Une dynamique de vie et d’espérance

De commencements en recommencements

 

Dans nos parcours, il y a des moments où l’horizon s’assombrit, pour nous, pour nos proches, pour nos amis. Parfois, c’est une vie brisée par le deuil, accablée par une maladie, confrontée à une impasse. Comment garder ou retrouver une espérance ?

Et puis nous sommes aussi confrontés aux grandes catastrophes collectives qui parsèment l’histoire et s’inscrivent parfois dans l’histoire de nos familles. Serions-nous sans recours par rapport à cette mémoire ? Et dans ce temps de crise, nous avons besoin de discernement.  Là aussi, comment persévérer dans l’espérance ?

Jürgen Moltmann, un grand théologien contemporain (1) a été confronté dans sa jeunesse au malheur engendré par la guerre à travers l’immense incendie qui a détruit la ville de Hambourg à la suite d’un bombardement aérien, puis par les combats qui l’amènent à se retrouver prisonnier dans un camp de prisonniers allemands en Grande-Bretagne. Il sait ce que le mal représente. Mais dans la découverte de Jésus, puis dans son engagement dans la foi chrétienne et la rencontre avec la pensée messianique juive, il a trouvé en Christ ressuscité le fondement d’une espérance et la source d’une dynamique qui abolit les impasses et ouvre un horizon de vie.

Ainsi a-t-il écrit un livre ayant pour titre : « Im Ende..der Enfang » : « Dans la fin.. un commencement ». Nous en avons eu connaissance dans sa traduction anglaise et nous avons alors rédigé une présentation (2) Ce livre vient d’être traduit et publié aux Editions Empreinte sous le titre : « De commencements en recommencements. Une dynamique d’espérance » (3).

Jürgen Moltmann est un théologien en phase avec les questionnements de notre temps. Mais, si la plupart de ses livres ont été traduits en français aux  Editions du Cerf, ce sont des ouvrages de plusieurs centaines de pages. Il y a donc tout un  travail à accomplir pour rendre accessible sa pensée à un grand public (4). Or, « De commencements en recommencements »  présente une double caractéristique. Ce livre s’adresse à toutes les personnes en recherche de sens. Et il présente un aspect majeur de la pensée de Jürgen Moltmann : la manière dont celui-ci conçoit et perçoit l’œuvre de Dieu dans les vies personnelles en sachant que celles-ci s’inscrivent dans un ensemble qui comprend également un aspect politique et une dimension cosmique. Si ce livre répond ainsi à des questions existentielles, c’est donc aussi une entrée dans la pensée théologique de Jürgen Moltmann.

 

La dynamique de l’espérance.

 

De bout en bout, ce livre est animé par le souffle de l’espérance.

« Que le Dieu de l’espérance vous remplisse de toute joie et de toute paix dans la foi pour que vous abondiez en espérance par la puissance du Saint Esprit (Romains 15.13). Dieu nous précède et nous guide vers un avenir. Il nous appelle et il nous conduit vers un nouvel horizon. L’espérance est une caractéristique originale de la foi chrétienne. Elle est fondée sur la présence de Christ ressuscité et elle suscite notre participation à l’œuvre de Dieu, à son royaume, à la nouvelle création. Pratiquement, elle nous encourage et nous permet de grandir, puis de rebondir face à l’adversité, de « commencements en recommencements ».

 

Les grandes questions de l’existence.

 

         Ce livre éclaire successivement trois aspects de notre existence : le dynamisme de l’enfance et de la jeunesse ; la confrontation avec les catastrophes dans une perspective qui nous permet d’aller au delà ; les questions soulevées par la mort dans une vision qui exprime la puissance miséricordieuse de Dieu. A partir de la version anglaise de ce livre, nous avons présenté à de nombreuses reprises la dynamique libératrice de ces textes . La parution en français vient apporter des pistes de réponse à de nombreuses questions existentielles. Voici donc une brève présentation du contenu de l’ouvrage.

L’approche de Jürgen Moltmann conjugue l’inspiration biblique et une ouverture aux valeurs  que portent l’Esprit dans la culture contemporaine . Ainsi, dans les chapitres sur l’enfance et la jeunesse, l’auteur se départit d’une attitude empreinte de pessimisme sur l’être humain et son devenir. Fréquemment, la valeur attribuée à l’enfant reposait sur sa faiblesse, source d’humilité. Jürgen Moltmann nous présente en regard l’œuvre divine qui se révèle dans le potentiel et la dynamique de la vie des enfants.

Les chapitres consacrés aux recommencements que Dieu suscite dans la confrontation aux catastrophes rompent avec les représentations d’un Dieu justicier ou avec la résignation et à l’incertitude concernant le sort des victimes. Ainsi, dans la durée, Dieu est à l’œuvre pour délivrer tous les hommes du mal. Il n’y a plus de catégories humaines vouées pour toujours à l’anéantissement en fonction d’une fatalité historique. Au contraire, dans sa justice , et dans une puissance infinie, à travers un processus qui s’exerce dans le temps, Dieu sauvera les victimes et il redressera et changera les oppresseurs (5). En Jésus mourant sur la croix, l’amour divin est vainqueur. A travers sa résurrection, Christ suscite un processus de libération qui aboutit à un univers dans lequel « Dieu sera tout en tous » (1 Cor 15.28). L’espérance est une dynamique qui ouvre la voie aux recommencements.

Bien sûr, dans la confrontation avec la mort, l’Evangile nous apporte la promesse de la Vie éternelle. Cependant, on constate que l’enseignement entendu aujourd’hui à ce sujet est souvent hésitant parce qu’il est influencé par des représentations héritées d’une histoire qui s’est écartée du message original. Il y a la crainte engendrée par l’image d’un Dieu justicier et la menace de l’enfer. Et il y a aussi les incertitudes suscitées par des oppositions doctrinaires héritées de l’histoire, ainsi en réaction avec les excès d’une osmose se prêtant aux manipulations institutionnelles,  l’apparition d’une thèse impliquant une séparation tranchée entre le ciel et la terre, qui rompt avec la dynamique de vie. En regard, à partir de la lecture des textes bibliques de l’ancien et du nouveau Testament et d’une analyse historique des représentations et des cultures, Jürgen Moltmann nous apporte une vision qui nous éclaire sur notre devenir dans l’éclairage de la vie éternelle, sur la communauté des vivants et des morts et sur l’œuvre de salut accompli par Dieu en Christ à l’intention de tous les hommes dans la marche vers une nouvelle création où « Dieu sera tout en tous » (1 Cor 15.28)  . A un moment où tout vacillait (6), nous avons trouvé dans la version anglaise de ce livre une réponse providentielle à nos questions. Nous avons voulu ensuite partager cette vision de l’œuvre de Dieu qui porte vie, amour, et délivrance (7)

 

Aujourd’hui, la parution en français du livre de Jürgen Moltmann est non seulement un événement éditorial en rendant accessible sa pensée à un  grand public francophone. C’est aussi la manifestation d’une dynamique de vie et d’espérance qui se répandra parmi ses lecteurs. Notre vie change lorsqu’on peut la penser en terme de commencements en recommencements.

