« Les projets de Dieu pour moi, pour l’humanité, pour l’univers sont des projets de bonheur et non de malheur »
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Odile Hassenforder : « Sa présence dans ma vie ».
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Quelle est notre représentation de Dieu et comment percevons-nous son oeuvre ? Dans son livre : « Sa présence dans ma vie » (1), Odile Hassenforder exprime ses convictions fondamentales dans un chapitre: « Ce que je crois » (p 141-142).
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« Dieu entretient et renouvelle constamment sa création en sollicitant notre collaboration ».
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En s’inspirant de Jérémie (29 :11), elle écrit : « Les projets de Dieu pour moi, pour l’humanité, pour l’univers sont des projets de bonheur et non de malheur « (p 141). Ce Dieu là est bon. Il n’est ni éloigné, ni lointain , comme tenu à distance. Il est constamment à l’œuvre.
« C’est dire que Dieu entretient et renouvelle constamment sa création en sollicitant notre collaboration puisqu’il nous l’a donné en gérance. Ainsi l’action humaine donne des fruits abondants. « Donnez leur vous-même à manger », dit Jésus devant la foule affamée et, en même temps, c’est lui qui multiplie les pains… C’est croire que nous sommes à cette période de l’histoire cosmique où le mal est détruit en Christ revenu à la vie. Toute personne qui accueille cette réalité au nom de Jésus-Christ, inhibe le pouvoir du mal pour elle et pour les autres et peut alors constater les effets de la prière… Je suis de plus en plus convaincue que le créateur est constamment à l’œuvre en renouvellement de vie, demandant la collaboration humaine dotée d’un cœur et d’une intelligence extraordinaire pour participer à l’évolution créatrice… » (p 141-142).
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Tout se tient. Un univers interconnecté où l’action de Dieu s’exerce dans les interrelations.
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Dans cette perspective, Odile se situe dans la nouvelle culture où l’univers n’est plus perçu comme fragmenté, mécaniste et déterministe, mais comme un monde interconnecté, holistique, en pleine créativité (2). Ainsi la dernière section du livre s’intitule : « Tout se tient. Bonté et harmonie en Dieu »et le dernier chapitre : Dieu, puissance de vie » (p 219-220). Elle écrit ici : « Assez curieusement, ma foi en Dieu, qui est puissance de vie, s’est développée à travers la découverte de nouvelles approches scientifiques qui transforment notre représentation du monde. Dans cette perspective, j’ai compris que tout se relie à tout et que chaque chose influence l’ensemble.Tout se tient, tout se lie. Pour moi, l’action de Dieu s’exerce dans ces interrelations. Dans cette représentation, Dieu reste le même, toujours présent et agissant à travers le temps » (p 219).
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Une vision de l’œuvre divine.
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Au départ, ce texte a été publié sur le site de Témoins dans une méditation plurielle rassemblant plusieurs écritsautour du verset (3) de l’Evangile de Mathieu : « Si Dieu revêt ainsi l’herbe des champs, qui existe aujourd’hui et qui demain sera jetée au four, ne vous vêtira-t-il pas à plus forte raison, gens de peu de foi ? (Matthieu 6/30).
Dans son commentaire, Odile partage sa vision de l’œuvre de Dieu. « Je conçois sans difficulté que Jésus-Christ ressuscité relie l’humanité comme l’univers au Dieu trinitaire.. Je sais que le Père, dans sa bonté infinie, veut et manifeste le meilleur pour moi (Deutéronome 30/9) puisqu’il veut notre bonheur à tous. Sachant que l’Esprit m’éclaire, m’aide et me conduit dans la vérité, ce qui est juste pour moi, je m’attends à lui… ».
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Conviction. Inspiration.
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Ce texte a été écrit dans les derniers mois de la vie terrestre d’Odile, une période où la pression de la maladie se manifestait de plus en plus. Dans ce texte, comme dans d’autres, la proximité de la tempête n’est pas absente.Les amis d’Odile savent qu’en regard des épreuves qu’elle a traversées, il y a cette douce et persévérante inspiration qui s’exprime tout au long de ce livre et qui se manifeste encore dans cet écrit : envers et contre tout, dans le présent et dans l’avenir, sur la terre comme au ciel,Dieu est bon. Christ est ressuscité, l’Esprit est à l’œuvre. Dieu est puissance de vie.
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J.H.
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Dieu, puissance de vie.
