Discerner les voies pour une société plus humaine

Des témoignages porteurs d’espérance 

 Dans la morosité du temps, lorsqu’au désarroi et à la détresse de beaucoup de gens, s’ajoutent le manque de vision des politiques et la focalisation des médias sur les mauvaises nouvelles, alors on a besoin d’analyser plus profondément les changements en cours et de mettre en évidence des évolutions positives, de discerner des pistes d’espérance. Voilà pourquoi le recueil d’entretiens publié par  » mérite notre attention. Et le sous-titre précise le propos : « Entretiens avec dix grands témoins pour retrouver confiance » (1).

Les chapitres correspondants méritent d’être énoncés, car on perçoit, à travers cette liste, des thèmes privilégiés comme la transition écologique (Nicolas Hulot, Anne-Sophie Novel, Pierre Rabhi), une pratique nouvelle de l’économie  (Cynthia Fleury, Anne-Sophie Novel, Dominique Méda), une aspiration spirituelle et morale (Frédéric Lenoir, Pierre-Henri Gouyon, Abdal Malik, Françoise Héritier). Et, il y a, chez chacun des auteurs, un choix de l’espérance tant pour la vie personnelle que pour une vision de l’avenir de notre société. C’est un dénominateur commun entre les personnes interviewées par Olivier Le Naire. Celles-ci ont même exprimé leur démarche dans un manifeste publié au début du livre : « Nos voies d’espérance ».

Le déroulé des titres dans le sommaire exprime bien le cheminement de cette pensée et de cet engagement :

° Refonder la vie publique, réussir la transition écologique (Nicola Hulot)

° Combattre les inégalités, choisir notre liberté (Cynthia Fleury)

° Apprendre à partager, humaniser l’économie (Anne-Sophie Novel)

° Donner un sens à sa vie (Frédéric Lenoir)

° Réinventer le travail et la croissance (Dominique Méda)

° Se réconcilier avec la nature (Pierre Rabhi)

° Réapprivoiser les sciences (Pierre-Henri Gouyon)

° Réussit l’intégation, relancer la citoyenneté (Abd al Malik))

° Trouver notre identité et notre place dans le monde (Eric Orsenna)

°Apprendre à vivre ensemble, éduquer autrement (Françoise Héritier)

 

Conscience écologique

La prise de conscience de la valeur de la nature et du respect qui doit lui être porté, est un des fils conducteurs

Aujourd’hui, le parcours de Pierre Rabhi est de plus en plus connu dans notre pays. Son interview témoigne à la fois d’un constat des impasses d’une technologie sans conscience et d’une dimension morale et spirituelle. Pierre Rabhi œuvre pour la promotion d’une agroécologie. « L’agroécologie, ce n’est pas un marché, ce n’est pas un business, mais quelque chose qui participe à un véritable changement de société. Un autre rapport à la vie, un autre rapport spirituel, esthétique, éthique au monde » (p 132).

Dans ce recueil, Nicolas Hulot est une autre grande figure de l’écologie. Engagé dans une action à grande échelle, confronté à l’inconscience de certains cercles dirigeants, il sait mettre en  valeur les expériences positives et les situations à portée de la main.

 

Une nouvelle approche économique et sociale

#Un autre fil conducteur est la mise en évidence du changement qui commence à se manifester dans la pensée économique. Ainsi plusieurs auteurs dénoncent l’abus actuel du terme de crise qui sous-tend l’idée qu’on pourrait revenir au modèle antérieur. On ne peut croire qu’ « avec un hypothétique retour de la croissance, tout pourrait redevenir comme avant. La croissance se heurte à des limites physiques.  Comme les ressources de la planète connaissent leur finitude, nous devons donc accepter que tout retour au passé, non seulement ne soit pas souhaitable, mais impossible » (p 19). Mais là aussi, on voit apparaître des voies nouvelles qui renouvellent la pratique économique. Anne-Sophie Novel met en évidence l’émergence de l’économie collaborative (2) où le changement des pratiques économiques va de pair avec la transformation des pratiques sociales. Cynthia Fleury évoque la transformation de la vie professionnelle et, face à une évolution où l’emploi se raréfie, elle propose d’offrir « à tout individu, dès sa naissance, une allocation universelle, versée chaque mois et tout au long de la vie, ce revenu étant  précisément dissocié du travail et de l’emploi » (p 53). Dominique Méda critique une fixation sur la croissance du PIB et esquisse une conception nouvelle du travail.

 

Aspirations spirituelles

 A partir de leur champ d’intervention, les auteurs présents dans ce recueil s’entendent pour mettre en évidence une transformation des genres de vie. Cette nécessaire transformation, déjà en route, requiert un changement personnel. Abd al Malik nous raconte comment, dans le contexte d’un quartier défavorisé, il a traversé une période de petite délinquance, en est sorti et vit une expérience spirituelle. En exergue de sa contribution qui est aussi un appel à la fraternité, Abd al Malik cite une pensée de Ludwig Wittgenstein : « La meilleure des choses que l’on puisse faire pour améliorer le monde, c’est s’améliorer soi-même » (p 159).

