Partager le bon et le beau

https://www.temoins.com/wp-content/uploads/2011-2/2011-2_777Allons.jpgNous nous trouvons souvent  confrontĂ©s Ă  une ambiance oĂč l’expression du nĂ©gatif l’emporte. DiffĂ©rents sentiments s’y manifestent. Ce peut ĂȘtre la crainte lorsqu’on se dĂ©charge, sans contrepartie de mauvaises nouvelles et, parfois, avec force dĂ©tails. C’est une absence d’horizon, un avenir bouchĂ©. Tous les maux de la terre, certes bien rĂ©els, affluent. Parfois on regrette le passĂ©. Tout va mal. Tout va plus mal. Et puis, chacun pour soi. Cela se dit rarement, mais cela se pratique : Ă©goĂŻsme et cynisme. Bien sĂ»r, lĂ  oĂč une foi ou un  idĂ©al se manifestent, l’ambiance est autre. Mais, mĂȘme lĂ , on observe parfois un repli sur son propre milieu : le bien au dedans, le mal et le danger au dehors.

Ce propos est caricatural. Et d’ailleurs, le mal existe. Il est lĂ  et bien lĂ . Cette rĂ©alitĂ© appelle mise en garde, lutte et pour les chrĂ©tiens, intercession. Simplement, partout oĂč nous constatons une expression commune d’empathie, de sympathie et de paix, nous pouvons dire qu’il y a lĂ  ce qui permet aux gens de vivre et Ă  la sociĂ©tĂ© d’ĂȘtre humaine, au bon sens du mot. Et d’ailleurs, qui ne verrait pas le positif, non seulement dans l’attention que tant de gens se portent dans la vie quotidienne, mais aussi dans des mouvements qui s’expriment Ă  grande Ă©chelle dans notre sociĂ©té : l’entraide qui se dĂ©ploie dans un grand nombre d’associations humanitaires, le dĂ©sir de beautĂ© qui fait le succĂšs des expositions, une nouvelle sociabilitĂ© qui s’esquisse notamment sur internet, et bien d’autres tendances positives. Apprenons Ă  voir le positif dans l’offre « mĂ©langĂ©e » des mĂ©dias. Mais n’y aurait-il pas aussi des lieux de rencontre oĂč on puisse, Ă  certains moments, partager ce qui est bon et beau et s’en rĂ©jouir ensemble ?

Nous rapportons ici une expĂ©rience. Pendant quelques annĂ©es, dans une association, des rencontres ont Ă©tĂ© organisĂ©es pour permettre un partage des expĂ©riences positives de chacun. Ainsi, les participants exprimaient des expĂ©riences de tout genre, ce qu ‘ils avaient vĂ©cu de beau et de bon. Ce pouvait ĂȘtre l’émotion ressentie Ă  la vue d’une peinture, l’apprĂ©ciation d’un livre ou d’un film, l’harmonie perçue Ă  travers tel chant ou telle musique, la joie d’une comprĂ©hension nouvelle de la sociĂ©tĂ© ou de la nature, mais aussi un moment de bonheur au quotidien, l’émotion ressentie en prĂ©sence d’un paysage, une expĂ©rience spirituelle ou l’expression d’un vĂ©cu relationnel bienfaisant. Et cette Ă©numĂ©ration n’a pas de limites.

Chacun pouvait donc participer selon son dĂ©sir en exprimant ainsi ce qui lui tenait Ă  cƓur, mais aussi en Ă©coutant tout simplement et en goĂ»tant le bonheur de ce partage. Chacun avait son chemin, son itinĂ©raire. Chacun Ă©tait respectĂ© dans son mouvement et sa recherche.

Explicitement , cette rencontre Ă©tait organisĂ©e par des chrĂ©tiens, si bien qu’il Ă©tait reconnu qu’à certains moments, dans un chant ou dans une priĂšre, une louange s’exprimait. C’était une expression de reconnaissance envers « l’Esprit qui donne la vie » et en « Celui en qui nous avons la vie, le mouvement et l’ĂȘtre » (Actes 17.27). Et ce Dieu lĂ  ne fait pas de forcing et respecte le cheminement de chacun.

Il y avait lĂ  une ambiance conviviale et joyeuse qui faisait Ă©cho Ă  ce que, dans les premiers temps du christianisme, un apĂŽtre a exprimĂ© en considĂ©rant ce qui Ă©tait positif dans la sociĂ©tĂ© de son temps, elle aussi aux prises avec bien des dĂ©formations et mĂȘme des dĂ©pravations.  Paul Ă©crivait ainsi aux chrĂ©tiens : « Que tout ce qui est bon et digne de louange, tout ce qui est vrai, respectable, juste, pur et honorable soit l’objet de vos pensĂ©es » (Epitre aux Philippiens 4.8).