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« Si Dieu revêt ainsi l’herbe des champs, qui existe aujourd’hui et qui demain sera jetée au feu, ne vous vêtira-t-il pas à plus forte raison, gens de peu de foi ? »
Matthieu 6 :30
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Comme pour la fleur des champs, Dieu nous donne sa vie gratuitement.
Quand tout va bien, il est facile de remercier Dieu pour tous ses bienfaits, de réaliser que le Créateur anime toute sa création, qu’Il la renouvelle constamment, Lui qui nous donne vie, mouvement et être (Actes 17.25).
Quand arrive la tempête, nous voilà ébranlés. C’est difficile de croire, d’être sûr que Dieu pourvoit si nous ne sommes pas enracinés dans cette confiance qu’Il n’a pas changé et s’occupe de nous dans cette nouvelle situation. Notre panique, notre angoisse nous rendent bien souvent aveugles. Préoccupés, obsédés même parfois par l’événement, envahis par nos sentiments, nous appelons au secours sans nous rendre compte que celui-ci arrive par une autre voie que celle attendue par notre regard à courte vue.
Assez curieusement, ma foi en notre Dieu qui est puissance de vie s’est développée à travers la découverte des nouvelles approches scientifiques qui transforment notre représentation du monde. Dans cette nouvelle perspective, j’ai compris que tout se relie à tout et que chaque chose influence l’ensemble. Tout se tient, tout se relie. Pour moi, l’action de Dieu s’exerce dans ces interrelations. Dans cette représentation, Dieu reste le même, toujours présent et agissant à travers le temps.
Je fais partie de l’univers. Je me sens reliée à toute la création. Mon attitude, mon action ont une influence, très souvent sans qu’on en ait conscience du reste. Et, à l’inverse, à moi de réagir aux influences que je reçois. Le rationnel rejoint en moi le domaine émotionnel : cette cohérence situe mieux ma foi qui entre dans ce mouvement.
Alors, dans un tel contexte, je conçois sans difficulté que Jésus-Christ ressuscité relie l’humanité comme l’univers au Dieu Trinitaire. Dans cette vision, tout naturellement, enracinée en Christ, je crains de moins en moins la tempête malgré les sensations, les sentiments qu’elle peut susciter. Je sais que le Père, dans sa bonté infinie, veut et manifeste le meilleur pour moi (Deut . 30.9) puisqu’il veut notre bonheur à tous. Sachant que l’Esprit m’éclaire, m’aide et me conduit dans la vérité, ce qui est juste pour moi, je m’attends à Lui, attentive aux évènements, intuitions…dans la reconnaissance et la louange. Comme pour la fleur des champs, Dieu pourvoit « avec élégance ».
Notre foi est encore bien petite ? Elle peut grandir, mais…il faut le vouloir ! Dieu est grand, beau et bon. Quelle merveille !
(2)Cette évolution de la représentation du monde est bienexprimée dans une préface de l’astrophysicien, Trinh Xuan Thuanh au livre majeur de Jean Staune : Staune (Jean). Notre existence a-t-elle un sens ? Une enquête scientifique et philosophique. Presses de la Renaissance, 2007 : « En physique, après avoir dominé la pensée occidentale pendant trois cent ans, la vision newtonienne d’un monde fragmenté, mécaniste et déterministe a fait place à celle d’un monde holistique, indéterminé et débordant de créativité ». Aujourd’hui la science et la spiritualité sont deux fenêtres complémentaires qui permettent àl’homme d’appréhender le réel . Des recherches mettent en évidence une interrelation entre l’esprit et le corps. Ainsi : Janssen (Thierry). La solution intérieure. Vers une nouvelle médecine du corps et de l’esprit. Fayard, 2006 . Présentation sur le site de Témoins : http://www.temoins.com/developpement-personnel/vers-une-nouvelle-medecine-du-corps-et-de-l-esprit.guerir-autrement.html. Beauregard (Mario). Brain wars. The scientific battle over the existence of the mind and the proof that will change the way we live our lives. Harper Collins. Présentation sur le site de Témoins : http://www.temoins.com/etudes/la-dynamique-de-la-conscience-et-de-l-esprit-humain.-un-nouvel-horizon-scientifique.