C’est aussi l’appel de Frédéric Lenoir : « Vous connaissez la fameuse phrase de Gandhi : « Soyez le changement que vous voulez dans le monde ». Il faut le dire, le répéter. Cela ne sert à rien de vouloir changer le monde si on ne change pas soi-même, si on n’a pas des comportements éthiques, des engagements, une justesse de vie dans nos actes quotidiens » (p 91). La transformation en cours appelle et suscite des aspirations spirituelles. Frédéric Lenoir identifie les obstacles, et, en regard, il met en  évidence quelques pistes de cheminement spirituel (3). Il nous parle des spiritualités asiatiques qui, « telles qu’elles ont été importées -j’insiste sur ce point- ont été adaptés à nos besoins. Elles nous aident à vivre mieux parce ce qu’elles proposent des outils de lien  entre le corps et l’esprit… » (p 96). S’il y a eu des dérives dans la religion dominante en France, « un christianisme qui est devenu une religion sociale », Frédéric Lenoir nous montre comment « le message de l’Evangile a, au contraire, pour but de nous aider à acquérir une liberté intérieure, à aller vers une recherche de la vérité qui libère (« La vérité vous rendra libre », dit Jésus). C’est aussi un message d’amour du prochain qui pose comme priorité la communion des uns avec les autres » (p 95).

Sur un autre registre, un scientifique, biologiste spécialisé en sciences de l’évolution, Pierre-Henri Gouyon s’interroge sur les risques encourus par l’humanité face à un changement technologique extrêmement rapide et incontrôlé. « Les actions que nous décidons dans la précipitation et l’aveuglement sont-elles bonnes pour l’avenir de l’humanité ? » (p 143). Trop souvent, la science génère et couvre aujourd’hui une « course folle de la technologie » (p 148).  Et il en donne des exemples, des OGM aux nanotechnologies. Il évoque la menace d’un eugénisme ravageur. Pour faire face à ces menaces, on a besoin de principes. « Nous avons besoin de principes sur la manière de considérer la vie et pas seulement la vie humaine. Globalement, existe-t-il quelque chose de respectable dans tout ce qui est vivant et que signifie respecter le vivant ? (p 157)

 

Du pessimisme à une espérance active

Il y a donc aujourd’hui à la fois des menaces, des prises de conscience et des pistes pour des transformations positives. Cependant, il semble que le pessimisme des français quant à leur avenir collectif est aujourd’hui encouragé par les attitudes de certains milieux influents dans différents cercles de pouvoir ou dans des médias. Dans un de ses derniers livres : « Une autre vie est possible » (4), Jean-Claude Guillebaud dénonce un pessimisme répandu dans l’intelligentsia parisienne. Frédéric Lenoir abonde dans ce sens. « En France, la plupart des intellectuels entretiennent une sorte de cynisme. Pour eux, par exemple, le bonheur est une chimère et très peu osent encore en parler » (p 85)… Je constate un décalage entre ceux qui vivent à Paris et les autres… Les provinciaux se montrent en général plus optimistes, cherchent des solutions et sont davantage prêts à se mobiliser. Le mal français vient aussi du fait que la majorité des médias et des élites vit justement à Paris dans un milieu stressé et, en général, assez cynique, ce qui offre une caisse de résonance nationale à ce pessimisme » (p 86). Et, par ailleurs,  Frédéric Lenoir rejoint  un diagnostic qui est exprimé par plusieurs autres auteurs dans ce livre : « Au lieu de tenir le discours d’une remise à plat, trop d’experts ou d’hommes politiques français prétendent revenir au modèle des Trente Glorieuses, à ce qu’on aurait perdu, alors que je suis convaincu -et je ne suis pas le seul- qu’on n’échappera pas à une remise en question très profonde de notre modèle de développement. Bien sûr l’économie est importante, mais, pour aller mieux, il faut avant tout se reposer cette question essentielle :  Qu’est ce que bien vivre ? Comment vivre de manière harmonieuse, à la fois individuellement et collectivement, dans un monde globalisé où les ressources sont limitées ? » (p 86)

 

Ce livre met ainsi en évidence des convergences entre des auteurs aux cheminements divers. Il exprime un nouvel état d’esprit. Il met en valeur des pistes de changement balisées par de nombreuses innovations. C’est bien une perspective à partager sur un blog qui veut se fonder sur une dynamique d’espérance (5).

J H

 

(1)            Le Naire (ed). Nos voies d’espérance. Entretiens avec 10 grands témoins pour retrouver confiance. Actes Sud/ LLL Les liens qui libèrent, 2014. Sur le site d’Actes Sud, voir les interviews des auteurs en vidéo : http://www.actes-sud.fr/nos-voies-desperance

(2)            Sur ce blog : « Anne-Sophie Novel, militante écologiste et pionnière de l’économie collaborative » : https://vivreetesperer.com/?p=1975                                 « Une révolution de l’être ensemble… Présentation du livre d’Anne-Sophie Novel et Stéphane Riot : « Vive la co-révolution. Pour une société collaborative » : https://vivreetesperer.com/?p=1394

(3)            Sur ce blog : « Un chemin de guérison pour l’humanité. Présentation du livre de Frédéric Lenoir : « La guérison du monde » : https://vivreetesperer.com/?p=1048

(4)            Sur ce blog  « Pour vivre ensemble, il faut être orienté vers l’avenir.  Le livre de Jean-Claude Guillebaud : « Une autre vie est possible » : https://vivreetesperer.com/?p=1986

