par jean | Août 2, 2019 | ARTICLES, Expérience de vie et relation, Société et culture en mouvement |
Pourquoi la fraternité ?
Selon Edgar Morin
Edgar Morin vient de publier un petit livre : « La fraternité. Pourquoi ? » (1). C’est une alerte. C’est un appel. C’est, en quelque sorte, un manifeste. Et ce manifeste nous est adressé par un des plus grands penseurs de notre époque (2). Au fil des années, Edgar Morin ne nous rapporte pas seulement une vie militante et créative, mais, sociologue et philosophe, il est également un immense penseur, un penseur encyclopédique, un penseur pionnier, auteur d’une série de livres intitulée : « La Méthode » : apprendre à envisager la globalité et à reconnaître la complexité.
Au cours de décennies de recherche, Edgar Morin a écrit un grand nombre de livres couronnés par une audience internationale, puisque traduits en 28 langues. Alors pourquoi y ajoute-t-il aujourd’hui un livre engagé, en réponse aux inquiétudes suscitées par les tensions et les dérives qui se manifestent dans nos sociétés ?
Face aux périls
Dans une récente vidéo (3), Edgar Morin n’hésite pas à déclarer :
« Le pire est envisageable, mais le meilleur est encore possible ». C’est dire l’importance de l’enjeu, mais quelles sont donc les menaces ?
Si l’individualisme comporte des aspects positifs comme les possibilités ouvertes par l’autonomie personnelle, il entraine également une « dégradation des solidarités » (p 38). De même, la mondialisation a un « effet paradoxal » : « Elle crée une communauté de destin pour toute l’humanité en développant des périls globaux communs : la dégradation de la biosphère, l’incertitude économique et la croissance des inégalités, la multiplication des armes… » (p 41). Et puis, Edgar Morin dénonce également des modes de pensée qui engendrent des effets négatifs. Certes, « La domination d’une pensée qui sépare et compartimente, et qui, elle-même, ne peut accéder aux problèmes fondamentaux et globaux de la société » nous paraît ancienne, mais elle prend force lorsque « le mode de connaissance dominant devient le calcul, qui traduit toutes les réalités humaines en chiffres et ne voit dans les individus-sujets que de objets » (p 39). Ainsi, dans ces conditions, les trois moteurs couplés : sciences-techniques-économies conduisent aux catastrophes écologiques, au péril mortel des armes nucléaires et autres, aux déshumanisations de tous ordres » et, en même temps, aux dangers du transhumanisme » (p 51). En regard, Edgar Morin nous présente un ensemble de propositions. Cette voie nouvelle passe par un « changement de notre façon de connaître et de penser, réductrice, disjonctive, compartimentée pour un mode de pensée complexe qui relie, capable d’appréhender les phénomènes dans leur diversité et leur unité ainsi que leur contextualité » (p 52).
Cependant, si la conflictualité prend des formes nouvelles, elle s’inscrit dans une longue histoire. Il y a bien des maux terribles dans notre passé. La mise en garde vis à vis des périls actuels ne doit pas nous les faire oublier (4). Edgar Morin ne les évoque pas ici, mais il analyse les racines anthropologiques et idéologiques de la conflictualité.
La force de l’entraide
Le grand livre de Darwin, « De l’origine des espèces au moyen de la sélection naturelle, ou la lutte pour l’existence dans la nature » (1859-1861) a été lu, à une époque, comme « confirmant le développement des plus agressifs et mieux adaptés à un monde conflictuel, et utilisé comme justification pseudo-scientifique du darwinisme social. Le penseur libertaire, Pierre Kropotkine, s’opposa vigoureusement à cette doctrine politique comme à l’interprétation dominante du darwinisme où le « struggle for life » devenait le déterminant de la solution au profit des meilleurs… » (p 17). Edgar Morin nous montre comment le darwinisme social a perdu son emprise. Aujourd’hui, on reconnait l’importance de la symbiose et des relations associatives. Face aux forces de conflit et de destruction, « les forces
d’association et d’union s’activent dans les écosystèmes » (p 21) Aujourd’hui, l’entraide est reconnue comme une force motrice (5).
La fraternité : une grande aspiration
Le fraternité, c’est une nécessité sociale, c’est aussi un besoin intérieur… Ainsi Edgar Morin ne trace pas uniquement un chemin collectif. Il raconte l’histoire de sa vie. Il exprime un ressenti. « De même que je n’ai jamais pu vivre sans amour, je n’ai jamais pu vivre sans fraternité… Il y a les grandes fraternités durables. Mais il y a aussi les fraternités provisoires. Ces fraternités dues à la rencontre, au hasard, à la communion, à l’adhésion enthousiaste, à des je-ne-sais quoi où deux êtres se reconnaissent plus que camarades, sont des moments solaires qui réchauffent nos vies dans leur cheminement dans un monde prosaïque (p 35-36).
Liberté, égalité, fraternité, belle devise (6) mais « la fraternité ne peut pas venir d’une injonction statique, supérieure, elle doit venir de nous (p 9). Elle peut s’appuyer sur une aspiration humaine. Les sources du sentiment qui nous portent vers autrui, collectivement (nous) ou personnellement (tu) sont les sources de la fraternité (p 11).