 

JH

 

(1)            La vie et la pensée de Jürgen Moltmann : « Une théologie pour notre temps. Autobiographie de Jürgen Moltmann » http://www.temoins.com/etudes/une-theologie-pour-notre-temps.-l-autobiographie-de-jurgen-moltmann/toutes-les-pages.html

(2)            Moltmann (Jürgen). In the end..The beginning. The life of hope. Fortress Press, 2004 . Présentation : « Vivre dans l’espoir. Dans la fin..un commencement ». http://www.temoins.com/ressourcement/vivre-dans-l-espoir-dans-la-fin-un-commencement.html

(3)            Moltmann (Jürgen). De commencements en recommencements. Une dynamique d’espérance. Empreinte Temps présent, 2012  http://www.editions-empreinte.com/detail_produit.php?rub=6&article=6698&voir=edit

(4)            Parce que la pensée théologique de Jürgen Moltmann est en phase avec les interrogations de notre temps et ouvre des pistes de réponse,  un blog a été créé pour rendre accessible cette pensée : « L’Esprit qui donne la vie » » http://www.lespritquidonnelavie.com/

(5)            Sur le blog : « L’Esprit qui donne la vie » : « Délivre nous du mal » http://www.lespritquidonnelavie.com/?p=702

(6)            Sur le blog : « Vivre et espérer » : « Une vie qui ne disparaît pas ! » https://vivreetesperer.com/?p=336

Sur le blog : « L’Esprit qui donne la vie », « La vie par delà la mort »  http://www.lespritquidonnelavie.com/?p=822

Cultiver la terre en harmonie avec la nature

 La permaculture : une vision holistique du monde

 Aujourd’hui, nous savons que la terre est menacée. C’est le changement climatique et le recul de la biodiversité. Et nous, nous prenons conscience de tout ce que nous recevons de la nature, une symbiose elle aussi en danger. En regard, à travers de multiples organisations, un puissant mouvement écologique est apparu. Les états entrent peu à peu dans cette mobilisation pour ce qu’on peut appeler la sauvegarde de l’humanité. Nous sommes tous concernés. C’est un appel pressant à changer de genre de vie. L’agriculture est particulièrement concernée. Au cours des dernières décennies, elle a été entrainée dans une escalade productiviste en rupture avec une relation équilibrée et durable avec l’environnement naturel. En regard, on a pu observer un engagement militant dans une manière nouvelle de vivre et de cultiver la terre. Cette approche est illustrée notamment par la grande figure de Pierre Rabhi. On assiste par ailleurs à l’invention de nouvelles pratiques qui allient efficacité accrue et respect de la nature. C’est un lieu d’innovation, c’est un front pionnier qui attire de nouveaux acteurs à la recherche d’une vie plus proche de la nature.

Ce courant est porteur d’espérance et il nous a par utile d’en faire mention sur ce blog. Nous avons déjà décrit l’apparition et le développement des « Incroyables comestibles » en France (1). Un ami engagé dans un « Jardin de Cocagne » (2), nous a récemment fait connaître cette belle innovation. Aujourd’hui, nous découvrons une nouvelle manière de cultiver la terre en harmonie avec l’environnement naturel. Ces initiatives innovantes sont « des fermes d’avenir ». Elles apparaissent et se développent dans des formes diverses selon la personnalité des intervenants et les caractéristiques de l’environnement.

 

La ferme biologique du Bec Hellouin

En naviguant sur le web, une expérience s’impose, celle de la ferme biologique du Bec Hellouin en Normandie. Cette réalisation est le fruit d’un itinéraire singulier. Au début des années 2000, Perrine et Charles  Hervé-Gruyer s’installent en ce lieu avec le désir d’y vivre une vie de famille. Au départ, pour assurer leur subsistance alimentaire, ils s’engagent progressivement dans une aventure agricole, découvrent en 2008 la permaculture et, à partir de là, développent une microagriculture intensive en s’inspirant à la  fois de pratiques ancestrales et de recherches innovantes .

Aujourd’hui, « la ferme biologique du Bec Hellouin est une ferme expérimentale fonctionnant selon les principes de la permaculture… Nous mettons en pratique un ensemble de solutions inspirées du fonctionnement des écosystèmes naturels, qui permettent de produire en abondance des fruits et des légumes sains : cultiver en buttes, agroforesterie, cultures associées, traction animale… La production maraichère de la ferme est plusieurs fois supérieure à la moyenne nationale par unité de surface, pratiquement sans recours aux énergies fossiles… L’herbage, situé en zone protégée Nature 2000, où nous avons créé les jardins, est devenue une oasis de vie où se côtoient un grand nombre d’espèces végétales et animales : 800  végétaux différents environ sont cultivés sur la ferme. Les deux iles-jardins, le jardin mandala, les mares, la foret nourricière, les vergers forment un agro-écosystème hautement productif et durable » .

Depuis fin 2011, la ferme du Bec Hellouin est engagée dans un programme de recherche avec l’INRA (Institut national de recherche agronomique) et AgroParis Tech. Elle met en oeuvre également un programme de formation. (3) Il y a là une belle dynamique que Perrine et Charles Hervé-Gruyer nous communiquent dans une vidéo (4).

 

 

Une approche holistique : la permaculture

Cette entreprise innovante s’inspire d’une vision évoquée par le terme de permaculture. Différentes définitions ont été proposées pour décrire cette approche. Nous reprenons ici la présentation qu’en donne Perrine et Charles Hervé-Gruyer, eux-mêmes auteurs d’un livre sur la permaculture.

« Créée dans les années 90 en Australie par Bill Molisson et David Holmgren, la permaculture est un système conceptuel inspiré du fonctionnement de la nature. Depuis des centaines de millions d’années, la nature crée des écosystèmes harmonieux et durables, qui génèrent eux-mêmes les conditions favorables au développement de formes de vie plus évoluées. Permaculture signifiait, à l’origine, agriculture permanente, puis le concept s’est élargi pour devenir culture permanente dans le sens de durable.

L’être humain, particulièrement en Occident, durant les derniers siècles, artificialise les écosystèmes et s’impose de ce fait l’obligation de devoir compenser par son travail et par des entrants les fonctions remplies naturellement par le vivant… La permaculture cherche à concevoir des installations harmonieuses, durables, résilientes, économes en travail comme en énergie, à l’instar des systèmes naturels. Son concept de design repose sur un principe essentiel : positionner au mieux chaque élément de manière à ce qu’il puisse agir positivement avec les autres…

La  permaculture repose sur trois principes : prendre soin de la terre, prendre soin des hommes, partager équitablement les ressources. La permaculture a un objet large : elle intègre l’agro-écologie, la construction écologique, les énergies renouvelables… dans une vision pragmatique et souple pouvant être adaptée à chaque territoire, aux besoins et aux aspirations de chaque personne ou communauté.

