec toute cette intensité ». Moltmann poursuit ensuite sa mĂ©ditation dans une rĂ©flexion thĂ©ologique : « Les morts ne sont pas « morts », trĂšs loin de nous, dĂ©pourvus de sens pour nous si bien que nous puissions les oublier rapidement. Ils sont Ă  cĂŽtĂ© de nous et en nous, et notre vie est en dialogue continuel avec eux. Nous vivons dans leur passĂ© qui est maintenant prĂ©sent et ils existent dans notre prĂ©sent. Nous vivons avec ce que les morts nous doivent et ce que nous leur devons  ». JĂŒrgen nous parle aussi de sa mĂšre : « Dans le cas de ma mĂšre, je n’ai pas eu de problĂšme avec sa mort :  Comme si c’était une Ă©vidence, elle Ă©tait et elle est prĂ©sente Ă  moi dans tout ce que fais et que j’expĂ©rimente dans le registre d’une confiance fondamentale ».

 

Bien sĂ»r, les ressentis personnels sont diffĂ©rents selon chacun. C’est lĂ  une expĂ©rience intime et toute personnelle. Elle peut ĂȘtre interprĂ©tĂ©e dans le contexte de la pensĂ©e thĂ©ologique de Moltmann. Ainsi a-t-il beaucoup Ă©crit Ă  ce sujet. On pourra accĂ©der facilement Ă  son approche Ă  travers le livre : « De commencements en recommencements » (2). « Plus nous nous approchons du Christ, plus les morts nous sont proches. Dans les cultes qui se tiennent dans les communautĂ©s ecclĂ©siales en AmĂ©rique latine, on appelle souvent le nom des « disparus », de ceux qui ont Ă©tĂ© assassinĂ©s par la dictature militaire, et la communautĂ© rĂ©pond : « PrĂ©sent » Ils n’ont pas disparu. Ils ne sont pas morts. Ils sont prĂ©sents en Christ et parmi nous ». (p 164).

 

Bien entendu, au moment de leur dĂ©part, les personnes dĂ©cĂ©dĂ©es peuvent Ă©veiller des sentiments divers. JĂŒrgen Moltmann exprime lĂ  avec Ă©motion, une affection paisible, qui, dans le contexte  de sa pensĂ©e thĂ©ologique, permet d’aller au delĂ .

Voici une prĂ©cieuse ressource pour ceux qui s’interrogent sur le sens de l’existence.

 

J H

 

(1)            « La vie spirituelle comme une « conscience relationnelle ». Une recherche de David Hay sur la spiritualité » : http://www.temoins.com/etudes/recherche-et-innovation/etudes/la-vie-spirituelle-comme-une-l-conscience-relationnelle-r/all-pages.html

(2)            Moltmann  (JĂŒrgen). De commencements en recommencements. Une dynamique d’espĂ©rance. Empreinte Temps prĂ©sent, 2012  (Chapitre : la communion des vivants et des morts : p 159-167). Sur ce blog : prĂ©sentation de l’ouvrage : « Une dynamique de vie et d’espĂ©rance » : https://vivreetesperer.com/?p=572

(3)            Moltmann (JĂŒrgen). A broad place. An autobiography. SCM Press, 2007. Mise en perspective sur le blog : « L’Esprit qui donne la vie » : « Une thĂ©ologie pour notre temps » : http://www.lespritquidonnelavie.com/?p=695

(4)            Les extraits concernant l’expĂ©rience de JĂŒrgen Moltmann dans la poursuite de la relation avec son pĂšre, sont empruntĂ©s au chapitre : « My parents die » (p 321-323)

 

Sur ce blog, voir aussi :

« Sur la terre comme au ciel » : https://vivreetesperer.com/?p=338

« Une vie qui ne disparaßt pas » :

https://vivreetesperer.com/?p=336

« Une théologie pour la vie » :

https://vivreetesperer.com/?p=1917

Anne-Sophie Novel : militante Ă©cologiste et pionniĂšre de l’économie collaborative

 

 

Chercher et communiquer pour agir

 