Mais Edgar Morin sait combien cette fraternité doit être entretenue, car elle est menacée par des forces opposée. Il y a opposition entre tout ce qui pousse à l’union -eros- et, d’autre part, tout ce qui pousse au conflit -polemos- ainsi que ce qui nous pousse à la destruction et à la mort -thanatos- » (p 25). Il y a interaction. Ainsi, « tout ce qui ne régénère pas, dégénère et il en est ainsi de la fraternité »
Des oasis de fraternité
Face à des menaces bien identifiées, Edgar Morin entrevoit « un bouillonnement d’initiatives privées, personnelles, communautaires, associatives qui font germer ici et là les ébauches d’une civilisation vouée à l’épanouissement personnel dans l’insertion communautaire… il y a là comme des oasis… (p 44). On retrouve dans la description d’Edgar Morin un foisonnement d’innovations, des fablabs (laboratoires de fabrication collaboratifs) à toute la gamme des initiatives écologiques et sociales. A cet égard, le film : « Demain » nous avait bien montré le sens de ce mouvement (7) . Ce blog rapporte des innovations de ce genre (8).
« Nous devons tout faire pour sauvegarder et développer la fraternité des oasis. Le déferlement des forces négatives en notre époque de régressions éthiques et politiques généralisées, rend de plus en plus nécessaire la constitution de ces oasis. Nous devons créer des ilots de vie autre, nous devons multiplier ces ilots, car, ou bien les choses vont continuer à régresser et les oasis seront des ilots de résistance de la fraternité, ou bien, il y aura des possibilités positives et ce seront les points de départ d’une fraternité plus généralisée dans une civilisation réformée » (p 36).
Montée d’une prise de conscience
Il apparaît de plus en plus aujourd’hui que le rationalité technique et scientifique ne suffit pas. La relation humaine est essentielle dans toutes ses dimensions éthiques : care, empathie, fraternité. C’est un mouvement général qui s’exprime également sur le plan spirituel. Si, de par son histoire personnelle et le cheminement de sa réflexion, agnostique, Edgar Morin n’entre pas dans la dimension religieuse, son éloge de la fraternité rejoint les croyants engagés en ce sens.
L’amour partagé est au cœur de l’Évangile. Il a cheminé parfois en sous-main dans des moments peu avenants de la chrétienté. Michel Clévenot a pu écrire une histoire de la pratique chrétienne sous le titre : « Les hommes de la fraternité » (9). Et, dans son grand livre : « Le Phénomène humain » (10), Pierre Teilhard de Chardin voit dans l’amour, le cœur du vécu chrétien : « L’amour chrétien, chose incompréhensible pour ceux qui n’y ont pas gouté. Que l’infini et l’intangible puissent être aimable ; que le cœur humain puisse battre pour son prochain d’une charité véritable : ceci paraît à bien des gens que je connais tout simplement impossible… Et cependant, que fondé ou non sur une illusion, ce sentiment existe, et qu’il est même anormalement puissant, comment en douter – rien qu’à enregistrer brutalement les résultats qu’il ne cesse de produire autour de nous… Et n’est-ce pas un fait enfin, celui là, je le garantis, que si l’amour de Dieu venait à s’éteindre dans l’âme des fidèles, l’énorme édifice de rites, de hiérarchie et de doctrines que représente l’Eglise retournerait instantanément dans la poussière dont il est sorti » (écrit en 1938-1940). Aujourd’hui, à travers la pensée théologique de Jürgen Moltmann (11), nous apprenons à reconnaître l’inspiration de l’Esprit dans la manifestation de la fraternité où qu’elle soit, souvent dans des espaces où la référence religieuse s’en est allée.
Sur ce blog, un précédent article annonçait la recherche actuelle de fraternité : « Appel à la fraternité ». Ce livre d’Edgar Morin, accessible à tous est la contribution d’un grand penseur à cette quête. L’engagement d’un homme de savoir dans cette cause nous paraît hautement significatif.
J H
- Edgar Morin. La Fraternité. Pourquoi ? Actes Sud, 2019
- Edgar Morin Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Edgar_Morin
- Entretien avec Edgar Morin 28 mars 2019 : https://www.youtube.com/watch?v=RghwWsPihs0
- Ne pas oublier l’âge dur dont nous sommes sortis depuis quelques décennies : Michel Serres Darwin, Bonaparte et le samaritain. Une philosophie de l’histoire : https://vivreetesperer.com/une-philosophie-de-lhistoire-par-michel-serres/
- Face à la violence, l’entraide : le livre de Pablo Servigne et Gauthier Chapelle : https://vivreetesperer.com/face-a-la-violence-lentraide-puissance-de-vie-dans-la-nature-et-dans-lhumanite/
- Une vision de la liberté, selon Jürgen Moltmann : https://vivreetesperer.com/une-vision-de-la-liberte/
- Le film « Demain » : https://vivreetesperer.com/le-film-demain/
- Le mouvement collaboratif, qui se développe actuellement, présente des facettes différentes : des communautés fraternelles, mais aussi des entreprises solidaires. Peu présent dans ce livre sur la fraternité, cet aspect économique doit être mis en valeur. La convergence est manifeste dans le livre d’Isabelle Delannoy : « L’économie symbiotique » . La présentation de ce livre est accompagnée de la mention des initiatives analysées sur ce blog : https://vivreetesperer.com/vers-une-economie-symbiotique/
- Michel Clévenot. Les hommes de la fraternité en 12 volumes « Les hommes de la fraternité. Une histoire post-moderne du christianisme » : https://www.religiologiques.uqam.ca/no9/cleve.pdf
- Pierre Teilhard de Chardin. Le phénomène Humain. Seuil (Points Sagesse) Citation : p 297-298
- Jürgen Moltmann. L’Esprit qui donne la vie. Cerf, 1999 « Un Esprit sans frontières » : https://vivreetesperer.com/un-esprit-sans-frontieres/
- Sur ce blog : « Appel à la fraternité » avril 2015 : https://vivreetesperer.com/appel-a-la-fraternite/
par jean | Juil 20, 2019 | ARTICLES, Société et culture en mouvement |
Vers un nouveau paysage industriel, économique, social

Peter est ingénieur dans une entreprise de haute technologie.