A la ferme du Bec Hellouin, nous étudions particulièrement les adaptations de la permaculture à l’agriculture biologique. Contrairement à une idée trop répandue, la permaculture n’est pas un ensemble de techniques de jardinage, mais bien un système conceptuel. Ces applications sont toutefois particulièrement pertinentes dans le domaine de la production agricole. La permaculture permet de concevoir des agro-systèmes tout à la fois harmonieux, durables, économes et productifs ».

 

Fermes d’avenir

On constate aujourd’hui que la vision éthique d’une activité humaine en phase avec la nature inspire beaucoup de gens et suscite un attrait pour de nouvelles formes de travail agricole. Dans un monde troublé, on peut y voir un désir d’enracinement. Ainsi, de nouvelles initiatives apparaissent comme celle des « fermes d’avenir.

Une association s’est créée pour favoriser le développement de ces fermes (5). Quelle est la vision de cette association ?

« Nous souhaitons  donner au plus grand nombre l’envie et les moyens de lancer leur propre projet agricole, écologique et rentable. Notre démarche touchera en particulier les agriculteurs souhaitant effectuer leur transition, les citadins souhaitant lancer une activité de maraichage et  les propriétaires fonciers soucieux de valoriser une partie de leurs terres… L’objectif primordial est de montrer qu’il est possible, sur un hectare, de créer un emploi pérenne de maraichage biologique…Dans un premier temps, notre défi est donc de créer une microferme exemplaire en maraichage, s’inspirant de la permaculture et de l’ensemble des techniques efficaces de l’agro-écologie…L’association Fermes d’avenir s’est développée autour d’un projet fondateur : la création de la microferme expérimentale de la Bourdaisière (37). Mais, au demeurant, de nombreuses fermes partout en France sont engagées dans une démarche exemplaire  respectant la terre, respectant les hommes et imprégnée d’une forte dimension éthique ».

 

 

Action pionnière : Maxime de Rostolan

Dans ce mouvement, les itinéraires des acteurs sont significatifs. C’est le cas pour Maxime de Rostolan, fondateur et dirigeant de l’association « Fermes d’avenir ». « Ingénieur chimiste de formation, Maxime de Rostolan, son diplôme en poche, s’intéresse au traitement de l’eau et s’engage alors dans un tour du monde afin de sensibiliser le public à cette question. A son retour dans l’hexagone, il se passionne pour la biomimétisme et crée l’association : « Biomecry France » qui encourage les entreprises à transformer leurs produits et métiers en s’inspirant de la nature. Il planche ensuite sur le financement participatif et lance « Blue Bees », une plateforme dédiée aux projets d’agriculture et d’écologie. Aujourd’hui, Maxime dirige « Fermes d’avenir ». Son nouveau défi : déployer un modèle agricole écologique et rentable à grande échelle ».

Maxime de Rostolan nous parle de son projet dans un exposé (vidéo) lors d’un colloque Ted X à Tours (6). « Depuis que j’ai vingt ans, j’essaie de trouver des solutions pour changer le monde… A force de chercher, j’ai découvert qu’il existe un partenaire de choix : le laboratoire du vivant ». Effectivement, on peut s’inspirer de la nature comme nous l’enseigne le biomimétisme. Maxime a pris conscience de l’impasse où se trouve aujourd’hui l’agriculture classique qui abuse de la mécanisation et des produits chimiques. « En 50 ans, on a divisé par 25, notre efficacité énergétique pour produire de l’alimentation ». Maxime se réfère lui aussi à la vision nouvelle ouverte par la permaculture. En 2010, il en découvre les potentialités à la ferme du Bec Hellouin.

Mais comment déployer ce type de ferme sur le territoire ? Les chercheurs de l’INRA sont intéressés par la possibilité de suivre une ferme de ce genre en phase d’installation. Maxime va donc se lancer dans l’innovation. Il se forme en conséquence et il s’engage dans le développement d’une ferme expérimentale de 1 ha 4, la ferme de la Bourdaisière à Montlouis sur Loire. Premier objectif : fournir les données correspondantes aux chercheurs de l’INRA. Deuxième objectif : créer une boite à outils qui permette à toute personne qui le souhaite de reproduire cette expérience. Troisième objectif : évaluer les services écosystémiques rendus par ce type d’agriculture : préserver la diversité, entretenir la qualité de l’eau, favoriser le paysage, créer une dynamique sur les territoires… ». Dans cet entretien en 2015, Maxime de Rostolan nous dit que depuis un an et demi, l’objectif a été tenu. « La nature est généreuse ! ». Et il a découvert un métier dans lequel il se trouve à l’aise.

 

Manifestement, les fermes d’avenir ouvrent une voie nouvelle en permettant à de nombreux acteurs de s’engager dans ce nouveau métier. « C’est une triste chose de songer que la nature parle et que l’homme n’écoute pas » a écrit Victor Hugo. Aujourd’hui, ce constat est battu en brèche.  La permaculture témoigne d’une vision nouvelle qui est en train de se communiquer et de se répandre. De la ferme du Bec Hellouin à celle de la Bourdaisière, un puissant mouvement d’innovation apparaît et porte une nouvelle conception des rapports entre l’homme et la nature. C’est une nouvelle éthique.

 

J H

 

(1)            « Incroyable, mais vrai ! Comment « Les incroyables comestibles » se sont développés en France » : https://vivreetesperer.com/?p=2177

(2)            Réseau Cocagne : http://www.reseaucocagne.asso.fr

 

(3)            Le site de la ferme du Bec Hellouin ne présente pas seulement les activités de la ferme, mais aussi les principes de la permaculture et de l’agroécologie : http://www.fermedubec.com

(4)            Histoire et présentation de la ferme du Bec Hellouin par les créateurs : Perrine et Charles Hervé-Gruyer. Cette vidéo montre concrètement les différents visages de la ferme et exprime l’inspiration de cette innovation : https://www.youtube.com/watch?v=5w3VqluGfGY

(5)            Fermes d’avenir : http://www.fermesdavenir.org

(6)            « La terre et l’éthique » : Maxime de Rostolan à TEDx Tours : https://www.youtube.com/watch?v=2qWKKQowguM

 

 

Sur ce blog, voir aussi :

« Pour une conscience écologique » : https://vivreetesperer.com/?p=694

« Vivre en harmonie avec la nature » :

https://vivreetesperer.com/?p=757

« Anne-Sophie Novel, militante écologiste et pionnière de l’économie collaborative » : https://vivreetesperer.com/?p=1975

« Convergences écologiques : Jean Bastaire, Jürgen Moltmann, Pape François, Edgar Morin » : https://vivreetesperer.com/?p=2151

 

Branché sur le beau, le bien, le bon

                                          

Le bonheur, un état d’esprit…

Témoignage et enseignement d’Elisabeth Grimaud, neuropédagogue

L’aspiration au bonheur est naturelle chez l’homme. Cette recherche prend des formes différentes. Elle est plus ou moins profonde, plus ou moins exigeante. Et, de même, les réponses se situent à différents niveaux et sur différents registres.          Neuropsycholinguiste, Elisabeth Grimaud nous apporte une approche empirique. Qu’est-ce qui nous rend plus heureux ? Comment identifier et développer les attitudes qui contribuent au bonheur ? Et, dans une personnalité humaine où différentes composantes interviennent, comment le cerveau participe-t-il à la réalisation du bonheur ? « Le bonheur est un état d’esprit », nous dit Elisabeth, « mais cela se travaille ». Cette approche met en avant l’expérience et elle rencontre la notre. Elle appelle une expression du ressenti. Elle aide à mieux comprendre les interrelations entre nos attitudes, nos pratiques et l’activité de notre cerveau, notamment à travers la production de neurotransmetteurs. Dans cette perspective, les activités qui mettent en œuvre le beau, le bien et le bon apparaissent comme ayant un rôle moteur dans la réalisation du bonheur.