Ce que nous vivons dĂ©jĂ  sur un certain registre, pourquoi ne pas le partager dans des rencontres comme celles que nous venons de dĂ©crire ? La situation peut varier. Elle est peut ĂȘtre trĂšs informelle, par exemple une soirĂ©e entre amis oĂč on prend plaisir Ă  partager de belles et bonnes choses. Le cadre lui-mĂȘme peut  comporter de nombreuses variantes en particulier dans le degrĂ© de l’expression de foi qui pourrait aller jusqu’à la mise en Ɠuvre d’un culte oĂč l’Esprit s’exprime Ă  partir de l’expĂ©rience apportĂ©e et partagĂ©e comme des paroles bibliques qui se prĂ©sentent. Comme dans une oeuvre musicale, il y a des notes multiples. On peut aussi prendre part Ă  des processus analogues dans des contextes purement sĂ©culiers. Quoiqu’il en soit, sachons ĂȘtre attentif. « L’essence de la crĂ©ation dans l’Esprit est la collaboration » (JĂŒrgen Moltmann). « Tout ce qui monte, converge » (Teilhard de Chardin).

 

JH

 

Sur ce blog : Vivre en harmonie

Sur le site de TĂ©moins, la vie d’un groupe de partage : Un air de libertĂ©. Conversation avec FrĂ©dĂ©rique. https://www.temoins.com/un-air-de-liberte-entretien-entre-frederique-ivulski-et-jean-hassenforder/

 

La tĂȘte et le cƓur

Aujourd’hui, de plus en plus, la spiritualitĂ© se conjugue avec l’expĂ©rience. Cette expĂ©rience met en jeu toutes les dimensions de notre ĂȘtre : le corps et l’esprit, la tĂȘte et le cƓur. Cependant des reprĂ©sentations peuvent faire encore barrage. En effet, si le changement culturel opĂ©rant Ă  partir de registres convergeant, amĂšne de plus en plus une reconnaissance des interrelations entre les diffĂ©rents aspects de notre ĂȘtre, il y a aussi dans notre hĂ©ritage des philosophies antagonistes qui, pendant des siĂšcles, ont prĂŽnĂ© la sĂ©paration et une hypertrophie du mental par rapport aux autres dimensions de l’ĂȘtre humain. C’est pourquoi, aujourd’hui encore, dans certains milieux « rationalistes » comme dans certains cercles chrĂ©tiens oĂč l’exercice de la foi s’opĂšre principalement Ă  travers une rĂ©flexion intellectuelle, on observe des rĂ©serves vis Ă  vis de l’expĂ©rience spirituelle. Et nous pouvons Ă©prouver en nous mĂȘme des rĂ©sistances issues de ces reprĂ©sentations. Il est donc important d’en comprendre l’origine pour pouvoir vivre pleinement ce que l’Esprit nous apporte Ă  travers l’expĂ©rience.  Deux auteurs : JĂŒrgen Moltmann et Leanne Payne,  nous apportent sur cette question des Ă©clairages pertinents.

 

La sĂ©paration entre l’ñme et le corps.

 

Ainsi JĂŒrgen Moltmann montre comment la philosophie platonicienne a profondĂ©ment influencĂ© le christianisme occidental (1) Platon proclame l’excellence d’une Ăąme immortelle. « Si l’homme cherche son identitĂ© dans l’ñme et non dans le corps, il se trouve lui-mĂȘme immortel et immunisĂ© contre la mort ». A cette supĂ©riorité  de l’ñme correspond une infĂ©rioritĂ© du corps, voire un quasi rejet. « Elle enlĂšve Ă  la vie corporelle tout intĂ©rĂȘt vital et dĂ©grade le corps en une enveloppe indiffĂ©rente de l’ñme ».

Le dualisme entre le corps et l’ñme « sera transposĂ© par Descartes dans la dichotomie moderne du sujet et de l’objet ». C’est seulement la pensĂ©e excluant la perception sensible qui induit la conscience de soi. Le sujet pensant exerce un commandement sur son corps et par extension sur la nature.

En regard, JĂŒrgen Moltmann adhĂšre Ă  une anthropologie biblique. L’homme, « engagĂ© dans une histoire divine » apparaĂźt toujours comme un tout et s’inscrit dans des relations existentielles. C’est en terme d’alliance qu’on doit concevoir la relation entre l’ñme et le corps.