« En recherche d’un nouveau champ d’activité pour son entreprise, il a été amené à travailler sur une innovation en rupture : l’imprimante 3D ». En répondant à nos questions, il nous ouvre un horizon : l’apparition d’un nouveau paysage industriel, économique et social.
Emergence d’un nouveau mode de production
« L’imprimante 3D n’est pas une nouveauté. Elle existe depuis plus de 30 ans. La vraie nouveauté, c’est de l’utiliser dans une phase industrielle. C’est de faire de la « mass production » . Il y a trente ans, on s’en servait pour faire des prototypes, par exemple des concepts de voiture, de moteur. On s’en servait aussi pour faire de la recherche afin de bien comprendre et d’améliorer le fonctionnement et le potentiel de cette imprimante à des fins de réaliser des produits de qualité. Aujourd’hui, on entre dans la phase d’industrialisation pour faire des pièces de qualité qui soient équivalentes à la production classique.
Qu’est-ce que l’imprimante 3D ? Dans la fabrication traditionnelle, on part d’un bloc de matière. On retire de la matière pour réaliser une pièce . Dans l’imprimante 3D, on part de rien. On part d’une poudre et, pour réaliser une pièce, on va agglomérer cette poudre, couche après couche. On peut avoir différents types de matière initiale : polymère, métal, céramique, bois, béton. Ce qui domine, ce sont les polymères et le métal. Aujourd’hui, l’imprimante 3D est utilisée dans trois domaines principaux : l’aérospatial, le médical, la défense.
Vers une économie décentralisée et écologique
Les conséquence sont significatives parce qu’on va développer l’économie locale. L’imprimante 3D permet d’éviter les transports. On envoie le modèle 3D par internet dans les lieux de fabrication. On y dispose de la matière. La production s’effectue dans des micro-usines à partir de quelques imprimantes 3D. Les produits sont fabriqués localement. On n’a plus besoin d’importer des produits de pays lointains. La production pourra à nouveau se développer dans des pays, dits développés, en Europe, en Amérique, et aussi dans des pays pauvres, jusqu’ici peu industrialisés. Cependant, il y a besoin de compétence. Il n’y a plus de dépendance par rapport à des lieux jusque là privilégiés. On pourra de plus en plus travailler en dehors des métropoles et des zones industrielles et réindustrialiser des régions aujourd’hui dépourvues.
Cette transformation va permettre également une personnalisation des produits, une adaptation aux clients. De même, les produits pourront être réparés. Les pièces pourront être changées. L’imprimante 3D favorise le remplacement des pièces. C’est une entrée dans le mouvement de l’économie circulaire qui est une des composantes de l’économie écologique. Moins de transport, moins de consommation d’énergie, tout cela va dans le sens de la transition écologique.
L’imprimante 3D : un développement rapide
Aujourd’hui, l’imprimante 3D est très développée aux Etats-Unis. Initialement, ce fut une innovation française, mais elle a été reprise et développée aux Etats-Unis à partir des années 1990. Elle est également très développée en Asie : Japon, Corée, Chine. Et maintenant, elle se développe en Europe. En France, nous sommes encore très en retard : 3% du marché contre 6% en Angleterre, 9% en Allemagne… et 40% aux Etats-Unis. Nous avons besoin d’une aide de l’Etat pour une démocratisation de l’imprimante 3D. Il y a besoin d’un immense effort d’information, de formation et de conseil. Pour une approche prospective, on peut déjà envisager l’imprimante 4D qui permet de donner mouvement aux objets. Entre autres, l’imprimante 4D permettra de reconstituer les tissus humains de grands brulés.
Dans la transformation en cours, il y a encore en France un temps d’inertie. Mais on peut envisager que la France entre pleinement dans ce processus d’ici cinq ans.
L’imprimante 3D, ce n’est pas seulement une innovation technologique, c’est également un changement de société ».
Interview de Peter recueillie par J H
Sur ce blog, on pourra lire aussi :
« La troisième révolution industrielle » (Jérémie Rifkin) : https://vivreetesperer.com/face-a-la-crise-un-avenir-pour-l’economie/
« Un monde en changement accéléré » (Thomas Friedman) : https://vivreetesperer.com/un-monde-en-changement-accelere/
« Pourquoi et comment innover face au changement accéléré du monde » (Thomas Friedman) : https://vivreetesperer.com/pourquoi-et-comment-innover-face-au-changement-accelere-du-monde/
« Comprendre la mutation actuelle de notre société requiert une vision nouvelle du monde » (Jean Staune)
https://vivreetesperer.com/comprendre-la-mutation-actuelle-de-notre-societe-requiert-une-vision-nouvelle-du-monde/
« Vers une économie symbiotique » (Isabelle Delannoy)
https://vivreetesperer.com/vers-une-economie-symbiotique/
par jean | Juil 20, 2019 | ARTICLES, Expérience de vie et relation, Vision et sens |
De plus en plus, quelque soient les tempêtes, nous percevons un mouvement d’unification dans le monde d’aujourd’hui (1) et, en abaissant les barrières entre les disciplines académique, ce mouvement affecte également notre usage du savoir (2). De plus en plus, l’être humain est envisagé dans une perspective globale, holistique. Le corps et l’esprit communique et interfère réciproquement comme le montre Denis Janssen dans son livre : « la guérison intérieure » (3). Dans le même mouvement, la médecine est appelée à reconnaître les interrelations entre les différents composants, les différents niveaux du corps et à s’engager dans une perspective intégrative (4). La spiritualité est, elle aussi, concernée au premier chef. On a pu la définir récemment comme une « conscience relationnelle », comme une relation avec soi-même, avec les autres, avec la nature et avec Dieu (5). La focalisation sur l’âme se détournant du corps, la méconnaissance de celui-ci, sont en train de s’éloigner. Tout est perçu en terme de relation. Comme le souligne Jürgen Moltmann dans sa théologie trinitaire, Dieu lui-même est communion d’amour, un amour qui se répand (6). La présence de Dieu se manifeste (7).