Dans son « talk » en 2014 Ă  Ted x Nantes (1) , Anne-Sophie Novel retrace son parcours de militante Ă©cologiste et de pionniĂšre de l’économie collaborative. A travers un travail soutenu de communication et d’expression sur internet, elle a contribuĂ© efficacement Ă  l’avancement des causes dans lesquelles elle est engagĂ©e. Son influence s’exerce Ă  travers la relation et le partage, aussi a-t-elle pu intituler son intervention : « Cultiver son pouvoir d’agir ». Anne-Sophie Novel Ă©crit aussi des livres. Et, sur ce blog, nous avons rendu compte de son livre pionnier : « Vive la COrĂ©volution.  Pour une sociĂ©tĂ© collaborative » (2). Ainsi, nous sommes heureux de retrouver Anne-Sophie Novel dans ce talk oĂč nous dĂ©couvrons son parcours et les convictions qui l’animent.

 

A la suite de l’attentat contre le World Trade Center Ă  New-York en 2001, observant la rapide rĂ©ouverture de Wall Street, elle s’interroge sur les rapports entre l’économie et le terrorisme et entreprend une thĂšse sur ce sujet. Au cours de ce travail, deux conclusions lui viennent Ă  l’esprit : « La majoritĂ© des attentats sont liĂ©s Ă  des conflits autour des ressources naturelles. La menace terroriste n’est rien au regard de la menace Ă©cologique ».

 

En 2007, elle s’engage davantage dans la promotion de l’écologie avec « l’Alliance pour la planĂšte » et la rĂ©alisation d’un blog : « A l’évidence ». et d’un site connectant l’information dans ce domaine : « Ecolo info ». En 2009, dans le milieu de l’information, elle participe activement Ă  la ConfĂ©rence de Copenhague. Dans la dĂ©ception engendrĂ©e par les blocages qui ont entravĂ© cette confĂ©rence, elle est amenĂ©e Ă  exprimer deux convictions : « Le changement ne viendra pas du haut, mais du bas Ă  des Ă©chelles ultralocales, au niveau des villes et des territoires. Le changement est dĂ©jĂ  en marche. La sociĂ©tĂ© civile et les citoyens agissent de partout. Parce que cela va mal et parce qu’ils veulent aussi rĂ©inventer leur quotidien ».

 

« J’ai envie d’en parler, donc je m’intĂ©resse et j’explore l’idĂ©e selon laquelle le partage va changer le monde. Je commence Ă  faire une veille sur la coopĂ©ration ». Les termes varient selon les pays : « collaboration radicale » aux Etats-Unis, « co-opportunité » en Grande-Bretagne.  En France, on commence Ă  parler de « consommation collaborative ». « Et lĂ , cela fait tilt. Je rĂ©alise qu’on n’est pas en train de vivre une simple crise. Nous sommes dans une transition. Chaque jour, des pans entiers de notre Ă©conomie sont en train de se fissurer. Des failles bĂ©antes laissent s’immiscer des jalons d’une nouvelle Ă©conomie. On a appris avec le web et le numĂ©rique Ă  partager de l’information et maintenant on partage bien plus que de l’information » dans des aspects trĂšs divers de notre vie quotidienne. « Nous sommes interconnectĂ©s en permanence. Sous couvert de crise Ă©conomique, nous sommes en train de retisser du lien social et cela a un effet positif  pour la planĂšte. En rĂ©alitĂ©, nous sommes en train de court-circuiter l’économie classique. La consommation, la production, la distribution, la finance, l’éducation, la politique sont en train de se fissurer et vont devoir se rĂ©inventer de l’intĂ©rieur. Les ONG, avec de nouveaux pouvoirs d’agir, ont une force supplĂ©mentaire. Les organisations vieillissantes, hiĂ©rarchiques, descendantes vont devoir s’horizontaliser et, finalement, on ne devra plus manager, mais faciliter les Ă©changes dans les organisations. C’est ce que j’ai appelĂ© une « Co-rĂ©volution ». De fait, le livre d’Anne-Sophie Novel et StĂ©phane Riot Ă©claire pour nous le nouveau monde qui est en train de naĂźtre.

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Dans cette vidéo, en annonçant des points de vigilance, Anne Sophie-Novel nous propose des pistes pour comprendre le changement et pour avancer.