(5)            Si certaines formes religieuses sont marquées par les séquelles du passé, nous nous référons ici à la pensée d’un théologien de l’espérance : Jürgen Moltmann. Il écrit : « De son avenir, Dieu vient à la rencontre des hommes et leur ouvre de nouveaux horizons qui débouchent sur l’inconnu et les invite à un commencement nouveau… Le christianisme déborde d’espérance… Il est résolument tourné vers l’avenir ». (p 109, in : Jürgen Moltmann. De commencements en recommencements. Une dynamique d’espérance. Empreinte, 2012). Voir : https://vivreetesperer.com/?p=572                                       Voir aussi : « Vivre en harmonie avec la nature. Ecologie, théologie et spiritualité » : https://vivreetesperer.com/?p=757                                     Ouverture à la pensée de Jürgen Moltmann sur le blog : « L’Esprit qui donne la vie » : http://www.lespritquidonnelavie.com/

 

Sur ce blog, voir aussi :

 

« Un mouvement émergent pour le partage, la collaboration et l’ouverture. OuiShare, comunauté leader dans le champ de l’économie collaborative » : https://vivreetesperer.com/?p=1866

 

« Une jeunesse engagée pour une société plus humaine et plus durable » : https://vivreetesperer.com/?p=1780

 

« Face à la crise, un avenir pour l’économie. La troisième révolution industrielle » : https://vivreetesperer.com/?p=354

 

« Une révolution en éducation. L’impact d’internet pour un nouveau paradigme en éducation » : https://vivreetesperer.com/?p=1565

 

« Emergence en France de « la société des modes de vie. La vision de Jean Viard sur le potentiel français » : https://vivreetesperer.com/?p=799

 

« Une théologie pour la vie. Jürgen Moltmann en conversation avec un panel de théologiens » : https://vivreetesperer.com/?p=1917

 

 

Le temps des consciences

Une rencontre entre Nicolas Hulot et Frédéric Lenoir

La crise actuelle multiforme et menaçante nous interpelle. Quelles en sont les origines et comment y faire face ? Ces questions sont partout posées . Parmi les réponses, on peut retenir un livre rapportant une rencontre entre Nicolas Hulot et Frédéric Lenoir : « D’un monde à l’autre. Le temps des consciences » (1).

Ces deux personnalités ont un parcours original et leur rencontre est donc prometteuse. « Nicolas Hulot a passé une partie de sa vie à voyager dans les parties les plus reculées du monde au fil de son émission de télévision : Ushaïa. Engagé depuis trente ans dans la protection de l’environnement , il fut ministre de la transition écologique et solidaire de mai 2017 à août 2018. Auteur de nombreux ouvrages, il a créé la Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme ». « Frédéric Lenoir est philosophe et sociologue, auteur de nombreux essais et romans traduits dans une vingtaine de langues. Il est notamment l’auteur des best sellers : « Du Bonheur », « Un voyage philosophique », « La puissance de la joie » ou « Le miracle Spinoza ». Il est cofondateur de la fondation Seve (Savoir Être et Vivre Ensemble) qui propose des ateliers de philosophie avec des enfants » (page de couverture). Le parcours de Frédéric Lenoir est diversifié à la fois quant à ses fonctions et quant à ses intérêts (2). En effet, si ses nombreux livres témoignent de son évolution spirituelle (3), il est connu aussi pour avoir été directeur du Monde des religions. Nous avons ici présenté son remarquable livre : « La guérison du monde » paru en 2012. Dans ce livre, Frédéric Lenoir envisage la crise qui affecte nos sociétés et il en présente les menaces et les opportunités : « Un chemin de guérison pour l’humanité. La fin d’un monde. Le début d’une renaissance » (4). On retrouve l’approche de Frédéric Lenoir dans ce livre : « Le temps des consciences » et on y trouve aussi l’authenticité et l’originalité de la démarche de Nicolas Hulot. De la crise du progrès à la recherche de sens, le livre se déroule en abordant de grandes questions de société comme « le règne de l’argent » ou « les limitations de la politique » ou un examen de nos attitudes : « Tout est question de désir », « Du toujours plus au mieux-être ». Les auteurs nous font part de leur réflexion, mais aussi de leur expérience. Ainsi, dans le chapitre : « Les limites de la politiques», Nicolas Hulot nous fait part des démêlés qui l’ont affecté dans son passage au gouvernement.

 

La crise du progrès

« En s’interrogeant sur ce qui appartient au progrès ou ce qui n’en est qu’une illusion, nous touchons d’emblée au cœur de la réflexion que nous devons engager en ce début de siècle. Sous bien des aspects, le projet s’est vidé de sens et est devenu une machine incontrôlable » (p 13), nous dit Nicolas Hulot. Mais il rappelle aussi les avancées majeures que sont l’augmentation de l’espérance de vie, les acquis sociaux et les libertés individuelles. Il y a un siècle, 80% de la population mondiale vivait dans l’extrême pauvreté contre 10% aujourd’hui en 2020. Mais, on doit « redéfinir ce que nous estimons relever du progrès afin de distinguer ce qui est une addition de performances technologiques de ce qui participe de notre raison d’être et à l’amélioration durable de la condition humaine » (p 12).

Frédéric Lenoir met en évidence les origines de cette crise. Déjà, dans son livre « La guérison du monde », il déplore le passage d’une conception « organique » du monde à une approche mécanique. C’est le philosophe René Descartes qui induit ce passage : « Au XVIIè siècle, le philosophe René Descartes considère que la nature  n’est que de la matière qu’on peut utiliser pour ses ressources. L’être humain devient, selon son mot célèbre, « maitre et possesseur de toutes choses ». Cette pensée réductionniste et utilitariste ouvre le champ de la science expérimentale, mais elle s’allie aussi au capitalisme naissant. La nature est totalement désenchantée. Elle abandonne ses dimensions sacrées pour devenir une chose… L’être humain n’est plus relié au cosmos ce qui pose une question fondamentale : comment vivre en étant déraciné du monde naturel ? » (p 25-26).