Cependant, dans ce monde en mutation, nous vivons en tension. Les représentations du passé sont encore là et font souvent barrage. Des attractions nouvelles nous bousculent parfois et nous dispersent. Les vicissitudes de la vie, les menaces concernant la santé sont toujours là avec les inquiétudes qu’elles génèrent. Nous avons toujours, et même de plus en plus, besoin de vivre en relation avec une présence, la Présence divine, source de confiance et de vie. Ainsi, ce texte d’Odile Hassenforder : « Vers une personnalité unifiée », écrit, il y a une dizaine d’années, nous paraît toujours innovant. Il vient nous éclairer dans nos cheminements de vie. C’est un texte de réflexion qui a demandé à Odile un effort de synthèse. Et c’est aussi un témoignage, car Odile a écrit ce texte tout en étant confrontée à une dure maladie. Aussi bien, nous savons qu’à l’époque, elle en avait parlé à son médecin, pour elle, un ami.
Ce texte est paru en 2006 sur le site de l’association à laquelle Odile participait activement : Témoins (8). Il a été ensuite publié dans le livre : « Sa présence dans ma vie » (9). Ici, Odile exprime une vision globale d’un être humain en marche vers une personnalité unifiée, dans une perspective de plénitude (en anglais : wholeness) (11) , en Christ ressuscité, promise et offerte par Dieu.
J H
- Une prise de conscience de la globalisation qui remonte à la conception de la « Noosphère » selon Teilhard de Chardin : https://fr.wikipedia.org/wiki/Noosphère
- Michel Serres. Petite Poucette. Une nouvelle manière d’être et de connaître. Vers un nouvel usage et un nouveau visage du savoir : https://vivreetesperer.com/une-nouvelle-maniere-detre-et-de-connaitre-3-vers-un-nouvel-usage-et-un-nouveau-visage-du-savoir/
- Vers une nouvelle médecine du corps et de l’esprit : https://www.temoins.com/vers-une-nouvelle-medecine-du-corps-et-de-lesprit/
- Médecine d’avenir. Médecine d’espoir : https://vivreetesperer.com/medecine-d’avenir-medecine-d’espoir/
- La vie spirituelle comme une « conscience relationnelle ». la recherche de David Hay sur la spiritualité d’aujourd’hui : https://www.temoins.com/la-vie-spirituelle-comme-une-l-conscience-relationnelle-r/
- Dieu, communion d’amour : https://www.temoins.com/la-vie-spirituelle-comme-une-l-conscience-relationnelle-r/
- Jürgen Moltmann. Reconnaître la présence de Dieu à travers l’expérience : https://vivreetesperer.com/reconnaitre-la-presence-de-dieu-a-travers-lexperience/ Richard Rohr. La danse divine (The divine dance) : https://vivreetesperer.com/la-danse-divine-the-divine-dance-par-richard-rohr/ Une nouvelle manière de croire (Diana Butler Bass) : https://vivreetesperer.com/la-danse-divine-the-divine-dance-par-richard-rohr/
- Sur le site de Témoins : Vers une personnalité unifiée : https://www.temoins.com/vers-une-personnalite-unifiee/
- Odile Hassenforder. Sa présence dans ma vie. Parcours spirituel. Empreinte, 2011 (p 207-211) Voir sur ce blog : Odile Hassenforder. Sa présence dans ma vie. Un témoignage vivant : https://vivreetesperer.com/odile-hassenforder-sa-presence-dans-ma-vie-un-temoignage-vivant/
Vers une personnalité unifiée
Les besoins, à différents niveaux, sont si nombreux que les multiples facettes de la relation d’aide sont toutes utiles. Pour ma part, depuis une trentaine d’années, j’ai fait bien du chemin. Dans les milieux charismatiques ou évangéliques, j’ai vu les merveilles de l’amour de Dieu, des miracles. J’ai aussi constaté qu’après amélioration, certaines personnes retombaient dans les mêmes ornières, malgré leur confiance en Dieu. Assistante sociale de profession, j’étais habituée à l’écoute et à la recherche de solutions, sociales bien sûr, mais aussi psychologiques.
Découvertes psychologiques.
Peu à peu, tout en m’imprégnant de la Parole de Dieu, j’ai cherché à approfondir mes connaissances psychologiques en suivant diverses formations, en lisant des livres spécialisés ou en consultant des personnes compétentes. J’en ai tiré une importante leçon de vie. Quelle grande espérance de savoir que la découverte des racines de ses dysfonctionnements permet de reconstruire sa personnalité selon ses désirs profonds. De même, quelle libération de pouvoir mettre à jour ses projections ou les déviations d’une mentalité parfois marquées par un héritage ancestral… qui déforment la réalité, court-circuitent la communication et faussent la relation. Et, parallèlement, l’introduction de nouvelles représentations suscite un meilleur équilibre. C’est toujours une joie profonde de voir une personne prendre peu à peu sa vie en main.