Dans son « talk » à Ted X Roanne, Elisabeth Grimaud, chercheur  en psychologie cognitive (1), explique comment le cerveau correspond avec certaines attitudes à travers des secrétions qui suscitent du bien-être. Ainsi a-t-elle intitulé sa communication : « Programmez votre cerveau pour le bonheur » (2). Cependant, si cet exposé débouche sur une analyse scientifique, il procède à partir du témoignage de l’intervenante  nous rapportant la manière dont elle a ressenti sa visite d’un chef d’œuvre de l’architecture espagnole : l’Alhambra à Grenade. Elle nous fait part d’un enthousiasme communicatif. Cette expression chaleureuse nous invite à entrer dans une pratique du beau, du bien et du bon, à en percevoir les effets et à comprendre, en regard, les processus en cours dans le cerveau.

 

La visite de l’Alhambra 

Comment Elisabeth Grimaud a-t-elle vécu sa visite à l’Alhambra ? Auteur d’une recherche sur l’enseignement cérébral par les jeux, Elisabeth a donc participé à un colloque scientifique international à Grenade. Et c’est à cette occasion que le troisième jour, elle a pu visiter « ce monument extraordinaire : l’Alhambra » .

Elle a commencé par les jardins. Ainsi est-elle d’abord rentrée « dans une grande allée tapissée d’arbres ». « En avançant, je me suis sentie entrer dans un univers »… Puis, en arrivant, il y avait un parterre de fleurs. « Je suis passée à coté d’une rose. Je me suis arrêtée. Cette rose m’a frappée parce qu’elle avait une couleur intense. A ce moment là, j’étais avec la fleur et rien d’autre… J’ai continué la visite. Je me suis rendu compte qu’il y avait une odeur qui se dégageait. Cela sentait bon. Il y avait une odeur d’été. C’était du chèvrefeuille. Je ressentais du bien-être ».

« En continuant la visite, j’ai accédé au monument. Le palais de l’Alhambra est constitué de différents espaces et de différents bâtiments. Et ces bâtiments ont tous une spécificité. Ils sont immenses, et, en même temps, dans cette immensité, il y a du détail, infiniment de détails. La sculpture est partout. L’immensité se conjugue avec une précision extraordinaire. Pendant plusieurs heures, j’ai monté des marches et, à chaque fois, l’effort en valait la peine…

Quand je suis passé devant le magasin de souvenirs, j’ai eu envie d’acheter quelque chose pour mon conjoint, mes enfants. J’ai trouvé un livre où il y avait des photos correspondant à ce que j’avais vu, suscitant des émotions ressemblant à celles que j’avais ressenties. Quand je suis ressorti de ce magasin, j’étais heureuse. Je l’avais fait pour ceux que j’aime.

Et pendant toute cette visite, j’ai vécu ce que j’appelle le bonheur, ce que j’enseigne et dont je parle beaucoup ».

 

 

Correspondance entre le vécu et les activités cérébrales 

Elisabeth Grimaud revient ensuite sur ce vécu et en analyse les différents aspects en les mettant en relation avec les activités du cerveau. « Les différentes manières dont j’ai vécu ce bonheur s’expriment par l’émotion et s’expliquent grâce aux mécanismes du cerveau ». Ainsi, en terme de « d.o.s.e », elle énonce les différents neurotransmetteurs qui ont été émis par le cerveau : dopamine, ocytocine, sérotonine, endorphine. Et elle nous apprend en quoi l’apparition de chaque neurotransmetteur correspond à une de ces activités durant cette visite de l’Alhambra.

« La dopamine est le neurotransmetteur de la réussite. Je montais les marches parce qu’à chaque fois, je sentais que j’allais vers une réussite. Ce que j’allais voir méritait un effort.

Dans le magasin, il y a eu activation de l’ocytocine qui correspond à l’attachement, à la reliance. A chaque fois que vous vous reliez à quelqu’un : famille, enfants, un bon copain, vous êtes heureux. Qu’est-ce que cela fait du bien de se voir ! Ma famille n’était pas là. mais je pensais à eux. J’étais avec eux.

A la fin de mon parcours, j’avais coché toutes les cases du programme. J’étais contente de moi. J’étais satisfaite. La sérotonine correspond à cette satisfaction de voir la tâche accomplie.

Enfin, l’endorphine agit en contraste. Elle amortit la douleur. Vous êtes fatigué. Et à ce moment, vous ne le ressentez plus. Cette gestion de votre fatigue vous permet de continuer. Vous sentez à nouveau un peu de bien-être ».

Cette analyse nous permet de mieux comprendre ce qui se passe en nous dans nos propres expériences. Mais Elisabeth Grimaud nous invite également à développer notre capacité d’activer ces neurotransmetteurs.  Ils découlent de certaines activités mentales, mais ils peuvent aussi les stimuler. « Vous avez la possibilité d’activer les neurotransmetteurs et l’entrainement cérébral peut vous aider en ce sens ».

 

Le beau, le bien et le bon

Elisabeth Grimaud nous présente ainsi une approche à travers laquelle il est possible de développer une disposition au bonheur à travers une aptitude à produire les neurotransmetteurs correspondants. Mais dans quel esprit ? C’est ici qu’en évoquant son expérience de la visite de l’Alhambra, Elisabeth Grimaud nous invite à nous exercer dans le sens du beau, du bien et du bon. « Lorsque vous mettez en activité ces trois mots simples, tous les jours dans votre quotidien, vous activez un peu de cette dose de bien-être qui va vous apportez du bonheur ».

« Le beau, c’est savoir s’émerveiller. Lorsque j’étais avec cette rose, le l’ai sentie, je l’ai vue. Je me suis émerveillée.  Qu’est-ce que cela a suscité dans mon corps ? Cela a fait monter le niveau d’ocytocine qui permet à la dopamine d’être davantage présente et d’apporter du bien-être. Cet émerveillement peut s’opérer à partir de nos cinq sens.

Le bien, c’est le fait de s’appliquer et de s’impliquer. Lorsque vous vous appliquez et que vous vous impliquez, vous recevez de la sérotonine. C’est le plaisir et la fierté de la tâche accomplie. Cela peut se réaliser dans le quotidien jusque dans de tout-petits riens ».