Nicolas Hulot dénonce aussi l’exploitation de la nature comme une marchandise. Comme le rappelle Frédéric Lenoir, la prise de conscience actuelle n’est pas sans précédent. Déjà les romantiques, au tournant du XVIIè et du XIXè siècle « offrent une vision du réel plus profonde que celle proposée par la vision cartésienne et reprise par l’idéologie capitaliste ». Pour eux, le monde « n’est pas fait de matière inerte, mais il est un organisme vivant. Ils invitent l’être humain à s’épanouir non pas en regardant la matière désenchantée, mais en contemplant l’âme du monde » (p 244-245), cette âme que le philosophe Platon avait mis en valeur. Frédéric Lenoir fait aussi référence au mouvement transcendentaliste américain : Henry David Thoreau et Ralph Wado Emerson qui tentent de reconnecter l’être humain à ses racines naturelles, et un siècle plus tard à la « Beat generation » (p 246-247).

Face aux déviances du monde actuel, Nicola Hulot partage avec nous la vision puissante et prémonitoire de Victor Hugo : « La grande erreur de notre temps, cela a été de pencher, je dis même de courber l’esprit des hommes vers la recherche du bien-être matériel. Il faut relever l’esprit de l’Homme vers le beau, le juste et le vrai, le désintéressé et le grand. C’est là et seulement là que vous trouverez la paix de l’Homme avec lui-même et par conséquent avec la société » (p 246).

 

Appel à la recherche de sens

« Actuellement, face à la crise actuelle, nous subissons comme des esclaves, alors que nous devrions prendre des décisions et faire des choix. La révolution qui se présente actuellement à nous n’est pas technologique. Elle est celle de l’esprit. Et nous devons l’accueillir ensemble… » (p 35) « L’homme doit faire fonctionner son esprit pour sortir du désarroi tragique de ne plus être relié à rien. » « Aujourd’hui, pense Nicolas Hulot, nous devons effectuer un nouveau saut, celui du sens » (p 37). Frédéric Lenoir évoque de même les besoins humains décrits dans la « pyramide d’Abraham Maslow » : « On peut cependant contester le fait que l’être humain passe à une aspiration supérieure lorsqu’un besoin plus fondamental a été satisfait… Ce n’est pas ce que l’expérience de la vie m’a montré. J’ai rencontré à travers de nombreux voyages des gens qui avaient parfois de la peine à survivre et dont la dimension spirituelle les aidait fortement à vivre et à être joyeux… C’est la réaction de notre esprit face aux événements que nous ne pouvons pas maitriser qui fait de nous des êtres joyeux ou tristes. C’est aussi la réflexion intellectuelle et morale qui nous permet de grandir en humanité et de vivre en harmonie avec les autres humains et espèces sensibles. Alors, je te rejoins complètement : La grande aventure du siècle doit  être celle de du sens » (p 36-37).

Le livre se termine donc par un chapitre : « donner du sens » avec  une citation de Friedrich Hegel en ouverture : « Ce qui s’agite dans l’âme humaine, c’est la quête de sens ». Or, trop souvent, cette quête est méconnue, nous dit Nicolas Hulot : « Boutée hors des débats publics, cantonnée à la sphère privée, voire réduite au non-dit, la question du sens est la grande absente des médias. C’est pourtant elle qui nous permettra de retrouver la pureté de ce qui se dissimule derrière le mot ‘progrès’ trop souvent confondu avec une addition de puissance et une augmentation de l’efficacité. La dimension spirituelle a été engloutie par la société technologique, matérialiste et consumériste » (p 290).

Ce chapitre, riche et diversifié, nous apporte des pistes de réflexion. Ainsi Frédéric Lenoir nous appelle à reconnaitre « la vibration spirituelle qui rassemble tous les humains ». « J’ai constaté cela en rencontrant des gens très éloignés de moi, notamment lors de voyages à l’étranger. Il est possible de vibrer sur la même « longueur d’onde » grâce à un simple sourire, un échange de regard ou quelques gestes… Comme l’ensemble du monde animé, l’être humain a une intériorité qui donne du sens à son corps, l’anime ou l’oriente de telle ou telle manière (p 292-293). « C’est un peu cela que j’appelle le sacré, cette vibration qui relie tous les individus entre eux et qui nous relie tous au monde », commente Nicolas Hulot. Frédéric Lenoir évoque la dimension anthropologique du sacré (5), développée notamment par Rodolf Otto et William James, dans un univers qui nous dépasse, face auquel nous ressentons crainte, émerveillement et qui nous bouleverse. C’est cette expérience profonde qu’on peut qualifier de sacrée ainsi que le lien mystérieux qui nous rassemble au-delà de toutes nos différences. « L’expérience la plus profonde et la plus belle que peut faire l’homme est celle du mystère », a dit Albert Einstein » (p 293). Frédéric Lenoir poursuit sa réflexion dans une rétrospective historique. « Les grands courants de spiritualité et de sagesse du monde sont nés au sein ou en marge des religions en réaction contre leur politisation, leur ritualisation et leur formalisme excessifs » (p 297).