Une approche du corps.
Observant l’influence du psychisme sur le corps, je me suis attachée, ces derniers temps, à creuser davantage mes connaissances physiologiques. Ainsi j’ai découvert que la maladie pouvait être une interpellation positive lorsqu’elle nous permettait d’aller plus loin dans la compréhension des racines de notre mal-être. Découvrir les causes permet de mieux remédier au mal. Le corps est heureusement doté de capacités de régénération et de mécanismes d’auto-défense. Cependant, ces phénomènes peuvent céder face à de trop fortes agressions. La médecine globale, telle qu’elle se développe actuellement, cherche à remettre en ordre l’équilibre général: les circuits qui relient les différents organes à l’image de vases communicants. Tout se tient. Il y a un lien entre les glandes endocrines , les hormones, les réseaux nerveux, le flux sanguin et même les ondes énergétiques… La guérison devient alors la remise en ordre de l’harmonie corporelle. Le traitement médical intervient comme un soutien positif pour remédier aux dysfonctionnements. Il ne s’agit plus de supprimer simplement les symptômes, mais de les considérer comme des panneaux de signalisation. Je loue le Créateur pour cette merveille qu’est notre corps dans sa complexité et dans ses potentialités (Ps .139).
La Vie circule.
Aujourd’hui, en essayant de faire une synthèse de mes découvertes, je réalise combien il y a interrelation entre les différents registres de notre être , du physique au spirituel en passant par les divers aspects de la vie psychique, de l’émotionnel au cognitif.
En lisant la Bible, j’y découvre une vision dynamique qui éclaire cette compréhension. Dans les Proverbes, par exemple, n’est-il pas indiqué que « D’aimables paroles sont bienfaisantes pour le corps (Pr. 16.24). Le cœur joyeux est un excellent remède (Pr. 17.22). La langue du sage apporte la guérison (Pr.12.18) ».
Ma pensée s’est peu à peu imprégnée d’une vision herméneutique et systémique : interprétation personnelle de chaque phénomène en le situant dans un ensemble au sein d’un système en mouvement et en évolution. Tout se tient. Avec émerveillement, je me rends compte que les textes bibliques font écho à ma manière de voir toute chose. Dieu Trinitaire nous a créés à son image pour devenir à sa ressemblance: une personne en relation. Par ailleurs, comme le montre les comparaisons employées par Jésus : l’eau vive, la sève, la lumière…la vie divine circule à tous les niveaux. Lorsque nous n’y mettons pas d’obstacles, nous pouvons en percevoir les effets bénéfiques. Le pardon des péchés fait tomber les barrières. Dieu agit. Dieu régénère. Dieu guérit. Comme le dit l’Evangile en parlant de Jésus : « Une force sortait de Lui et les guérissait tous » (Luc 6.19, 8.46).
Notre participation à la création.
J’ai été secouée au plus profond de mon être, le jour ou j’ai réalisé que Dieu m’appelait à participer à la gérance de sa création, à commencer par ma personnalité. Qui suis-je pour être ainsi « collaboratrice » du Créateur (Ps.8) ? Dieu continue à créer avec chacun de nous et avec moi. Le Père Céleste agit sans cesse, dit Jésus, et Il m’invite à participer à la nouvelle création mise en route dans sa résurrection. En peu de mots ici, je voudrais dire comment je comprends le dernier verset des Psaumes comme une apothéose : « Que tout ce qui respire loue l’Eternel ! ». Toutes les expressions qui se traduisent par des mouvements, des énergies, des ondes… ne participent-elles pas à cette respiration ?
Une motivation forte.
Cette expression d’une vie qui nous dépasse et à laquelle nous participons, m’aide à accompagner positivement les personnes en difficulté. En effet, pouvoir imaginer que notre cheminement à chacun peut nous conduire vers une vie plus pleine et plus libre, est une forte motivation qui fait avancer. Ainsi une épreuve devient un tremplin pour rebondir dans l’espérance (Rom. 5.54), une invitation à faire le point pour réajuster sa vie, l’occasion d’accueillir la force divine (I Cor. 10.13) pour traverser cette crise et en sortir. En Christ ressuscité, la vie est plus forte que le mal qui a perdu son pouvoir de destruction absolue (I Cor. 15). Le but poursuivi est de guider le cheminement de guérison vers l’harmonie de l’être tout entier en utilisant des approches différentes selon la personne intéressée, à sa mesure, en fonction de sa situation et de sa culture. Ce travail intérieur peut parfois se traduire par une transformation profonde du mode de vie (Rom. 12.1). Ainsi la vie porte davantage de fruits (Jean 15).
Une nouvelle dynamique.
Ainsi concrètement, il me paraît important d’apprendre à voir au quotidien ce qui est beau et bon autour de soi et en soi en développant ce que Paul appelle les fruits de l’Esprit (Gal. 5.23, Eph. 5.9, Col. 3.12…). Exprimer ses observations positives en les partageant avec d’autres, bénir en toutes circonstances (Mat. 5.45), voilà des attitudes qui développent en nous paix et joie, sentiment de plénitude dans la présence de Dieu (Rom. 14.17). Bien sûr, il serait mal venu d’imposer mes représentations, y compris par l’intermédiaire de versets bibliques. Chacun doit pouvoir exprimer ses souffrances comme son mal de vivre, mais à partir de là, il est possible de découvrir tout ce qui est positif dans sa vie et favoriser ainsi une dynamique nouvelle qui va avoir une influence bénéfique sur le psychisme et sur le corps. Ainsi j’encourage mon interlocuteur à manifester ses désirs profonds, et, ainsi à découvrir et à développer ses potentialités. C’est de cette façon qu’il pourra reconstruire librement sa vraie personnalité : « corps, âme, esprit » (I Th. 5.23). J’adhère à ce commentaire trouvé dans l’édition du Semeur de la Bible: Il s’agit de l’être humain, non en trois dimensions superposées, mais dans une globalité de la personne dans ses trois dimensions, pour vivre en contact, en relation: le corps dans sa présence au monde, l’âme, l’être intérieur dans sa relation au monde, l’esprit, l’être intérieur dans sa relation avec Dieu.