«  Le monde, dans lequel nous vivons, s’accĂ©lĂšre. Il se complexifie. Il crĂ©e des crispations. Il crĂ©e une montĂ©e des extrĂȘmes. Mais je crois qu’on doit quand mĂȘme abandonner les idĂ©es provinciales. Changer n’est pas facile, mais cela se travaille ». C’est un temps de crise et on ne retrouvera pas la situation antĂ©rieure. « On va passer par des zones de turbulence qu’on a jamais connu jusque lĂ .  Il vaut mieux anticiper pour imaginer de nouveaux possibles ».

« L’économie collaborative ou la co-rĂ©volution sont parmi ces possibles. Mais Ă  quoi bon rĂ©fĂ©rencer ses biens en ligne si c’est pour marchandiser la plus petite intimitĂ© de notre vie. Il nous faut promouvoir beaucoup de transparence et de logique ouverte. L’innovation ne sert de rien si on ne dĂ©veloppe pas Ă©galement une vision plus adaptĂ©e aux enjeux d’aujourd’hui ».

 

Aujourd’hui, on dispose de toutes les solutions, de tous les rapports. « Ce qui nous manque bien souvent, c’est une vision et des dirigeants qui ont le courage de s’engager dans cette vision. Mais nous, avec notre pouvoir d’agir, nous avons tout pour les y mener. Let’s go ! »

 

Dans ce talk, Anne-Sophie Novel nous invite Ă  cultiver « notre pouvoir d’agir ».  Tout au long de son parcours, elle a rĂ©alisĂ© des outils de communication pour partager : des blogs (3), des livres (4)
 Elle associe recherche, expertise et communication.

D’expĂ©rience, nous savons que le changement passe par une Ă©volution des reprĂ©sentations, car celles-ci induisent nos comportements. Notre pouvoir d’agir, c’est bien de contribuer Ă  cette Ă©volution.  Ensemble, nous pouvons partager la vision et l’enthousiasme qu’Anne-Sophie Novel nous communique.

 

J H

 

(1)            « Cultiver son pouvoir d’agir » : Anne-Sophie Novel Ă  TEDx Nantes : http://tedxnantes.fr/?p=396

(2)            Novel (Anne-Sophie) Riot (StĂ©phane). Vive la COrĂ©volution ! Pour une sociĂ©tĂ© collaborative. Alternatives, 2012 (ManifestĂŽ)       Mise en perspective sur ce blog : « Une rĂ©volution de « l’ĂȘtre ensemble » : https://vivreetesperer.com/?p=1394

(3)            Blogs : « De moins en mieux » : http://www.demoinsenmieux.com/   « MĂȘme pas mal. Partage d’initiatives pour mode de vie en temps de crise » : http://alternatives.blog.lemonde.fr/a-propos/

(4)            Novel (Anne-Sophie). La Vie Share. Mode d’emploi. Alternatives, 2013 . En automne 2014, vient de paraĂźtre un recueil de 10 entretiens Ă©ditĂ© par Olivier Le Naire : Le Naire (Olivier) ed. Nos voies d’espĂ©rance. Entretiens avec dix grands tĂ©moins pour retrouver la confiance. Actes Sud/ Les liens qui libĂšrent.  Contribution de Anne-Sophie Novel : « Apprendre Ă  partager. Humaniser l’économie. De la lucidité » p 59-80.  Le point sur la pensĂ©e de Anne-Sophie Novel. Voir Ă  ce sujet en vidĂ©o, une courte intervention de l’auteure. http://www.dailymotion.com/video/x25a3u7_anne-sophie-novel-2-nve_webcam

 

Sur ce blog, voir aussi :

« Pour une sociĂ©tĂ© collaborative ! Un avenir pour l’humanitĂ© dans l’inspiration de l’Esprit » https://vivreetesperer.com/?p=1534

« L’ére numĂ©rique. Glles Babinet, un guide pour entrer dans ce nouveau monde » https://vivreetesperer.com/?p=1812

« Un mouvement Ă©mergent pour le partage, la collaboration et l’ouverture.  OuiShare : une communautĂ© leader dans le champ de l’économie collaborative » https://vivreetesperer.com/?p=1866

Reliance : une vision spirituelle pour un nouvel Ăąge

Tout se tient. Nous sommes reliĂ©s, interconnectĂ©s. DĂšs 2006, dans son livre : ‘Something there’ (1), David Hay Ă©voque la spiritualitĂ© en terme de ‘Conscience relationnelle’. Ainsi, dans la part de cette recherche consacrĂ©e Ă  la vie enfantine, l’analyse des conversations avec les enfants montrait combien ils se sentaient reliĂ©s Ă  la nature, aux autre personnes, Ă  eux-mĂȘmes et Ă  Dieu.