Aujourd’hui, comment vivre ensemble harmonieusement ? « Puisque nous partageons une même communauté de destins, il s’agit de redéfinir des valeurs universelles communes. Ces valeurs nous permettent de déterminer ce qui est essentiel dans notre vie et ce qui ne l’est pas. Elles sont l’objectif ou l’horizon vers lequel l’être humain tend pour croitre de manière harmonieuse : solidarité, fraternité, liberté, beauté, respect, justice » (p 299). En réponse, on découvre un Nicolas Hulot particulièrement sensible à la beauté : « L’un de mes premiers guides a été la beauté, car j’ai eu la chance d’en être le témoin privilégié tout au long de ma vie. Source d’humilité sur le mystère du monde, elle fait prendre conscience de la sacralité de la nature. Je suis intimement convaincu que c’est la beauté qui relie tous les êtres humains. Elle est un langage universel… La beauté de la nature nous enseigne l’harmonie, l’équilibre, la juste mesure qui font défaut dans les comportements humains. Du monde fractal à l’espace, il y a un ordre. La beauté se loge partout jusqu’au fond des abysses… La beauté est ce qui nous guide peut-être jusqu’à ce que certains appellent Dieu et nous ramène au premier matin du monde. Elle est une force d’émerveillement pour celui qui sait orienter son regard, ses sensations, ses champs émotionnels et de conscience Je dois tout mon chemin à cette rencontre avec la beauté qui m’a mené vers le respect, le juste, le vrai et le nécessaire (p 299). En communion avec Frédéric, cet éloge de la beauté se poursuit. « Il n’y a pas que la beauté des paysages, mais aussi la beauté des esprits, des gestes, des pensées, des regards, des corps, des mots. Elle se niche partout pour nous donner des joies durables… La beauté est universelle ». (p 303-304). On reconnaît là une capacité d’émerveillement et tout sur ce quoi elle débouche (6). Ces propos rejoignent ceux de Jean-Claude Guillebaud dans son livre : « Sauver la beauté du monde » (7).

La conversation se poursuit à propos d’autres valeurs fondamentales comme la solidarité, la fraternité, la liberté. Les deux intervenants évoquent les personnalités qui les inspirent dans leurs parcours : Nelson Mandela pour Nicolas Hulot et le Dalaï Lama pour Frédéric Lenoir, et en remontant dans le passé, Victor Hugo pour N. Hulot et Baruch Spinoza pour F. Lenoir, et, en fin de chapitre, on en revient à la recherche d’une vision collective : « Je me demande si ce n’est pas la catastrophe écologique doublée par des crises sanitaires, qui lui sont corrélées, qui pourrait susciter un idéal collectif. Il s’agit de redécouvrir des valeurs universelles qui permettent de vivre une meilleure harmonie ensemble et avec notre environnement : La beauté, la justice, la solidarité, la liberté tant politique qu’intérieure » (p 339-340). Et, comme l’écrit Nicolas Hulot, « Cette crise économique et sanitaire a la vertu de nous rappeler que nous vivons en équilibre sur un fil de soie et que nous faisons partie d’un miracle… N’oublions jamais que, dans le domaine du vivant, l’homme est une possibilité parmi des milliards d’autres qui a eu la chance de tomber sur la combinaison gagnante… S’il fait partie d’un tout, l’homme ne peut se substituer au tout… Nous devons être les jardiniers. Il faut les faire jaillir en chacun d’entre nous pour échapper au sable mouvant de la profusion des moyens, accéder au bonheur, et décider de la direction à prendre ensemble… Le sens doit être un opérateur de conscience permettant de faire le tri. » (p 341).

Face à la crise actuelle, nous cherchons quelles en sont les origines et comment y faire face. Nous comprenons mieux aujourd’hui comment un changement de mentalité et des représentations correspondantes a entrainé la crise actuelle. Ce livre nous aide à mieux percevoir les conséquences d’une affirmation de la toute puissance de l’homme : « L’homme, maitre et possesseur de toutes choses », selon Descartes. En regard, à travers la recherche de Frédéric Lenoir et l’expérience de Nicolas Hulot, cet ouvrage nous appelle à reconnaître que l’homme n’est pas détaché de la nature, qu’il s’inscrit dans une dimension spirituelle dans la rencontre avec le sacré et le mystère du monde. Si nous sommes tous aujourd’hui à la recherche de sens, est-ce seulement en raison d’une déviation matérialiste ? Est-ce que cela ne tient pas aussi aux manquements d’une religion occidentale trop centrée sur la destinée individuelle de l’homme ? A cet égard, la parution de l’encyclique : « Laudato Si » (8) apparaît comme un tournant révolutionnaire. Et le dernier demi-siècle a été marqué par l’apparition d’une théologie nouvelle, la théologie de Jürgen Moltmann, une théologie de l’espérance dans la perspective d’une seconde création à l’œuvre en Christ ressuscité (9). Ainsi, pour comprendre et agir, nous pouvons accéder aujourd’hui à différentes ressources. Ce livre est significatif par la qualité et la complémentarité de ses auteurs.