En marche.
Dans les limites de ce texte, il n’est pas possible d’illustrer, par des exemples concrets, ce panorama ou bien des nuances doivent être apportées. J’aime partager cette vision qui m’habite et suscite en moi un élan de vie. C’est le fruit d’une mise en place progressive de ma vie dans le projet d’un Dieu qui veut mon bonheur. Même dans les temps ou il me faut traverser la vallée de l’ombre, Il se tient à mes cotés et me reçoit à sa table en « invitée d’honneur » (Ps. 23). Sans ambition, ni prétention, simplement à ma mesure, je cherche à tenir ma place dans cette marche humaine que nous sommes appelés à effectuer ensemble en Eglise selon le projet divin (Eph. ch 1) . Cette vision, qui inspire ma vie, me permet d’affirmer à toute personne rencontrée que la vie vaut la peine d’être vécue.
Odile Hassenforder.
Voir aussi :
Médecine d’avenir. Médecine d’espoir : https://vivreetesperer.com/medecine-d’avenir-medecine-d’espoir/
Les progrès de la psychologie. Un grand potentiel de guérison : https://vivreetesperer.com/les-progres-de-la-psychologie-un-grand-potentiel-de-guerison/
La prière, selon Agnès Sanford, une pionnière de la prière de guérison : https://vivreetesperer.com/la-priere-selon-agnes-sanford-une-pionniere-de-la-priere-de-guerison/
par jean | Juin 29, 2019 | ARTICLES, Expérience de vie et relation |

Un manifeste de Cynthia Fleury : « Le soin est un humanisme ».
Plus ou moins, nous ressentons notre fragilité. Si nous sommes tous des êtres vulnérables, nous pouvons ressentir cette vulnérabilité comme une charge, comme un poids, comme une épreuve. L’aide réside dans un environnement relationnel. Et cette relation est évoquée dans différents contextes. En christianisme, par exemple, c’est l’aide que vient apporter le « bon samaritain », dans la parabole du même nom. C’est l’aide qui se trouve dans la relation avec Dieu, telle qu’elle est annoncée dans la Parole biblique dans une multitude de passages.
Si la compassion est également enseignée dans d’autres traditions, les références chrétiennes ont inspiré un mouvement qui va bien au delà du christianisme et nous permettent d’y reconnaître l’œuvre de l’Esprit. Michel Serres, dans son livre : « Une philosophie de l’histoire » (1), nous parle de la venue d’un âge doux par rapport à un âge d’oppression qui a duré pendant des siècles en pression de la violence et de la maladie. Effectivement, dans les dernières décennies, il y a bien des signes qui traduisent une profonde transformation des mentalités dans une expression croissante d’empathie et de sollicitude. C’est, entre autres, le mouvement du Care qui est apparu aux Etats-Unis au début des années 1980, un courant de pensée et de pratique initié par Carol Gilligan (2).
Philosophe et psychanalyste, Cynthia Fleury (3) intervient aujourd’hui en France dans le champ du soin et de la santé. Elle a fondé la première chaire de philosophie dans un hôpital français, l’hôpital Sainte Anne. Elle est professeure au Conservatoire National des Arts et Métiers, dans une chaire : Humanités et santé et s’emploie à promouvoir une pensée humanisante dans le système médical français. A une époque de grandes mutations sociales et technologiques, cette pensée humanisante est bien exprimée dans son récent livret : « Le soin est un humanisme » (4). Elle nous y parle de la vulnérabilité humaine et de la sollicitude que celle-ci appelle en regard. Quelques citations ici rapportées nous éclairent sur la démarche de Cynthia Fleury et nous encouragent à entrer dans une lecture approfondie de ce livret.
Reconnaître la vulnérabilité
Cynthia Fleury met en évidence la vulnérabilité humaine comme un point de départ de l’approche humanisante du soin .
« La vulnérabilité est consubstantielle à tout homme et finalement assez peu spécifique ». « La vulnérabilité invite l’homme à inventer un « éthos », à produire un geste soucieux de la différence de l’autre. Elle fait naitre chez nous une préoccupation, une attention, une qualité inédite de pensée au monde et aux autres » (p 8).
« Reconnaître nos limites, c’est faire quelque chose, bâtir une société qui ne soit pas celle du ressentiment, et un être humain, qui ne soit pas, lui non plus l’objet – ou le sujet – de pulsions mortifères » ( p 7). « Il faut, dès lors, se soucier de rendre « capacitaires » les individus, c’est à dire leur redonner aptitude et souveraineté dans ce qu’ils sont ». ( p 7). C’est prendre en charge la vulnérabilité sans s’y enfermer et sans y enfermer les autres, au contraire en ouvrant des voies de libération. « Je souhaite porter et promouvoir une vision de la vulnérabilité qui ne soit pas définitive, mais, tout au contraire, inséparable d’une nouvelle puissance régénératrice des principes et des usages. La vulnérabilité est une combinaison d’hypercontraintes qui sont souvent, d’emblée, dévalorisées, stigmatisées par la société comme étant non performantes, invalidantes et créatrices de dépendances. Mais elle nous invite, nous, les « autres », à mettre en place des manières d’être et de se conduire, précisément autres, aptes à faire face à cette fragilité pour ne pas la renforcer, voire pour la préserver au sens où cette fragilité peut être affaire de rareté, de beauté, de sensibilité extrême » ( p 7-8).