Depuis la fin du XXe siĂšcle, la reconnaissance de cette reliance transparait dans la thĂ©ologie chrĂ©tienne avec l’apparition de la nouvelle thĂ©ologie trinitaire de JĂŒrgen Moltmann. Dieu est communion (2). De mĂȘme, Richard Rohr Ă©voque constamment la rĂ©alitĂ© d’une interconnexion (3). Cette prise de conscience de l’importance de la relation est Ă©galement un phĂ©nomĂšne culturel : ‘Relions-nous !’ (4). Ce livre prĂ©sente un mouvement de pensĂ©e. Et voici qu’un ‘Manuel de transition intĂ©rieure’, un livre qui vient nous introduire dans le changement personnel requis par l’entrĂ©e dans un nouvel Ăąge, un Ăąge Ă©cologique, un Ăąge du vivant, s’affiche dans le titre de ‘Reliance’ (5). Pour rĂ©pondre au dĂ©rĂšglement planĂ©taire, un vĂ©ritable ‘changement de paradigme’ s’impose et requiert ‘une transition tant intĂ©rieure qu’extĂ©rieure’. « Cette mĂ©tamorphose de notre ‘ĂȘtre-au-monde’ appelle un rĂ©veil de l’imaginaire, un dĂ©passement des dualismes, et une ouverture Ă  la spiritualité ». Cet ouvrage a pour auteurs, Tylie Grosjean, Elie Wattelet et Michel Maxime Egger, souvent Ă©voquĂ© sur ce site (6). A l’intention du vaste public auquel ce livre est destinĂ©, un chapitre est consacrĂ© Ă  une ‘ouverture Ă  la spiritualité’ et c’est dans ce chapitre que nous avons puisĂ© les Ă©lĂ©ments d’une rĂ©flexion sur la ‘reliance’.

 

Reliance au plus grand que soi

Les auteurs mettent en Ă©vidence un « regain de spiritualitĂ©, en lien en particulier avec des engagements Ă©cologiques et sociĂ©taux ». « Ce n’est pas qu’un effet de mode. Il constitue une tendance de fond dans le monde occidental. En toute rigueur intellectuelle, il convient de le prendre en compte dans une approche de la transition qui se veut holistique et dynamique » (p 102-103).

Mais qu’est-ce que la spiritualité ? Peut-on en approcher une dĂ©finition ? En fait, « le mot renvoie Ă  des expĂ©riences plurielles qui ressortent notamment dans une large enquĂȘte menĂ©e en 2013 auprĂšs de personnes frĂ©quentant le forum 104, carrefour parisien entre spiritualitĂ© et transition. A la question : qu’est-ce que la spiritualité ? on peut lire des rĂ©ponses trĂšs diverses : la rencontre de l’ĂȘtre humain avec son Ăąme ; la quĂȘte de la rĂ©alitĂ© de ce que nous sommes au-delĂ  des apparences ; ce qui donne sens Ă  ma vie ; ĂȘtre reliĂ© au divin qui est en chacun de nous
 une rĂ©alitĂ© invisible, mais qui existe, porteuse de valeurs et d’idĂ©aux pour l’humanitĂ© ; un chemin de connaissance de soi et un Ă©veil Ă  l’au-delà  ». Les auteurs avancent cette proposition : « la spiritualitĂ© dĂ©signe la relation Ă  un autre plan du rĂ©el de la vie et de la conscience : ‘le plus grand que soi’ ». Comme l’étymologie du mot renvoie Ă  ‘l’esprit’, « dans notre perspective, ce n’est pas seulement la vie de l’esprit (avec une minuscule), mais la vie de ou dans l’Esprit (avec une majuscule) comme expression justement du ‘plus grand que soi’ » (p 103). DiffĂ©rentes versions sont ensuite Ă©voquĂ©es : immanence, transcendance, immanence et transcendance (panenthĂ©isme ).