-d-apres-le-livre-de-mario-beauregard-brain-wars.htmlCette évolution avait été anticipé dans le monde chrétien par des esprits pionniers comme Agnès Sanford dans sa conception de la prière de guérison : Agnès Sanford. La lumière qui guérit. Delachaux et Niestlé, 1955. Disponible aujourd’hui dans sa version américaine originale : Sanford (Agnes). The healing light. Ballantine books. La vision d’un univers interconnecté commence à susciter également une manière nouvelle de concevoir l’église : Friesen (Dwight). The kingdom connected. Baker books, 2009. Présentation sur le site deTémoins : http://www.temoins.com/publications/le-royaume-de-dieu-un-univers-connecte.html Très tôt, la nouvelle représentation scientifique du monde a été prise en compte dans la pensée théologique de Jürgen Moltmann, notamment dans deux grands livres : « Dieu dans la création. Traité écologique de la création » (Cerf, 1988) et « L’Espritqui donne la vie » (Cerf, 1999). La pensée théologique de Jürgen Moltmannest présentée sur le blog : « L’Esprit qui donne la vie » : http://www.lespritquidonnelavie.com/
Dans le texte de l’évangile de Matthieu, Jésus évoque d’autres sujets d’émerveillement : « Regardez les oiseaux du ciel. Ils ne sèment, ni ne moissonnent et ils n’amassent rien dans les greniers ; et votre Père céleste les nourrit.. » (Mat 6 : 26)
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Sur Flickr, nous vous recommandons le très beau site de Siddhart Sharma qui présente, entre autres, de merveilleuses photos de petits oiseaux voletant parmi des fleurs colorées. :http://www.flickr.com/photos/33587234@N04
A la suite de cette réflexion, on pourra contempler telle ou telle d’entres elles :
Au sortir de la société hiérarchisée qui a prévalu pendant des siècles, l’aspiration à la liberté a grandi et s’est manifestée à travers des bouleversements sociaux comme les révolutions qui, à la suite de la Révolution Française, ont parsemé le XIXè siècle. Mais l’aspiration à la liberté ne se manifeste pas seulement au plan de la politique intérieure, mais aussi sur le registre des combats pour l’indépendance nationale par opposition à une domination étrangère et, dans le domaine social, en terme de luttes pour une libération face à l’exploitation d’un groupe dominant. Aujourd’hui encore, l’aspiration à la liberté figure dans l’actualité comme on l’a vu dans les « printemps arabes » et ce ferment est toujours actif.
Cependant, le mouvement pour la liberté n’est pas sans rencontrer des écueils. Il y a des avancées, mais aussi des reculs et des régressions. Le processus dépend pour une part de nos représentations de l’être humain et de la manière de concevoir la vie en société dans une perspective plus vaste. Quelle est notre vision de la nature humaine et de l’avenir de l’humanité ?
Pour répondre à ces interrogations, nous nous inspirons de la pensée de Jürgen Moltmann telle qu’elle s’exprime en quelques pages éclairantes dans son livre : « L’Esprit qui donne la vie » (1).
La liberté comme maîtrise.
Dans une rétrospective historique, on constate que la liberté s’est affirmée fréquemment en terme de lutte pour le pouvoir. Il y a des vainqueurs et des vaincus. Dans cette perspective conflictuelle, la liberté apparaît comme un privilège de ceux qui dominent. Cela a été le cas dans la société antique. La liberté apparaît alors comme une « maîtrise ». « Celui qui comprend la liberté comme maîtrise ne peut être libre qu’au détriment des autres hommes… Au fond, il ne connaît que lui-même et ce qu’il possède. Il ne voit pas les autres comme des personnes » (p 165). Si nous considérons principalement la libertécomme la possibilité de faire ce qui nous plaît, nous avons l’impression d’être « notre propre maître ». Mais alors, c’est l’individualisme qui prévaut. Certes, on fixe pour règle de respecter la liberté des autres. Mais n’est-ce pas sous-entendre que « tout homme n’est qu’une limite à ma liberté ». « Chacun est libre pour ce qui le concerne lui-même, mais personne ne se soucie de l’autre…Dans le cas idéal, il s’agit d’une société d’individus libres et égaux, mais solitaires » (p 160). Mais est-ce bien là une situation qui puisse répondre aux aspirations profondes de l’être humain ?
La liberté comme participation.