Le bon, c’est entrer en relation. « Dans ma visite, lorsque je suis entré au magasin, je me suis tournée vers les autres en pensant aux miens. Quand on se tourne vers les autres, selon la psychologie positive, on augmente son propre niveau de bien-être ». On peut être aussi un ami pour soi-même. Elisabeth est sensible aux dangers du narcissisme et d’un développement autocentré. Ainsi met-elle l’accent sur les bienfaits de la relation.

Au total, « quand on considère l’augmentation du bien-être dans le corps, il se fait en étant en lien avec les autres, avec l’environnement par les cinq sens, avec ce que l’on fait. C’est avec le beau, le bien, le bon que vous développez votre bonheur au quotidien ».

 

Echos

Nous Ă©coutons Elisabeth Grimaud comme une amie qui nous raconterait un moment heureux de sa vie. Et en mĂŞme temps, elle nous Ă©claire sur les ressorts de nos Ă©motions et de nos comportements. Quelque part, on ressent lĂ  une harmonie.

Ce commentaire ajoute ici un autre angle de vue qui nous paraît complémentaire.

La neuropédagogue met l’accent sur le rôle du cerveau et la manière d’en tirer parti à travers des comportements positifs puisqu’il les répercute en effets bienfaisants. Cependant, à notre sens, le cerveau n’est pas le maître du jeu. C’est notre pensée qui oriente. Nous nous émerveillons. Nous aimons. Et, comme dans le cas de la gratitude (3), ces émotions positives entrainent des réactions neuronales qui se traduisent en effets bienfaisants. Et de fait, il y a interaction. Une bonne habitude s’ancre et va s’amplifier à travers cet ancrage. On découvre aujourd’hui la puissance de la pensée. Avec le chercheur en neurosciences, Mario Beauregard, on peut voir que « l’esprit humain a une grande capacité d’influence au niveau du corps, du cerveau et de tous les systèmes physiologiques qui sont connectés » (4).

Cependant, nous vivons dans une culture qui a longtemps été influencée par un héritage philosophique et religieux où l’âme et le corps étaient séparés et le corps dévalorisé. On peut ajouter à cela un point de vue pessimiste sur la nature humaine (5). Ce contexte est réfractaire à une approche telle que celle qui nous est présentée ici.

Dans son livre : « Dieu dans la création » (6), Jürgen Moltmann (7) ouvre la voie d’une approche théologique globale, holistique : « Les recherches actuelles mettent en valeur les interactions entre le psychisme et le corps ». Ce phénomène est bien reçu dans la vision d’une anthropologie biblique où « l’homme apparaît toujours comme un tout ». « L’homme est une totalité qui s’exprime à travers son corps. La corporéité est la fin de toutes les œuvres divines ». « La présence de Dieu dans l’Esprit n’est plus localisée uniquement dans la conscience ou dans l’âme, mais dans la totalité de l’organisme humain ».

Nous faisons référence ici à l’expérience spirituelle d’Odile Hassenforder (8) en phase avec la vision interactive qui se développe aujourd’hui : « Ma foi en notre Dieu, qui est puissance de vie, s’est développée à travers la découverte des nouvelles approches scientifiques qui transforment nos représentations du monde. Dans cette nouvelle perspective, j’ai compris que tout se relie à tout et que chaque chose influence l’ensemble. Tout se tient. Tout se relie. Pour moi, l’action de Dieu s’exerce dans ces interactions ».

En entendant Elisabeth Grimaud nous parler de la prédisposition du cerveau à exercer des effets positifs en rapport avec la mise en œuvre du beau, du bien et du bon, on peut s’écrier avec un psaume (139. 14) : « Je te loue que je suis une créature si merveilleuse ».

Dans une épitre du Nouveau Testament (Philippiens 4. 8), on trouve cette recommandation : « Que tout ce qui est bon, tout ce qui est vrai, juste, agréable… soit l’objet de vos pensées ». Cette recommandation, cette expression de sagesse va de pair avec le « beau, le bien, le bon » au cœur du processus mis en valeur par Elisabeth Grimaud. Ainsi pourrait-on avancer que dans son exposé, on peut voir une rencontre entre neurosciences, psychologie positive et sagesse. C’est une rencontre qui s’effectue ici dans une expérience relatée avec simplicité et enthousiasme, de quoi éveiller en écho un accueil chaleureux.

 

J H

 

(1)            Elisabeth Grimaud, neuropsycholinguiste a créé une méthode scientifique d’entrainement cérébral : EnCéfaL (entrainement cérébral fonctionnel par les activités de loisir) : http://www.lafabriqueabonheurs.com/praticien-en-neuropedagogie-encefal/ Elle est l’auteur d’un livre : Beau, bien, bon (Marabout, 2017). Elle est interviewée à ce sujet (vidéo) dans le cadre d’un site : « Beau, bien, bon » où l’on trouve également de courtes vidéos : « Secrets d’optimisme » : https://www.youtube.com/channel/UCFtBeM9siMy8pnmJpyFfH5w/featured

(2)            La rencontre avec Elisabeth Grimaud à Ted X Roanne : « Beau, bien, bon, programmez votre cerveau pour le bonheur » (Nous en rapportons quelques extraits) https://www.youtube.com/watch?v=tKIYGevgAxA

(3)            La gratitude : un mouvement de vie : https://vivreetesperer.com/?p=2469

(4)            Comment nos pensées influencent la réalité ? Mario Beauregard : Pour une approche intégrale de la conscience : https://vivreetesperer.com/?p=2341

(5)            Lytta Basset : Oser la bienveillance https://vivreetesperer.com/?p=1842

Jacques Lecomte : La bonté humaine https://vivreetesperer.com/?p=674

(6)            Jürgen Moltmann. Dieu dans la création. Traité écologique de la création. Cerf, 1988. Chapitre : « La corporéité est la fin de toutes les œuvres divines » (p 311-349)

(7)            Une théologie pour notre temps. L’autobiographie de Jürgen Moltmann : http://www.temoins.com/une-theologie-pour-notre-temps-lautobiographie-de-juergen-moltmann/

(8)            Odile Hassenforder. Sa présence dans ma vie. Parcours spirituel. Empreinte Temps présent, 2011

Odile Hassenforder : « Sa présence dans ma vie » : un témoignage vivant : https://vivreetesperer.com/?p=2345

Avaaz. Un mouvement international pour changer le monde

Transformation sociale et transformation personnelle vont de pair

 Le grand mouvement international Avaaz (1) vient de lancer une campagne pour la promotion de principes éthiques : « Faisons preuve de gentillesse et de respect. Tendons vers la sagesse. Pratiquons la reconnaissance ». Cette initiative nous paraît témoigner d’une évolution prometteuse dans un  changement de mentalités à l’échelle internationale. Transformation sociale et transformation personnelle vont de pair. Quel est le parcours du mouvement Avaaz ? Quels principes éthiques veut-il promouvoir ? Comment cette initiative s’inscrit-elle dans une transformation des mentalités où action sociale et spiritualité font alliance ?