« Pour une spiritualitĂ© de la transition qui ne peut ĂȘtre que non dogmatique, ouverte et sans exclusive, le ‘plus grand que soi’ est un mystĂšre ineffable qui nous dĂ©passe et fait partie inhĂ©rente de la vie sur Terre. Or un mystĂšre ne s’explique pas et ne se rĂ©sout pas comme une Ă©nigme, il se vit et se cĂ©lĂšbre. Ainsi qu’en tĂ©moignent les mystiques, on n’y accĂšde qu’en participant Ă  sa vie mĂȘme. Il Ă©chappe Ă  notre comprĂ©hension, excĂšde tous les noms et images dont on l’affuble
 Quelles que soient la forme et la dĂ©nomination, pour paraphraser le thĂ©ologien Jean-Yves Leloup, il renvoie Ă  l’Être, la Conscience, la Vie, la Relation et l’Amour qui est Ă  la source de tout ĂȘtre, de toute conscience, de tout vie, de toute relation et de tout amour » (p 104). « On peut donc entendre la spiritualitĂ© comme une vie reliĂ©e au ‘plus grand que soi’, lequel est la source secrĂšte, humble, puissante, et fĂ©conde du vivant ».

Cette approche est illustrĂ©e ici par un tĂ©moignage. « Pour Michel Maxime comme pour beaucoup d’autres, une telle expĂ©rience d’éveil a constituĂ© un tournant radical dans sa vie, un moment fondateur et sans retour : « C’était en 1984, pendant l’annĂ©e que j’ai passĂ© en Inde ». Il raconte le contexte de son expĂ©rience : « Le corps limĂ© et l’ñme polie par la route, j’étais descendu au petit matin au bord d’un Ă©tang dans lequel se mirait un temple. LĂ , dans le silence et la solitude de l’aube, la transparence cristalline de l’eau, j’ai Ă©tĂ© soudain submergĂ© par une vague de paix et de lumiĂšre. Les larmes abondantes coulaient san raison et sans fin. Entre le monde et moi, tout soudain Ă©tait communion, amour, harmonie. Rien ne manquait plus, plus rien n’était Ă  attendre et Ă  espĂ©rer. Il y avait juste la vie dans son abondance et sa puissance, l’ĂȘtre dans sa plĂ©nitude et sa puretĂ©. A partir de cet instant, rien n’était plus comme avant et ne le serait jamais plus ». Cette expĂ©rience de plĂ©nitude rejoint celles dĂ©crites par David Hay dans son livre ‘Something there’ (1). « Une autre dimension de la conscience s’était ouverte Ă  moi », poursuit Michel Maxime. « Oui, il y a au plus profond de l’ĂȘtre et du monde un Esprit, un Souffle, une PrĂ©sence infinie, au-delĂ  du temps et de l’espace, qui transcende le rĂ©el et qui le fonde  ». Cette vision s’est prĂ©cisĂ©e par la suite : « A cet instant lĂ , ce RĂ©el ultime Ă©tait encore impersonnel ; il n’avait ni nom, ni visage, mais il Ă©tait – il prendra plus tard la forme du Christ. Toute la suite de ma vie jusqu’à aujourd’hui, a Ă©tĂ© de cultiver les fruits de cette expĂ©rience  » (p 105).

 

Un sacré relationnel

 « De la refondation spirituelle du cosmos dĂ©coule un art de la reliance. Être et vivre, c’est ĂȘtre et vivre avec. Cela revient Ă  crĂ©er des â€˜Ă©cosystĂšmes de vie bien reliĂ©e’ Ă  travers la culture d’un quadruple lien. A soi – au-delĂ  de l’ego – dans une dĂ©marche de connaissance, d’accomplissement et d’alignement entre notre ĂȘtre profond, nos aspirations et ce que nous faisons. Aux autres – au-delĂ  des frontiĂšres et des identitĂ©s – dans la compassion et l’amour
 Au vivant – au-delĂ  de toutes les sĂ©parations – dans la conscience de nos interdĂ©pendances, la reconnexion profonde avec les autres formes de vie, humaines et autres qu’humaines. A « plus grand que soi » – au-delĂ  de tous les dogmes – Ă  travers l’accĂšs Ă  des Ă©tats de conscience plus larges, plus profonds et Ă©levĂ©s oĂč nous rĂ©pondons Ă  l’appel de l’infini et accueillons le Souffle qui se donne » (p 111).