 

La dĂ©chirure entre la tĂȘte et le cƓur.

 

En analysant les obstacles Ă  la priĂšre d’écoute (2), Leanne Payne Ă©voque une « dĂ©chirure grave entre la tĂȘte et le cƓur ». Comment puis-je entendre Dieu, si « je n’intĂšgre pas correctement mes capacitĂ©s intuitives et imaginatives Ă  mes facultĂ©s objectives et rationnelles pour les utiliser dans un juste Ă©quilibre ».

Ce dysfonctionnement est liĂš Ă  ce qu’elle appelle la « faille cartĂ©sio-kantienne » entre la pensĂ©e et l’expĂ©rience. L’hĂ©ritage intellectuel de Descartes et de Kant a engendrĂ© chez beaucoup de chrĂ©tiens une dĂ©chirure « se caractĂ©risant par le fait qu’ils acceptent une connaissance conceptuelle au sujet de Dieu comme rĂ©alitĂ© tout en niant simultanĂ©ment les maniĂšres Ă©lĂ©mentaires d’aimer Dieu, de le connaĂźtre et de marcher avec lui, ces derniĂšres Ă©tant plus Ă©troitement liĂ©es Ă  la connaissance intuitive sans laquelle nous perdons les bienfaits de la raison et ceux de la connaissance conceptuelle » .

« En niant les maniÚres intuitives de connaßtre, nous ne pouvons plus entendre la voix de Dieu. ».

« A l’inverse de l’idĂ©ologie kantienne, les chrĂ©tiens affirment que Dieu lui mĂȘme nous parle d’une maniĂšre dont il nous donne le modĂšle dans l’écriture. Il a façonnĂ© nos Ăąmes et nous a donnĂ© des oreilles et des yeux spirituels, enracinĂ©s dans le fait qu’il vit en nous et nous en lui, afin que nous le voyions, l’entendions et le connaissions ».

 

Notre propos ici n’est pas de traiter de l’expĂ©rience et des conditions de son authenticitĂ© spirituelle, mais simplement d’éclairer et donc de lever les barriĂšres culturelles qui peuvent s’y opposer. Oui, c’est en terme de rĂ©ciprocitĂ© que nous percevons la relation entre notre Ăąme et notre corps, entre notre tĂȘte et notre cƓur.

 

Leanne Payne raconte qu’une personne ayant dĂ©couvert le chemin de la priĂšre d’écoute s’attira cette remarque acerbe : « Je vois, vous avez maintenant une ligne directe avec Dieu ». Une amie me disait rĂ©cemment qu’elle hĂ©sitait Ă  faire connaĂźtre ce blog parmi les membres d’un groupe chrĂ©tien (catholique) trĂšs centrĂ© sur la rĂ©flexion Ă  travers l’étude de livres. Elle pensait que, pour certains de ces membres, le blog leur apparaĂźtrait comme trop tournĂ© vers l’expĂ©rience. Quel est notre vĂ©cu Ă  ce sujet ? Quels sont nos cheminements ?

 

JH

 

(1)            Cette analyse est dĂ©veloppĂ©e Ă  plusieurs reprises par JĂŒrgen Moltmann. A propos de cette Ɠuvre :  www.lespritquidonnelavie.com

(2)            Payne (Leanne). La priĂšre d’écoute. RaphaĂ«l, 1994 (p.141-143)

GuĂ©rison, libĂ©ration. La vie d’Odile Hassenforder a changĂ©

Une expĂ©rience fondatrice dans  la mouvance de l’Esprit.

 