 

J H

  1. Nicolas Hulot Frédéric Lenoir. D’un monde à l’autre. Le temps des consciences. Propos recueillis par Julie Klotz. Fayard, 2020. Voir à ce sujet sur France Culture : « Nicolas Hulot et Frédéric Lenoir, pour un monde en quête de sens » : https://www.franceculture.fr/emissions/de-cause-a-effets-le-magazine-de-lenvironnement/de-cause-a-effets-le-magazine-de-lenvironnement-du-mardi-08-septembre-2020
  2. Parcours de Frédéric Lenoir : https://www.fredericlenoir.com/bio-longue/
  3. Mieux comprendre l’évolution spirituelle de Frédéric Lenoir à travers une vidéo rapportant une interview conjointe de Carolina Costa, pasteure et Frédéric Lenoir, philosophe et sociologue
  4. https://www.rts.ch/play/tv/pardonnez-moi/video/carolina-costa–frederic-lenoir?urn=urn:rts:video:8266285
  5. « Un chemin de Guérison pour l’humanité. La fin d’un monde. L’aube d’une renaisssance » : https://vivreetesperer.com/un-chemin-de-guerison-pour-lhumanite-la-fin-dun-monde-laube-dune-renaissance/
  6. Voir : Hans Jonas. Les pouvoirs du sacré. Une alternative au récit du désenchantement. Seuil, 2020
  7. Autour du livre de Bertrand Vergely : Retour à l’émerveillement : « Avant toutes choses, la vie est bonne » : https://vivreetesperer.com/avant-toute-chose-la-vie-est-bonne/
  8. « Sauver la beauté du monde » : https://vivreetesperer.com/sauver-la-beaute-du-monde/
  9. Autour de Laudato Si : « Convergences écologiques : Jean Bastaire, Jürgen Moltmann, pape François et Edgar Morin » : https://vivreetesperer.com/convergences-ecologiques-jean-bastaire-jurgen-moltmann-pape-francois-et-edgar-morin/
  10. Un blog dédié à l’œuvre de Jürgen Moltmann : https://lire-moltmann.com Voir aussi : « Une vision d’espérance dans un monde en danger » : https://www.temoins.com/une-vision-desperance-dans-un-monde-en-danger/

Sur le chemin de l’école

Des enfants en marche : beauté et grandeur d’âme.

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         « Sur le chemin de l’école » (1) : un film qui nous parle en termes épiques de la démarche d’enfants du « tiers monde » animés par le désir d’apprendre et bravanttoutes les difficultés pour aller à l’école.

         Le film nous est ainsi présenté. « Ces enfants vivent aux quatre coins du globe, mais partagent la même soif d’apprendre. Ils ont compris que seule l’instruction leur permettra d’améliorer leur vie, et c’est pour cela que chaque jour, dans des paysages incroyables, ils se lancent dans un périple à haut risque qui les conduira vers le savoir. Jackson, 11 ans, vit au Kenya et parcourt, matin et soir, quinze kilomètres avec sa petite sœur au milieu des savanes et des animaux sauvages… Zahira, 12 ans, habite dans les montagnes escarpées de l’Atlas marocain, et c’est une journée de marche exténuante qui l’attend pour rejoindre son internat avec ses deux amies… Samuel, 13 ans, vit en Inde et, chaque jour, les quatre kilomètres qu’il doit accomplir sont une épreuve parce qu’il n’a pas l’usage de ses jambes. Ses deux jeunes frères poussent pendant plus d’une heure son fauteuil roulant bricolé jusqu’à l’école… C’est sur un cheval que Carlos, 11 ans, traverse les plaines de Patagonie sur plus de dix-huit kilomètres. Emmenant sa petite sœur avec lui, il accomplit cet exploit deux fois par jour, quelque soit le temps… ».

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         Geneviève Patte est une pionnière des bibliothèques enfantines  Elle est témoin du désir d’apprendre, de connaître qui est présent en chaque enfant et qui se manifeste dans la lecture. Là où des adultes suscitent un environnement favorable, alors une dynamique apparaît. Une dynamique à respecter : « Laissez les lire » (2). On comprend que Geneviève puisse nous parler avec enthousiasme du film « Sur le chemin  de l’école », car, dans un contexte différent, et dans des conditions plus difficiles, ce film exprime la dynamique qui se manifeste chez des enfants désireux d’apprendre et de connaître.

         « J’avais entendu parler de ce film par une amie, elle-même illustratrice de livres pour enfants ». Geneviève partage avec cette amie une attention pour l’enfant : ne pas lui imposer nos propres intérêts, mais être à son écoute dans une relation réciproque. Cette amie lui avait dit : « Va voir ce film. Tu verras comment ces enfants ont un désir de connaître qui leur fait franchir des montagnes. Au sens propre… ».

         Geneviève a admiré ce dynamisme. Elle a ressenti dans ce film la dimension du temps et de l’espace. « Ce film fait très bien sentir le temps. Le rythme du film fait ressortir la durée des déplacements. Aller à l’école, coûte que coûte… ».

         Il y a là un grand courage. « On brave toutes les difficultés. Les parents acceptent de se séparer de leurs enfants pour qu’ils aillent à l’école avec les dangers que cela suppose. Ainsi un père met en garde ses enfants : comment se comporter quand on rencontre un troupeau d’éléphants… Face au danger, les enfants ont du beaucoup courir. Ils se sont cachés… Ce qui me frappe, c’est l’intelligence des enfants »

         L’école est revêtue de prestige. « Ainsi, un des enfants est content d’arriver à l’heure au moment où on salue le drapeau. L’enfant respecte les adultes. Les adultes respectent l’enfant ».