La dignité de l’être humain, c’est d’être irremplaçable.
Cynthia Fleury se fonde sur une vision de « l’exceptionnalité de l’homme », selon elle, « la seule manière d’imaginer et de maintenir l’humanisme du genre humain » ( p 6).
C’est dans cette perspective que Cynthia Fleury s’est engagée dans le domaine du soin. « La notion d’humanités fait le lien avec le premier territoire de recherche qui a été le mien : la Renaissance, les Lumières et bien au delà. Poser les humanités au cœur de la santé, c’est se rattacher à cette histoire par laquelle l’homme ne demeure humain qu’à condition de refuser de se dessaisir de sa propre faculté de jugement » ( p 9).
Cynthia Fleury s’inquiète de la démission de la personne, de la démission du patient et veut l’aider à y échapper. « Je pense être devenu psychanalyste sur le tard pour me tenir au plus près de cette volonté flirtant avec l’appel à l’aide et la tentation de la disparition » ( p 9).
Si l’humain ne se sent plus reconnu dans sa valeur propre, alors, il perd le goût de la vie. « Quant à la notion d’irremplaçabilité, je l’ai expérimenté par défaut, en clinique, avec mes patients. Les individus qui ont un sentiment de remplaçabilité tombent malades et peuvent opérer des passages à l’acte contre eux-mêmes ou autrui… Il y a comme une détérioration du sujet en eux… » (p 10).
Le soin, une fonction en partage
Un soin véritable requiert une relation, un dialogue, un partage. Ce ne peut être une pratique imposée d’en haut sans consensus.
« Le soin n’appartient pas à une caste de soignants qui distribueraient leurs soins comme d’autres de bonnes paroles, à des patients incapables d’être actifs dans la démarche du soin. Le soin est une fonction en partage relevant de l’alliance dialectique, créative, des soignants et des soignés qui ensemble font éclore une dynamique, notamment tissée grâce à la spécificité des sujets qu’ils sont .
Si le soin est central pour le sujet… le sujet est également central pour le soin – au sens où « le colloque singulier » ou encore la qualité des relations intersubjectives entre soignés et soignants, entre soignants eux-mêmes, sont déterminants, tout comme la reconnaissance subjective réciproque entre patients et soignants » ( p 20-21).
Sollicitude et patience des soignants
Une attitude empathique et relationnelle joue un rôle essentiel dans la réussite du soin. C’est « une sollicitude et une patience de la part des soignants » . Voilà qui permet de développer une dynamique de vie.
« Veiller, dans la santé, à construire une « vérité capacitaire » qui donne au malade les moyens physiques et psychiques de dépasser sa maladie est un fait de toute importance pour le médecin. Dire la vérité au malade est certes nécessaire. Cependant, la nécessité de veiller à ce que cette vérité n’affaiblisse pas le sujet et les aidants, mais au contraire les renforce dans leur quête de traitement et de guérison est tout aussi décisive, d’autant que le régime d’incertitude dans lequel évolue la médecine invite à quelque humilité par rapport à la perception de ce qui est la vérité » ( p 23).
« Sollicitude et prudence, articulées à des savoir-être et des savoir-faire spécifiques sont déterminants pour créer l’optimisation du soin, les conditions d’acceptabilité du traitement et son observance comme les conditions qui peuvent en découler » ( p 23).
La technicisation croissante de la médecine peut engendrer une impression d’impuissance chez le patient et une angoisse vis à vis de mécanismes dominateurs. « Dans un univers de soin de plus en plus technicisé, le sentiment de déshumanisation peut être fort et le sentiment d’abandon renforcé chez le patient. L’accompagnement humain pour une meilleure appropriation de la technicité des soins et des traitements est donc essentiel pour éviter chez le patient, un sentiment de chosification ou tout simplement de perte d’autonomie ou la perception d’un consentement bafoué, car non suffisamment informé ». (p 24-25)
Des institutions à humaniser
On sait combien l’environnement a une influence sur ceux qui y participent. C’est dire l’importance de l’ambiance dans les hôpitaux.
« La conception d’une fonction soignante en partage invite à étudier les organisations institutionnelles sociales et sanitaires et à vérifier qu’elles soient compatibles avec une éthique de soin » (p 26)
Maladies chroniques et continuité des soins
Au cours des dernières années, nous sommes entré dans une période nouvelle. « la définition de la maladie a profondément changé. La maladie n’a pas basculé du côté de la mort, mais du côté de la vie. Etre malade signifie désormais plus souvent vivre avec un mal qu’y succomber directement, voire vivre mal avec un mal qui vit » (p 29).
Que faire aujourd’hui par rapport à cette omniprésence des maladies chroniques ? Elle pose question, non seulement au corps médical, mais à ceux qui y sont confrontés et cherchent une nouvelle approche. « Comment mieux soigner cela et accompagner ces sujets ? Là encore, il convient de se remémorer qu’il n’y a pas de maladie, mais seulement des sujets qui tombent malade et que la reconnaissance de cette subjectivité est la seule opérationnelle pour la production du soin …Tout est là pour complexifier le rapport
à la santé et à la guérison, et pour montrer qu’un soin demain réellement efficace pour le patient saura concilier guérison et rétablissement » ( p 30).