 Avaaz . Un mouvement citoyen en ligne.

 « Avaaz – qui signifie « Voix » » dans plusieurs langues d’Asie, du Moyen-Orient et de l’Europe de l’Est – a été lancée en janvier 2007 avec une mission démocratique simple : « fédérer les citoyens de toutes les nations pour réduire l’écart entre le monde que nous avons et le monde voulu par le plus grand nombre et partout.

Avaaz offre à des milliers de personnes venues de tous les horizons la possibilité d’agir sur les questions internationales les plus urgentes, de la pauvreté à la crise du Moyen Orient et au changement climatique. Le modèle de mobilisation par internet permet à des milliers d’efforts individuels, aussi petits soient-ils, de se combiner rapidement pour devenir une puissante force collective. Active dans 14 langues, et animée par une équipe professionnelle présente sur cinq continents et des bénévoles partout dans le monde, Avaaz agit, en signant des pétitions, en finançant des encarts dans les médias, en envoyant des messages et des appels téléphoniques aux dirigeants, en organisant des manifestations et des évènements pour faire en sorte que l’opinion et les valeurs des citoyens du monde influent sur les décisions qui nous concernent tous ».

En quelques années, Avaaz est devenu un mouvement d’envergure mondiale (1). En effet aujourd’hui, il affiche une participation de 40 millions de membres. Cependant il faut préciser que le degré d’implication de ces membres varient beaucoup ; Beaucoup d’entre eux ont simplement signé une pétition lancée par Avaaz sur internet. Le site d’Avaaz nous permet de savoir quelles sont les pétitions qui ont eu le plus d’impact et quels ont été les temps forts du mouvement. Nous avons nous-même signé plusieurs de ces pétitions. On peut voir en ligne les participants qui affluent de nombreux pays. Les causes défendues sont nombreuses et diverses : du soutien apportée à la production  indienne de médicaments génériques accessibles aux plus démunis jusqu’à la lutte contre les pesticides qui détruisent les abeilles en passant par la dénonciation des méfaits de Boko Haram.

Avaaz laisse libre ses membres des soutenir uniquement les causes avec lesquelles ils se sentent en affinité. « Chez Avaaz, nous reconnaissons que des gens de bonne foi seront souvent en désaccord sur des détails précis. Au lieu de s’échiner à obtenir le consensus, chacun d’entre nous décide de participer ou non à chacune des campagnes. Mais, sous chaque campagne d’Avaaz , se trouve un ensemble de valeurs,  la conviction que nous sommes avant tout des êtres humains dotés de responsabilités envers chacun, envers les générations futures et la planète ». Cependant, le terme de « membre » employé pour désigner celui qui participe aux activités d’Avaaz, nous paraît quelque peu excessif. Le terme de sympathisant,  associé ou partenaire pourrait être plus pertinent.

Mais Avaaz ne sollicite pas seulement ses membres pour développer des campagnes. Elle est également à leur écoute.

« Chaque année, Avaaz définit ses priorités générales à partir d’un sondage proposé à tous ses membres et les idées de campagne sont soumises par sondage et testées chaque semaine auprès de panels de 10000 membres choisis au hasard ». Avaaz suit ainsi le mouvement réformateur dans l’opinion mondiale. Ces campagnes sont mises en oeuvre à partir d’un travail avec des partenaires et des experts et d’une prise en compte de moments charnières entre crise et opportunité. « Dans la vie d’un enjeu ou d’une cause, il apparaît parfois un moment où une décision doit être prise et ou une mobilisation du public peut tout à coup faire bouger les choses »

Avaaz, par son origine, par ses dirigeants, par son organisation, témoigne du nouveau contexte international où une conscience mondiale est en train d’émerger. Certes des critiques peuvent être émises sur tel ou tel point, mais, dans l’ensemble, Avaaz a remporté des victoires dans la défense de causes positives et il apparaît, selon le journal « Guardian », comme le plus grand et le plus puissant mouvement citoyen mondial en ligne.

 

Promotion de principes de vie : comment être meilleur pour soi et pour les autres.

C’et pourquoi on peut accorder une attention toute particulière à une campagne qu’Avaaz vient d’entreprendre et qui vise à développer des comportement fondés sur une vision éthique et spirituelle (2). Cette campagne a pour but de favoriser une transformation personnelle. « Engagez-vous dans une aventure intérieure pour comprendre comment être meilleur pour soi et pour les autres. C’est une partie cruciale du changement qie nous souhaitons tous ». C’est dire que transformation sociale et transformation personnelle vont de pair.

Avaaz invite ses membres à vivre selon trois principes : gentillesse et respect, sagesse et reconnaissance. La formulation de  ces principes est elle-même instructive  et prometteuse.

Faire preuve de gentillesse et de respect.

Nous ferons preuve de gentillesse et de respect envers nous-même et les autres aussi souvent que possible : tout le monde livre au moins une bataille dont nous ne savons probablement rien.

Tendons vers la sagesse.

Nous ferons notre possible pour prendre les décisions justes en nous écoutant et en écoutant attentivement les autres. Nous chercherons l’équilibre entre notre raison, notre cœur et nos intuitions dans une harmonie qui sonne juste.

Pratiquons la reconnaissance

Nous prendrons régulièrement le temps de penser à toutes les personnes et choses pour lesquelles nous éprouvons de la reconnaissance, parce que cela met les choses en perspective, dissout la négativité et nous aide à nous concentrer sur ce qui compte vraiment.

Avaaz s’engage dans cette campagne avec détermination.    « Notre communauté soutient avec une écrasante majorité ces trois grands principes qui peuvent nous aider à changer le monde. Rejoignez les milliers de membres qui ont pris cette résolution envers eux-mêmes et partagez votre expérience et l’histoire de votre aventure intérieure  sur notre chat enligne ». Et, pour la suite, Avaaz ne manque pas d’ambition puisqu’elle se propose : « quand nous serons 500000 à avoir pris cet engagement, nous inviterons les dirigeants du monde entier à nous rejoindre ».

Et, dans un message aux membres d’Avaaz, Ricken Patel et toute l’équipe propose des suggestions pratiques. « A propos de la reconnaissance, si vous ne l’avez jamais fait, essayez de faire cet exercice : Fermez les yeux, respirez profondément et prenez trente secondes pour penser à ce pour quoi et pour qui vous vous sentez reconnaissant. Si vous faites cet exercice à deux ou à plusieurs, ce sera encore mieux. Vous pourrez alors partager ce que vous ressentez. Nous l’avons fait lors des réunions publiques de la Marche des citoyens pour le climat (et même pendant la Marche elle-même) et c’était vraiment extraordinaire ».

 

« Soyez le changement que vous voulez pour le monde »

Cette initiative d’Avaaz nous paraît s’inscrire dans un état d’esprit dont Gandhi a été un porte-parole emblématique lorsqu’il proclame : « Soyez le changement que vous voulez dans le monde » (3).