         « Ce film nous révèle un monde d’une grande beauté. Tous les paysages sont magnifiques. Mais cette nature est quand même très dure. Là, c’est un désert. Les enfants affrontent le désert parce qu’ils ont envie de connaître ».

         « Les enfants ne sont pas encombrés de richesses ou saturés par une hyperconsommation. On va vraiment à l’essentiel ».

         Ce film communique la beauté : « Beauté de ces univers. Beauté de ces enfants. Beauté de ces familles… C’est très beau. Tout est très beau… ». « La solidarité entre les enfants est magnifique ». Ainsi ce film nous comble de beauté : « Le monde est beau aussi bien dans les êtres que dans le monde qui nous est donné ». « C’est un film  qui stimule ma foi ».

         Les paroles de Geneviève font écho à ce que J H a lui aussi ressenti en voyant sur le web un condensé du film présenté à des enfants français (3). Il y a, dans ce film, un mouvement, un  souffle, une dimension épique. La démarche de ces enfants est admirable et l’attitude de leurs parents l’est tout autant. Ils acceptent un risque pour leurs enfants  dans un esprit de foi : « Je vous bénis. Que vous arriviez sains et saufs à l’école… Que Dieu soit avec toi… ». On découvre aujourd’hui la dimension spirituelle qui se manifeste dans la vie des enfants (4). Il y a dans ce film une dynamique de vie qui nous émerveille. Nous sommes impressionné par une beauté et une grandeur d’âme qui nous dépassent. Comme l’exprime  Geneviève Patte : « Ce monde est beau aussi bien dans les êtres que dans le monde qui nous est donné ».

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(1)            Sur le chemin de l’école : film documentaire de Pascal Plisson. Bande annonce sur You Tube : http://www.youtube.com/watch?v=jsyDtye0B7E Les histoires de chaque enfant, présentées dans une courte vidéo, :  sont très belles : Jackson, 11 ans, Kenya http://www.youtube.com/watch?v=Ayhyzp67kFY Zahira, 12 ans, Maroc : http://www.youtube.com/watch?v=1l_4oGdVj5g  Carlos, 11 ans, Argentine : http://www.youtube.com/watch?v=wJa3nUM8NVg    Samuel, 13 ans, Inde : http://www.youtube.com/watch?v=Z23rQFFzzw8 Commentaire sur le site des Cahiers Pédagogiques. Edito, cinéma. « Emmenez vos élèves sur le chemin de l’école » : http://www.cahiers-pedagogiques.com/Emmenez-vos-eleves-sur-le-chemin-de-l-ecole

(2)            Patte (Geneviève). Laissez les lire ! Mission lecture. Gallimard, 2012. Mise en perspective sur ce blog : »Une dynamique relationnelle et éducative » https://vivreetesperer.com/?p=523

(3)            Une vidéo réalisée par la Croix : des extraits significatifs du film présentés à des enfants français. http://www.la-croix.com/Famille/Parents-Enfants/Dossiers/Sur-le-Chemin-de-l-ecole-on-sent-la-joie-d-aller-en-classe.-C-est-rare-!-2013-09-24-1023698

(4)            Nye (Rebecca). Children’s spirituality. What it is and why it matters. Church House Publishing, 2009. « La spiritualité des enfants est une capacité initialement naturelle pour une conscience de ce qui est sacré dans les expériences de vie. Dans l’enfance, la spiritualité porte principalement sur le fait d’être en relation, de répondre à un appel, de se relier à plus que moi-même, c’est à dire aux autres, à Dieu, à la création, ou à un profond sens de l’être intérieur ». Voir sur ce blog : « L’enfant, un être spirituel » : https://vivreetesperer.com/?p=340

Des petits riens de grande portée : la bienveillance au quotidien

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Odile Hassenforder : « Sa présence dans ma vie »

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         La réflexion de Lytta Basset, dans son livre : « Oser la bienveillance » (1), nous a appelé à revisiter le livre d’Odile Hassenforder : « Sa présence dans ma vie » qui témoigne également d’un esprit de bienveillance comme c’est le cas dans ce texte (2). C’est une bienveillance au quotidien.

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J H

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Des petits riens d’une grande portée.

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         Dans le hall de cet immeuble, un homme africain pousse une lourde machine à cirer le carrelage. « Bonjour. Ça brille ! » . « Oh oui, merci, merci », me répond-il avec un magnifique sourire. Je suis contente : le fluide de la bonté a été bien reçu. En m’éloignant, un « Seigneur, bénis le » jaillit de mon cœur. Et puis, je pense : j’aurais pu m’arrêter une minute pour lui dire : « Dieu bénit votre travail. C’est beau.  ». Je n’y ai pas pensé sur le moment. Aujourd’hui, je crois que je peux m’exprimer ainsi. Avec un ton enjoué, c’est mieux reçu que sur un ton sérieux. Exprimer les choses gaiement, c’est mon style. J’ajoute un grain d’humour, un peu de soleil qui met en joie. Il m’est arrivé quelquefois, assez rarement tout de même, que mon interlocuteur me regarde d’un œil me manifestant sa réprobation, probablement le cœur trop douloureux pour recevoir au point où j’ai presque envie de m’excuser. 

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         J’ai remarqué qu’un simple petit mot pour faire passer un courant de sympathie peut faire du bien.