On peut avoir un autre regard sur la vie sociale selon lequel la liberté s’exerce dans une relation caractérisée par un respect réciproque. « C’est le concept de la « liberté communicative »… C’est dans l’amour mutuel que la liberté humaine trouve sa réalité. Je suis libre et me sens libre lorsque je suis respecté et reconnu par les autres (2) et, lorsque, de mon côté, je respecte et reconnaît les autres » (p 166). Si je partage ma vie avec d’autres, « l’autre n’est plus la limite, mais le complément à ma liberté ». « La vie est communion dans la communication… Nous nous communiquons mutuellement de la vie… Dans la participation à la vie les uns avec les autres, chacun devient libre au-delà des limites de son individualité » (p 166). Ainsi la liberté s’exerce dans la relation sociale. Elle se manifeste dans l’amour ou la solidarité.
En comparant « la liberté comme maîtrise » et « la liberté comme communauté », Jürgen Moltmann éclaire notre interprétation de l’histoire. « Aussi longtemps que la liberté signifie maîtrise, il faut tout séparer, isoler, fractionner et distinguer pour pouvoir dominer. Mais si la liberté signifie communauté, alors on fait l’expérience de l’union de tout ce qui est séparé ». Ainsi deux conceptions s’opposent : d’un côté, une logique individualiste, et d’un autre côté, une vision holistique. Dans cette vision, « l’aliénation de l’homme par rapport à l’homme, la séparation de la société humaine et de la nature, la scission entre l’âme et le corps, enfin la crainte religieuse sont abolies ». « La liberté comme communauté est un mouvement qui va en sens contraire des luttes pour le pouvoir et des luttes des classes dans lesquelles la liberté ne pouvait être comprise que comme domination… La vérité de la liberté humaine consiste dans l’amour qui veut la vie. Elle conduit à des communautés sans entraves, solidaires et ouvertes… » (p 167)
La liberté comme avenir.
Mais, si onconçoit la vie sociale sans pouvoir fonder sa dynamique dans une perspective d’avenir, sans horizon, alors un enfermement apparaît, un repli se manifeste. « La détermination de la liberté par la foi chrétienne conduit encore au delà de la liberté comme communauté. Nous avons caractérisé la foi chrétienne comme étant essentiellement espérance de la résurrection. A la lumière de cette espérance, la liberté est la passion créatrice pour le possible ». Pour s’exercer, la liberté ne peut se contenter de l’existant. « Elle est référée à l’avenir, à l’avenir du Dieu qui vient » (p 167). Ainsi nous regardons en avant, nous pensons en terme de projet, nous manifestons notre créativité. « Cette dimension de la liberté qui se réfère à l’avenir a été longtemps négligée parce qu’on ne comprenait pas la liberté de la foi chrétienne comme participation à l’agir créateur de Dieu. » (p 168). Dans cette perspective, « nous découvrons la liberté dans la relation de sujet à sujet en relation au projet commun.. ». Jürgen Moltmann nous appelle à entrer dans une vision. « Il est vrai que dans l’histoire dont nous faisons l’expérience, il nous est plus facile de désigner le négatif dont nous voulons nous libérer que d’exprimer le positif envue duquel nous espérons devenir libre. Mais c’est l’espérance d’un avenir plus grand qui, dans l’histoire, nous mène vers des expériences toujours nouvelles » (p 168).
Liberté, égalité, fraternité.
Dans cet éclairage, nous pouvons examiner la grande devise de la République française : liberté, égalité, fraternité. Lorsqu’on souffre de l’absence de liberté, on en perçoit le prix. Et l’égalité fait barrage aux privilèges qui entraînent et accompagnent la domination. Mais si l’on s’en tient à ces deux termes, on s’expose à retomber dans une situation où la recherche de maîtrise est sous-jacente et s’exprime dans un individualisme qui défait le lien social… C’est pourquoi, l’adjonction de la fraternité est essentielle. Et, si l’on se reporte à l’histoire, on sait que le terme s’est imposé au cours du processus qui a abouti à la Révolution de 1848 et que, par rapport à l’individualisme bourgeois, des chrétiens socialistes ont joué un rôle dans cette adjonction (3). Une inspiration chrétienne s’est manifestée dans l’émergence de la fraternité. La fraternité va de pair avec la solidarité et elle en est le ferment.