Ce sera la relation qui sera au cƓur de notre existence tant pour rĂ©parer des liens que pour en Ă©tablir de nouveaux. Ici les auteurs s’inspirent du philosophe juif Martin Buber. Selon lui, le but est d’établir des relations ‘je-tu’ plutĂŽt que ‘je-cela’. « Ce dernier est superficiel, unilatĂ©ral, instrumental. L’autre
 y devient un objet au service de l’ego sĂ©parĂ© et sĂ©parant. Le ‘je-tu’ au contraire est profond, rĂ©ciproque et dialogal
 L’autre est rencontrĂ©, accueilli et reconnu sans jugement, dans sa libertĂ©, sa singularitĂ© et sa dimension divine. La dualitĂ© devient communion d’amour, union sans fusion et confusion » (p 112). Le ‘je-tu’ est le fondement pour construire un ‘nous’ authentique – si important dans les collectifs de transition – qui permet de dĂ©passer le culture du ‘moi-je’ dans le respect de l’unicitĂ© et de l’altĂ©ritĂ© de chaque personne. ‘Je suis parce que nous sommes’ affirme la sagesse traditionnelle bantoue. Et, estime Martin Buber, « à partir d’un certain degrĂ© de vĂ©ritĂ© et de profondeur, un espace s’ouvre dans le ‘je-tu’ oĂč se manifeste un ‘Tu majuscule’ d’essence spirituelle : le ‘Tu Ă©ternel et divin’ qui par essence ne peut jamais devenir un ‘cela’ et constitue l’origine et la sĂšve de l’amour inconditionnel ». « Cette mĂ©tamorphose revient Ă  rĂ©aliser ce que plusieurs traditions de sagesse considĂšrent comme la vocation de l’ĂȘtre humain : devenir un pont – Ă  l’intĂ©rieur et l’extĂ©rieur de soi – entre la Terre et le Ciel, le matĂ©riel et le spirituel, le fini et l’infini, le temps et l’éternité ».

« Dans cette dynamique, nous passons alors de la connaissance sur Ă  la connaissance de. Une connaissance qui est co-naissance (naissance avec), directe, intuitive, globale, paradoxale, au-delĂ  de la dualitĂ© sujet-objet, dan une saisie immĂ©diate par-delĂ  les mots et les images. Le langage de cette connaissance est celui du mythe et du symbole, ses moteurs sont l’émerveillement et l’amour. » (p 112)

Nous entrons ici dans le royaume du sacrĂ©. « ForgĂ© par l’anthropologie culturelle, le ‘sacré’ est une notion complexe, lourde d’hĂ©ritages divers. Étymologiquement, il dĂ©signe ce qui est (mis) Ă  part, sĂ©parĂ© de l’impur et du profane. C’est traditionnellement le domaine du ‘Tout Autre’, tissĂ© de rĂšgles et d’interdits ».

Aujourd’hui, le sacrĂ© change de visage, dans une nouvelle conscience et un nouveau type d’expĂ©rience spirituelle (7). Il n’est pas rĂ©ductible au religieux instituĂ© qui n’en est qu’une des expressions. Il n’est plus assignĂ© Ă  un lieu, mais est potentiellement partout. Il ne sĂ©pare plus, mais relie. Il n’existe plus en soi, mais Ă©merge Ă  travers une relation « je-tu ». Cette expĂ©rience du sacrĂ©, personnelle et intime, croise souvent la mystique religieuse et la mystique sauvage. Elle peut survenir de maniĂšre circonstancielle, Ă  la faveur d’une connexion profonde avec le vivant, d’une extase amoureuse, d’une lecture ou d’un rite. Elle peut aussi ĂȘtre le fruit d’un cheminement spirituel oĂč l’on cultive un Ă©tat intĂ©rieur d’alignement entre « plus grand que soi, le vivant et soi-mĂȘme » (p 113).

Dans la foi chrĂ©tienne, une dimension personnelle vient s’inscrire dans la reliance. Elle se manifeste concrĂštement Ă  travers la venue de JĂ©sus, l’incarnation divine et la rĂ©surrection du Christ. Comme cela a Ă©tĂ© le cas dans le cheminement de Michel Maxime, ce message pourra ĂȘtre entendu dans le nouveau paysage spirituel qui se manifeste aujourd’hui, tel que ce livre vient le prĂ©senter Ă  un vaste public en recherche de sens.