Dan les dernières décennies, à la suite des « groupes d’Oxford » fondé par le pasteur américain, Frank Buchman, le « Réarmement moral », à partir de 1938, a voulu s’opposer à la montée du nazisme, en développant un renouveau spirituel accessible à tous et fondé sur une pratique de l’écoute dans le silence (4). Dans l’après-guerre, ce mouvement a beaucoup travaillé en faveur de la résolution de conflits internationaux par la réconciliation et le pardon. Sa devise rejoint celle de Gandhi : « Changer soi-même pour que le monde change ». L’appellation : « Réarmement moral » a correspondu à une époque, mais elle n’était plus adaptée à la notre. Mais le mot d’ordre : « Changer soi-même pour que le monde change » a été repris aujourd’hui par le mouvement : Initiatives et changement » (5), lui-même héritier des valeurs du Réarmement moral. La conscience de notre responsabilité personnelle par rapport aux problèmes avec lesquels l’humanité est confrontée, nous paraît aller grandissant. C’est ainsi que le mouvement « Colibris », inspiré par Pierre Rahbi, se réfère à une légende amérindienne : face à un immense incendie de forêt, un petit colibri s’active en allant chercher quelques gouttes d’eau pour les jeter sur les flammes. Il sait bien que cette tentative de petit pompier est dérisoire, mais « il fait sa part ».

Dans son ouvrage : « La guérison du monde » (6), Frédéric Lenoir envisage le monde actuel dans une perspective historique, de « la fin d’un monde » à « l’aube de la renaissance », et ce livre se conclut par un chapitre intitulé : « Se transformer soi-même pour changer le monde ».  « C’est quand la pensée, le cœur, les attitudes auront changé que le monde changera ». « La modernité a mis l’individu au centre de tout. C’est donc aujourd’hui sur lui plus que sur les institutions et les superstructures que repose l’enjeu de la guérison du monde ». Bonne nouvelle ! Frédéric Lenoir perçoit une évolution  dans les attitudes. Il distingue trois phases successives dans la manifestation de l’autonomie : «  l’individu émancipé, l’individu narcissique et l’individu global ». « Dans cette troisième phase, nous assistons depuis une quinzaine d’années à la naissance d’une troisième révolution individualiste. Différents mouvements convergent : « besoin de redonner du sens à la vie commune à travers un regain des grands idéaux collectifs, besoin de donner du sens à sa vie personnelle à travers un travail sur soi et un questionnement existentiel » (p 289). Ici idéal social et conscience spirituelle se conjuguent. Dans ce contexte, on comprend mieux l’initiative d’Avaaz dans la promotion de trois principes de vie.

Si les menaces abondent dans notre monde tourmenté, on peut y voir un temps de crise qui est aussi un passage vers une civilisation nouvelle. Aujourd’hui, face aux épreuves, en lutte pour la la sauvegarde de la vie et pour la justice, en conscience de plus en plus universelle, les hommes ont besoin de changer dans leurs comportements dans le sens des principes formulés par Avaaz . C’est une requête et une aspiration qui nous appelle à puiser dans une inspiration qui se manifeste dans une diversité de traditions religieuses et philosophiques. Personnellement, nous entendons le message exprimé et  vécu par Jésus : « Tu aimeras le prochain comme toi-même ». (Matthieu 22.39). Et nous voyons  l’œuvre de l’Esprit dans une humanité en marche à la recherche de la justice et de la fraternité. Comme l’écrit le théologien Jürgen Moltmann : « A l’encontre de toutes les forces contraires, le projet de Dieu est l’harmonie entre les êtres » (7). En lutte contre ce qui défigure aujourd’hui l’humanité et la nature, Avaaz s’inspire de valeurs qui fondent son combat. A travers la promotion de principes de vie, elle s’engage dans une approche globale où transformation personnelle et transformation collective sont appelées à se conjuguer.

J H

 

(1)            Site d’Avaaz : http://www.avaaz.org/fr/ . Pour une information sur l’histoire et le fonctionnement d’Avaaz, voir Wikipedia francophone et anglophone.  Pour un éclairage sur le fonctionnement d’Avaaz et sur la personnalité et le rôle de son fondateur, Ricken Patel,  nous avons apprécié un article de Carole Cadwallade sur le site du Guardian : « Inside Avaaz. Can online activism really change the world ? » http://www.theguardian.com/technology/2013/nov/17/avaaz-online-activism-can-it-change-the-world

(2)            Trois principes de vie : https://secure.avaaz.org/fr/three_principles_loc/?pv=592&rc=fb

(3)            « Soyez le changement que vous voulez pour le monde » : Cette parole de Gandhi est rappelée par  Frédéric Lenoir  dans son livre : « La guérison du monde » et aussi dans un chapitre du livre :  « Nos voies d’espérance » : Sur ce blog : « Discerner les voies d’une société plus humaine » : https://vivreetesperer.com/?p=1992

(4)            Témoignage sur le Réarmement moral : Philippe et Lisbeth Lasserre. La voix intérieure. Témoins, N° 120, mars 1996, p 10-11. Consultable sur le site de Témoins : http://temoins.com/about-joomla/la-memoire-de-temoins/les-43-magazines/temoins-nd-120.html

(5)            Site d’Initiatives et Changement : http://fr.iofc.org/. Sur ce blog : « Une jeunesse engagée pour une société plus humaine et plus durable. Interview de Myriam Bertrand, volontaire du service civique à Initiatives et changement (sept 2013-mars 2014) : https://vivreetesperer.com/?p=1780     « Construire une société où chacun aura sa place.  A propos de la relation France-Maghreb » : https://vivreetesperer.com/?p=1240

(6)            Frédéric Lenoir. La guérison du monde. Fayard, 2012. Sur ce blog : « Un chemin de guérison pour l’humanité » : https://vivreetesperer.com/?p=1048   Commentaire : « Emergence d’une nouvelle sensibilié spirituelle et religieuse. En regard du livre de Frédéric Lenoir : La guérison du monde » : http://www.temoins.com/evenements-et-actualites/recherche-et-innovation/etudes/emergence-dune-nouvelle-sensibilite-spirituelle-et-religieuse-en-regard-du-livre-de-frederic-lenoir-l-la-guerison-du-monde-r

(7)            Introduction à la pensée de Jürgen Moltmann sur le blog : « L’Esprit qui donne la vie » : http://www.lespritquidonnelavie.com/  Voir sur ce blog : « Vivre en harmonie » : https://vivreetesperer.com/?p=43 « L’essence de la création dans l’Esprit est par conséquent la « collaboration » et les structures manifestent la présence de l’Esprit dans la mesure où elles font connaître l’ « accord général ».

Une parabole qui parle au cœur

Le père généreux, selon Christine Pedotti

Qui n’a pas lu ou entendu, une fois au moins, et, pour beaucoup, maintes et maintes fois, la parabole dite du « fils prodigue », et qui, comme l’indique Wikipedia (1), a reçu bien d’autres appellations. Cette parabole fait partie des textes fondateurs qui irriguent notre culture (2). Elle a été répétée, commentée d’innombrables fois dans les églises, même si ce qu’elle dit d’un père aimant, n’a pas toujours produit ses effets.