Dans un livre récent : « Le mystère français » (4), deux démographes, Hervé Le Bras et Olivier Todd, nous apportent un éclairage précieux sur la pluralité des cultures dans la société française. Cette réalité est mise en évidence à travers un ensemble de cartes particulièrement significatives. L’interprétation des auteurs peut naturellement être débattue. A notre sens, la notion de fraternité mériterait d’être davantage prise en compte. La crise de l’héritage révolutionnaire dans le grand bassin parisien, peut être perçue comme la résultante d’un déficit de fraternité. Le dynamisme qui se manifeste dans des régions autrefois marquées par un catholicisme hiérarchisé, peut être imputée à la fraternité qui se manifeste dans une inspiration évangélique autrefois contrôlée.
Aujourd’hui, dans la crise économique et sociale et le désarroi qui en résulte, la fraternité nourrit et soutient la vie en société. Elle s’exprime plus difficilement dans une vie politique marquée par la recherche du pouvoir. Mais, d’expérience, certains en savent l’importance. Ainsi, dans le récent livre de Ségolène Royal : « Cette belle idée du courage » (5), la fraternité est présente dans beaucoup de portraits. Et, à un moment, l’organisationd’une fête annuelle de la fraternité a manifesté la prise en compte d’aspirations populaires au risque de susciter une réaction hostile chez les tenants de l’idéologie traditionnelle.
Pour une société conviviale
Et pourtant, aujourd’hui, dans la mutation en cours, la politique ne peut ignorer un mouvement profond qui s’exprime dans la reconnaissance de l’empathie (6) et dans l’aspiration à une autre manière de vivre où la dimension fraternelle va de pair avec un mouvement qui va de l’avant. Ainsi Jean-Claude Guillebaud a-t-il intitulé son dernier livre : « Une autre vie est possible » (7).
Dans la même inspiration, on parle aujourd’hui de convivialité. Ainsi, dans un recueil intitulé « De la convivialité. Dialogue sur la société conviviale à venir » (8), Patrick Viveret met en cause la « démesure », ce que les grecs appelaient « l’hubris » comme une des causes de la crise actuelle. Et il conclut en posant la question du vivre ensemble entre les êtres humains. « Nous n’avons plus la facilité de contourner la question humaine en la reportant du côté des choses –passer du gouvernement des hommes à l’administration des choses – et il nous faut affronter la question du gouvernement des hommes à l’échelle planétaire. C’est fondamentalement, et la question de la démocratie, et au sens le plus radical du terme, la question de la qualité relationnelle interhumaine, j’ose le mot : de la qualité d’amour de l’humanité qui est en jeu dans la suite de sa propre aventure » (p 40) . L’appel à la convivialité s’étend puisque, tout récemment, un « Manifeste convivialiste » (9) vient de paraître.
Comment vivre ensemble entre êtres humains ? Et selon quelle éthique de la liberté ? La pensée théologique de Jürgen Moltmann nous aide à clarifier les termes du débat… Et, dans cette vision, s’il nous
J.H.
(1)Moltmann (Jürgen). L’Esprit qui donne la vie. Cerf, 1999.La pensée théologique de Jürgen Moltman est présenté au public francophone sur le blog : « L’Esprit qui donne la vie » : http://www.lespritquidonnelavie.com/.Vie et pensée de Jürgen Moltmann à travers son autobiographie : « Une théologie pour notre temps » : http://www.lespritquidonnelavie.com/?p=695
(2)La recherche en sciences sociales, notamment à travers les écritsde Axel Honneth, met de plus en plus l’accent sur l’importance pour les gens de se sentir reconnu par autrui. Nous renvoyons à recueil de contributions sur ce sujet récemment publié : La reconnaissance. Des revendications collectives à l’estime de soi. Editions Sciences humaines, 2013. « C’est dans le regard des autres que l’individu trouve la confirmation de son existence, qu’il se sent à la fois semblable et différent. Et qu’il peut trouver les sources de l’amour et de l’estime de soi….Le besoin de reconnaissance touche aussi bien les individus que les groupes ».
(5)Royal (Ségolène). Cette belle idée du courage. Grasset, 2013 Sur ce blog, mise en perspective : « Force et joie de vivre dans un engagement politique au service des autres » : https://vivreetesperer.com/?p=1335
(7)Guillebaud (Jean-Claude). Une autre vie est possible. Comment retrouver l’espérance ? L’Iconoclaste, 2012.Mise en perspective sur ce site : « Quel avenir pour le monde et pour la France » : https://vivreetesperer.com/?p=937
(8)Caillé (Alain), Humbert (Marc), Latouche (Serge), Viveret (Patrick). De la convivialité. Dialogues sur la société conviviale à venir ». La Découverte, 2011.