Au téléphone, après avoir eu mon renseignement ou passer une commande, souhaiter « une bonne journée » est déjà un clin  d’œil. Lorsque j’ajoute : « Vous avez du soleil chez vous », je sens dans le « oui » ou le « non » que le ton de mon interlocuteur ou interlocutrice a changé. Il devient enjoué, presque amical. Quelquefois j’ajoute lorsque je reçois un « oui » une phrase ce genre : « C’est bien, alors une très bonne journée ! » et si j’entends : « c’est maussade, il est gris… », je m’exclame : « Alors je vous souhaite beaucoup de soleil dans le cœur » . En général, je sais que le courant de vie est passé. Le royaume de Dieu s’illumine là où est l’amour, la bienveillance, la douceur, la joie… Tous ces fruits de l’Esprit s’expriment dans notre attitude, et de notre attitude, découlent les actes.

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         J’ai entendu un jour une conférencière dire ; « Ne pas répondre à une lettre (on pourrait dire aujourd’hui un e-mail) est un acte de mort. Parole forte qui dit bien que la relation est coupée.  Nos actes sont-ils empreints de bienveillance ? Des services rendus, des dévouements militants peuvent être chargés d’agressivité rentrée, de prétention… L’amour n’est-il pas une expression du cœur dans les petites choses comme dans les grandes ?

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         J’ai entendu un jour une amie parlant de son conjoint : « Je ressens sa bonté dans ses paroles, et même si je ne suis pas d’accord avec son point de vue, je me sens bien à son contact. Du coup, me sentant bien, j’ai envie d’être moi-même bienveillante . C’est vraiment communicatif ». Cette bienveillance devient naturelle en nous lorsque nous recevons la bonté du Père Céleste en Jésus-Christ (Ephésiens 3/16-19).

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Odile Hassenforder

Ecrits personnels

2007   

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(1)            Basset (Lytta). Oser la bienveillance. Albin Michel, 2014/ Présentation sur ce blog : Vivre et espérer : https://vivreetesperer.com/?p=1842

(2)            Hassenforder (Odile). Sa présence dans ma vie. Parcours spirituel. Empreinte temps présent, 2011  Chapitre p 183-184  Autres contributions d’Odile Hassenforder sur ce blog : consulter le tag correspondant : https://vivreetesperer.com/?tag=odile-hassenforder

Comme les petits enfants

Accueil, confiance et émerveillement

Odile Hassenforder : Sa présence dans ma vie.

Lieu ordinaire : dans la banlieue sud de la région parisienne, au troisième étage d’un petit immeuble, un angle de vue sur un mélange de végétation et de constructions et un  vaste espace de ciel. Mais, à partir de ce lieu ordinaire, dans une méditation quotidienne, Odile sait s’émerveiller. Elle apprend à recevoir. Elle découvre une harmonie. « Une atmosphère de confiance germe en moi. Je pense à l’enfant qui accueille la vie…Je deviens de plus en plus attentive à la semence intérieure qui germe, à l’écoute de l’intuition spirituelle,  à l’éveil de tout ce qui est bien-beau-bon autour de moi ». (1)

Mon fauteuil de méditation matinale est orienté à l’est.

J’aime admirer le lever de soleil, ces nuages qui s’éclairent, se colorent, passent du gris au rosé, avancent plus ou moins vite selon le vent… La vie est mouvement. La vie est énergie. Elle n’est pas statique comme l’expriment des pessimistes aveugles à ce renouvellement perpétuel.

Pour ma part, de tels spectacles de la nature, de la simple pâquerette au coucher du soleil et au ciel étoilé, m’émerveillent. Je sens mon cœur se dilater. J’appartiens à cet univers visible, mais  aussi invisible…Quelle magnificence. Emerveillement qui suscite l’adoration du Créateur : « L’homme a-t-il tant d’importance pour que tu t’occupes de lui ? » (Psaume 8/5). Et moi, je me sens toute petite, et pourtant je suis une créature merveilleuse (Psaume 139/14).

Un contentement intérieur s’établit peu à peu en moi. Comme les pièces d’un puzzle s’ajustant les uns aux autres, je découvre peu à peu un magnifique tableau. Cette vision et ce ressenti de bien-être m’envahissent. Et ma respiration devient le lieu de mon corps à mon mental s’épanouissant dans cet univers spirituel qui me dépasse. Alors s’éveille en moi une joie paisible, reliée à l’être suprême, mon Dieu, qui m’habite. Problèmes, inquiétudes, angoisses s’éloignent, se rapetissent comme les objets dans l’image d’un appareil de photo lorsque le focus agrandit le champ de vision. Une atmosphère de confiance germe en moi. Je pense à l’enfant qui accueille la Vie. Les paroles de Jésus me reviennent à l’esprit : « Le Royaume de Dieu appartient à ceux qui ressemblent à ces enfants » (Matt 19/14).

En moi, je connais cette conversion progressive de mon attention : de volontaire qui cherche le « bon modèle » chrétien à reproduire, je deviens de plus en plus attentive à la semence intérieure qui germe, à l’écoute de l’intuition spirituelle en moi et aussi à l’éveil à tout ce qui est bien-beau-bon autour de moi.

Odile Hassenforder

Écrit personnel 2007

 

(1) Odile Hassenforder. Sa présence dans ma vie. Parcours spirituel. Empreinte Temps présent. 2011 (p 213-214)

Sur ce blog : autres textes d’Odile  Hassenforder : https://vivreetesperer.com/?tag=odile-hassenforder