Dans le dĂ©sarroi existentiel, une parole de l’Evangile vient Ă  notre rencontre pour nous permettre de trouver ou de retrouver, Ă  travers les mots de Pierre, la relation avec JĂ©sus qui donne sens et paix : « Seigneur, Ă  qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie Ă©ternelle » (Jean 6.68). Et lorsque nous sommes pressĂ© par la maladie, les paroles et les actes de JĂ©sus dans l’Evangile ouvrent pour nous une espĂ©rance mobilisatrice. Dans son livre : « Sa prĂ©sence dans ma vie », Odile raconte une expĂ©rience qui a changĂ© sa vie et dans laquelle guĂ©rison et libĂ©ration sont Ă©troitement associĂ©es. A travers la vision spirituelle qui en est rĂ©sultĂ©e, cette expĂ©rience fondatrice a accompagnĂ© toute sa vie (1). Odile a Ă©crit plusieurs rĂ©cits de cette expĂ©rience vĂ©cue en 1973. Nous prĂ©sentons ici l’un d’entre eux, publiĂ© en 1985 dans le bulletin : TĂ©moins. Ce texte nous communique le vĂ©cu et le ressenti de cette expĂ©rience, mais, en mĂȘme temps, il nous apporte des paroles bibliques en Ă©chos et en Ă©clairage. L’annonce qui lui a ouvert les portes de la vie a Ă©tĂ© pour elle source de libertĂ© en lui offrant un choix. « Pourquoi ne la transmettrais-je pas aux autres ? Du reste, annoncer, informer, proposer, ce n’est pas imposer ; c’est vraiment au fond de lui-mĂȘme (le cƓur dont parle la Bible) que chacun dĂ©cide » (Evangile de Marc 4.1-9) ;

 

Recoller les morceaux. 

            Je continue Ă  dire aujourd’hui que j’ai beaucoup de chance d’avoir dĂ©couvert Dieu agissant dans ma vie. Ce jeudi d’octobre 1973, j’ai reçu au plus profond de mon ĂȘtre la vie en JĂ©sus-Christ qui m’a sauvĂ©e, guĂ©rie, baptisĂ©e en son Esprit Saint (Evangile de Matthieu 3.11) ;

 

A cette Ă©poque, je sentais ma personnalitĂ© m’échapper, se dissocier au point oĂč je n’arrivais plus Ă  rĂ©diger un chĂšque ou Ă  compter ma monnaie. Ecrire un rapport devenait un supplice car, Ă  certains moments, je ne contrĂŽlais plus ma pensĂ©e Je sombrais de plus en plus malgrĂ© la psychanalyse, divers traitements et mĂȘme l’aide fraternelle.

 

Me rappelant une phrase de l’Evangile, j’ai hurlĂ© Ă  JĂ©sus : « Si vraiment tu es la vie, donne-moi le goĂ»t Ă  la vie (Jean 14.6). Et en moi a jailli une source de vie, d’énergie, d’amour, de joie. (Jean 4.4 ; Galates 5.22).

 

Cette rĂ©ponse n’a pas Ă©tĂ© immĂ©diate car, je l’ai compris depuis, il ne suffit pas de demander, il faut saisir la promesse de JĂ©sus (Jean 7.37).

 

Un chrĂ©tien rencontrĂ© en vacances, m’a dit que JĂ©sus guĂ©rissait aujourd’hui comme en Palestine durant sa vie terrestre : invisible mais rĂ©el pour ceux qui croient. J’ai posĂ© un tas de questions, j’avais du mal Ă  le croire, mais je ne l’ai pas oubliĂ©. Trois mois plus tard, j’ai failli provoquer un accident : je voyais le feu rouge sans pouvoir rĂ©agir Ă  ce signal et une voiture a coupĂ© ma route Ă  vive allure puisque le feu Ă©tait vert pour elle ! Ce jour-lĂ , j’ai rĂ©flĂ©chi : je peux continuer Ă  essayer de m’en sortir tout en sachant que je risquais fort de glisser davantage dans le gouffre et la folie. Par ailleurs, je sais maintenant que JĂ©sus guĂ©rit. J’ai donc le choix entre deux chemins. Depuis des annĂ©es, je lutte dĂ©sespĂ©rĂ©ment pour mon fils, mon mari et puis
 j’ai envie de vivre tout simplement. Alors j’ai choisi la vie (DeutĂ©ronome 30.15) et j’ai tĂ©lĂ©phonĂ© Ă  la seule personne convaincue et expĂ©rimentĂ©e que je connaissais.

 

Il n’était plus question de discuter. J’ai demandĂ© la priĂšre. Je l’ai mĂȘme demandĂ© cinq fois durant cette semaine, car je retombais dans une dĂ©pression profonde aprĂšs avoir reçu une Ă©nergie peu commune (Jean 6.27 ; Luc 11.13). J’avais vraiment dĂ©cidĂ© de vivre et je m’accrochais. Je remettais toute ma vie concrĂšte Ă  JĂ©sus pour qu’il la transforme positivement.En sortant d’une rĂ©union de priĂšre, oĂč j’ai eu la conviction intĂ©rieure que j’allais guĂ©rir, j’ai rĂ©alisĂ©, au moment de m’endormir, que mon ĂȘtre Ă©clatĂ© reprenait son unitĂ©. Chaque morceau prenait sa place comme un puzzle terminĂ©. Je me trouvais totalement dans la rĂ©alitĂ© et je dĂ©couvrais en mĂȘme temps, un univers inconnu de moi auparavant (Job 42.5) dans lequel, en harmonie avec moi-mĂȘme et avec mon environnement, je prenais naissance dans la joie et dans la paix (Jean 3.3 ; 2 Corinthiens 5.17). Je rentrais dans le royaume de Dieu (Romains 14.17) et l’Eglise  spirituelle de JĂ©sus-Christ (Jean 1. 13 ; Matthieu 16.17).