Dispersion, lâcher prise, ressourcement et rayonnement.
Propos de Jean-Claude Schwabrecueillis au fil d’une conversation.
Quelles sont les préoccupations auxquelles les gens sont confrontés aujourd’hui ?
« Aujourd’hui, beaucoup de gens ont de la peine à vivre, à se poser dans la vie. Cela vient du fait que le contexte social ou professionnel dans lequel nous vivons se délite et que les institutions qui nous emploient ne nous apportent plus le même soutien. Il arrive même que certains professionnels (même des ecclésiastiques) ne sont plus portés par leur institution. Ils ne trouvent plus de reconnaissance sociale non plus. Du coup, cela fait porter un immense fardeau sur leurs épaules, tant sur le plan professionnel que sur le plan personnel. On se sent à la limite du supportable, du possible. Ce matin, j’étais avec un collègue, en formation continue. Rien ne le soutient. … »C’est toi qui dois te promouvoir personnellement ». C’est unimmense fardeau. D’où l’importance de plus en plus grande d’avoir accès à d’autres appuis, à ses ressources personnelles d’une part et d’autre part aux autres ressources qui peuvent être disponibles.
Face aux manques d’appuis et de repères, quelle forme de ressourcement personnel proposes-tu aux gens ?
Pour moi, les ressources personnelles, c’est l’espace qu’on se donne pour recevoir son être de Dieu. Quand tu fais silence devant Dieu, il se passe quelque chose que tu ne peux pas produire par toi-même. Quand tu te présentes devant le Dieu de miséricorde, pour moi, c’est le Dieu de Jésus-Christ, il se passe quelque chose de mystérieux. C’est le sentiment fort d’exister, ce noyau indestructible de mon être qui n’est pas seulement une ressource, mais une source qui se renouvelle. Je suis alors dans le non-faire et non plus dans « tout ce qu’il y a à faire » et qui me dépasse. Je suis dans le sabbat. Je renonce à toutes les raisons d’exister autres que « d’être là ». Et alors il m’est redonné le sentiment de cette réalité du fondement de mon existence. C’est comme si je me laissais couler au fond de la piscine pour aller y toucher le fond et remonter ensuite.
Sur quoi se fonde cette expérience spirituelle et comment les gens la vivent-ils ?
En vivant cela avec certains de mes vis-à-vis, et en communiquant avec eux à ce sujet, je vois qu’ils font cette expérience et qu’ils trouvent un positionnement par rapport au tourbillon de la vie. Je travaille surtout avec des chrétiens, mais dans les sessions que j’organise, il y a aussi des gens hors cadre, hors milieu chrétien. Mon langage s’inspire de la Bible, mais il est accessible à tous. Parmi les paroles bibliques qui m’inspirent, il y a ce texte que je trouve tout à fait central, et qui parle à chacun. Paul dit : « Je suis qui je suis, par la grâce de Dieu », 1 Corinthiens15.10. C’est tout un chemin : Paul se compare d’abord aux autres apôtres plus grands que lui, pour ensuite ne plus se comparer du tout et se situer dans son être profond fondé dans l’être du Christ: « Je suis qui je suis ». On trouve dans l’Evangile une approche analogue lorsque Jésus déclare : « Avant qu’Abraham fut, Je suis » (Jean 8.58). Il affirme une réalité centrale de son être, indestructible. L’appel du psaume 46 (verset 11), lorsque Dieu dit : « Arrêtez et sachez que je suis Dieu », je levis comme une invitation à cette même démarche : s’arrêter, faire le Shabbat, c’est à dire : renoncer à tout ce qui semble justifier mon existence pour en retrouver le fondement. Dans l’expérience même qu’on peut faire lorsqu’on s’arrête, et qu’on laisse passer les distractions, on reçoit un sentiment fort d’exister. Cette perception-là redonne un courage de vivre. Ceux qui entrent dans cette démarche en font l’expérience.
Parmi les ressources disponibles, quelle est la place donnée aux relations humaines ?