De même, le tournant ambulatoire de l’hôpital requiert un changement d’attitude vis à vis des patients. On doit reconnaître celui-ci « en tant que sujet et porteur d’un savoir spécifique nécessaire à la compréhension de son mal. Si le patient n’est pas considéré comme un « agent », un acteur de son traitement, le tournant tournera court » (p 31).
Une voie ouverte
Cynthia Fleury se fonde sur l’exceptionnalité de l’humain. « Je considère pour ma part que la défense de l’exceptionnalité de l’homme reste la seule manière d’imaginer et de maintenir l’humanisme du genre humain » (p 6). Dans un autre langage, la vision chrétienne proclame que le vie humaine est sacrée. « Toute personne est une histoire sacrée », tel est le titre d’un livre emblématique de Jean Vanier (5), le fondateur de l’Arche, une œuvre ou les plus vulnérables, des déficient mentaux sont reconnus comme des personnes à part entière (6). Le discours de Cynthia Fleury s’inscrit sur le seul registre de la philosophie. Il procède d’une approche existentialiste. « L’homme se fait. Il est ce qu’il fait. Se faire, c’est se former. C’est prendre soin de. Et le travail ne se résume pas à une tâche de gestionnaire. Il est préalablement – et devrait être en dernière instance – un mode d’attention aux choses et aux usages » (p 6). Dans ce livret, Cynthia Fleury nous expose son parcours de philosophe et de psychanalyste dans les chaires où elle expose les rapports entre les humanités et la santé (p 14-16). Sa vision du soin s’inscrit dans une perspective de société. « s’informer, (se) former,, (se) transformer, voilà ce que l’épistémologie de la démocratie enseigne à la politique. Et c’est ce qu’il y a derrière le grand continuum du soin : l’attention aux idées, à la connaissance, et l’attention aux êtres et au monde » (p 32).
Dans ce livret, Cynthia Fleury nous communique la dynamique de sa pensée. Certaines de ses expressions nous paraissent signifiantes et éclairantes. Et ainsi, elles nous permettent de mesurer la réalité à laquelle nous sommes tous confrontés, et, dans cette conscience, de mieux influer et de mieux intervenir dans cette réalité.
Et, parce qu’elle met en valeur de bonnes pratiques visant à « donner au malade les moyens physiques et psychiques de dépasser sa maladie » et ce que cela requiert en terme d’encouragement et d’accompagnement, monte en nous le désir de participer à cette tâche de soutien dans les limites de notre condition, et s’éveille en nous la mémoire de soignants que nous avons rencontrés ou rencontrons dans nos vies, et auxquels nous devons tant.
J H
- Michel Serres. darwin, bonaparte et le samaritain. Une philosophie de l’histoire. Le pommier, 2016 https://vivreetesperer.com/une-philosophie-de-lhistoire-par-michel-serres/
- Ethics of care : https://en.wikipedia.org/wiki/Ethics_of_care
- Vie et œuvre de Cynthia Fleury : https://fr.wikipedia.org/wiki/Cynthia_Fleury
- Cynthia Fleury. Le soin est un humanisme. Tracts Gallimard N° 6, mai 2019 Un podcast de France Culture : « Eduquer, soigner sont les gestes paradigmatiques de la société » : https://www.franceculture.fr/emissions/linvite-actu/cynthia-fleury?fbclid=IwAR3PxZuELDtmP5BxHCiCdAKPSq0vyHRAGDGCu67pcoItk9tt2SpaCZgmKnY
- Jean Vanier. Toute personne est une histoire sacrée, 1994 Voir aussi sur ce blog : « Devenir plus humain » : https://vivreetesperer.com/devenir-plus-humain/
- L’Arche : https://www.larche.org/fr/web/guest/accueil?gclid=CjwKCAjwuqfoBRAEEiwAZErCsk0rwpWzj48z-j9y32algHh0dwOrTYw9qDcJ2lwhUzSykZTySKUcBhoCqcsQAvD_BwE
Voir aussi :
« Médecine d’avenir, médecine d’espoir. « La médecine personnalisée », d’après Jean-Claude Lapraz » : https://vivreetesperer.com/medecine-d’avenir-medecine-d’espoir/
« Les plantes médicinales au cœur d’une nouvelle approche médicale. Phytothérapie clinique intégrative et médecine endobiogénique » . https://vivreetesperer.com/les-plantes-medicinales-au-coeur-dune-nouvelle-approche-medicale-phytotherapie-clinique-integrative-et-medecine-endobiogenique/
« Les progrès de la psychologie. Un grand potentiel de guérison ». https://vivreetesperer.com/les-progres-de-la-psychologie-un-grand-potentiel-de-guerison/
par jean | Juin 29, 2019 | ARTICLES, Beauté et émerveillement |

Éblouie pour la clarté du soleil qui sort la tête de la brume, les champs et les arbres sont encore endormis…
J’arrête ma voiture pour immortaliser ce moment où je ressens la présence de Dieu dans toute cette beauté qui s’éveille !
Un nouveau jour qui commence, dans sa présence.
le monde tient par sa main, et parfois la beauté est telle que mon cœur brûle de reconnaissance et d’amour pour celui qui a tout créé !
« Mon Dieu, mon Roi,
sois attentif à mes appels,
C’est à toi que j’adresse ma prière
Dès le matin, Seigneur.
Entends-moi.
Dès le matin je me prépare
à être reçu chez toi, et j’attends ».
Tiré du psaume 5 (Bible en français courant)
CJ