J H

 

  1. La vie spirituelle comme ‘une conscience relationnelle’. Une recherche de David Hay : https://www.temoins.com/la-vie-spirituelle-comme-une-l-conscience-relationnelle-r/
  2. Dieu, communion d’amour : https://lire-moltmann.com/dieu-communion-damour/
  3. La grande connexion : https://vivreetesperer.com/la-grande-connexion/
  4. Tout se tient. ‘Relions-nous’ : un livre et un mouvement de pensĂ©e. https://vivreetesperer.com/tout-se-tient/
  5. Michel Maxime Egger, Tylie Grosjean, Elie Wattelet. Reliance. Manuel de la transition intérieure. Actes Sud / Colibris (Domain du possible)
  6. Ecospiritualité : https://vivreetesperer.com/ecospiritualite/ Réenchanter notre relation au vivant : https://vivreetesperer.com/reenchanter-notre-relation-au-vivant/
  7. Comment la reconnaissance et la manifestation de l’admiration et de l’émerveillement exprimĂ©es par le terme : ‘awe’, peut transformer nos vies : https://vivreetesperer.com/comment-la-reconnaissance-et-la-manifestation-de-ladmiration-et-de-lemerveillement-exprimees-par-le-terme-awe-peut-transformer-nos-vies/

Se sentir aimĂ© pour s’accepter

 

Une vulnĂ©rabilitĂ© enveloppĂ©e d’amour

 

Lorsqu’on a vĂ©cu enfant dans un environnement contraint, il peut nous arriver d’intĂ©rioriser ultĂ©rieurement ces contraintes. La norme reçue se poursuit dans un idĂ©al volontariste. Les conflits engendrĂ©s par des impositions excessives, s’ils sont eux-mĂȘmes brimĂ©s, peuvent aussi se retourner en auto-agressivitĂ©. Et celle-ci engendre une recherche de modĂšle pour Ă©viter les tensions intĂ©rieures et Ă©chapper Ă  la culpabilisation. Ainsi, pour certains d’entre nous, nous avons, plus ou moins, des difficultĂ©s Ă  nous reconnaĂźtre et Ă  nous accepter tel que nous sommes. Si le contexte religieux suscite une culpabilisation, il en rĂ©sulte un vĂ©ritable enfermement. Cependant, la psychologie peut nous aider Ă  percevoir l’étendue de nos blocages. Et, par exemple, la non acceptation de soi, peut se traduire dans la mĂ©connaissance du corps. Elle peut aussi engendrer une peur de nos vulnĂ©rabilitĂ©s comme de tout ce qui Ă©chappe Ă  notre contrĂŽle puisqu’il y quelque chose en nous qui nous inquiĂšte.

Cette attitude ne facilite pas non plus une relation ouverte et dĂ©tendue avec les autres. On manque de libertĂ©. Mais, c’est aussi par la relation que la dĂ©livrance peut venir. Bien souvent, on voit des ĂȘtres se transformer parce qu’ils se sentent aimĂ©s. Ils dĂ©couvrent le bonheur. Ils abandonnent leurs protections et leurs dĂ©fenses. Quelle image avons-nous de Dieu ? L’enseignement de JĂ©sus manifeste l’amour que Dieu a pour nous. Et cet amour est opĂ©rant. C’est ce que Luc-Olivier Bosset nous fait admirablement dĂ©couvrir dans cette vidĂ©o : « Une vulnĂ©rabilitĂ© enveloppĂ©e d’amour » (1). En lavant les pieds de ses disciples, quelques heures avant son arrestation et sa passion, JĂ©sus manifeste un amour pour ces hommes tels qu’ils sont, et pour nous aussi
 Cette mĂ©ditation touche le cƓur et peut se rĂ©Ă©couter Ă  plusieurs reprises. En accompagnement, nous proposons ces quelques notes issues de l’exposĂ©. « Le dernier mot sur la vulnĂ©rabilitĂ© est donnĂ© par l’amour de JĂ©sus qui lave tout, qui soigne tout, qui guĂ©rit tout ».

 

J H

 

 

Le lavement des pieds : un geste d’une profonde douceur.