Parmi les ressources qui sont mises à notre disposition, certaines viennent directement de Dieu et d’autres viennent de nos relations humaines. Je m’inspire beaucoup du texte d’Esaïe 50.4 : « Le Seigneur éveille mon oreille pour que j’écoute comme les « appreneurs »; il m’a donné une langue exercée, pour que je puisse soutenir par la parole celui qui est abattu… ». Ce texte met en lien une attitude profonde en Dieu avec la relation aux autres. Dans cette posture dépouillée devant Dieu, de l’arrêt, du silence et de l’écoute intérieure, je trouve ce noyau vital personnel, qui permet ensuite d’être un soutien pour les autres. Evidemment, quand on fait cela, il y a un retour à l’expéditeur. Lorsque tu entres dans une telle relation avec les autres, tu es nourri toi-même, sans pour autant que cela devienne ta raison de vivre ».
Propos de Jean-Claude Schwab recueillis au fil d’une conversation.
Jean-Claude Schwab est pasteur. Il participe activement au réseau : Expérience et théologie et a la responsabilité du site correspondant : http://www.experience-theologie.ch/accueil/
On pourra lire deux articles de Jean-Claude Schwab sur le site de Témoins :
Nous vous invitons à visiter également l’article : « Paix et joie en Dieu. Approche pour une méditation. La vision de Jürgen Moltmann dans « Ethics of Hope » sur le site : « L’Esprit qui donne la vie »
Une lectrice nous dit comment elle a rencontré le livre : « Sa présence dans ma vie »
Il venait de passer une consultation chez un médecin, lorsque de retour auprès de l’assistante, celle-ci l’interrogea en évoquant le livre de Madame Hassenforder. Et, à sa grande surprise et à son grand bonheur, elle lui dit combien ce livre l’avait touchée (1). Une brève conversation en résulta. « Grande lectrice », et même dans le passé, engagée dans des travaux d’édition, elle avait découvert « Sa présence dans ma vie » à la librairie « La Procure », en regardant les ouvrages présentés au public.
A la lecture de ce livre, elle a été touchée par la « sincérité » de son auteure : Odile Hassenforder. Ce livre l’a impressionnée parce qu’il invitait le lecteur à entrer dans « une autre dimension ». Il y a un chapitre dans cet ouvrage : « Dame confiance » qui apporte un témoignage concernant la confiance (2). Mais cet état d’esprit est présent dans la dynamique qui se manifeste dans la plupart des textes. Aussi, c’est bien ce terme que la lectrice a « mémorisé ». « J’ai compris qu’il suffisait d’un mot pour que la situation change de plan ».
Aujourd’hui, nous dit-elle, maintenant, j’hésite à dire « courage » aux gens. Mais aux personnes en difficulté, je dis : « bonne confiance ». Et « j’utilise cette expression au moment de la nouvelle année » et aussi aux anniversaires. Je souhaite « bonne confiance » dans les situations où il y a un mouvement de « bascule ». « Les personnes y sont extrêmement sensibles. Je sais que j’ai touché à quelque chose de beaucoup plus profond. Cette expression aide à prendre de la hauteur par rapport à la situation ». La confiance nous permet d’entrer dans une double dimension : « Se sentir en lien, et aussi pouvoir relire la situation avec un autre regard ».
Ainsi, ce livre, découvert sur un présentoir de librairie, a produit du fruit. « Je ne crois pas au hasard. Je crois aux rencontres. J’ai mémorisé ce livre. J’en ai extrait l’essentiel » . Et voyant combien j’étais concerné par ce livre, elle me dit une parole qui m’est allée droit au cœur : « Le message est passé ».
Émerveillement, contemplation, adoration : un chant de Taizé .
A travers le web, nous pouvons partager nos découvertes, mais aussi, nous entretenir à leur sujet. Une amie, m’ayant fait parvenir une vidéo rapportant un chant de Taizé, je l’ai fait connaître autour de moi . Une réponse : « c’est vraiment magnifique et le diaporama est très beau ».
Effectivement, les paroles de ce chant nous appelle à la méditation, à la contemplation, à l’adoration.
Ô toi, au delà de tout, Quel esprit peut te saisir ? Tous les êtres te célèbrent, Le désir de tous aspire à toi.
En quelques mots, ce chant exprime une inspiration puisée dans les psaumes . Cette strophe, répétée dans une mélodie harmonieuse, inspire et accompagne notre pensée.
Cependant, ce chant est, de plus, accompagné par un diaporama. Alors que d’autres chants sont accompagnés par des images directement connotées par une pratique religieuse, nous trouvons ici une évocation beaucoup plus large. Il y a une grande harmonie entre le chant et les images qui se succèdent.