 

Je me suis mise Ă  lire la Bible, le Nouveau Testament d’abord. Je devrais dire « dĂ©vorer », car toutes ces paroles rĂ©sonnaient en moi d’évidence et je disais : c’est bien ça, c’est vrai, c’est ce qui m’arrive ! (Jean 16.13). SimultanĂ©ment, je dĂ©bordais d’amour mĂȘme pour des collĂšgues qui m’avaient fait des « crasses » dans mon travail. Cette bonne nouvelle  de JĂ©sus ressuscitĂ©, je la racontais Ă  qui voulait l’entendre. Cette annonce a Ă©tĂ© pour moi source de libertĂ© en m’offrant un choix. Pourquoi ne la transmettrais-je pas aux autres ? Du reste, annoncer, informer, proposer, ce n’est pas imposer. C’est vraiment au fond de lui-mĂȘme (le cƓur dont parle la Bible) que chacun dĂ©cide (Marc 4.1-9).

 

Je suis profondĂ©ment reconnaissante au Seigneur car « sa bontĂ© et sa grĂące m’accompagnent tous les jours de ma vie », sa perfection se manifeste dans sa misĂ©ricorde (Matthieu 5.48 ; Luc 6.36), lui qui fait briller son soleil sur tous les hommes qu’Il aime sans distinction (Matthieu 5.45).

 

Odile Hassenforder

 

(1)   Hassenforder (Odile). Sa prĂ©sence dans ma vie. Parcours spirituel. Empreinte, 2011 . Odile y relate sa guĂ©rison avec plus d’ampleur et de recul, dans un  chapitre : « Ma vision de Dieu a changé » (p 27-43) PrĂ©sentation du livre sur le site de TĂ©moins : http://www.temoins.com/evenements-et-actualites/sa-presence-dans-ma-vie.html

Chagall, Dieu et l’amour

Autour d’une exposition : « Chagall entre guerre et paix ».
Blaise Cendrars Ă  propos de Chagall :

« Il dort, il est Ă©veillĂ©, il prend une Ă©glise et il peint avec une Ă©glise, il prend une vache et il peint avec une vache, avec une sardine
 ».xx

RĂ©sidant dans une ville en Normandie, David Gonzalez a fait le dĂ©placement pour visiter l’exposition : « Chagall entre guerre et paix », au MusĂ©e du Luxembourg. Au fil d’une conversation, il nous dit pourquoi il Ă©tait motivĂ©, ce qu’il a ressenti et ce qu’il en rapporte.

« Qu’est ce qui m’a motivĂ© ? L’appel du dĂ©sir. Parce que ma premiĂšre rencontre avec les peintures de Chagall s’est rĂ©alisĂ©e fortuitement Ă  l’occasion d’un mariage. Des amis prĂ©paraient leur mariage. Ils ont fait le choix de s’entourer d’amis plutĂŽt que de vivre cette attente en famille ou dans une Ă©glise. Et, au cours de l’aprĂšs-midi prĂ©cĂ©dant leur mariage, le groupe d’amis qui entourait les mariĂ©s, sous la direction d’un autre ami artiste, ont vĂ©cu un moment crĂ©atif sur le thĂšme de Chagall. Sur des nappes en papier tendues sur des tasseaux en bois, ils ont peint tous ensemble des tableaux Ă  la maniĂšre de Chagall. J’ai vu ces peintures et elles me sont allĂ©es droit au cƓur. Elles m’ont fait une forte impression : les rouges, les bleus, des mariĂ©s voltigeant dans le ciel, des animaux lumineux dans la nuit de villages inconnus.