Ainsi, il est bon d’y revenir puisque nous y recevons une parole qui sait faire passer le message d’un amour infini et libérateur. Dans nos chemins, nous avons besoin de ces ressources qui viennent répondre à nos questions et à nos aspirations. Lorsqu’il s’en présente sur le web, alors c’est une joie de les partager et de les faire connaître. Cette vidéo portant sur la parabole du fils prodigue (3), apparaît sur « Campus protestant » (4),  dans une série de commentaires du dimanche. Il nous est présenté dans la forme d’une conversation entre Antoine Nouis et Christine Pedotti. Bien connu par ailleurs pour la qualité de ses publications, Antoine Nouis (5) interroge Christine Pedotti sur sa compréhension de la parabole. Et c’est là qu’apparaît chez celle-ci une expérience de vie qui lui permet de commenter cette histoire avec une grande sensibilité. La biographie de Christine Pedotti (6) nous l’apprend, elle est à la fois, à l’écoute des êtres et à la découverte de Dieu, comme en témoigne des livres nombreux et variés : livres pour les enfants, ouvrages de spiritualité et, tout récemment, en co-animation, une encyclopédie sur Jésus. (7).

Alors, dans le commentaire de cette parabole, Christine Pedotti nous en montre la portée. Si les péripéties du fils prodigue attirent notre attention, elles mettent en valeur les attitudes du père qui peut être reconnu comme le personnage principal, un « père prodigue », un père généreux, avance Christine Pedotti.  Elle sait montrer, en sa personne, la générosité, la surabondance, la bonté inépuisable de Dieu . « Le Dieu auquel je crois est le Dieu de la surabondance, de la prodigalité. C’est un emballement du bien ».

En l’image du père, la parabole, d’un bout à l’autre, nous montre un Dieu constant dans un amour respectueux et miséricordieux. C’est la même bienveillance inconditionnelle que nous rapporte Lytta Basset (8) en décrivant la vie de Jésus. C’est la bonté incommensurable qui nous est rappelée par Michèle Jeunet lorsqu’elle évoque la fondatrice de sa congrégation. « Thérèse Couderc disait de Dieu : « Il est bon. Il est plus que bon. Il est la bonté » (9).

https://www.youtube.com/watch?v=z6wzMNXCsh8&feature=share

Ce Dieu là n’est pas un Dieu sévère qui épie les péchés et inspire la crainte. Il n’est pas non plus un Dieu lointain. Bien sûr, la vie de Jésus en témoigne. Cette parabole nous montre, à travers le père, un Dieu relationnel, constamment en désir de relation, toujours à l’œuvre pour l’entretenir et pour la réparer. Ainsi, la grâce est là. Richard Rohr évoque ainsi un flux divin, un flux d’amour constamment à l’œuvre. Jürgen Moltmann perçoit la création comme un tissu de relations (10). Ces deux théologiens évoquent Dieu en terme d’une communion trinitaire  (11). « Il n’y a pas en Dieu de façon unilatérale, domination et soumission…. Dans le Dieu trinitaire, il y a la réciprocité et l’éclairage de l’amour » (12).

Si les chrétiens reçoivent le texte biblique comme support d’une vision du monde qui leur est communiquée, à travers l’histoire, on constate que cette réception ne se fait pas sans trouble et sans comporter des dérives où l’on s’éloigne d’un esprit d’amour et de paix. Des textes comme la parabole du fils du prodigue ou celle du bon samaritain (13) nous rappellent l’essence même de la révélation divine, ce que Jésus résume en terme d’amour. Ces paraboles peuvent être lues par tous.  Elles parlent directement au cœur. Une pensée traverse le temps et vient nous rencontrer. Comme nous y invite Christine Pedotti, nous pouvons gouter la générosité, la surabondance, la bonté inépuisable de Dieu.

J H

  1. Fils prodigue : un article sur wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Fils_prodigue
  2. Textes fondateurs présents au programme des classes de français : le fils prodigue : http://crdp.ac-paris.fr/parcours/fondateurs/index.php/category/le-fils-prodigue
  3. Evangile du dimanche : le fils perdu et retrouvé. Vidéo sur Campus protestant : https://www.youtube.com/watch?v=z6wzMNXCsh8&feature=share
  4. Campus protestant est une plateforme de réflexion prenant appui sur la pensée et la culture protestante à travers principalement des contenus vidéos. Ces vidéos constituent une ressource importante pour les cheminements chrétiens au delà des confessions : https://campusprotestant.com
  5. Antoine Nouis, exégète, pasteur et conseiller théologique à l’hebdomadaire protestant Réforme qu’il a dirigé pendant six ans, est l’auteur d’un commentaire intégral du Nouveau Testament : « Au commencement était la méditation » : http://www.temoins.com/au-commencement-etait-la-meditation/
  6. Biographie de Christine Pedotti, écrivain et journaliste : https://fr.wikipedia.org/wiki/Christine_Pedotti
  7. Jésus. L’encyclopédie Joseph Doré Albin Michel  https://www.la-croix.com/Urbi-et-Orbi/Documentation-catholique/Jesus-Lencyclopedie-Mgr-Joseph-Dore-2017-10-20-1200885814
  8. Bienveillance humaine. Bienveillance divine. Une harmonie qui se répand : Lytta Basset. Oser la bienveillance : https://vivreetesperer.com/bienveillance-humaine-bienveillance-divine-une-harmonie-qui-se-repand/
  9. Développer la bonté en nous, un « habitus » de bonté. Michèle Jeunet commente la parabole du bon grain et de l’ivraie : https://vivreetesperer.com/developper-la-bonte-en-nous-un-habitus-de-bonte/
  10. Jürgen Moltmann. Dieu dans la création. Cerf, 1988 « Rien dans le monde n’existe, ne vit et ne se meut par soi. Tout existe, vit et se meut dans l’autre, l’un dans l’autre, l’un avec l’autre » (p 29).
  11. Richard Rohr. With Mike Morell. The divine dance. The Trinity and your transformation. SPCK , 2016 : https://vivreetesperer.com/la-danse-divine-the-divine-dance-par-richard-rohr/ Jürgen Moltman. Trinité et royaume de Dieu. Cerf, 1984
  12. « Il n’y a pas en Dieu, de façon unilatérale, domination et soumission, commandement et obéissance, comme l’affirmait Karl Barth dans sa doctrine de la souveraineté… Dans le Dieu trinitaire, il y a la réciprocité et l’échange de l’amour… Il n’y a pas de vie isolée.. Le concept de vie trinitaire, d’interpénétration est déterminant dans le traité écologique de la création..  ». Jürgen Moltmann. Dieu dans la création. (p 30-32)
  13. Michel Serres . Darwin, Bonaparte et le samaritain. Une philosophie de l’histoire. La parabole du bon samaritain est conviée par Michel Serres dans une philosophie de l’histoire. https://vivreetesperer.com/une-philosophie-de-lhistoire-par-michel-serres/