Ces images renvoient d’abord à l’environnement naturel de Taizé : une eau vive, des fleurs, des papillons… Une trouvaille : le chant s’inscrit dans le cycle d’un jour, de l’aube à l’arrivée de la nuit. C’est pour nous un signe de paix et d’harmonie
Au cœur du diaporama, apparaît un bas-relief qui nous montre une procession en marche vers la nativité. Ainsi, dans cette évocation d’un Dieu qui nous dépasse, il y a le rappel bienvenu de la venue de Jésus à Noël . Et Jésus manifeste concrètement la présence de Dieu, et nous le révèle comme un bon père.
Enfin, pendant une longue séquence filmée, nous voyons apparaître les visages de ceux qui participent à cette célébration chorale : visages divers dans les expressions et les attitudes puisqu’on voit de temps à autre un jeu d’instrument de musique. A travers ces visages, nous entrons dans une communion d’esprit.
Ainsi, le chant et le diaporama s’allient pour nous faire entrer dans une harmonie : émerveillement, contemplation, adoration.
Dans son livre : « Sa présence dans ma vie ». Odile Hassenforder exprime la bonté et l’amour de Dieu.
En nous faisant part de son parcours spirituel tout au long de sa vie, d’une expérience fondatrice dans laquelle elle a reçu à la fois guérison et ressenti de l’amour de Dieu jusqu’aux dernières années où confrontée à une grave maladie, elle a trouvé en Dieu force et soutien, en passant par deux décennies où elle a vécu vie familiale et engagement chrétien en étant à l’écoute de tous ceux qui étaient en difficulté ou en recherche, Odile Hassenforder nous exprime, dans son livre (1) l’essentiel de sa foi . « Qui est Dieu ? » Un Dieu de Bonté et d’amour, nous répond-elle dans les différents textes qui composent ce chapitre, et, entre autres, celui-ci : « Geste d’amour ».
Geste d’amour.
Il est encore trop petit, mais il a très envie d’être grand. Alors, il emprunte le vélo du grand frère. Maman le lui a interdit pourtant. Ce qui devait arriver, arriva : il est tombé et s’est fait très mal. Quelle maman, ou quel papa, digne de ce nom, va-t-il le gronder ? A la vue du petit blessé, le geste d’amour spontané n’est-il pas de se précipiter pour consoler son enfant, le prendre dans ses bras et le soigner ? La leçon viendra plus tard. De cette expérience malheureuse, l’enfant retiendra d’abord et surtout cette tendresse qu’il a reçue. De même, cet adolescent, après un conflit avec son père, se réjouira de la réconciliation au cours de laquelle il s’est senti compris et aimé.
Nous sommes créés à l’image de Dieu, ce Dieu d’amour qui a pris nature humaine pour communiquer avec nous. Jésus est venu nous révéler la bonté infinie de son Père. Il nous en parle en racontant l’histoire de cet homme qui accueille sans reproche son fils, celui qui a dilapidé son héritage. Il le voit de loin, et, saisi d’une grande compassion, il court à sa rencontre et l’embrasse (Luc 15).
De même, j’ai été très émue le jour où j’ai lu le chapitre 11 du livre d’Osée . L’Eternel considère le peuple d’Israël comme son enfant. « Quand Israël était enfant, je l’ai aimé. J’ai appelé mon fils à sortir d’Egypte… C’est moi qui ai guidé les premiers pas d’Ephraïm (diminutif d’Israël) et qui l’ai porté dans mes bras. Mais il n’a pas voulu savoir que, moi, je prenais soin de Lui. Je le dirigeais avec ménagement, lié à lui par des liens d’amour. J’étais pour lui comme un père qui porte son petit enfant tout contre sa joue… ». Quelle sollicitude ! Quelle tendresse quasi maternelle !
Dieu nous a aimé le premier. Il fait des projets de bonheur pour chacun de nous, rappelle le prophète Jérémie (29/11 ). Il vient au devant de nous. Son pardon nous est acquis d’avance (I Jean 1/9).
Quand Jésus bénit les petits enfants et les donne en modèle à ses disciples, ne veut-il pas leur faire comprendre la nécessité d’accueillir avec confiance la bonté de son Père ?
« Le Seigneur est bienveillant et compatissant,
Patient et d’une immense bonté.
Le Seigneur est bon pour tous.
Son amour s’étend à tous ceux qu’Il a créés » (Psaume 145/8).