Ces impressions lĂ , affectives et esthĂ©tiques, m’ont donnĂ© envie d’accrocher ces tableaux dans un petit temple anglais d’une station thermale normande qui ne sert quasiment qu’aux baptĂȘmes et aux mariages. Je me suis dit que ces tableaux mettraient un peu de chaleur et de goĂ»t au milieu des boiseries et des bĂ©atitudes gravĂ©es sur les murs. Parmi ces tableaux produits au cours d’un pique-nique Ă  la veille du mariage, quelques uns seulement Ă©taient vraiment exposables. J’ai donc complĂ©tĂ© ce dĂ©but d’expo en me procurant un catalogue de l’oeuvre peinte de Chagall, puis en photocopiant et en mettant sous verre quelques uns des tableaux les plus connus de ses diverses pĂ©riodes.

Cette premiĂšre expĂ©rience pour moi, a Ă©tĂ© principalement visuelle et pratique dans un premier temps. Mais elle a aussi dĂ©posĂ© en moi deux notions trĂšs fortes : que Chagall peignait l’amour entre un homme et une femme et qu’il cherchait aussi Ă  illustrer le divin. L’origine de ces peintures en provenance d’amis amoureux et l’accrochage dans le temple Ă©taient certainement Ă  l’origine de cette rĂ©ception thĂ©matique : Chagall , Dieu et l’amour.

Quelques annĂ©es plus tard, une amie m’a proposĂ© d’aller voir l’exposition : « Chagall entre guerre et paix » au MusĂ©e du Luxembourg. Cet approfondissement de ma relation avec la peinture de Chagall se trouvait Ă  nouveau habitĂ© par l’amitiĂ© et le dĂ©sir. J’ai repensĂ© Ă  Dieu dans Chagall dans les habits de l’amour. Deux remarques : j’ai compris cette fois-ci que l’attention et l’état d’esprit conditionnent entiĂšrement la rĂ©ception d’une Ɠuvre. Le dĂ©sir et l’amitiĂ© m’ont semblĂ© ĂȘtre la meilleure voie pour redĂ©couvrir Chagall.

Premier pas dans le trĂšs fonctionnel MusĂ©e du Luxembourg. Les rĂ©servations sont complĂštes. Nous sommes nombreux devant les tableaux. Il est vingt heures trente. C’est une expĂ©rience crĂ©pusculaire.

PremiĂšre sĂ©quence de tableaux : c’est le Chagall des annĂ©es 1910. Deux toiles vertes transforment immĂ©diatement mon souvenir en dĂ©couverte. Ce n’est plus le Chagall des ciels bleu nuit et des rouges omniprĂ©sents. Il y a devant moi une peinture reprĂ©sentant une femme et son enfant devant une fenĂȘtre, et c’est la lumiĂšre vĂ©gĂ©tale et le vert des tissus qui illuminent ce tableau . Plus de flou. Un tableau rĂ©aliste. Le dessin est extrĂȘmement prĂ©cis. La femme, c’est Bella, et le nourrisson, c’est la petite fille de Marc Chagall.

La vie s’est comme arrĂȘtĂ©e. Le cours de la vie est suspendu au prĂ©sent. Et ce prĂ©sent a la beautĂ© froide d’une foret ukrainienne. Marc Chagall me fait penser Ă  Sören Kierkegaard : sa vie entiĂšre Ă©tait une attente de l’amour heureux. C’est ce que la vie lui offre. Il s’en saisit. En 1914, la guerre Ă©clate. Chagall ne peut plus revenir Ă  Paris comme il le dĂ©sirait. C’est un exil. Il doit rester Ă  Vitebesk. C’est une Ă©preuve et le vide d’une rĂ©clusion.

C’est la pĂ©riode russe de Chagall. Dans le prolongement du premier espace du MusĂ©e du Luxemboug, sont exposĂ©s : dessins, croquis, fusains, encres de Chine, acrylique et gouache de Chagall en exil. C’est un peuple juif qui dĂ©file sous nos yeux. Des rabbins ont la figure de Monsieur tout le monde. Des visages parfois tourmentĂ©s Ă  l’extrĂȘme oĂč se lit toute l’angoisse du monde et de l’humain. Parfois, ce sont des regards et des bouilles totalement cocasses. On voit mĂȘme un rabbin transportant la Bible sur son dos en forme d’armoire. Des inscriptions hĂ©braĂŻques au sens Ă©nigmatique figurent sur presque chaque portrait et scĂšne de vie. Plusieurs encres de Chine et papier mine ont pour support du papier d’emballage. Peindre Chagall sur des nappes en papier correspondait bien Ă  l’esprit de l’artiste. L’art comme la vie est prĂ©caire et sans prix. En regardant cette production sans aucune couleur, Chagall campe un drame historique oĂč se marque Ă  la fois, au quotidien, l’angoisse et l’humour.