 

« Il fut un temps oĂč lorsqu’on dĂ©couvrait qu’un enfant Ă©tait gaucher, au lieu de lui permettre d’ĂȘtre ce qu’il Ă©tait, on le forçait Ă  entrer dans un moule, mĂȘme si cela n’était pas dans sa nature. Il fallait que cet enfant apprenne Ă  Ă©crire avec la main droite, car c’était la normalitĂ©.

 

Dans l’Evangile, Ă  un moment donnĂ© (Jean 13), on nous raconte que JĂ©sus lave les pieds de ses disciples. Quand il accomplit ce geste, JĂ©sus sait pertinemment que ses disciples ne sont pas des superhĂ©ros. Dans les heures qui vont suivre, quand la tension avec les autoritĂ©s politiques et religieuses va ĂȘtre Ă  son comble, JĂ©sus sait trĂšs bien que ses disciples vont se sentir vulnĂ©rables, qu’ils vont l’abandonner. C’est pourquoi, sentant toute cette fragilitĂ©, le Christ aurait pu profiter des derniĂšres heures qu’il passait avec eux pour les faire entrer, ces gens un peu gauches, pour les faire entrer dans le moule du superdisciple parfait, invulnĂ©rable, solide et vaillant.

 

Or, au lieu de cela, il accomplit un geste d’une profonde douceur. Il leur lave les pieds. Il prend le temps de les toucher Ă  un endroit de leur corps qui est exposĂ©, qui est vulnĂ©rable, le pied qui est souvent sali, blessĂ©, meurtri par les cailloux de la route. Ce faisant, c’est comme si JĂ©sus leur disait : Et bien, cette vulnĂ©rabilitĂ© qui te traverse, ne passe pas ton temps Ă  vouloir la nier, la  bannir, l’arracher comme si c’était une mauvaise herbe, mais apprend plutĂŽt Ă  l’aimer, Ă  l’envelopper d’amour. Ne te rĂȘve pas comme une personnalitĂ© sans talon d’Achille, comme un super hĂ©ros, mais avance plutĂŽt dans l’existence en vivant tout ce que tu es, mĂȘme ces parties vulnĂ©rables. Ces parties vulnĂ©rables peut-ĂȘtre te font souffrir, car elles sont exposĂ©es, mais, en mĂȘme temps,  ce sont des points de  contact qui te mettent en relation avec le monde qui t’entoure. Regarde, au travers de tes failles, parfois la vie peut te rejoindre, te nourrir et te porter.

 

Alors, accepte ta vulnĂ©rabilitĂ©, en sachant que parfois, au travers d’elle, jaillit mon amour. Car le dernier mot sur ta vulnĂ©rabilitĂ© ce ne sera pas la condamnation, la moquerie ou l’humiliation des autres, mais ce dernier mot sur ta vulnĂ©rabilitĂ© sera donnĂ© par mon amour qui lave tout, qui soigne tout, qui guĂ©rit tout. Vois, si je me suis mis Ă  genoux devant toi, dit JĂ©sus, c’est pour que tu puisses te relever et que tu puisses, chaque jour, choisir la vie.

 

Notes Ă  partir des propos de Luc-Olivier Bosset

 

(1)            « Une vulnĂ©rabilitĂ© enveloppĂ©e d’amour » : Chaine « Pasteur du dimanche » sur You Tube : https://www.youtube.com/playlist?list=PL6F0WgMatbJUxPNorU-tyfYon2NQBXsRG                                                      Sur ce blog : autres mĂ©ditations empruntĂ©es Ă  « Pasteur du dimanche » : « Face Ă  la dĂ©tresse du monde » : https://vivreetesperer.com/?p=1643  « Tu regardes au fond de mon cƓur et tu me connais » : https://vivreetesperer.com/?p=2047

 

Sur ce blog, articles concernant la bontĂ© de Dieu et l’amour de JĂ©sus :                                                           « La beautĂ© de l’écoute » : https://vivreetesperer.com/?p=1219  « Se sentir aimĂ© de Dieu » : https://vivreetesperer.com/?p=1752   « Dieu, puissance de vie » : https://vivreetesperer.com/?p=1405

« Bienveillance humaine. Bienveillance divine. Une harmonie qui se répand » : https://vivreetesperer.com/?p=1842