SĂ©quence suivante. Nous retrouvons les mariĂ©s de Chagall virevoltant dans un ciel nocturne comme peuplĂ© d’animaux et de personnages bizarres. L’un des personnages bizarres est un juif volant. C’est la figure du juif errant. C’est l’image de l’humain cherchant le sens de sa vie au cours de son parcours terrestre. De mĂȘme, dans la tradition hassidique, les animaux rĂ©vĂšlent quelque chose du monde de Dieu.

 

Nouvelle sĂ©quence. Au centre de l’exposition, se dĂ©voile une sĂ©rie d’illustrations portant sur la Bible. Elle est pour Chagall : « la plus grande source de poĂ©sie de tous les temps ». C’est un ensemble d’eaux-fortes insĂ©rĂ©es au sein de la Bible de GenĂšve. C’est le grand tableau relevĂ© Ă  la gouache du roi David jouant de la lyre. C’est le don des tables de la loi Ă  MoĂŻse. Ce sont les prophĂštes, les patriarches, les guerriers et les rois.

Image associée

Des crucifixions, notamment un trĂšs grand triptyque font le lien entre la persĂ©cution de JĂ©sus et celle des juifs en Europe dans les annĂ©es 40. Chagall en a fait don Ă  l’état français. Comme bien souvent, l’image de JĂ©sus dĂ©route et sa normalitĂ© questionne. C’est Ă  ce moment lĂ  du parcours que l’amie qui m’accompagnait me demande si JĂ©sus Ă©tait amoureux d’une femme ou d’un homme comme le raconte plusieurs romans historiques contemporains. L’échange dure dix minutes. Et c’est un Ă©change pour tous puisqu’un petit groupe s’est arrĂȘtĂ© Ă  cĂŽtĂ© de nous pour Ă©couter discrĂštement l’échange d’arguments. Nous en venons, en conclusion, Ă  la question la plus pertinente : Qui est JĂ©sus pour toi ? Et nous poursuivons notre visite.

DerniĂšre sĂ©quence. L’exposition est assez courte et nous nous retrouvons au milieu des tableaux de la derniĂšre pĂ©riode de la vie de Chagall. Fini les noirs, les rouges et les inversions chromatiques. Plus de barbes violettes, bleues ou vertes. C’est maintenant l’équilibre Ă  petites touches d’un coucher de soleil dans la baie d’Antibes, des palmiers et lilas
 Le paradis terrestre est presque lĂ . Retour Ă  une rĂ©alitĂ© ensoleillĂ©e. Quelque chose s’est passĂ©. Peut-ĂȘtre Chagall a-t-il fini par aimer le monde tel qu’il est. Son esprit bohĂšme semble s’ĂȘtre posĂ©, mais sa peinture n’a pas fini de nous faire rĂȘver .

« Mon cirque se joue dans le ciel,

Il se joue dans les nuages, parmi les chaises.

Il se joue dans la fenĂȘtre oĂč se reflĂšte la lumiĂšre »

Marc Chagall

Le divin n’a donc pas que le visage des vieilles Ă©glises dĂ©sertes. Il se reflĂšte aussi dans la richesse des couleurs du monde, du dĂ©sir et de l’amitiĂ©, mais, pour l’apprĂ©cier, il faut aimer et se savoir aimĂ©. DĂšs lors, la vie, l’église, la foi en JĂ©sus-Christ sont comme des vitraux qui nous disent un dĂ©sir, Ă  la fois souterrain et divin, que nous soyons heureux de vivre et d’espĂ©rer ».

Contribution de David Gonzalez.

 

Exposition : Chagall entre guerre et paix. 21 février- 21 juillet 2013 au Musée du Luxembourg

http://www.museeduluxembourg.fr/fr/expositions/p_exposition-18/

On pourra lire Ă©galement :

« Une expĂ©rience. Un regard transformĂ©. Visiter des expositions d’art ». https://vivreetesperer.com/?p=802

Choisir la vie !

La mort est une rĂ©alitĂ© si courante que nous risquons de l’accepter comme une fatalitĂ©.  De prĂšs ou de loin, la mort se fait entendre. Elle est tapie ou bruyante. L’actualitĂ© s’en fait constamment l’écho. En regard, pour vivre, nous avons besoin de nous situer dans une inspiration de vie, et mĂȘme de savoir quelles sont nos raisons de vivre. « J’ai mis devant toi la vie et la mort. Choisis la vie ! »(DeutĂ©ronome 30.19)

 

Le thĂ©ologien JĂŒrgen Moltmann nous aide Ă  percevoir la mort comme le terme d’une puissance de destruction et, en regard, il proclame, en Christ, la victoire de la vie sur la mort.

 

Avec lui, nous pouvons analyser les processus qui mĂšnent Ă  la mort. Cette analyse s’effectue Ă  diffĂ©rents niveaux.

Il est clair qu’à travers l’exploitation, l’oppression et l’aliĂ©nation, la puissance destructrice de la mort est particuliĂšrement apparente Ă  l’échelle politique. « Certaines dĂ©cisions ont des consĂ©quences incalculables pour la vie de millions de gens. Elles rendent la vie difficile et souvent impossible. Chaque jour, les faibles, les pauvres et les malades doivent lutter pour la survie.. ». Aujourd’hui, on voit aussi combien la protection du vivant est devenue un enjeu majeur.

La puissance destructrice qui mĂšne Ă  la mort se fait sentir Ă©galement dans la vie sociale Ă  travers le rejet, l’isolement et une solitude croissante.

Dans notre propre existence, face Ă  la tentation du non sens ou de l’abandon, nous avons nous mĂȘme chaque jour Ă  prendre parti chaque jour pour la vie. « Chaque matin, la vie doit ĂȘtre Ă  nouveau affirmĂ©e et aimĂ©e puisque, aussi bien, elle peut ĂȘtre dĂ©niĂ©e, refusĂ©e ou rejetĂ©e ».

 

« Pour lutter contre la mort et ne pas abandonner, nous avons besoin de croire que la mort peut ĂȘtre vaincue
 La rĂ©surrection de Christ porte le « oui » de Dieu Ă  la vie et son « Non » Ă  la mort, et suscite nos Ă©nergies vitales
 Les chrĂ©tiens sont des gens qui refusent la mort . « L’origine de la foi chrĂ©tienne est une fois pour toute la victoire de la vie divine sur la mort : « La mort a Ă©tĂ© engloutie dans la victoire » (1 Cor 15.54). C’est le cƓur de l’Evangile.  C’est l’Evangile de la Vie ».

 

Si la fĂȘte de PĂąques Ă©voque la rĂ©surrection de JĂ©sus, en quoi contribue-t-elle Ă  modifier pratiquement nos reprĂ©sentations et nos comportements ?

 

Ici JĂŒrgen Moltmann proclame l’engagement chrĂ©tien dans le processus de la vie. « LĂ  oĂč Christ est prĂ©sent, il y a la vie et il y a l’espoir dans la lutte de la vie contre la puissance de la mort
. Dans un amour crĂ©atif pour la vie, nous percevons que nous ne sommes pas seulement partie prenante aux Ă©nergies naturelles de la vie. Nous expĂ©rimentons aussi « les puissances du siĂšcle Ă  venir » (HĂ©b 6.5). « Au commencement, Ă©tait la Parole
 En elle, Ă©tait la Vie et la Vie Ă©tait la lumiĂšre des hommes (Jean1.4). L’évangile de Jean est marquĂ© par une thĂ©ologie de la vie ».

 

Recevons et partageons la dĂ©claration de foi  que JĂŒrgen Moltmann nous exprime en ces termes : « Cette thĂ©ologie de la vie doit ĂȘtre le cƓur du message chrĂ©tien en ce XXIĂš siĂšcle. JĂ©sus n’a pas fondĂ© une nouvelle religion. Il a apportĂ© une vie nouvelle dans le monde, et aussi dans le monde moderne. Ce dont nous avons besoin, c’est une lutte partagĂ©e pour la vie, la vie aimĂ©e et aimante, la vie qui se communique et est partagĂ©e, en bref la vie qui vaut d’ĂȘtre vĂ©cue dans cet espace vivant et fĂ©cond de la terre » (3) .

 

J.H.

 

Source

 

(1) JĂŒrgen Moltmann. In the end..the beginning. Fortress presss. 2004 (Prochaine parution en français aux Ă©ditions Empreinte sous le titre : « De commencements en recommencements »

JĂŒrgen Moltmann. La venue de Dieu. Cerf,1977

(2) Life against death, p. 75-77. Dans : JĂŒrgen Moltmann. Sun of        rightneousness, arise ! Fortress Pres, 2010.

(3) Texte Ă  partir de l’article : « La vie contre la mort » dans le blog concernant la pensĂ©e de JĂŒrgen Moltmann : http://www.lespritquidonnelavie.com/